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Département du droit hospitalier et de la démocratie sanitaire

L’équipe du Département du droit hospitalier et de la démocratie sanitaire vous propose une sélection des principaux textes parus durant le mois de janvier 2024. 

Au sommaire de notre newsletter : 

Accès aux documents administratifs : appréciation des limites techniques de l’administration par une décision du Conseil d'Etat;

- Une nouvelle revalorisation du personnel hospitalier à compter du 1er janvier 2024 ;

- Une décision du Conseil d'Etat relative aux modalités d'autorisation de prolongation d’activité d'un fonctionnaire en fin de carrière ;

- Publication d'un décret relatif à la préparation et à la réponse du système de santé pour faire face aux situations sanitaires exceptionnelles ; 

- Publication d'un arrêté relatif aux missions de référence, aux capacités et moyens de prise en charge et de diagnostic des établissements de santé de référence ;

- Des recommandations de la HAS relatives à l'intervention auprès des personnes en situation de grande précarité présentant des troubles psychiques.

Nous vous souhaitons une bonne lecture.

Accès aux documents administratifs : appréciation des limites techniques de l'administration

L’article L.311-1 du code des relations entre le public et l’administration dispose que : " Sous réserve des dispositions des articles L. 311-5 et L. 311-6, les administrations mentionnées à l'article L. 300-2 sont tenues de publier en ligne ou de communiquer les documents administratifs qu'elles détiennent aux personnes qui en font la demande, dans les conditions prévues par le présent livre ".

Ces dispositions concernent notamment les dossiers administratifs des patients détenus par les établissements publics de santé et dont la communication peut être demandée.

En vertu de l'article L. 311-9 du même code, l'accès aux documents administratifs s'exerce, au choix du demandeur et " dans la limite des possibilités techniques de l'administration ".

Dans une décision du 20 décembre 2023, le Conseil d’Etat a considéré que les dispositions de l’article précité « font seulement obligation à l'administration de donner accès aux documents demandés en ayant recours, le cas échéant, aux outils informatiques dont elle dispose à la date à laquelle elle se prononce et en utilisant les fonctionnalités dont ceux-ci sont dotés. Elles ne lui font obligation ni de recourir à un logiciel qui serait mis à sa disposition par le demandeur, ni de développer un nouvel outil informatique, ni de développer de nouvelles fonctionnalités sur les outils dont elle dispose ».

Consulter la décision du Conseil d'Etat

Nouvelle revalorisation du personnel hospitalier à compter du 1er janvier 2024 

Un décret et trois arrêtés publiés au Journal officiel le 23 décembre 2023 viennent revaloriser, à compter du 1er janvier 2024, le travail de nuit, des jours fériés et des dimanches du personnel hospitalier non médical, ainsi que les indemnités de garde et le plafond de rémunération de l’intérim pour le personnel médical. 

Le décret n° 2023-1238 du 22 décembre 2023 prévoit un nouveau mécanisme d’indemnisation du travail de nuit dans la fonction publique hospitalière. Ce nouveau mécanisme se fonde sur la rémunération horaire de l’agent (traitement indiciaire brut et indemnité de résidence) à laquelle est affecté un taux de majoration de 25 %. Il se substitue au dispositif d’indemnisation par une indemnité fixe variant selon l’intensité du travail de nuit, le corps et le service d’affectation de l’agent.

Un arrêté prévoit également une revalorisation du montant de l’indemnité forfaitaire pour travail des dimanches et jours fériés, passant de 44,89 € à 60 €. 

En ce qui concerne le personnel médical, un deuxième arrêté est venu revaloriser les indemnités de garde.

Enfin, un troisième arrêté a réhaussé le montant journalier du plafond des dépenses engagées par un établissement public de santé au titre d’une mission de travail temporaire. Ce montant passe de 1.210,99 € à 1.410,69 €.

Consulter le décret n°2023-1238 

Consulter l'arrêté modifiant le montant du plafond des dépenses engagées 

Consulter l'arrêté modifiant le montant des indemnités des gardes

Consulter l'arrêté fixant le montant de l'indemnité forfaitaire

Décision du Conseil d'Etat relative aux modalités d'autorisation de prolongation d’activité d'un fonctionnaire en fin de carrière

En l'espèce, un fonctionnaire du Ministère de la culture ayant atteint la limite d’âge de son grade, fixée à soixante-cinq ans et quatre mois a déposé une demande de prolongation d’activité. La Ministre de la culture a fait droit à cette demande dans la limite de deux trimestres, conformément aux dispositions de la loi du 13 septembre 1984 relative à la limite d’âge dans la fonction publique et le secteur public, en précisant qu’il pourrait présenter, six mois avant l’échéance de la prolongation ainsi accordée, une nouvelle demande de prolongation d’activité. Ayant usé de cette faculté, le fonctionnaire a bénéficié au total de cinq autorisations de prolongation d’activité de deux trimestres chacune puis a été radié des cadres et admis à faire valoir ses droits à la retraite. Cependant, pour le calcul de ses droits à pension, le service des retraites de l'Etat a refusé de prendre en compte les huit derniers trimestres effectués dans le cadre de ces prolongations successives d'activité. 

