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Circulaire n° 90-8 du 28 juin 1990 relative aux modalités d'application de la loi relative aux droits et à la protection des personnes hospitalisées en raison de troubles mentaux et à leurs conditions d'hospitalisation.

Je vous prie de trouver ci-joint la loi précitée, telle que votée définitivement par le Parlement le 19 juin 1990. Elle abroge et remplace les articles L. 326-1 à L. 355 du code de la santé publique.

La publication au Journal officiel de cette loi devrait intervenir entre le 30 juin et le 31 juillet prochains.

Elle est applicable un jour franc à compter de la date de cette publication pour Paris et pour la province un jour franc à compter de la date de réception du Journal officiel à la préfecture.

Il convient donc de prendre toutes dispositions nécessaires pour mettre en oeuvre les nouvelles procédures prévues par ce texte dès sa date d'entrée en vigueur.

Toutefois, certaines dispositions nouvelles nécessitent au préalable la publication de textes complémentaires.

C'est tout particulièrement le cas de :

1° La création des commissions départementales des hospitalisations psychiatriques, visées au nouvel article L. 332-3 du code de la santé publique, qui seront amenées à jouer un rôle important, notamment au regard des hospitalisations sur demande d'un tiers.

Le décret en Conseil d'Etat prévoyant son fonctionnement étant en cours d'élaboration, vous n'avez dans l'immédiat aucune disposition à prendre quant à sa mise en place. Vous recevrez ultérieurement des instructions précises concernant cette commission.

2° Il en est de même pour le règlement intérieur type visé au nouvel article L. 332-1 du code de la santé publique qui fera également l'objet d'un décret en Conseil d'Etat pour chaque catégorie d'établissement ou unité d'hospitalisation accueillant des malades atteints de troubles mentaux.

En revanche, les autres dispositions de la nouvelle loi sont applicables sans délai et vous trouverez ci-après les principales précisions nécessaires à leur mise en oeuvre.

3° S'agissant des hospitalisations d'office :

a) Hospitalisations d'office prononcées après promulgation de la nouvelle loi :
- la nécessité d'appuyer la décision du préfet sur un certificat médical circonstancié (art. L. 342 nouveau), n'émanant pas d'un médecin de l'établissement, ne fait qu'entériner une pratique qui s'est progressivement généralisée ces dernières années et que la jurisprudence a consacrée ;
- l'obligation est faite au préfet :
- de confirmer, s'il y a lieu, dans les 48 heures les mesures provisoires d'hospitalisation prises en cas d'application du nouvel article L. 343 ;
- de prendre un nouvel arrêté pour prolonger, en cas de nécessité, une hospitalisation d'office au-delà d'un mois, puis à l'issue de trois mois, puis tous les six mois, conformément aux dispositions du nouvel article L. 345.

Cette nouvelle procédure doit être strictement respectée et nécessite une vigilance particulière, dès lors que la mainlevée de l'hospitalisation d'office est acquise à l'issue de ces délais, faute de décision préfectorale.

Ainsi les malades hospitalisés sous ce régime bénéficieront de la garantie que leur situation sera en tout état de cause réexaminée périodiquement dans les délais prescrits par la loi.

Il convient toutefois d'éviter qu'un malade, dont l'état serait toujours susceptible de présenter un péril pour lui-même ou pour son entourage, fasse l'objet d'une levée de son hospitalisation en raison d'une absence ou d'un retard de la décision préfectorale de maintien, étant entendu que les directeurs d'établissement et les médecins s'exposeraient à des poursuites pénales pour détention arbitraire s'ils n'effectuaient pas la mainlevée de l'hospitalisation, à défaut de décision préfectorale.

Il appartient donc aux préfets de prévoir avec les directeurs d'établissement concernés des procédures de transmission des documents rapides et fiables et d'organiser à tous les niveaux les permanences nécessaires pour pallier à toute défaillance et permettre de respecter scrupuleusement les délais prescrits par la loi.

