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Circulaire DGS/DH n° 100 du 11 décembre 1995 relative aux précautions à observer en milieu chirurgical et anatomopathologique face aux risques de transmission de la maladie de Creutzfeldt-Jakob.

La circulaire n° 45 du 12 juillet 1994 indiquait les précautions à observer en milieu chirurgical et anatomopathologique face aux risques de transmission de la maladie de Creutzfeldt-Jakob. Cette circulaire a soulevé un certain nombre de difficultés d'application tenant :
- à un degré de précision insuffisant dans la description des méthodes proposées qui, de plus, n'abordaient pas les problèmes posés par les matériels non stérilisables (endoscopes en particulier) ;
- au fait que la présentation générale du risque laissait au praticien la responsabilité de définir les règles à adopter dans sa pratique personnelle et les circonstances dans lesquelles les appliquer.

Cette nouvelle circulaire précise les méthodes à utiliser et les conditions dans lesquelles elle doivent être appliquées. Elle vient donc remplacer la circulaire n° 45 du 12 juillet 1994 qui est annulée.

1. Rappel sur les encéphalopathies subaiguës spongiformes

Les encéphalopathies subaiguës spongiformes sont des maladies dégénératives du système nerveux central, toujours mortelles, touchant l'homme et l'animal. Ces maladies peuvent être transmises au sein d'une même espèce et dans certaines conditions d'une espèces à une autre.

Chez l'animal, il s'agit notamment de la tremblante du mouton, de l'encéphalopathie transmissible du vison et de l'encéphalopathie subaiguë spongiforme bovine (maladie des vaches folles).

Chez l'homme, de telles encéphalopathies correspondent à la maladie de Creutzfeldt-Jakob (M.C.J.), au syndrome de Gerstmann-Straussler-Scheinker, au kuru, à l'insomnie fatale familiale et peut-être à la maladie d'Alpers.

Les encéphalopathies subaiguës spongiformes se traduisent au début de leur évolution par une ataxie, un tremblement et une instabilité posturale, évoluant le plus souvent vers une démence et un état grabataire. Dans la forme habituelle, l'incubation est longue (10 à 35 ans) ; aucun test ne permet alors de poser le diagnostic. Durant la phase clinique, il n'y a ni signe inflammatoire, ni anomalie biologique du sang ou du liquide céphalo-rachidien, ni test non invasif, direct ou indirect, permettant d'affirmer le diagnostic ; l'électroencéphalogramme n'apporte que des présomptions. Le diagnostic clinique est confirmé uniquement par l'examen histopathologique du système nerveux central (S.N.C.) : spongiose avec vacuolisation neuronale, prolifération astrocytaire et hypertrophie de la glie sans signe inflammatoire ni démyélinisation. Cette spongiose correspond à l'accumulation d'une iso-forme pathologique (Prpsc) d'une protéine normale du système nerveux central qu'est la protéine P. Cette protéine anormale, dont la concentration est proportionnelle au titre infectieux du S.N.C., est présente bien avant l'apparition des signes cliniques.

Les agents responsables de ces maladies sont assimilés à la PrP anormale et regroupés sous le nom d"agents transmissibles non conventionnels' (A.T.N.C.) ou 'prions'. Ils sont particulièrement résistants à de nombreux traitements physiques et chimiques (chaleur jusqu'à 130° en milieu humide, au-delà en chaleur sèche, ultrasons, U.V., radiations ionisantes, éthanol, formaldéhyde...)

L'incidence de la maladie de Creutzfeldt-Jakob est de l'ordre de 1 cas par million d'habitants et par an. Elle touche en général les personnes de plus de cinquante ans et elle est responsable d'environ 60 décès par an en France soit 1 décès sur 10 000. On distingue les formes sporadiques (90 p. 100) et les formes familiales (10 p. 100). Récemment, l'attention a été attirée par des formes iatrogènes transmises le plus souvent par l'administration d'hormones hypophysaires extractives [hormone de croissance, gonadotrophines (1)] les greffes de dure-mère et des instruments neurochirurgicaux contaminés.

(1) Seules les gonadotrophines extraites d'hypophyse de cadavre sont concernées mais non les gonadotrophines d'origine urinaire.