Par un jugement du 10 février 2019, le tribunal administratif de Paris a annulé le titre de pension en tant qu’il ne prend pas en compte, pour le calcul de la pension du fonctionnaire, les services effectués pendant la prolongation d’activité et enjoint au service des pensions de l'Etat de reconstituer les droits à pension du fonctionnaire en prenant en compte ces services. 

Par une décision du 22 décembre 2023, le Conseil d’Etat a considéré que : « lorsqu'un agent a obtenu, avant la survenance de la limite d'âge, l'autorisation de prolonger son activité au-delà de celle-ci, l'administration peut, sous réserve de l'intérêt du service et de son aptitude physique, lui accorder, y compris après la limite d'âge, d'autres autorisations successives de prolongation d'activité, dans la limite globale de dix trimestres, dès lors que chacune de ces décisions intervient avant la rupture du lien de l'agent avec le service sans avoir pour effet de le maintenir en activité au-delà de la durée des services nécessaire à l'obtention du pourcentage maximum de la pension. ». 

Les autorisations successives de prolongation d’activité du fonctionnaire étant intervenues avant la rupture de son lien avec le service, l’Etat est tenu de prendre en compte l’ensemble des périodes correspondantes pour la détermination des droits à pension de l’intéressé, alors même qu’une partie de ces autorisations lui avaient été accordées après la survenance de sa limite d’âge.

Cette décision concerne les trois versants de la fonction publique (Etat, territoriale et hospitalière).

Consulter la décision du Conseil d'Etat

Publication d'un décret relatif à la préparation et à la réponse du système de santé pour faire face aux situations sanitaires exceptionnelles

Le décret du 3 janvier 2024, n°2024-8, établit le dispositif « ORSAN » pour anticiper et gérer efficacement les situations sanitaires exceptionnelles. Ce dispositif vise à organiser de manière coordonnée les mesures nécessaires pour faire face à ces situations. Il comprend notamment des plans de réponse détaillés, mettant en place une mobilisation coordonnée des structures médicales et des professionnels de santé, ainsi que la mise à disposition des ressources matérielles et humaines nécessaires pour répondre à la situation.

Le dispositif ORSAN inclut la planification annuelle ou pluriannuelle des actions spécifiques pour la prise en charge des patients et la formation continue des professionnels de santé. De plus, des exercices réguliers sont organisés pour évaluer l'efficacité opérationnelle du dispositif, de manière à pouvoir faire des modifications en fonction des résultats.

Le déclenchement du plan peut être initié par le directeur de l'Agence régionale de santé (ARS) ou à la demande du préfet ou du ministre de la santé. À la suite de chaque déclenchement, un processus d'évaluation est mis en œuvre pour identifier les problèmes qui peuvent se présenter et pour améliorer le dispositif.

Des contrats d'objectifs sont établis entre l'ARS et les établissements de santé, définissant des missions spécifiques à accomplir en cas de crise sanitaire. Ces contrats peuvent également inclure la participation des centres et des maisons de santé, ainsi que des communautés professionnelles territoriales.

ORSAN est également conçu pour s'articuler avec le plan ORSEC, qui gère les situations d'urgence et de crise de manière générale. Lorsque les ressources fournies par ORSAN ne sont pas suffisantes, le préfet peut mobiliser les moyens du plan ORSEC, notamment pour réaliser certaines missions comme la vaccination exceptionnelle ou encore la distribution de produits de santé.

Au niveau régional, des établissements de référence sont désignés pour assurer des missions d'expertise, de diagnostic et de prise en charge thérapeutique, ainsi que pour fournir des conseils en matière d'organisation des urgences collectives et des situations sanitaires exceptionnelles. Ces établissements passent des contrats avec l'ARS, précisant leurs missions et les moyens mis à leur disposition.

En outre, un plan de gestion des tensions hospitalières et des situations sanitaires exceptionnelles est prévu, comprenant deux niveaux de réponse : un plan de mobilisation interne pour gérer les tensions hospitalières et un plan blanc pour les situations sanitaires exceptionnelles. Ce plan est élaboré par le directeur de l'établissement de santé, après consultation des instances médicales et techniques, puis est transmis à l'ARS et au SAMU territorialement compétent.

En cas de besoin de renforts supplémentaires, un plan zonal est mis en place pour renforcer les mesures prises dans le cadre d'ORSAN. Ce plan inclut une cartographie des ressources du système de santé de la zone, des modalités d'acheminement des renforts et des procédures de déclenchement et de mise en œuvre.

Dans le cadre d'ORSAN, les professionnels de santé volontaires peuvent être mobilisés, avec des conventions spécifiques établissant les conditions de leur intervention et leur rémunération.

De plus, le dispositif prend en compte le service de santé des armées, avec la possibilité pour un hôpital militaire de fournir une assistance à un établissement de santé de référence, selon les termes d'un contrat établi entre le ministère de la Défense et l'ARS.

