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Cour de cassation, 12 décembre 2013, n° 12-29392 (Établissement d'hébergement pour personne âgée dépendante - Sortie contre avis médical - Nécessité d'un écrit)

En l’espèce, M. X alors âgé de 82 ans a été accueilli temporairement par un EHPAD où il a séjourné entre le 20 novembre 2006 et le 28 février 2007 avant d’être transféré, à la suite d’une pneumopathie, vers une structure hospitalière où il est décédé le 9 mai 2007. Invoquant l’existence de fautes commises par l’EHPAD, notamment le défaut de prise en compte de la volonté de son père, Mme X a assigné cet établissement en responsabilité et en indemnisation de son préjudice moral.
La Cour retient, au regard des éléments de preuves produits par les parties, que M. X « n’avait formalisé auprès de la direction (de cet EHPAD) aucune demande expresse tendant à voir interrompre sa prise en charge contre avis médical » et rejette ainsi le pourvoi formé par Mme X.

 

Cour de cassation
chambre civile 2

Audience publique du jeudi 12 décembre 2013

N° de pourvoi: 12-29392

Non publié au bulletin Rejet

Mme Flise (président), président
SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Yves et Blaise Capron, avocat(s)

 

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 23 novembre 2011), que quelque temps avant le décès de son épouse, atteinte d'un cancer, M. X., alors âgé de 82 ans, a été accueilli temporairement par l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Y. (l'EHPAD) où il a séjourné entre le 20 novembre 2006 et le 28 février 2007 avant d'être transféré, à la suite d'une pneumopathie, vers une structure hospitalière où il est décédé le 9 mai 2007 ; qu'invoquant l'existence de fautes commises par l'EHPAD Y., notamment le défaut de prise en compte de la volonté de son père, Mme X.  l'a assigné en responsabilité et en indemnisation de son préjudice moral ;

Attendu que Mme X.  fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors, selon le moyen, qu'aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne, ce consentement pouvant être retiré à tout moment et le médecin devant respecter la volonté de la personne après l'avoir informée des conséquences de ses choix ; qu'il n'en va autrement que lorsque la personne est hors d'état d'exprimer sa volonté ; qu'en considérant, par conséquent, pour débouter Mme X. de toutes ses demandes, que Mme X. n'avait pas rapporté la preuve d'une faute caractérisée à la charge de l'EHPAD, quand elle constatait que M. X. avait émis le désir de sortir de l'établissement et de revenir vivre dans son habitation de Poitiers et que, par deux fois, la direction et le personnel de l'EHPAD avaient refusé de se conformer à la volonté de M. X.  et quand elle ne relevait pas que ce dernier était hors d'état d'exprimer sa volonté, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations et a violé les dispositions de l'article L. 1111-4 du code de la santé publique, ensemble les dispositions des articles 16-3 et 1382 du code civil et les stipulations des articles 5 et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu que les dispositions des articles L. 1111-4 du code de la santé publique et 16-3 du code civil étaient inapplicables à l'espèce où n'était pas en cause la question du consentement d'un patient à un acte médical ou à une intervention thérapeutique ;

Et attendu, qu'après avoir constaté que M. X.  avait manifesté auprès de ses filles le désir de revenir à son domicile et que le personnel de l'EHPAD s'était opposé les 25 janvier et 27 février 2007 à ce que Mme X.  fasse sortir son père de l'établissement, l'arrêt retient que le médecin avait établi le 19 janvier 2007 un certificat dans lequel il constatait que l'état de santé de l'intéressé contre-indiquait une sortie de l'établissement, sauf pour consultation médicale ; que le règlement de fonctionnement de l'établissement dont M. X.  a signé un exemplaire lors de son installation lui imposait d'avertir l'administration 48 heures à l'avance pour toute absence pour convenance personnelle et en cas de vacances d'avertir l'établissement un mois auparavant pour les congés de plus de quinze jours ; que la charte des droits et libertés de la personne accueillie fait également état de la nécessité d'un écrit pour toute renonciation aux prestations ; que M. Z., fils du défunt, atteste avoir appelé son père lors de son séjour à la maison de retraite et affirme que lors d'une conversation téléphonique qui avait lieu dans le bureau de la directrice, son père a décidé de rester dans cette maison de retraite contre l'avis de Mme X.  ;

Qu'en l'état de ces constatations et énonciations, découlant de son appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de preuve produits, dont il ressortait que M. X.  avait émis des avis contradictoires concernant la poursuite de son hébergement en établissement et n'avait formalisé auprès de la direction aucune demande expresse tendant à voir interrompre sa prise en charge contre avis médical, la cour d'appel a pu décider que l'EHPAD, en s'opposant à ce que Mme X.  fasse sortir son père de l'établissement, n'avait commis aucune faute engageant sa responsabilité ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X.  aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze décembre deux mille treize.