2. Objectifs de la circulaire

Cette circulaire a pour but de prévenir une éventuelle transmission iatrogène des A.T.N.C. A ce titre, elle complète différentes mesures plus spécifiques (cf. annexe 2) concernant :
- les médicaments et biomatériaux ;
- les greffes de cellules, de tissus et d'organes ;
- les produits sanguins.

En effet, si l'incidence de la M.C.J. reste stable pour l'instant, on voit se multiplier les cas de transmission iatrogène, essentiellement à la suite d'injections d'hormone extractive de croissance ou de greffes de dure-mère. Dans ces situations, il est impossible de savoir si la contamination ne concerne qu'un petit nombre de personnes qui expriment toutes la maladie ou un nombre plus vaste de sujets parmi lesquels seul un petit nombre exprimeront la maladie (peut-être en raison d'une susceptibilité génétique particulière).

On ne peut donc qu'être préoccupé par le risque de voir se constituer des 'réservoirs' d'A.T.N.C. beaucoup plus vastes que les quelques centaines de personnes en incubation d'une M.C.J. spontanée. Compte tenu de la multiplication des actes invasifs, le risque de contamination doit désormais être pris en compte dans diverses circonstances.

Les recommandations exposées tiennent compte des données épidémiologiques disponibles concernant l'infectiosité des tissus et l'efficacité des différentes voies d'introduction ainsi que des recommandations élaborées par l'Organisation mondiale de la santé et reprises par la Communauté européenne.

Le domaine des A.T.N.C. est un domaine encore mal connu et en constante évolution qui impose une vigilance toute particulière. Les méthodes préconisées ont fait l'objet d'expériences et d'études par des laboratoires de recherche sur les A.T.N.C., avec un recul et une expérience suffisants pour qu'on puisse les considérer comme faibles. Cependant, ces expériences ont porté principalement sur des souches animales (dont le comportement n'est sans doute pas rigoureusement superposable à celui des souches humaines), aucune méthode n'a été validée selon un protocole spécifique et n'offre donc une sécurité totale.

3. Les procédés d'élimination des A.T.N.C. sur le matériel médico-chirurgical

3.1. Le nettoyage

Le nettoyage, première étape de traitement du matériel, associe une action mécanique et une action détergente. Quel que soit le procédé utilisé (mécanique ou manuel), il sera mis en oeuvre par du personnel formé et protégé (gants, blouse, lunettes) cette opération.

Le matériel utilisé doit d'abord être mis à tremper à part dans un récipient rempli d'un détergent de type alcalin pendant quinze minutes dès la fin de son utilisation.

Le matériel est ensuite nettoyé toujours à part, afin d'être débarrassé des impuretés comme pourra le vérifier un examen visuel attentif.

L'emploi d'un détergent-désinfectant n'est pas en soi contre-indiqué mais tout produit contenant un aldéhyde (formol, glutaraldéhyde...), est formellement proscrit car ce dernier a une action protectrice des A.T.N.C. vis-à-vis des procédures d'inactivation employées ultérieurement. En cas d'utilisation d'un bac à ultra-sons, il faut bien vérifier la comptabilité du produit.

Aucun traitement particulier des effluents n'est actuellement préconisé.

Cette phase de nettoyage est essentielle car, à elle seule, elle peut réduire notablement la charge infectieuse et elle conditionne l'efficacité des étapes ultérieures. Néanmoins, le matériel nettoyé peut être encore contaminé.

3.2. L'inactivation des A.T.N.C.

L'Organisation mondiale de la santé retient trois procédés d'inactivation en précisant qu'aucune ne constitue une garantie absolue ; il s'agit de :
- l'autoclave sous certaines conditions (autoclave 'pour charge poreuse' (1) entre 134 °C et 138 °C pendant dix-huit minutes) ;
- la soude (1N pendant une heure à 20 °C).
- l'hypochlorite de sodium (à 2 p. 100 de chlore libre pendant une heure à 20 °C).
(1) L'O.M.S. distingue les autoclaves à déplacement de gravité (gravity-displacement auto-claving), utilisés dans les pays anglo-saxons, et les autoclaves dits 'pour charge poreuse' (porous-load autoclaving), seuls autoclaves existant en France. C'est donc les conditions relatives à ce type d'appareils qui sont retenues ici.

