Site internet DAJ

L'essentiel de l'actualité juridique décrypté par le 

Département de la réglementation hospitalière, de la veille juridique et de la démocratie sanitaire

L’équipe du Département de la réglementation hospitalière, de la veille juridique et de la démocratie sanitaire vous propose une sélection des principaux textes parus durant le mois de janvier. 

Au sommaire de notre newsletter : 

- Précision sur la vaccination contre la covid-19

- Actualisation des recommandations du HCSP relatives au greffes et à l'AMP face au Covid

- Fin de la délivrance d'arrêts de travail dérogatoires en cas de contamination par la Covid-19

- Actualisation de la fiche sur les violences conjugales

- Précisions sur l'indemnisation du dommage et de la perte de chance 

- La Cour de la cassation se prononce sur la question d’un conflit d’intérêt pour un curateur « hospitalier » à l’origine d’une demande d’admission en soins psychiatriques sans consentement

- La Cour de cassation se prononce sur les conséquences du défaut d’information de la commission départementale des soins psychiatriques dans le cadre des soins psychiatriques sans consentement

- Évolution de la profession et de la formation infirmières : les recommandations de l’IGAS et de l’IGERS

Prise en charge d’un(e) patient(e) victime de violences conjugales

Une fiche pratique sur la prise en charge des personnes victimes de violences conjugales a été publiée sur le site internet de la DAJDP. Elle précise notamment les modalités de la levée du secret médical dans le cadre d’un signalement aux autorités, les différentes façons de faire un dépôt de plainte pour les victimes ainsi que l’existence de structures pluridisciplinaires adaptées à cette prise en charge (la Maison des femmes).

Consulter la fiche pratique 

La CEDH valide le refus de la France d'inscrire la mention "sexe neutre" sur un acte de naissance 

Dans cet arrêt rendu le 31 janvier 2023, la Cour européenne des droits de l’homme estime que le refus de la France de remplacer la mention « sexe masculin » par la mention « sexe neutre » « ou intersexe » sur l’acte de naissance d’un requérant, ne viole pas son droit au respect de la vie privée.

 L’affaire concerne le rejet par la France de la demande d’une personne tendant à que la mention « sexe masculin » inscrite sur son acte de naissance soit remplacée par la mention « sexe neutre » ou « intersexe ». Invoquant une violation de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, le requérant a porté sa demande devant la CEDH.

 Cette requête soulevait la question des conséquences au regard du droit au respect de la vie privée garanti par l’article 8 de la Convention, de l’attribution du sexe masculin ou du sexe féminin à une personne qui, étant biologiquement intersexuée, ne relève ni de l’un ni de l’autre.

 Au regard de la mise en balance de l’intérêt général et de l’intérêt privé du requérant, la Cour considère « que les motifs tirés du respect du principe de l’indisponibilité de l’état des personnes et de la nécessité de préserver la cohérence et la sécurité des actes de l’état civil ainsi que l’organisation sociale et juridique du système français, avancés par les autorités nationales, sont pertinents ».

 Interrogée sur la marge d’appréciation de la France, la Cour reconnaît que des intérêts publics sont en jeu et que « même si le requérant ne réclame pas la consécration d’un droit général à la reconnaissance d’un troisième genre mais seulement la rectification de son état civil », le fait de reconnaître ce refus de modification comme étant constitutif d’une violation de l’article 8, aurait pour conséquence de profondes modifications en droit interne.

 A ce titre, la Cour considère « qu’elle doit faire preuve en l’espèce de réserve » et que s’agissant d’une question qui relève d’un choix de société, « il convient donc de laisser à l’Etat défendeur le soin de déterminer à quel rythme et jusqu’à quel point il convient de répondre aux demandes des personnes intersexuées en matière d’état civil ».

La Cour conclut que compte tenu de la marge d’appréciation dont elle disposait, la France n’a ainsi pas méconnu son obligation positive de garantir au requérant le respect effectif de sa vie privée, et qu’il n’y a donc pas eu de violation de l’article 8 de la Convention.

Consulter l'arrêt de la CEDH 

Covid-19

Précisions sur la vaccination contre la covid-19

Ce texte prévoit que les vaccins contre la Covid-19 susceptibles d’être utilisés, selon les recommandations d’utilisation émises par la Haute Autorité de Santé (HAS), sont :

-          pour les enfants de plus de 12 ans et les adultes : les vaccins à acide ribonucléique (ARN) messager, les vaccins à vecteur viral et les vaccins sous-unitaires à protéine recombinante ; 

-          pour les enfants âgés de 5 à 11 ans : les vaccins à acide ribonucléique (ARN) messager et le vaccin à ARNm COMIRNATY 10 microgrammes/ dose, des laboratoires Pfizer/ BioNTech.