Je n'ignore pas le caractère contraignant de ces dispositions pour les diverses administrations et médecins concernés mais le respect des libertés comme la protection des personnes justifie pleinement une organisation très étudiée et étroitement coordonnée entre les différents services concernés.

b) Hospitalisations déjà prononcées sous le régime du placement d'office et toujours en vigueur au jour de la publication de la loi.

La loi n'a pas de caractère rétroactif et les arrêtés préfectoraux pris précédemment restent valables au jour de la promulgation de la nouvelle loi.

Toutefois, on ne saurait admettre que les malades placés d'office antérieurement aux nouvelles dispositions ne bénéficient pas des mêmes garanties que les malades nouvellement admis.

En application de la législation actuelle (art. L. 337), les médecins des établissements susvisés étaient déjà tenus d'établir tous les mois un certificat médical transcrit sur le registre sans que ce certificat fasse l'objet d'une transmission au préfet. Il convient donc que les préfets demandent dès maintenant que ces certificats soient établis et leur soient adressés systématiquement au moins quatre jours avant l'expiration du délai d'un mois comme le prévoit l'article L. 344 nouveau.

Les préfets pourront ainsi revoir chaque situation au regard des délais de renouvellement des arrêtés prévus par la loi et être en mesure de l'appliquer à tout malade dès sa publication.

Dès réception de chaque certificat, les préfets vérifieront l'opportunité de maintenir l'hospitalisation d'office. Dans l'hypothèse d'un maintien, il conviendra alors de retenir la date initiale du placement d'office pour prendre un nouvel arrêté selon que l'hospitalisation doit être prorogée au-delà du premier mois, ou au-delà du 4e mois (1 + 3), ou au-delà du 10e mois (1 + 3 + 6 mois).

Exemples :

On fera l'hypothèse que la nouvelle loi sera publiée au Journal officiel le 3 juillet 1990 et donc applicable à compter du 5 juillet, 0 heure.

1° Un malade a été placé d'office le 24 mai 1990, le préfet a donc reçu le certificat dit de “24 heures” et celui de “quinzaine”, mais aucun autre certificat depuis, puisque conformément à l'actuel article L. 345 le certificat suivant n'est adressé que chaque semestre. Dans notre hypothèse, la date du 24 juin étant antérieure à celle de la publication de la loi, cette dernière fait obligation à l'établissement de transmettre le certificat le 24 juillet 1990, puis le 24 août 1990 (dans l'hypothèse où l'hospitalisation d'office serait prolongée), ce qui permettra au préfet de revoir le cas échéant la situation du malade lors de ces deux échéances.

Cependant, le préfet sera tenu, après réception du certificat du 24 septembre (soit 1 + 3 mois), de prendre un nouvel arrêté renouvelant l'hospitalisation d'office si celle-ci devait être maintenue.

2° Un malade a été placé d'office le 9 juin 1990. Un mois plus tard, soit dans les 3 jours précédant le 9 juillet 1990 (la nouvelle loi étant entrée en application le 5 juillet), le préfet est tenu de prendre un nouvel arrêté dans l'hypothèse où l'hospitalisation d'office devrait être maintenue.

Il reste entendu que dans notre hypothèse, tout placement d'office prononcé avant le 5 juin rentre dans le cadre de l'exemple 1.

S'agissant des hospitalisations d'office de longue durée, les préfets doivent prendre, le cas échéant, un nouvel arrêté à compter du sixième mois suivant le dernier rapport médical de situation mentionné à l'actuel article L. 345.

Exemple :

Un malade a été placé d'office le 2 octobre 1988 et l'est encore à ce jour. En application de la législation actuelle (art. L. 345), il appartenait au préfet de revoir le cas échéant sa situation au 2 avril et au 2 octobre de chaque année.

Le préfet reverra donc la situation du malade dans les trois jours précédant le 2 octobre 1990, au vu d'un nouveau certificat médical circonstancié et prendra, le cas échéant, un nouvel arrêté d'hospitalisation d'office.