D'autres produits tels que, par exemple, le sodium dodécyl sulfate (S.D.S.) à 10 p. 100 (en trempage trente minutes entre 60 et 100 °C) peuvent diminuer notablement le titre infectieux. L'efficacité de ces produits, en cours d'expérimentation, nécessite d'être confirmée avant qu'on puisse les recommander en pratique courante.

3.2.1. L'inactivation chimique :

L'inactivation chimique est obtenue par les procédés suivants :
- soit, la soude 1 N pendant soixante minutes à 20 °C,
- soit l'hypochlorite de sodium à 6d chlorométriques (Eau de Javel (r)
fraîchement diluée au demi) pendant soixante minutes à 20 °C (2).
(2) Certains auteurs donnent la préférence à la soude

Cette inactivation convient en général au matériel métallique ; en cas de doute ou d'instrument présentant plusieurs composants, il est nécessaire de vérifier auprès du fabricant si les matériels sont compatibles avec les produits précédents. Lors d'un appel d'offres, le cahier des charges devra tenir compte de ces impératifs.

Les conditions de mise en oeuvre de cette inactivation (volume, récipient, titrage, précautions d'emploi, élimination...) seront étudiées avec le pharmacien, le médecin hygiéniste et l'ingénieur biomédical. Il est rappelé que l'utilisation de soude sur de l'aluminium est dangereuse (l'utilisation de l'eau de Javel (r) n'est pas non plus sans inconvénient). L'étage d'inactivation chimique doit être suivie d'un rinçage soigneux.

3.2.2. L'inactivation physique :

L'inactivation physique nécessite le recours à la chaleur humide. L'opération sera effectuée dans un autoclave à une température qui ne doit pas être inférieure à 134 °C et pendant une durée qui ne doit pas être inférieure à dix-huit minutes.

4. Les situations à risques

Leur évaluation doit tenir compte du risque individuel et du risque lié à la nature de l'acte.

4.1 Les patients

Un individu pris au hasard présente un risque d'exprimer une M.C.J. et donc d'être, à l'occasion d'un acte invasif, à l'origine d'une contamination iatrogène, qui est de l'ordre de 1 sur 106. Il n'apparaît pas réaliste de modifier les procédures habituelles pour un risque aussi faible considéré comme virtuel, sauf à insister sur la qualité de la phase de nettoyage. De tels individus seront considérés comme des patients à risque virtuel.

Par contre, les patients ayant reçu de l'hormone de croissance extractive présentent un risque plus élevé, évalué à 1 sur 102. Il en est de même, quoi-qu'à un degré moindre des patients chez lesquels ont été implantés des fragments de dure-mère (du moins dans le territoire céphalique). Enfin, les patients apparentés au premier degré (parents ou fratrie) à des malades ayant présenté une forme familiale vraie de M.C.J. ont un risque encore plus élevé.

Compte tenu des incertitude inhérentes aux moyens diagnostiques, cela conduit à considérer comme patients particulièrement à risque d'être à l'origine d'une contamination les patients suivants :
- ceux qui présentent des signes évocateurs de M.C.J. (1) et après élimination des autres causes possibles de ces troubles ;
- ceux qui ont reçu de l'hormone de croissance extractive, des gonadotrophines extractives ou de la glucocérébrosidase extractive ;
- ceux dont un membre de la famille (père, mère, fratrie) est décédé de M.C.J. confirmée ou fortement suspectée ;
- ceux qui ont subi une intervention neurochirurgicale (ce qui inclut les patients ayant subi une greffe de dure-mère intracrânienne).
(1) Le diagnostic de M.C.J. peut être suspecté devant l'apparition récente et l'évolution progressive d'un des éléments suivants :
- un ralentissement psychomoteur ou une démence ;
- une ataxie cérébelleuse ;
- un trouble oculomoteur.

4.2. La nature de l'acte

Il faut d'abord distinguer les actes non invasifs, qui ne nécessitent pas de précautions particulières, des actes invasifs. Parmi ces derniers, il faut différencier les actes touchant des organes à haut potentiel d'infectiosité des autres (voir la classification de l'O.M.S. en annexe). Il faut donc distinguer les interventions touchant le système nerveux central, l'oeil ou la dure-mère (ponction lombaire et certains actes de chirurgie O.R.L., maxillo-faciale ou rachidienne) qui exposent à un risque démontré de contamination, des autres situations et interventions dont la coeliochirurgie et l'accouchement, où le risque ne peut être exclu bien qu'il n'ait pas été objectivé (risque virtuel).

