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Conseil d'Etat, 24 janvier 2020, n° 437328 (Transfert d'embryons post-mortem, Référé-liberté, Absence de lien avec le pays d'exportation, Absence de circonstance particulière)

Un couple marié a procédé, dans le cadre d’une assistance médicale à la procréation (AMP), à un dépôt de gamètes dans un centre d’étude et de conservation des œufs et du sperme (CECOS). En 2018, cinq embryons issus de ces gamètes ont été conservés et une fécondation in vitro a permis la naissance d’un enfant. Toutefois, à la suite du décès de son mari, l’épouse de ce dernier a demandé que les embryons conservés au CECOS soient déplacés en Espagne, et ce, afin d’y débuter une grossesse.

L’établissement de santé duquel dépend le CECOS ayant refusé d’accéder à sa demande, elle a saisi, dans le cadre d’un référé-liberté, le tribunal administratif de Rennes qui a refusé de faire droit à sa requête.

Suite à cette décision, elle a interjeté appel devant le Conseil d’Etat. Dans sa décision du 24 février 2020, le Conseil d’Etat rappelle que conformément à l’article L. 2141-2 du code de la santé publique (CSP), le décès d’un des membres du couple fait obstacle à l’insémination ou au transfert des embryons. Il considère que cette interdiction ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale figurant à l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des liberté fondamentales (CEDH) pour l’application de laquelle, les Etats parties disposent d’une marge d’appréciation. Il en va de même concernant l’article L. 2141-9 du CSP qui interdit que des embryons conservés en France puissent être déplacés à l’étranger à des fins prohibées sur le territoire national, et ce, afin de faire obstacle à un éventuel contournement de l’article L. 2141-2 du CSP. En outre, il écarte l’argument relatif à une violation du droit de propriété rappelant l’absence de droit patrimonial sur le corps humain, ses éléments et ses produits.

Enfin, il considère qu’il n’y a pas, en l’espèce, d’atteinte excessive portée aux droits et libertés protégés par la CEDH résultant de la mise en œuvre de la loi française, car la requérante n’entretient aucun lien avec l’Espagne et que sa demande était exclusivement fondée sur la possibilité offerte par la loi espagnole de réaliser un transfert d’embryons post-mortem. Il rejette donc la requête.