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EDITO

Les échanges de notre direction des affaires juridiques avec les différentes équipes psychiatriques de l’AP-HP, dont la fréquence est spécifique aux soins de santé mentale, témoignent de l’importance en cette matière de l’articulation de la Médecine et du Droit. Ainsi que de l’attention, aujourd’hui bien plus grande qu’hier, portée par l’opinion et des associations de malades vigilantes, au-delà même des équipes hospitalières, aux problématiques de libertés individuelles.

Parallèlement, la privation de liberté, la contrainte à se soigner, les moyens utilisés pour cette contrainte, même indispensables au plan médical, sont désormais largement soumis au regard extérieur du juge, mais également à celui du Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL). Ce dernier, après un rapport remarqué sur le Centre psychothérapique de l'Ain à Bourg-en-Bresse en 2016, vient de publier des recommandations en urgence concernant le CHU de Saint-Etienne, dont le retentissement a été national.

L’essentiel de notre newsletter de ce trimestre porte à nouveau sur ces questions. Nous espérons que la documentation ainsi réunie vous permette si besoin de préciser vos pratiques, et de les sécuriser au regard des nouveaux droits des malades.

Marc Dupont

Adjoint à la Directrice

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Patients non francophones : plaquettes d’information sur leurs droits

La loi impose une information des patients soignés sans leur consentement en psychiatrie sur leur situation juridique et leurs droits, garanties et voies de recours. Cette information doit être délivrée dès que possible à compter de l’admission.

Afin de respecter au mieux cette obligation légale, l’AP-HP a souhaité mettre à disposition de ses services psychiatriques une plaquette d’information en cinq langues étrangères différentes (anglais, espagnol, arabe, russe, mandarin).

Consulter les plaquettes AP-HP

Audiences : assistance ou représentation du patient par un avocat

La loi prévoit qu’à l’audience, le patient doit être assisté ou représenté par un avocat que, selon le cas, il aura choisi, ou qui aura été désigné au titre de l’aide juridictionnelle ou encore commis d’office.

Lorsque le patient ne peut assister à l’audience (au vu d'un avis médical motivé lorsque des motifs médicaux font obstacle à son audition), il est obligatoirement représenté par un avocat.

Dans ces cas, l’hôpital doit faciliter le respect des droits des patients, notamment en mettant en relation le patient et son avocat.

Recommandations de notre direction :

Dans l’hypothèse où un avocat ne répondrait pas aux sollicitations de son client lors d’une audience devant le juge des libertés et de la détention (JLD) et que le patient se trouverait dans l’impossibilité de se présenter devant le juge, l’établissement de santé pourrait :

- Faciliter les démarches du patient afin qu’il choisisse un autre avocat de son choix ;

- Saisir le bâtonnier de l'Ordre des Avocats du Barreau concerné afin de s’assurer que le patient sera bien représenté à l’audience.

L’équipe du Pôle vous propose une nouvelle fiche pratique qui fait le point sur cette question de l’assistance et de la représentation du patient par un avocat.

Consulter la fiche pratique

Soins psychiatriques : recommandations en urgence du CGLPL

La Contrôleure générale des lieux de privation de liberté (CGLPL) a adressé à la ministre des solidarités et de la santé des recommandations en urgence à la suite de sa visite du CHU de Saint-Etienne.

Lors de cette visite, des manquements ont été constatés dans les prises en charge aux urgences, dans les pratiques d’isolement et de contention ainsi que dans l’exercice des droits des patients.

Le CGLPL recommande notamment que la prise en charge initiale des patients au CHU soit « réalisée dans le respect de la dignité des personnes » ; « les moyens nécessaires doivent être mis en œuvre pour garantir les possibilités d'hospitalisation adaptées » ; que « les pratiques d'isolement et de contention doivent faire l'objet d'une réflexion institutionnelle et respecter les prescriptions de la loi du 26 janvier 2016 ainsi que les recommandations du CGLPL, de la Haute Autorité de santé, et du Conseil de l'Europe à travers les normes révisées du CPT (» ; enfin qu'une formation sur l'accès aux droits doit être « dispensée aux soignants et l'information donnée aux patients (...) être déclinée aux différents moments de l'hospitalisation ; les cadres de santé doivent établir un contrôle de cet accès aux droits ».