5. Procédures recommandées

5.1. Principes généraux

En fonction de ce qui précède, c'est-à-dire en tenant compte du caractère réel ou virtuel du risque lié au malade ou à l'acte, on est amené à proposer trois types de procédures correspondant à trois types de situations :
- une procédure de précautions maximales (procédure I) chez les malades atteints de M.C.J. et les patients particulièrement à risque subissant des actes à risque démontré. Cette procédure nécessite la destruction (par incinération) du matériel. Si on décide de conserver certains matériels - ce qui n'est envisageable que pour les patients non atteints de M.C.J. - il faut associer, après le nettoyage, 2 procédés d'inactivation des A.T.N.C. : de préférence un procédé d'inactivation chimique, pendant 60 minutes à 20 °C, par la soude 1N ou l'Eau de Javel (r) à 6D chlorométriques fraîchement diluée, puis un procédé d'inactivation physique par autoclave à au moins 134 °C pendant au moins 18 minutes ; à défaut, les deux procédés chimiques successivement pendant 60 minutes chacun ;
- une procédure de précautions renforcées (procédure II) chez des patients particulièrement à risque subissant des actes à risque virtuel ou chez des patients à risque virtuel subissant des actes à risque démontré. Cette procédure nécessite, après la phase de nettoyage, soit une inactivation physique à l'autoclave à au moins 134 °C pendant au moins 18 minutes, soit une inactivation chimique pendant 60 minutes à 20 °C en utilisant la soude 1N ou l'Eau de Javel (r) à 6D chlorométriques fraîchement diluée ;
- la procédure habituelle de stérilisation ou de désinfection chez des patients à risque virtuel subissant des actes à risque virtuel (procédure III). Il faut cependant insister sur l'exigence de qualité dans la mise en oeuvre des diverses étapes de cette procédure en routine et en particulier sur la phase de nettoyage. De même, il ne peut qu'être recommandé de fixer, d'une manière générale, la durée de stérilisation à 18 minutes avec une température de 134 °C pour tout le matériel réutilisable.

5.2. Les patients particulièrement à risque

5.2.1. Les actes non invasifs ou courants.

Si les patients atteints de M.C.J. doivent être accueillis en chambre individuelle pour des raisons psychologiques évidentes, pour l'ensemble des patients particulièrement à risque il n'y a pas de précaution particulière à prendre en plus des précautions dites universelles (circulaire citée en annexe) en ce qui concerne les soins d'hygiène et les soins infirmiers, à l'hôpital comme à domicile.

Le transfert de ces patients doit être précédé d'une information sur le diagnostic, sa suspicion ou les facteurs de risque présentés, à destination des services ou des unités d'accueil.

Les prélèvements biologiques seront effectués, comme il est de règle, avec du matériel à usage unique et la circulation des produits biologiques issus du patient obéit aux règles générales applicables à tous produits biologiques conformément à la circulaire DGS/DH n° 23 du 3 août 1989 relative à la prévention de la transmission du V.I.H. chez les personnels de santé.

Pour les explorations ophtalmologiques, l'utilisation, chez ces patients, de matériel à usage unique (tel que lentilles de contact, coques et aiguilles d'électrorétinogramme et de potentiels évoqués visuels, aiguilles et fraises à corps étranger, capuchons amovibles de tono-mètre...) doit être la règle.

5.2.2. Les actes invasifs.

Le matériel utilisé chez ces patients pour des actes à risque démontré devra être traité selon la procédure I (précautions maximales).

Le matériel utilisé chez ces patients pour des actes à risque virtuel devra être traité selon la procédure II (précautions renforcées).

Ne sont licites chez ces patients que les interventions ou explorations invasives susceptibles d'apporter un bénéfice thérapeutique direct pour le patient et il convient de donner la préférence - à qualité de résultat comparable - aux techniques et aux méthodes qui utilisent du matériel à usage unique ou réutilisable dans le cadre des procédures I ou II.

