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Cour de Cassation, Soc. 24 avr., n°10-20.473 (Infirmiers - Décompte des congés payés - Jours de repos aménagé - Jours de réduction du temps de travail (JRTT) - Égalité de traitement - Secteur privé)

Cour de cassation
chambre sociale

Audience publique du mercredi 24 avril 2013

N° de pourvoi: 10-20473

Publié au bulletin

Rejet

M. Bailly (conseiller doyen faisant fonction de président), président
SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat(s)

 

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

 

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 11 mai 2010) que M. X. a été engagé le 18 octobre 1982 en qualité d'infirmier par le Centre hospitalier Y., qui est soumis à la convention collective nationale de l'hospitalisation privée à but non lucratif du 31 octobre 1951, dite de la FEHAP ; que par note de service du 25 janvier 1993, l'employeur a réduit à 35 heures la durée hebdomadaire de travail des personnels du service infirmier de nuit, par diminution de la durée quotidienne de travail de 9 heures 45 à 9 heures 30, et attribution de jours de repos s'ajoutant aux congés payés et jours fériés, et compensant la durée des nuits de travail pour atteindre une moyenne de 35 heures hebdomadaires de travail ; qu'un accord d'entreprise du 18 janvier 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail (ARTT), excluant de son champ d'application les personnels affectés aux services de nuit, a prévu, dans la majorité des situations, que la durée hebdomadaire de travail serait réduite à 37 heures, avec 12 jours de réduction du temps de travail par an : qu'une note de service n° 22.2000 du 21 septembre 2000, relative aux modalités du passage effectif aux 35 heures a mentionné notamment, pour les roulements, la nécessaire planification annuelle prévisionnelle des jours de réduction du temps de travail ; que l'accord de branche n° 2002-01 du 17 avril 2002 (branche sanitaire, sociale et médico-sociale à but non lucratif) visant à mettre en place le travail de nuit, a été agréé par arrêté du 23 juin 2003 et étendu par arrêté du 3 février 2004 ; qu'il prévoit notamment, à compter du 1er janvier 2004, des contreparties de la sujétion de travail de nuit sous forme d'octroi d'un certain nombre de jours de repos par an ; qu'une note de service n° 09-2005 du 2 juin 2005 relative au temps de travail des personnels affectés au service infirmier de nuit, remplaçant celle de 1993, a fixé à 9 heures 36 le temps de travail quotidien pour les personnels soignants, selon l'horaire de 20 heures 39 à 6 heures 15, et à 35 heures en moyenne sur un cycle de 8 semaines la durée hebdomadaire de travail de ces personnels ; que le même texte a prévu en outre que, pour tenir compte de la fatigue liée aux 9 heures 36 de travail de nuit, les infirmiers de nuit disposeraient de "jours de repos aménagé" (JRA) au sein de la semaine de travail afin de ne pas dépasser les 35 heures ; que critiquant le fait que désormais l'employeur déduisait de ses congés payés annuels les JRA qui y étaient accolés, alors que dans la même situation les JRTT des infirmiers de jour n'étaient pas décomptés comme congés annuels, le salarié, infirmier de nuit soutenu par les syndicats C.G.T. et SUD, a saisi la juridiction prud'homale le 15 juin 2007 pour contester les modalités de décompte des congés payés et des jours fériés ;
 

Sur le moyen unique, en ce qu'il est dirigé contre les chefs de l'arrêt ayant débouté les syndicats SUD et CGT de leurs demandes de dommages-intérêts pour déloyauté de l'employeur :

Attendu que le salarié ne justifiant ni d'un intérêt personnel ni d'une qualité à agir à la place des syndicats, qui avaient présenté des demandes distinctes des siennes, le moyen est irrecevable ;
 

Sur le moyen unique en ce qu'il est dirigé contre des chefs de l'arrêt concernant les propres demandes du salarié :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de juger qu'il n'existe pas d'inégalité de traitement entre les infirmiers de jour et les infirmiers de nuit au regard du décompte des jours de congés payés, et de le débouter en conséquence de ses demandes de rappel de salaire à ce titre ainsi que de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et congés, alors, selon le moyen :

