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Les juristes du Pôle vous proposent une sélection de ce qu'il faut retenir dans le domaine de la santé mentale pour le dernier trimestre de l'année 2017.

Au sommaire : mineurs en établissements de santé mentale, sectorisation et libre choix du patient, compétence du juge dans l'appréciation de l'état de santé du patient, convocation du curateur, compétence à former un pourvoi, traçabilité d'une mesure d'isolement, mortalité de personnes souffrant de troubles mentaux.

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Toute l'équipe du Pôle vous souhaite de joyeuses fêtes de fin d'année !

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Comment s’articulent les droits des parents et les droits des enfants dans leurs rapports avec l’hôpital et avec les autorités administratives et judiciaires, au moment de l’admission et pendant la prise en charge ?

Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté publie un rapport dédié à la spécificité des prises en charge des mineurs dans les établissements de santé mentale.

Il formule cinq grands axes de recommandations, portant sur le cadre juridique et les conditions d’admission du mineur, sur les droits des mineurs et de leurs représentants légaux, sur l’intervention du juge des libertés et de la détention, ainsi que sur la prise en charge.

Notamment, il relève que « le personnel hospitalier devrait être sensibilisé aux questions d’ordre juridique » ou encore que « les patients mineurs ne devraient pas être accueillis avec des adultes de plus de 25 ans. Il devrait être envisagé de regrouper dans des unités distinctes d’une part, les mineurs de 13 à 16 ans et, d’autre part, les jeunes de 16 à 25 ans ».

Consulter le rapport

A qui incombe de rechercher une place à un patient ?

Le libre choix de l’établissement par le patient est un principe fondamental qui doit être pris en compte et ce, quel que soit son mode de prise en charge, « tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du secteur psychiatrique correspondant à son lieu de résidence » (article L. 3211-1 du code de la santé publique).

Pour autant, que le patient soit suivi en hospitalisation libre ou pour des soins psychiatriques sans consentement, l'orientation vers un établissement de son secteur psychiatrique sera privilégiée. L’organisation médicale et administrative « sectorisée » a pour objet de faire bénéficier le patient d’une prise en charge globale, coordonnée et de proximité.

Le patient doit donc préférentiellement être, à tout moment, accueilli, orienté et soigné en fonction de son lieu de résidence dans les différentes structures dont dispose son secteur, ceci sans rupture entre les soins intra et extrahospitaliers.

En cas d’incapacité matérielle de l’établissement de secteur (par exemple, déjà sur-occupé) à accueillir un patient dans des conditions satisfaisantes, il convient d’organiser son admission dans un autre établissement en mesure d’y procéder.

Pour conclure : le libre choix du patient doit être respecté. Mêmes si les habitudes des équipes « hors secteur » s’expriment souvent par une réticence spontanée à l’accueil et la prise en charge de patients ne relevant pas de leur secteur, celles-ci n’ont aucun fondement en droit. Il ne peut être restreint au libre choix qu’en cas d’impossibilité matérielle d’accueil ou pour motif thérapeutique.

Dès lors qu’un patient s’est présenté, spontanément ou non, au sein d’un établissement, la charge de lui rechercher une place revient à cette structure : en priorité dans le secteur psychiatrique rattaché au patient, mais sans être exclusive, tout en respectant l’éventuel choix contraire de ce dernier.

Une fiche pratique mise à jour sur la sectorisation psychiatrique

La « sectorisation psychiatrique » a constitué pendant de nombreuses années, depuis les années 1960, le cadre d’organisation de référence des prises en charge psychiatriques.

La loi « Santé » du 26 janvier 2016 l’a maintenue, mais en l’intégrant dans une organisation générale fondée sur des territoires de santé mentale de plus grande dimension. Cette fiche pratique présente les objectifs et l'organisation de la mission de psychiatrie de secteur, ainsi que la définition et l’organisation technique des secteurs.

L'équipe du Pôle vous propose une fiche pratique actualisée sur cette thématique.

Consulter la fiche pratique

Le juge ne saurait substituer son avis à l'évaluation médicale du patient

La Cour de cassation estime qu’il résulte des dispositions du code de la santé publique que « le juge qui se prononce sur le maintien de l'hospitalisation complète doit apprécier le bien-fondé de la mesure au regard des certificats médicaux qui lui sont communiqués ».