La règle générale est de ne jamais utiliser de matériel thermosensible pour pratiquer des examens chez ces patients. Dans le cas particulier des endoscopes, en cas de nécessité ou d'utilisation par inadvertance chez des patients atteints de M.C.J. diagnostiquée ou suspectées, l'endoscope devra être détruit. Cependant, en cas d'utilisation chez les autres patients particulièrement à risque, compte tenu de la faible infectiosité des tissus touchés lors d'endoscopie bronchique ou digestive, on peut envisager de conserver l'endoscope et de le soumettre à deux nettoyages successifs avec un détergent alcalin ne contenant pas d'aldéhyde puis à une désinfection suivant les procédures recommandées par les fabricants (1).

(1) Le fait que la plupart des produits préconisés contiennent un aldéhyde explique le double nettoyage préalable. Une circulaire à paraître prochainement édictera des recommandations sur la désinfection des endoscopes.

En chirurgie ophtalmologique, la nature des instruments, dont certains ne tolèrent ni la chaleur ni l'un des procédés chimiques d'inactivation des prions, oblige à nuancer le schéma précédent :
- en cas d'intervention chez un malade atteint de M.C.J. diagnostiquée ou suspectée, le matériel doit obligatoirement être détruit sans exception possible ;
- en cas d'intervention chez les autres patients particulièrement à risque et ceux à risque virtuel, le sort de ces instruments doit être étudié au cas par cas avec le C.L.I.N.

5.2.3. Les déchets d'activités de soins.

Chez ces patients, les déchets d'activité de soins contenant du L.C.R. doivent être obligatoirement incinérés, de même que les fragments de tissus et les pièces anatomiques, dont le placenta. Ces déchets ne peuvent suivre les filières d'élimination habituelles des déchets d'activité de soins à risque infectieux utilisant des procédés de prétraitement qu'à condition qu'elles aboutissent à une usine d'incinération d'ordures ménagères.

Les autres déchets d'activité de soins des patients particulièrement à risque, ainsi que ceux issus des autres patients, suivent les filières habituelles d'élimination.

Les précautions à prendre selon les différentes situations sont récapitulées dans le tableau suivant :

Tableau récapitulatif des précautions à prendre pour prévenir la transmission de la M.C.J.

* Pour la chirurgie ophtalmologique, se reporter page 141.

6. Situations particulières

6.1. Les accidents professionnels

Tout accident professionnel doit être obligatoirement déclaré comme accident de travail selon les modalités en vigueur dans l'établissement et notifié au service de médecine du travail. Les circonstances de l'accident de travail doivent toujours être soigneusement précisées et consignées par écrit.

En cas de coupure ou de piqûre, il est recommandé de laver soigneusement, à l'eau de Javel (r) à 6D fraîchement diluée, pendant 5 à 10 minutes, les zones lésées saines contiguës. Un lavage abondant termine cette opération.

En cas de projections oculaires, un lavage immédiat, abondant et prolongé à l'eau ou au sérum physiologique est effectué et complété par une consultation ophtalmologique de bilan.

Aucun traitement à visée préventive ne peut être recommandé dans l'état actuel des connaissances vis-à-vis du risque spécifique des A.T.N.C. Les personnels susceptibles d'avoir été contaminés accidentellement par des A.T.N.C. devront être suivis par le service de médecin du travail de façon prolongée.

6.2. Au décès d'un patient atteint de M.C.J.

Les pratiques de thanatopraxie sont déconseillées. De même, il est légitime de recommander l'incinération du corps ; cependant le libre choix des familles doit être respecté. Par ailleurs, aucune législation actuelle n'empêche un transport de corps dans les conditions habituelles.

6.3. En anatomopathologie

6.3.1. En salle d'autopsie.

Le risque de transmission de maladies infectieuses, qu'elles soient diagnostiquées ou non, existe lors de toute autopsie. Les recommandations suivantes concernent, par conséquent, toutes les autopsies, quelle que soit la cause du décès. Le risque ne doit en aucun cas faire récuser une autopsie dont l'intérêt scientifique ou médico-légal est établi.

