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Conseil d'Etat, 19 avril 2000, M. X (obligation d'information - risque exceptionnel - invalidité partielle)

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 janvier et 21 mai 1996 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. X, demeurant (...) ; M. X demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 21 novembre 1995 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a, d'une part, rejeté sa demande tendant à l'annulation du jugement du 24 février 1993 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier régional et universitaire de Grenoble à lui verser la somme de 1 852 000 F en réparation du préjudice résultant pour lui de l'intervention chirurgicale qu'il a subie dans ledit centre hospitalier le 24 juin 1987, d'autre part, mis à sa charge les frais d'expertise ;
2°) de condamner le centre hospitalier régional et universitaire de Grenoble à lui verser une somme de 30 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Fabre-Aubrespy, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. X et de Me Le Prado, avocat du centre hospitalier régional et universitaire de Grenoble,
- les conclusions de M. Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que lorsque l'acte médical envisagé, même accompli conformément aux règles de l'art, comporte des risques connus de décès ou d'invalidité, le patient doit en être informé dans des conditions qui permettent de recueillir son consentement éclairé ; que, si cette information n'est pas requise en cas d'urgence, d'impossibilité ou de refus du patient d'être informé, la seule circonstance que les risques ne se réalisent qu'exceptionnellement ne dispense pas les praticiens de leur obligation ;

Considérant que l'opération subie par M. X le 24 juin 1987 au centre hospitalier régional et universitaire de Grenoble en vue de mettre fin à une hernie discale a entraîné une invalidité partielle de l'intéressé ; qu'en se fondant sur le caractère exceptionnel d'un tel accident pour juger qu'il n'y avait pas lieu d'informer la famille de M. X, alors mineur, des risques de l'intervention, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit justifiant l'annulation de son arrêt ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de renvoyer l'affaire devant la cour administrative d'appel de Marseille ;

Sur l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 et de condamner le centre hospitalier régional et universitaire de Grenoble à verser à M. X une somme de 15 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon en date du 21 novembre 1995 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la cour administrative d'appel de Marseille.
Article 3 : Le centre hospitalier régional et universitaire de Grenoble versera à M. X une somme de 15 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. X, au centre hospitalier régional et universitaire de Grenoble, au centre hospitalier de Chambéry, au président de la cour administrative d'appel de Marseille et au ministre de l'emploi et de la solidarité.