Consulter le décret

Publication d'un arrêté relatif aux missions de référence, aux capacités et moyens de prise en charge et de diagnostic des établissements de santé de référence

Un arrêté du 18 janvier 2024 prévoit les mesures liées à l’application du dispositif ORSAN et notamment les missions spécifiques qui sont attribuées aux établissements de santé régionaux de référence.

On retrouve parmi ces missions le diagnostic et la prise en charge des risques nucléaires, radiologiques, biologiques et chimiques.

- Pour répondre à un risque d’épidémie biologique, l'établissement de référence s’assure de la prise en charge des adultes et des enfants infectés ou présentant une suspicion d’infection par un agent pathogène. Il met également en œuvre la vaccination des personnes en contact avec ce patient.

- Pour répondre au risque nucléaire, il assure également la prise en charge des patients présentant une radio-contamination ou une irradiation.

- Face au risque chimique, il prend en charge les patients présentant une intoxication par un agent chimique, une toxine ou d’une blessure avec une trace de l’un de ces précédents éléments.

Pour faire face à la prise en charge de patients nombreux, l’établissement doit être en mesure d’assurer la prise en charge d’enfants et d’adultes présentant des blessures graves et nécessitant le recours à un plateau technique de haut niveau d’expertise. Il doit aussi pouvoir prendre en charge les patients atteints de troubles psychiques post-traumatiques notamment en cas d’urgence collective.

Ces établissements ont aussi un rôle d’expertise et de conseil vis-à-vis de l’ARS pour l’élaboration du dispositif ORSAN. Ils fournissent des conseils pour l’organisation de la prise en charge des urgences collectives et des situations sanitaires exceptionnelles. Ils ont par ailleurs une mission de formation des établissements de santé en la matière. 

Après une première sélection par l'ARS, c’est le ministre chargé de la santé qui désigne l'établissement de référence de la région par arrêté.

Dans le cadre du dispositif ORSAN, l’ARS détermine les objectifs de ces établissements et s’assure qu’ils ont la capacité technique et opérationnelle pour assurer l’exercice de leurs missions. Elle s’assure de la mise en œuvre des missions nationales d’expertise et de la prise en charge spécifique des patients dans les établissements de référence.

L’arrêté prévoit également l’application du plan zonal de mobilisation prévu dans le cadre du dispositif ORSAN. Il est prévu notamment que le SAMU de zone coordonne les interventions de renfort en mobilisant ses ressources pour apporter un appui au SAMU territorialement compétent.

Consulter l'arrêté

Des recommandations de la HAS relatives à l'intervention auprès des personnes en situation de grande précarité présentant des troubles psychiques 

La Haute autorité de santé (HAS) publie ses recommandations pour intervenir auprès des personnes en situation de grande précarité présentant des troubles psychiques. L’objectif est de proposer une approche globale incluant l’accès à un logement et un accompagnement clinique et social.

Les services doivent proposer des démarches d’ « aller vers » les personnes qui ne sont pas en capacité de formuler une demande d’aide et de soins, ainsi qu’un accueil et un accompagnement inconditionnels, souples et inclusifs.

La HAS précise que les interventions (soins et accompagnement) doivent :

- prendre en compte l’impact des traumatismes sur les parcours de vie des personnes ;

- promouvoir les approches centrées sur le pouvoir d’agir des personnes, leurs forces, leurs choix et désirs dans la perspective de leur rétablissement ;

- proposer un suivi pluridisciplinaire, travaillé :

• au sein des équipes, en veillant à leur diversité. Ces équipes peuvent notamment intégrer des pairs-aidants qui sont parfois les plus à même de faire lien avec des personnes très éloignées des soins et de l’accompagnement ;

• entre les acteurs des secteurs sanitaire (équipes de psychiatrie et de soins primaire en particulier), social, médico-social, et les acteurs du logement ;

- s’adapter aux vulnérabilités spécifiques de certaines populations (liées aux troubles associés addictifs ou cognitifs, à l’âge, au genre, au parcours migratoire) ;

- s’appuyer sur les principes de la réduction des risques et des dommages en les adaptant à la nature des troubles psychiques.

En outre, elle rappelle qu’assurer l’accès effectif des personnes à l’ensemble de leurs droits et en promouvoir la reconnaissance permet l’inscription des personnes dans un parcours de santé et d’insertion et participe à la prévention des ruptures.

Il est nécessaire d’organiser un dispositif de repérage précoce des troubles psychiques et des vulnérabilités psychosociales, d’apporter une réponse dès les premières demandes et d’accompagner les périodes de transition. Pour cela, il est important de développer :

- une offre de logements (ou, à défaut, une offre d’hébergement, inconditionnelle et respectueuse de la dignité et l’intimité) ;

- une offre de soin en psychiatrie et santé mentale ;

- une offre d’accompagnement social et médico-social suffisante et adaptée.

La coordination de l’action des professionnels et des structures sur un territoire est un axe majeur à améliorer afin de proposer une organisation permettant une réponse globale aux besoins des personnes (repérage, soins, logement, accompagnement social…).

Enfin, la lutte contre la stigmatisation et les discriminations auprès des structures, des institutions et du grand public est un enjeu fondamental.

Consulter les recommandations de la HAS

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