Ce texte précise par ailleurs que le pharmacien exerçant dans une pharmacie d'officine ou dans un centre de vaccination peut préparer les vaccins à ARNm, mais également ceux à vecteur viral et ceux sous-unitaires à protéine recombinante. Il peut les délivrer sous forme de seringues individuelles pré-remplies aux professionnels et étudiants autorisés à prescrire et administrer ces vaccins.

De plus, il est prévu que les pharmaciens d’officine, habilités à vacciner, peuvent prescrire et administrer l’ensemble des types de vaccins Covid. Cette extension s’applique également à leur administration par les étudiants en pharmacie formés de 2ème et 3ème cycle court, y compris durant leur stage de pratique professionnelle.

Par ailleurs, suite à l’avis n° 2022.0064/AC/SESPEV du 15 décembre 2022 rendu par la haute autorité de santé (HAS) relatif à la vaccination des enfants de 6 mois à 4 ans à risque de formes sévères de Covid-19 ou appartenant à l'entourage des personnes immunodéprimées, ainsi qu’à l’autorisation de mise sur le marché (AMM) délivrée par l’Agence européenne des médicaments, l’arrêté du 18 janvier 2023 autorise les sages-femmes et les infirmiers à réaliser ces injections.

En effet, le texte précise que ces derniers peuvent administrer (et non pas prescrire) le vaccin aux enfants concernés, à l’exception de ceux ayant un trouble de l'hémostase ou ayant des antécédents de syndrome inflammatoire multisystémique pédiatrique suite à une infection à la covid-19 ou ayant des antécédents de réaction anaphylactique à un des composants de ces vaccins, ou ayant présenté une réaction anaphylactique lors de la première injection.

Consulter l'arrêté du 3 janvier 

Consulter l’arrêté du 18 janvier 

Le HCSP actualise ses recommandations relatives aux greffes et à l’AMP face à la Covid-19

Dans le contexte de pandémie de Covid-19, le Haut conseil de la santé publique (HCSP) actualise ses précédents avis relatifs à la sécurisation des produits du corps humain dans les domaines de la greffe et de l’assistance médicale à la procréation (AMP). En accord avec les données actualisées de la littérature et des recommandations internationales, les principaux changements actés par le HCSP sont les suivants :

- En matière de dons de tissus, les donneurs asymptomatiques ou peu symptomatiques ne sont plus testés, le délai d’éviction est ramené de 10 à 7 jours pour les candidats au don symptomatiques et testés positifs, et aucune durée d’éviction n’est imposée pour les sujets contact candidats au don, sous réserve qu’ils soient testés négatifs au moment du don.

- En matière de dons d’organes solides à partir de donneurs vivants, les donneurs continuent à être testés par test génomique sur prélèvement naso-pharyngé. Hors les cas d’urgence vitale pour le cœur et le foie, la greffe est reportée en cas de test positif sauf s’il s’agit d’une infection symptomatique datant de plus de 21 jours et moins de 90 jours. Si le donneur testé positif est asymptomatique ou symptomatique depuis plus de 90 jours, le délai de report des prélèvements est ramené à 7 jours au lieu de 14 jours après la fin des symptômes.

-  En matière de dons d’organes solides à partir de donneurs décédés, un test génomique sur prélèvement naso-pharyngé est effectué dans les 72 heures et non plus dans les 48 heures précédant le don. En cas de résultat positif, chez un donneur symptomatique depuis moins de 10 jours, la greffe est contre-indiquée hors urgence vitale pour le cœur et le foie. En revanche, elle est autorisée, à l’exception des poumons et de l’intestin, en cas d’infection symptomatique datant de plus de 21 jours et moins de 90 jours (sujet considéré comme guéri).

-  En matière de dons de cellules souches hématopoïétiques, différentes situations sont discutées en amont de la stimulation du donneur puis à partir du conditionnement du receveur. Désormais, seuls les donneurs symptomatiques ou avec un contact récent avec un sujet Covid-19 sont l’objet d’un test génomique sur prélèvement naso-pharyngé, alors qu’auparavant tous les donneurs devaient être testés.