Le cerveau doit être prélevé en dernier afin d'éviter de contaminer par un éventuel A.T.N.C. tous les organes examinés. Pour l'abord du crâne, il est recommandé, afin d'éviter les projections, d'utiliser soit une scie à main soit une scie électrique protégée par un manchon de plastique. L'utilisation de billots de bois doit être proscrite.

Les opérateurs doivent porter :
- des gants métalliques entre deux paires de gants chirurgicaux ou
des gants de protection renforcée à fils métalliques recouverts par
des gants chirurgicaux ;
- un masque antiprojection ou à visière jetable ;
- des lunettes de protection fermées sur le côté ;
- un tablier de protection, par dessus leur tenue habituelle.

A la fin de l'autopsie, tous les instruments sont traités selon la procédure I s'il s'agissait d'un patient particulièrement à risque, selon la procédure III dans les autres cas. Dans tous les cas, le matériel de protection ainsi que les tables et plans de travail sont décontaminés à l'eau de Javel (r) à 6D chlorométriques fraîchement diluée puis nettoyé selon la procédure habituelle (1). Les pièces anatomiques non conservées, les liquides biologiques, le matériel à usage unique et les linges ayant servi au nettoyage, sont évacués vers l'extérieur pour incinération, sous double protection.

(1) Dans ce cas précis, on notera que, pour des raisons évidentes, l'inactivation intervient avant le nettoyage.

Lorsqu'il s'agit de l'autopsie d'un patient particulièrement à risque, les prélèvements fixés, identifiés lisiblement, sont placés dans des récipients fermés dont la surface externe a été décontaminée à l'eau de Javel (r) à 6D chlorométriques fraîchement diluée. Les prélèvements formolés sont manipulés avec précaution car ils restent infectieux. Les prélèvements à congeler sont disposés dans deux sacs plastiques superposés, lisiblement étiquetés et rangés dans une boîte plastique étiquetée, placée dans un compartiment réservé et identifié d'un congélateur à - 80 °C fermé à clé.

6.3.2. Traitement au laboratoire des préparations anatomopathologiques.

6.3.2.1. Lorsqu'il s'agit de prélèvements sur des organes à risques démontré, tels que le S.N.C. ou la dure-mère, issus de patients particulièrement à risque, les opérateurs doivent porter des gants métalliques sur une paire de gants ou des gants de protection renforcée à fils métalliques, des lunettes de protection fermées sur le côté et un tablier protecteur à usage unique.

Le matériel à usage unique est choisi de préférence ; il est jeté dans des 'conteneurs de sécurité' avant d'être incinéré.

Les fractions d'organes non fixées sont congelées dans des congélateurs spéciaux, fermant à clé et étiquetés. Les organes fixés (inclus ou non) ou non fixés et les lames sont considérés comme infectieux et stockés dans des endroits spéciaux, fermant à clé, étiquetés et marqués du signe de danger biologique.

Après fixation, les échantillons à inclure en paraffine, toujours infectieux, peuvent être décontaminés sans altérer la qualité de la lecture en les agitant pendant 1 heure dans l'acide formique normal pur. Ils devront ensuite être lavés pendant 2 heures dans du formol à 4 p. 100, afin de permettre l'inclusion. En l'absence d'inactivité par l'acide formique, les échantillons restent infectieux : ni les techniques histologiques pratiquées, ni le temps n'altèrent notablement leur infectiosité et toutes les manipulations de blocs comme de lames, doivent être effectuées avec des gants ; tous les appareils en contact doivent subir une inactivation chimique et physique suivant la procédure I ainsi que le matériel réutilisable.

L'utilisation de rasoirs jetables est fortement conseillée. Exceptionnellement, en cas d'impossibilité d'utilisation de rasoirs jetables, les rasoirs en acier devront, en plus des procédures habituelles de nettoyage, être décontaminés suivant la procédure I. La stérilisation à la chaleur sèche ('Poupinel') ne peut être préconisée comme procédure d'inactivation des prions.

Les couteaux de verre seront préférés au diamant pour la coupe à l'ultramicrotome et jetés après usage lorsqu'il existe une forte suspicion d'encéphalopathie spongiforme subaiguë à la microscopie optique.

6.3.2.2. Lorsqu'il s'agit de prélèvements sur des organes à risque virtuel, issus de patients particulièrement à risque, les opérateurs devront porter soit une double paire de gants soit des gants de protection renforcée à fils métalliques.

