Revenir aux résultats de recherche

Cour de cassation, 2e civ., 10 juillet 2008, n° 07-17424 (ONIAM - préjudice économique - allocation adultes handicapés)

En l’espèce, l’ONIAM a proposé à un patient contaminé par le VIH qui demandait l’indemnisation de son préjudice économique une offre d’indemnisation prenant en compte le montant de l’allocation aux adultes handicapés versée par l’Etat au patient. Selon l’ONIAM, l’offre qu’il est tenu de présenter à la victime d’une contamination par le VIH causée par une transfusion de produits sanguins ou une injection de produits dérivés du sang doit tenir compte des prestations de toute nature reçues ou à recevoir d’autres débiteurs du chef du même préjudice. Or, la Cour de cassation rejette le pourvoi formé par l’ONIAM en considérant que servie en exécution d'une obligation nationale en vue d'assurer aux bénéficiaires la garantie d'un minimum de ressources, l'allocation aux adultes handicapés dont l'attribution est subsidiaire par rapport à d'autres avantages de vieillesse ou d'invalidité ou d'accident du travail, perçus au titre d'un régime de sécurité sociale et qui est subordonnée à un plafond de ressources de l'intéressé constitue essentiellement une prestation d'assistance dépourvue de caractère indemnitaire, dont la charge incombe à l'Etat, et qui n'ouvre pas droit à un recours contre la personne tenue à réparation ou à son assureur.

Cour de cassation

2e chambre civile

Audience publique du jeudi 10 juillet 2008

N° de pourvoi: 07-17424

Rejet

Publié au bulletin

M. Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président), président


SCP Didier et Pinet, SCP Roger et Sevaux, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 31 mai 2007), que M. X..., contaminé par le virus d'immunodéficience humaine (VIH), a été indemnisé le 3 juin 1992 par le Fonds d'indemnisation des transfusés et hémophiles contaminés par le VIH (le Fonds), du préjudice spécifique de contamination qu'il avait subi ; que le 14 avril 2006 M. X... a demandé à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (Oniam), substitué au Fonds par l'article 119 de la loi du 9 août 2004, l'indemnisation de son préjudice économique ; que M. X..., refusant l'offre de l'Oniam, a saisi la cour d'appel de Paris ;

Attendu que l'Oniam fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré insuffisante l'offre d'indemnisation qu'il avait formulée et d'avoir fixé l'indemnisation du préjudice économique de M. X... à une certaine somme, alors, selon le moyen :

1°/ que l'offre que l'Oniam est tenu de présenter à la victime d'une contamination par le virus d'immunodéficience humaine causée par une transfusion de produits sanguins ou une injection de produits dérivés du sang tient compte non seulement des prestations énumérées à l'article 29 de la loi du 25 juillet 1985, mais aussi des indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d'autres débiteurs du chef du même préjudice ; qu'en conséquence, l'allocation aux adultes handicapés en ce que son versement résulte de la contamination, et qu'elle vise à reconstituer les ressources du bénéficiaire, présente un caractère économique directement lié au préjudice souffert par la victime ; que, dès lors, en considérant que lesdites sommes, puisqu'elles constituaient des prestations d'assistance dont la charge incombe à la collectivité et ne donnent pas lieu à recours subrogatoire, notamment en application de l'article 29 de la loi du 5 juillet 1985, n'étaient pas à déduire du préjudice économique subi par M. X..., la cour d'appel a violé l'article L. 3122-5 du code de la santé publique ;

2°/ que l'offre que l'Oniam est tenu de présenter à la victime d'une contamination par le virus d'immunodéficience humaine causée par une transfusion de produits sanguins ou une injection de produits dérivés du sang tient compte des prestations énumérées à l'article 29 de la loi du 25 juillet 1985, parmi lesquelles "les prestations versées par les organismes, établissements et services gérant un régime obligatoire de sécurité sociale" ; que tel est donc le cas de l'allocation aux adultes handicapés, servie comme une prestation familiale et versée par les caisses d'allocations familiales ; qu'en considérant cependant que l'allocation aux adultes handicapés perçue par M. X..., puisqu'elle constituait une prestation d'assistance dont la charge incombe à la collectivité et ne donne pas lieu à recours subrogatoire, notamment en application de l'article 29 de la loi du 5 juillet 1985, n'était pas à déduire du préjudice économique subi par M. X..., la cour d'appel a violé l'article L. 3122-5 du code de la santé publique ;

Mais attendu que, servie en exécution d'une obligation nationale en vue d'assurer aux bénéficiaires la garantie d'un minimum de ressources, l'allocation aux adultes handicapés dont l'attribution est subsidiaire par rapport à d'autres avantages de vieillesse ou d'invalidité ou d'accident du travail, perçus au titre d'un régime de sécurité sociale et qui est subordonnée à un plafond de ressources de l'intéressé, variant selon que le bénéficiaire est marié ou vit maritalement ou est lié par un pacte civil de solidarité et a une ou plusieurs personnes à charge, constitue essentiellement une prestation d'assistance dépourvue de caractère indemnitaire, dont la charge incombe à l'Etat, et qui n'ouvre pas droit à un recours contre la personne tenue à réparation ou à son assureur en application de l'article 29 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 ;

Que c'est donc par une exacte application de l'article L. 3122-5 du code de la santé publique que la cour d'appel, abstraction faite du motif justement critiqué par la première branche du moyen, mais qui est surabondant, a décidé que l'allocation aux adultes handicapés perçue par M. X... ne devait pas être déduite de son préjudice économique ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux ; le condamne à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix juillet deux mille huit.