 Consulter les recommandations 

Santé mentale : 60 ans après la circulaire de 1960, l’IGAS analyse l’organisation et le fonctionnement du dispositif de soins psychiatriques en France

Un rapport axé sur l’organisation de la psychiatrie sur le territoire permet d’observer les difficultés que rencontre l’offre de soins psychiatriques 60 ans après la circulaire du 15 mars 1960. Parmi elles, figurent notamment : les disparités territoriales, les controverses entre les professionnels quant à la pertinence de l’intervention psychiatrique, mais surtout la faible complémentarité entre d’une part, le dispositif sectorisé et d’autre part, le dispositif non sectorisé centré sur une hospitalisation indifférenciée et sur des consultations libérales.

Pour faire face à ces problématiques, la mission propose d’une manière générale de développer la recherche en santé mentale pour orienter au mieux les politiques publiques et plus particulièrement, d’expliciter les grandes fonctions du dispositif de soins public et privé, afin d’aider les établissements à guider leur positionnement.

Consulter le rapport

Atlas de la santé mentale : une base de données territorialisée en santé mentale inédite

L'Institut de recherche et documentation en économie de la santé (Irdes) et la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) met à disposition de l’ensemble des acteurs intervenant dans le domaine de la santé mentale un atlas de la santé mentale interactif.

Il s’agit là d’une base de données territorialisées rassemblant plus de 350 indicateurs.

Consulter l’atlas

Décision administrative d’admission en soins sans consentement : le délai de prescription de 4 ans s’applique 

La Cour de cassation rappelle qu’une action en réparation des conséquences dommageables résultant pour l’intéressé d'une décision administrative d'admission en soins sans consentement ne relève pas de la responsabilité médicale (pour laquelle s'applique un délai de prescription de 10 ans) et est soumise à la prescription quadriennale applicable au regard de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances de l'Etat.

Consulter l'arrêt

Soins psychiatriques sans consentement : le juge judiciaire ne peut annuler une décision administrative 

En rejetant une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), la Cour de cassation confirme que le juge judiciaire ne peut annuler une décision administrative illégale d’admission en soins psychiatriques sans consentement et ne peut que prononcer la mainlevée de cette mesure. 

La Cour de cassation s’était déjà prononcée en ce sens le 11 mai 2016 (n° 15-16.233). 

Consulter l'arrêt

Soins psychiatriques sans consentement et respect des droits des personnes mineures 

Le 8 mars 2016, le Tribunal administratif de Versailles avait annulé une décision administrative d’admission en soins psychiatriques sans consentement relative à un mineur en rappelant notamment que le consentement préalable des parents d’un patient mineur est indispensable « avant toute admission en urgence en service psychiatrique » (hors SDRE). 

Il précise également que « l’admission par un établissement de santé d’un mineur hospitalisé n’a pas pour effet de transférer à cet établissement la responsabilité d’organiser, diriger et contrôler la vie du mineur pendant la durée de sa prise en charge ».

Il rappelle enfin que « le placement d’un enfant de neuf ans en unité psychiatrique ne peut être considéré comme un acte usuel de l’autorité parentale ».

Concernant ces faits, le Tribunal de grande instance de Versailles décide le 23 janvier 2018 que le demandeur « peut prétendre à l’indemnisation de son entier préjudice né de l’atteinte portée à sa liberté par son hospitalisation à la demande d’un tiers jugée irrégulière ».

Ainsi le Centre hospitalier est condamné à payer la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice résultant de la privation de liberté et 4 000 euros en réparation du préjudice résultant de l’administration de traitements sous la contrainte.

Consulter les jugements du Tribunal administratif et du Tribunal de grande instance

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Les juristes du Pôle de la règlementation hospitalière et de la veille juridique vous proposent également une sélection bi-mensuelle de ce qu'il faut retenir dans le domaine de la santé. 

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