Après fixation, les échantillons devront être décontaminés en les agitant pendant 1 heure dans l'acide formique normal pur. Ils devront ensuite être lavés pendant 2 heures dans le formol à 4 p. 100, avant inclusion. Cette procédure devra être respectée sauf dans le cas où elle rendrait impossible des techniques spéciales. Dans ce cas, l'opérateur devra être formé à une procédure particulièrement soigneuse.

6.3.2.3. Dans tous les autres cas, il faut observer les bonnes pratiques de laboratoire habituelles.

Cas particulier : pour la cytopathologie du L.C.R., des cônes jetables doivent être utilisées et incinérés après usage.

Dans tous les cas, après la préparation des échantillons, le plan de travail est décontaminé avec un linge à usage unique imprégné d'eau de javel (r) à 6D chlorométriques fraîchement diluée ; le plan de travail est ensuite rincé à l'eau puis nettoyé avec un détergent.

Tous déchets d'origine humaine issus de patients particulièrement à risque, qu'ils proviennent ou non du système nerveux central, doivent être incinérés.

7. Diffusion de la circulaire et modalités d'application

Cette circulaire est destinée à l'ensemble des établissements de soins publics et privés, aux organismes effectuant des opérations de stérilisation pour le compte d'un de ces établissements, aux laboratoires d'analyses de biologie médicale et d'anatomopathologie, publics et privés, et aux conseils de l'ordre des médecins, pharmaciens, chirurgiens-dentistes et sage-femmes.

Elle devra être étudiée par le C.L.I.N., l'équipe chargée de l'hygiène hospitalière et le pharmacien de l'établissement. Cette étude doit conduire à réviser ou à établir des protocoles écrits spécifiques à l'établissement, à certains secteurs ou à certaines procédures et qui tiendront compte de particularités locales dans les plus brefs délais.

Par ailleurs, il faut rappeler l'importance de la surveillance épidémiologique de la M.C.J. aussi bien sporadique et familiale que iatrogène. A cet effet, deux systèmes effectuent un recueil de données :
- un réseau de l'I.N.S.E.R.M. qui effectue une étude sur la madalie de Creutzfeldt-Jakob et auquel il serait utile que lui soient signalés tous les cas rencontrés par les neurologues, neuropathologistes, psychiatres ou autres médecins qui suspectent ce diagnostic, le plus précocement possible, en s'adressant à : I.N.S.E.R.M. U.360, hôpital de La Salpêtrière, 75651 Paris Cedex 13, tél. : (1) 42-16-25-51, télécopie : (1) 42-16-25-41 ;
- le Centre national de référence de la maladie de Creutzfeldt-Jakob iatrogène, centre d'expertise national pour les maladies de Creutzfeldt-Jakob dues à l'hormone de croissance extractive mais aussi lié à d'autres facteurs (arrêté du 15 décembre 1993). Il est situé : à l'hôpital de La Salpêtrière, 47, boulevard de l'Hôpital, 75051 Paris Cedex 13, tél. : (1) 42-16-22-24.

Je vous demande de bien vouloir me tenir informé des éventuels problèmes rencontrés dans l'application de cette circulaire.

Référence : circulaire n° 45 du 12 juillet 1994 relative aux précautions à observer en milieu chirurgical et anatomopathologique face aux risques de transmission de la maladie de Creutzfeldt-Jakob.

Textes abrogés : circulaire n° 45 du 12 juillet 1994 relative aux précautions à observer en milieu chirurgical et anatomopathologique face aux risques de transmission de la maladie de Creutzfeldt-Jakob.

ANNEXES

ANNEXE I

Classification de l'O.M.S. (1)

(1) Report of the Who consultation on public health issues related to animal and human spongiform encephalopathies - Geneva 12-14 November 1991 (WHO/CDS/VPH/92.104).

Cette classification a été établie par l'Organisation mondiale de la santé, en 1992, à partir d'études sur les titres d'infectiosité de différents tissus et liquides biologiques du mouton au cours de tremblante clinique, et a été reprise par la Communauté européenne. Chez l'homme, dans l'état actuel des connaissances, les risques sont établis par analogie avec ces modèles animaux. La réalité du risque a été confirmée par certains cas cliniques iatrogènes à la suite de greffes de dure-mère, de cornée.