-  Enfin en matière d’AMP, il n’est plus nécessaire de faire signer un consentement ni de renseigner un questionnaire en rapport avec le Covid-19. De même aucun test biologique n’est requis en amont d’une tentative d’AMP et l’existence d’une infection asymptomatique ou modérée de Covid-19 ne doit plus retarder les procédures d’AMP. 

Consulter l’avis du HCSP 

Fin de la délivrance d’arrêts de travail dérogatoires en cas de contamination par la Covid-19

Le décret du 27 janvier 2023 met fin au dispositif d’indemnisation dérogatoire des assurés se trouvant dans l’impossibilité de continuer à travailler en cas de contamination par la Covid-19.

Ainsi, il met un terme, à compter du 1er février 2023, à la délivrance d’arrêts de travail dérogatoires aux assurés se trouvant dans l’impossibilité de continuer à travailler, y compris à distance, en cas de contamination par la Covid-19 établie par un examen inscrit à la nomenclature des actes de biologie médicale.

La loi du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale, prévoyait, en son article 27, la possibilité pour les assurés, en cas de contamination par la Covid-19, de bénéficier d’indemnités journalières au titre d’un arrêt de travail établi à raison de leur isolement.

Ainsi, les dispositions du II de l’article 27 de la loi du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale pour 2023 ne seront plus applicables aux arrêts de travail délivrés après le 31 janvier 2023.

Consulter le décret 

Précisions sur l’indemnisation du dommage et de la perte de chance

En l’espèce, à la suite d’une fracture du tibia, un homme est hospitalisé en 2009 dans le service de chirurgie orthopédique du centre hospitalier de Mâcon au sein duquel il subit une ostéosynthèse par plaque vissée. A la suite d’une inflammation de sa cicatrice, le patient est réadmis dans le même service et subit une nouvelle intervention au cours de laquelle la plaque d’ostéosynthèse est retirée et remplacée par une ostéosynthèse par fixateur externe. Toutefois à cette occasion, le patient se voit diagnostiquer une infection par le staphylocoque caprae. Après l’apparition de nouveaux signes d’infection, une nouvelle intervention est réalisée au cours de laquelle le fixateur externe est remplacé par une résine. Une nouvelle infection, par propionibacterium acnes, et les signes d'une seconde fracture du tibia sont ultérieurement diagnostiqués.

En première instance, le tribunal administratif retient le caractère nosocomial des deux infections et condamne par conséquent l’hôpital à indemniser le patient, atteint d'une incapacité permanente partielle de 8 %, des préjudices subis à raison des deux infections à hauteur de 59 000 euros.

Par un arrêt du 25 février 2021 contre lequel le patient se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Lyon, estimant que la seconde infection dont elle a confirmé le caractère nosocomial, a seulement été à l'origine d'une perte de chance de ne pas subir une deuxième fracture du tibia, a ramené cette somme à 35 652,92 euros.

Dans un premier temps, le Conseil d’Etat rappelle que conformément à l’article L.1142-1 du code de la santé publique (CSP), « Les établissements, services et organismes susmentionnés [organismes dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins] sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère ». Or « doit être regardée au sens de l'article L. 1142-1, comme présentant un caractère nosocomial, une infection survenant au cours ou au décours de la prise en charge d'un patient et qui n'était ni présente, ni en incubation au début de celle-ci, sauf s'il est établi qu'elle a une autre origine que la prise en charge ».

Par la suite, le Conseil d’Etat précise que « dans le cas où une infection nosocomiale a compromis les chances d'un patient d'obtenir une amélioration de son état de santé ou d'échapper à son aggravation, le préjudice résultant directement de cette infection et qui doit être intégralement réparé n'est pas le dommage corporel constaté, mais la perte de chance d'éviter la survenue de ce dommage, la réparation qui incombe à l'hôpital devant alors être évaluée à une fraction du dommage corporel déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue ». Il ajoute qu’il « en va de même lorsque, à la suite d'une première infection nosocomiale, un patient fait l'objet d'une nouvelle prise en charge au cours ou au décours de laquelle apparaît une seconde infection nosocomiale, et que ce patient demande la réparation d'un nouveau dommage auquel cette seconde infection nosocomiale a compromis ses chances d'échapper ». En revanche, le Conseil d’Etat indique que « lorsqu'il est certain que le nouveau dommage ne serait pas survenu en l'absence de la première infection nosocomiale, le préjudice qui doit être réparé est le dommage corporel et non la perte de chance d'éviter la survenue de ce dommage ».

