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Cour de Cassation, 15 juin 2005 (déchets médicaux - tri défectueux - responsabilité pénale - bonne foi)

[...] Attendu que, pour relaxer les dirigeants de ces sociétés du chef d'importations sans déclaration de marchandises prohibées, l'arrêt relève que l'analyse des processus mis en oeuvre par les sociétés X... et AVG pour collecter et trier les verres usagés, dont le sérieux est attesté par la délivrance de certificats ISO 9002, démontre que la présence de déchets médicaux, évalués par l'expert à 1,49% de la quantité prélevée, ne peut être qu'accidentelle ; que les juges ajoutent que les différents témoins entendus lors de l'enquête ont d'ailleurs affirmé qu'ils n'avaient jamais constaté la présence de déchets hospitaliers parmi les verres ménagers et que la perquisition effectuée dans les locaux des sociétés n'a pas permis de dévoiler un mélange illégal de déchets hospitaliers ; qu'ils en déduisent que les prévenus ont rapporté la preuve de leur bonne foi [...]

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quinze juin deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire SOULARD, les observations de la société civile professionnelle BORE et SALVE de BRUNETON, de la société civile professionnelle BARADUC et DUHAMEL, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général COMMARET ;

Statuant sur le pourvoi formé par :
- L'ADMINISTRATION DES DOUANES, partie poursuivante,
contre l'arrêt de la cour d'appel de COLMAR, chambre correctionnelle, en date du 9 juin 2004, qui l'a déboutée de ses demandes après relaxe de Werner X... et Nikolaus Y... du chef d'importations sans déclaration de marchandises prohibées ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 38, 336, 414, 423, 424, 425, 426, 427, 437, 438, 432 bis, 369 du Code des douanes, 23-1, 24, alinéa 1, 24-9 , 25 de la loi du 15 juillet 1975, devenus les articles L. 541-40, L. 541-46, et L. 541-48 du Code de l'environnement, 2 et suivants du décret du 23 mars 1990, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a relaxé les prévenus du chef du délit d'importation sans autorisation de marchandises prohibées ;
"aux motifs que, s'il est exact que les procès-verbaux des Douanes rédigés par deux agents des Douanes ou de toute autre administration fait foi jusqu'à inscription de faux, et que ces actes n'ont fait l'objet d'aucune inscription de faux, la Cour estime qu'une simple constatation visuelle effectuée par les agents des Douanes n'est pas suffisante à rapporter la preuve de la présence de marchandises prohibées, à défaut d'une analyse biologique ; que les prévenus rapportent la preuve de leur bonne foi dans la mesure où un processus de tri et de contrôle rigoureux a été mis en place ; que l'Administration ne répond pas à la motivation des premiers juges selon laquelle la preuve n'est pas rapportée par le parquet de la notification à la commission et à l'Etat allemand des dispositions spécifiques de protection du territoire français, conformément à la procédure prévue à l'article 18 de la directive n 75-442 CEE pour le contrôle des transferts de déchets de l'annexe II ;
"1 ) alors qu'aux termes de l'article 2 du décret du 23 mars 1990 auquel renvoie l'article 38-4 du Code des douanes, est prohibée l'importation sans autorisation des déchets relevant de l'annexe I dudit décret ; que cette annexe vise les déchets de soins médicaux issus d'hôpitaux ou d'établissement de soin, ainsi que les déchets médicamenteux ; qu'en jugeant que les déchets incriminés n'étaient pas prohibés, au motif qu'ils n'avaient pas fait l'objet d'une analyse biologique et qu'ils n'étaient présents qu'en petite quantité, la cour d'appel a ajouté aux textes susvisés deux conditions qu'ils ne prévoyaient pas, et les a ainsi violés par refus d'application ;
"2 ) alors qu'aucun texte communautaire n'impose aux Etats membres de notifier, à peine de nullité, à la commission et aux autres Etats membres les textes pris pour l'application des directives en matière de transfert de déchets ; qu'en jugeant que le décret du 23 mars 1990 était sans valeur, faute d'une telle notification, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
"3 ) alors que la bonne foi est exclue lorsque le prévenu s'est volontairement abstenu de solliciter l'autorisation préalable requise en vue du transport de déchets hospitaliers ; qu'en se bornant à affirmer que les prévenus avaient pu ignorer le mélange des déchets à raison de l'infime quantité de déchets hospitaliers, la cour d'appel, qui ne fait état d'aucune circonstance étrangère aux prévenus, de nature à les empêcher de satisfaire à leurs obligations légales, a, par là même, entaché d'un défaut de base légale au regard des textes susvisés" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que, lors d'un contrôle effectué sur un ensemble routier transportant des verres de bouteilles brisés, les agents des douanes ont constaté la présence de flacons de médicaments et de gants en latex usagés, de seringues pour perfusions et d'autres déchets hospitaliers ; que l'enquête a fait apparaître que ce chargement appartenait à la société X..., qui l'avait fait collecter par la société AVG, dans des containers communaux situés en Allemagne ;

Attendu que, pour relaxer les dirigeants de ces sociétés du chef d'importations sans déclaration de marchandises prohibées, l'arrêt relève que l'analyse des processus mis en oeuvre par les sociétés X... et AVG pour collecter et trier les verres usagés, dont le sérieux est attesté par la délivrance de certificats ISO 9002, démontre que la présence de déchets médicaux, évalués par l'expert à 1,49% de la quantité prélevée, ne peut être qu'accidentelle ; que les juges ajoutent que les différents témoins entendus lors de l'enquête ont d'ailleurs affirmé qu'ils n'avaient jamais constaté la présence de déchets hospitaliers parmi les verres ménagers et que la perquisition effectuée dans les locaux des sociétés n'a pas permis de dévoiler un mélange illégal de déchets hospitaliers ; qu'ils en déduisent que les prévenus ont rapporté la preuve de leur bonne foi:

Attendu qu'en l'état de ces seules énonciations, relevant de l'appréciation souveraine des juges du fond, la cour d'appel a justifié sa décision ;

Qu'il s'ensuit que le moyen ne saurait être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;