Catégorie I. - Haute infectiosité : cerveau, moelle épinière (2).

(2) Il paraît prudent d'y adjoindre l'hypophyse et le L.C.R. pourtant classés respectivement en III a et III b par l'O.M.S. de même que les méninges (dure-mère) et l'oeil que la classification de l'OMS ne prend pas en compte.

Catégorie II. - Moyenne infectiosité : rate, amygdale, ganglions lymphatiques, iléon, colon proximal.

Catégorie III :
- a) Faible infectiosité : nerf sciatique, surrénales, colon distal, muqueuse nasale (3)
(3) La publication de Yoichi Tamai et al. (N. Engl. J. Med. 327 ; 9:649) incite à faire figurer le placenta dans l'une ou l'autre de ces catégories.
- b) Très faible infectiosité : liquide céphalo-rachidien, thymus, moelle osseuse, foie, poumon, pancréas.

Catégorie IV. - Infectiosité non détectable : muscles squelettiques, coeur, glande mammaire, colostrum, lait, caillot sanguin, sérum, fèces, rein, thyroïde, glande salivaire, salive, ovaire, utérus, testicule, vésicule séminale.

ANNEXE II

Textes concernant les mesures à prendre pour prévenir la transmission des A.T.N.C.

Transfusion sanguine
Lettres ou notes de l'Agence française du sang des 23 décembre 1992, 10 décembre 1993 et 24 mai 1995.

Greffes de cellules, de tissus et d'organes
Décret n° 94-416 modifiant le décret n° 92-174 du 25 février 1992 relatif à la prévention de la transmission de certaines maladies infectieuses.
Circulaire DGS/DH/94 n° 05 relative aux précautions à prendre dans le domaine des risques de maladies transmissibles liés aux greffes et à l'utilisation humaine d'organes, de tissus, de cellules et de produits d'origine humaine, particulièrement en ce qui concerne les agents transmissibles non conventionnels (A.T.N.C.) responsables d'encéphalopathies subaiguës spongiformes.
Arrêté du 7 octobre 1994 portant suspension de la fabrication, de l'importation, de l'exportation et de la mise sur le marché et ordonnant le retrait des dures-mères d'origine humaine et des produits en contenant.

Médicaments
Arrêté du 3 juillet 1992 portant interdiction d'exécution et de délivrance de préparations magistrales à usage humain à base de tissus d'origine bovine.
Arrêté du 22 juillet 1992 portant interdiction d'exécution et de délivrance de préparations magistrales et de médicaments homéopathiques à usage humain à base de tissus d'origine bovine.

Dispositifs médicaux
Décret n° 95-292 du 16 mars 1995 relatif aux dispositifs médicaux définis à l'article L. 665-3 du code de la santé publique et modifiant ce code.

Biomatériaux
Note d'information DGS/VS2/SQ3/93/26 DH/EM du 25 mars 1993 sur l'utilisation en chirurgie de matériels contenant des produits d'origine bovine ou ovine et son éventualité de contamination humaine provoquée par les agents des E.S.S. animales.

Précautions dites 'universelles'
Circulaire DGS/DH n° 23 du 3 août 1989 relative à la prévention de la transmission du virus de l'immunodéficience humaine chez les personnels de santé.

Destruction des déchets d'activités de soins à risques infectieux

Sur l'incinération :
- loi n° 76-633 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées
pour la protection de l'environnement ;
- arrêtés des 23 août 1989 et 25 janvier 1991 sur les usines
d'incinération d'ordures ménagères.

Sur le prétraitement par procédés de désinfection (il n'a pas été prouvé que ces procédés inactivent les A.T.N.C.) :
- circulaire du 26 juillet 1991 relative à la mise en oeuvre des procédés
de désinfection des déchets des hôpitaux et assimilés.

Direction générale de la santé. Direction des hôpitaux.

Le ministre du travail et des affaires sociales à Messieurs les préfets de région, direction des affaires sanitaires et sociales (pour information) ; Mesdames et messieurs les préfets de département, direction départementale des affaires sanitaires et sociales (pour mise en oeuvre).

Texte non paru au Journal officiel.