1°/ que si l'employeur peut accorder des avantages particuliers à certains salariés, c'est à la condition que tous les salariés de l'entreprise placés dans une situation identique au regard de l'avantage octroyé puissent en bénéficier ; qu'en l'espèce, la cour d'appel avait constaté que les infirmiers de nuit bénéficiaient de jours de repos aménagés destinés à répartir les heures de travail à l'intérieur d'un module de 28 semaines pour atteindre une moyenne de 35 heures hebdomadaires, tandis que les infirmiers de jour bénéficiaient d'un jour de réduction du temps de travail à la quatorzaine, soit 24 jours annuels, destinés à compenser les heures de travail accomplies au-delà de la durée légale dans un cycle de 10 semaines ; que les premiers se voyaient décompter en jours de congés payés les jours de repos aménagés, tandis que les jours de réduction du temps de travail des seconds s'ajoutaient à leurs jours de congés payés ; qu'il résultait de telles constatations qu'au regard de l'avantage accordé - l'octroi de jours de congés payés -, les deux catégories de salariés - infirmiers de jour ou infirmiers de nuit - étaient dans une situation identique, dès lors qu'il s'agissait pour eux de définir des règles de décompte des jours destinés à compenser les heures de travail effectuées au-delà de la durée légale avec leur jours de congés payés ; qu'en estimant pourtant que l'adoption de modalités distinctes de calcul des congés payés pour les infirmiers de jours et ceux de nuit ne procédait pas d'une différence de traitement, au motif erroné, au regard de l'avantage octroyé, que les jours de repos aménagé n'avaient pas le même objet que les jours de réduction du temps de travail, la cour d'appel a violé la règle «à travail égal, salaire égal» énoncée par les articles L. 2261-22 II 4 et L. 2271-1 8° du code du travail et ensemble l'article 09.02.01 de la convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951, l'article 5 de l'accord de branche visant à mettre en place le travail de nuit et l'article 1.1 de l'accord d'entreprise relatif à l'aménagement du temps de travail au centre hospitalier Y. ;

2°/ Qu'aux termes de l'article L. 3141-5 du code du travail, sont considérées comme périodes de travail effectif pour la détermination de la durée du congé payé les jours de repos acquis au titre de la réduction du temps de travail ; qu'en considérant que les jours de repos aménagés programmés ne devaient pas être considérés comme périodes de travail effectif, tout en ayant relevé que les jours de repos aménagés étaient destinés à répartir les heures de travail à l'intérieur d'un module de 28 semaines pour atteindre une moyenne de 35 heures hebdomadaires, ce dont il résultait qu'il s'agissait bien de jours de réduction du temps de travail devant être considérés comme du temps de travail effectif, la cour d'appel a violé ensemble l'article L. 3141-5 du code du travail, l'article 5 de l'accord de branche visant à mettre en place le travail de nuit et l'article 1.1 de l'accord d'entreprise relatif à l'aménagement du temps de travail au centre hospitalier Y. ;

Mais attendu qu'ayant relevé que les jours de repos aménagé (JRA) et les jours de réduction du temps de travail (JRTT) n'avaient ni le même objet, ni la même nature, ni la même finalité ni le même régime, les premiers ne correspondant pas à du temps de travail effectif mais visant à répartir des heures de travail au sein d'un cycle de huit semaines, alors que les seconds constituaient la contrepartie d'un travail supérieur à 35 heures hebdomadaires, en sorte que les infirmiers de nuit et les infirmiers de jour ne se trouvant pas dans une situation identique au regard du mode de décompte des congés payés, la règle "à travail égal, salaire égal" invoquée n'était pas opérante, la cour d'appel n'encourt pas les griefs du moyen ;

PAR CES MOTIFS :

Déclare le pourvoi irrecevable en ce qu'il est dirigé contre les chefs de l'arrêt déboutant les syndicats SUD et CGT de leurs demandes de dommages-intérêts pour déloyauté de l'employeur ;

LE REJETTE pour le surplus.

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes des parties ;