Confirmant la position de la cour administrative d’appel de Lyon, le Conseil d’Etat retient donc « qu’il n’était pas certain que le dommage corporel constaté après la seconde infection ne serait pas survenu en l’absence de ces deux interventions » et que par conséquent, « le préjudice devant être réparé était non pas l’entier dommage causé par la seconde fracture mais seulement la perte de chance d’éviter le dommage ».

Le Conseil d’Etat rejette ainsi le pourvoi du patient.

Consulter l'arrêt du Conseil d'Etat

La Cour de la cassation se prononce sur la question d’un conflit d’intérêt pour un curateur « hospitalier » à l’origine d’une demande d’admission en soins psychiatriques sans consentement

La Cour de cassation s’est prononcée au sujet d’un patient qui a été admis en soins psychiatriques sans consentement à la demande d’un tiers, son curateur « hospitalier » (le service tutélaire de l’Association du Rhône pour l’hygiène mentale). Au titre du contrôle semestriel de la mesure, le directeur d’établissement a saisi le juge des libertés et de la détention aux fins de poursuite de la mesure. Suite à la production d’un certificat médical circonstancié produit par un médecin psychiatre de l’établissement de santé, il a été décidé du maintien du patient en hospitalisation complète.

Le patient fait grief à cette décision en ce qu’elle relève « de la même personne morale de droit privé que le tuteur en charge des intérêts de la personne malade et tiers demandeur à l’admission en soins psychiatriques sans consentement » et ainsi qu’elle « procède d’un conflit d’intérêts et par suite caractérise un manquement à l’exigence d’impartialité et d’indépendance de la part de l’établissement de santé ».

En accord avec la cour d’appel de Lyon, la Cour de cassation a considéré qu’il ne saurait être déduit de la seule existence d’une même fondation regroupant plusieurs entités distinctes, dont l’hôpital et le service tutélaire, un défaut d’impartialité de l’établissement de santé. En ce sens, la Cour estime que la décision n’est pas entachée d’irrégularité quand bien même les certificats médicaux proposant le maintien de soins psychiatriques émanent d’un médecin psychiatre placé sous le même pouvoir hiérarchique que le curateur (ou le tuteur) chargé des personnes malades.

Elle ajoute qu’en application des dispositions l’article L. 3212-7 du code de la santé publique, « le tiers à l’origine de la demande d’admission n’intervient pas lors de son maintien, décidé par le directeur d’établissement d’accueil au vu d’un certificat médical circonstancié établi par un psychiatre exerçant dans cet établissement et indiquant si les soins sont toujours nécessaires ».

Consulter l’arrêt de la Cour de cassation

Évolution de la profession et de la formation infirmières : les recommandations de l’IGAS et de l’IGERS

Dans le cadre de la mission qui leur a été déléguée, l’IGAS et l’IGERS font état au sein de leur rapport d’une vingtaine de recommandations sur les nécessaires évolutions de l’exercice de la profession d’infirmier et soulignent la nécessiter d’arbitrer la coopération entre professionnels de santé, le parcours des étudiants et des professionnels, ainsi que les tensions entre le cadre juridique et l’évolution des besoins de cette profession.

Selon le rapport, ces évolutions devront nécessairement trancher deux points de crispation qui sont aussi des frontières entre l’exercice médical et infirmier :

-          La prescription pour laquelle la mission propose d’aller au-delà des actes ponctuels déjà reconnus aux infirmiers pour expertiser une compétence de prescription plus globale qui serait délimitée en cohérence avec les missions prioritaires des infirmiers ;

-          La consultation pour laquelle la mission propose des évolutions sur des pathologies précises et dans le cadre des dispositifs coordonnés afin de garantir la bonne articulation avec les médecins. La consultation en accès direct serait réservée aux infirmier(e)s en pratique avancée (IPA).

L’exercice d’une plus grande autonomie de la profession infirmière doit cependant se déployer dans un cadre juridique sécurisé. La mission souligne par conséquent la nécessité d’investir davantage dans la formation continue des infirmiers. La sécurisation de l’exercice infirmier doit également passer par la promotion de la collaboration interprofessionnelle via l’exercice coordonné.

Enfin, selon le rapport, l’évolution du champ de compétences infirmières impliquerait également de revoir la définition législative de la profession.

Consulter le rapport de l'IGAS

---