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CE, 27 avril 1994, Mlle X

Conseil d'Etat statuant au contentieux
Requête° 106760
3ème et 5ème sous-section réunies

Lecture du 27 Avril 1994

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 avril 1989 et 10 août 1989 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mlle X, demeurant (...) ; Mlle X demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 30 juin 1988 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 juillet 1986 du maire de Gignac-La-Nerthe (Bouches-du-Rhône) prononçant son licenciement, ensemble de la décision implicite rejetant le recours gracieux formé contre cet arrêté ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée par la loi n° 87-529 du 13 juillet 1987 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Burguburu, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Delvolvé, avocat de Mlle X et de Me Guinard, avocat de la ville de Gignac-la-Nerthe,
- les conclusions de M Toutée, Commissaire du gouvernement ;

Sur la recevabilité de la demande présentée par Mlle X devant le tribunal administratif :

Considérant qu'aux termes du 1er alinéa de l'article 1er du décret du 11 janvier 1965 relatif aux délais de recours contentieux en matière administrative : "Sauf en matière de travaux publics, la juridiction administrative ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée" ; que, d'après le 7ème alinéa qui a été ajouté au même article 1er par l'article 9 du décret du 28 novembre 1983 : "Les délais de recours ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision" ;

Considérant que la demande présentée par Mlle X devant le tribunal administratif de Marseille tendait à l'annulation d'un arrêté du maire de Gignac (Bouches-duRhône) en date du 28 juillet 1986 qui l'a licenciée de son emploi de bureau pour un motif disciplinaire ;

Considérant qu'il est constant que les mentions prescrites par la disposition cidessus rappelée au 7ème alinéa de l'article 1er du décret du 11 janvier 1965, que le maire de Gignac devait respecter pour rendre les délais de recours contentieux opposables à Mlle X, n'ont été portées ni dans la notification de l'arrêté de licenciement que Mlle X a reçue le 5 août 1986, ni dans la notification de la décision du 7 octobre 1986 par laquelle le maire a rejeté le recours gracieux que le mandataire de Mlle X lui avait adressé le 3 août 1986 ; qu'il suit de là qu'à la date du 3 avril 1987 à laquelle Mlle X a déposé son recours pour excès de pouvoir devant le tribunal administratif, aucune forclusion ne pouvait être opposée à ce recours ;

Sur la légalité de l'arrêté de licenciement, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu'en vertu de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 : " doivent être motivées les décisions qui infligent une sanction ", et qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : "La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision" ;

Considérant que l'arrêté attaqué qui se borne à indiquer dans ses motifs que "selon le conseil de discipline, les faits ayant motivé la comparution de Mlle X, de par leur gravité et leurs répétitions, justifient la sanction requise" ne satisfait pas, par cette seule référence à l'avis du conseil de discipline, à l'exigence de motivation prescrite par la disposition législative ci-dessus rappelée ; qu'il est dès lors entaché d'excès de pouvoir ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mlle X est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande ;

Décide :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 30 juin 1988, ensemble l'arrêté du maire de Gignac en datedu 28 juillet 1986 et la décision du maire de Gignac en date du 7 octobre 1986 sont annulés.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mlle X, à la commune de Gignac et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.