Les procédures ci-dessus décrites permettront de faire progressivement bénéficier les personnes placées d'office antérieurement à la publication de la loi, des nouvelles procédures prévues.

Les préfets pourront ainsi réévaluer la pertinence des hospitalisations d'office et notamment celles de longue durée qui dans certains départements restent en proportion importante.

4° S'agissant des hospitalisations sur demande d'un tiers :

Les préfets ne sont pas, en attendant la mise en place des commissions départementales, directement concernés. Les présentes instructions ainsi que le texte de la nouvelle loi devront être communiqués sans délai aux directeurs des établissements concernés.

a) Pour admettre un malade en hospitalisation sur demande d'un tiers, la règle sera à la date de parution de la loi d'exiger la production de deux certificats médicaux circonstanciés concordants en sachant toutefois que le second certificat peut être établi par un psychiatre de l'établissement ou par le médecin de garde ou encore par le médecin d'astreinte pour les urgences psychiatriques (cf. circulaire n° 896 ASD du 15 juin 1979 et circulaires n° 326 du 15 février 1990 et 90-5 du 14 mars 1990) ou encore le médecin du service d'urgence générale.

La procédure d'extrême urgence prévue par l'article L. 333-2 permettant d'admettre une personne au vu d'un seul certificat médical doit rester l'exception, comme l'indique la nouvelle loi. En attendant la mise en place de la commission départementale, il convient que chaque mois les directeurs d'établissement adressent au préfet un rapport précisant les circonstances de chacune des hospitalisations sur demande d'un tiers faite selon la procédure prévue au nouvel article L. 333-2. Ces documents pourront ainsi être communiqués aux commissions départementales ultérieurement.

b) En ce qui concerne les prolongations mensuelles d'hospitalisation sur demande d'un tiers, les délais doivent être strictement respectés. Le principe est que les personnes déjà hospitalisées sous le régime du placement volontaire au jour de publication de la loi doivent pouvoir bénéficier des mêmes dispositions : le point de départ du délai pour calculer le renouvellement est la date de l'hospitalisation. Si cette disposition oblige les directeurs d'établissement à prendre une nouvelle décision, ils devraient pouvoir le faire sans difficulté à partir des certificats déjà établis chaque mois pour chaque malade et transcrits sur le registre. Les médecins avanceront de quelques jours la date des examens systématiques afin de communiquer les certificats en temps utile au directeur. Chaque établissement devra s'organiser en conséquence.

Je serai bien sûr amené à donner ultérieurement de nouvelles instructions notamment au moment de la parution du décret relatif à la commission et du décret relatif au règlement intérieur. Je vous demande en attenant de me faire connaître dès à présent sous le double timbre ministère de l'intérieur, ministère de la solidarité, de la santé et de la protection sociale, les difficultés d'interprétation que vous pourriez rencontrer.

J'appelle votre attention sur le fait qu'une information et une formation des personnels tant administratifs que soignants concernés par ces nouvelles dispositions devraient être prévues. En effet, l'application des nouvelles mesures demande un effort tout particulier de sensibilisation des personnels, la loi actuelle ayant parfois été perdue de vue ces dernières années comme j'ai pu le constater. La nouvelle loi ne prendre son plein effet qu'à cette condition, et ces modalités éviteront ainsi des erreurs regrettables susceptibles de mettre en cause la responsabilité des administrations et des personnels soignants.

Je n'ignore pas que les nouvelles dispositions de la loi entraîneront un surcroît de travail pour les services préfectoraux, les D.D.A.S.S., et les établissements, mais l'intérêt du malade et le respect de ses droits justifient pleinement les nouvelles garanties qui lui sont accordées.

MINISTERE DE L'INTERIEUR MINISTERE DE LA SOLIDARITE, DE LA SANTE ET DE LA PROTECTION SOCIALE, Direction générale de la santé, Bureau 3 C.

Le ministre de l'intérieur, le ministre de la solidarité de la santé et de la protection sociale à Madame et Messieurs les préfets ; Monsieur le préfet de police.

Non parue au Journal officiel.

1962.