Or, une ordonnance rendue par le premier président d’une cour d’appel relève que « les constatations médicales sont imprécises, en discordance avec les propos tenus par l'intéressé à l'audience, et que M. X. se dit prêt à voir un psychiatre ».

La Cour décide « qu'en statuant ainsi, par des motifs relevant de la seule appréciation médicale, le premier président, qui a substitué son avis à l'évaluation, par les médecins, des troubles psychiques du patient et de son consentement aux soins, a violé les textes susvisés ».


Consulter l'arrêt de la Cour de cassation du 27 septembre 2017

Soins sans consentement : le défaut de convocation du curateur constitue une irrégularité

La Cour de cassation rappelle qu’un curateur doit être « informé de la saisine du premier président en charge du contrôle de l’hospitalisation sans consentement de la personne sous curatelle et convoqué par tout moyen, à peine de nullité ». Elle s’appuie notamment sur le dernier alinéa de l’article 468 du Code civil qui prévoit que l’assistance d’un curateur est « requise pour introduire une action en justice ou y défendre » ainsi que sur les articles R. 3211-13 et R. 3211-19 du Code de la santé publique.

En l’espèce, le défaut de convocation de l’un des co-curateurs du patient, fût-il le tiers ayant demandé les soins sans consentement, constitue bien une irrégularité de fond justifiant la nullité de la procédure.


Consulter l'arrêt de la Cour de cassation du 11 octobre 2017

Soins psychiatriques sans consentement : le tiers ne peut former de pourvoi s’il n’a pas la qualité de partie

La première chambre civile de la Cour de cassation rappelle que « lorsque la saisine du juge n’émane pas du tiers (qui a fait la demande d’admission en soins psychiatriques sans consentement), celui-ci est avisé de l’audience de première instance ou d’appel, peut faire parvenir ses observations par écrit, (…) mais n’a pas la qualité de partie ». Et qu’en application des articles 609 et 611 du Code de procédure civile, « nul ne peut se pourvoir en cassation contre une décision à laquelle il n’a pas été partie, à moins qu’elle n’ait prononcé une condamnation à son encontre ». 

Consulter l'arrêt de la Cour de cassation du 15 novembre 2017

Traçabilité et contrôle par le juge des mesures d'isolement : l’absence dans le registre du nom des soignants ayant suivi une mesure d’isolement et une durée parfois supérieure à 24 heures ne sont pas de nature à contrevenir, en elles-mêmes, à l'exigence de traçabilité

Ce point vient d’être affirmé par une Cour d’appel, dès lors qu’il ressort en revanche des éléments médicaux produits devant le juge un contexte de risque avéré d’atteinte à la personne du patient et de la nécessité de mise en place d’une mesure de protection.  

Ainsi, une motivation « lapidaire », de « risque auto-agressif » ne permet pas au juge d’effectuer un contrôle effectif de la conformité de la légalité de la mesure d’isolement et porte grief au patient.

En revanche, la mention d’une « dépression bipolaire d'intensité sévère avec des éléments psychotiques d'un risque de suicide majeur, d'un risque de fugue avec mise en danger du patient et d'un état délirant majeur induisant un danger imprévisible » ainsi que celle d’un assouplissement des aménagements spécifiques attestant d'une évolution de la mesure d'isolement au regard de l'amélioration de l'état de santé du patient sont suffisantes pour permettre au juge d’effectuer son contrôle.

Consulter l'ordonnance de la Cour d'appel de Versailles, 6 novembre 2017, n° 17-07/797

Consulter l'ordonnance de la Cour d'appel de Versailles, 6 novembre 2017, n° 17-07/798

Mortalité des personnes souffrant de troubles mentaux : analyse des certificats de décès

De 2000 à 2013, 783 403 décès de personnes atteintes de troubles mentaux (TM) ont été enregistrés, représentant 10,3% de l’ensemble des décès survenus sur cette période.

Un article publié au sein du Bulletin épidémiologique hebdomadaire présente une analyse sur la mortalité associée à l’existence de TM en France.

Il souligne l’importance de prendre soin aussi bien de la santé mentale que physique des personnes souffrant de TM et insiste sur la nécessité de mettre en œuvre des actions de prévention, notamment du suicide mais portant aussi sur les facteurs de risque cardiovasculaire, respiratoire et métabolique.

Consulter l'article

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