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Conseil d’Etat, 11 décembre 2009, n°323483 (Hospitalisation sans consentement – Hospitalisation à la demande d’un tiers – Troubles mentaux – Tiers demandeur – Qualité)

En l’espèce, un centre hospitalier a procédé le 18 octobre 2002 à l’hospitalisation sans consentement d’un patient à la demande d’un infirmier. Cette décision a été portée à la connaissance de l’intéressé qui a par la suite intenté une action en vue de faire annuler cette décision. Le Conseil d’Etat a considéré par cet arrêt qu’il résulte des dispositions de l’article L. 3212-1 du Code de la santé publique que l’hospitalisation sans consentement d’une personne atteinte de troubles mentaux ne peut être décidée sur demande d’un tiers que si celui-ci, à défaut de pouvoir faire état d’un lien de parenté avec le malade, est en mesure de justifier de l’existence des relations antérieures à la demande, lui donnant qualité pour agir dans l’intérêt de celui-ci. Le Conseil d’Etat considère ainsi que la cour administrative d’appel n’a pas commis d’erreur de droit en considérant, qu’après avoir relevé que l’auteur de la demande indiquait seulement sa qualité de cadre infirmier au centre hospitalier, que sa demande ne satisfaisait pas aux exigences posées par les dispositions de l’article L. 3212-1 du Code de la santé publique.

Conseil d'État

N° 323483
Mentionné dans les tables du recueil Lebon
1ère et 6ème sous-sections réunies
M. Daël, président
M. Franck Le Morvan, rapporteur
LE PRADO, avocat

lecture du vendredi 11 décembre 2009

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 décembre 2008 et 23 mars 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER MONTPERRIN, dont le siège est 109 avenue du Petit Barthélémy à Aix-en-Provence (13617 cedex 01), représenté par son directeur ; le centre hospitalier demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 20 octobre 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Marseille du 16 mai 2007 annulant la décision de son directeur du 18 octobre 2002 portant placement en hospitalisation à la demande d'un tiers de M. Philippe A ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Franck Le Morvan, chargé des fonctions de Maître des requêtes,

- les observations de Me Le Prado, avocat du CENTRE HOSPITALIER MONTPERRIN,

- les conclusions de Mlle Anne Courrèges, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Le Prado, avocat du CENTRE HOSPITALIER MONTPERRIN ;

Sur le moyen tiré de la tardiveté de la demande de première instance :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée ; qu'aux termes de l'article R. 421-5 du même code, Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ; que cette condition ne peut être regardée comme remplie que si la notification s'accompagne de la remise à l'intéressé d'un document écrit comportant la mention des délais et voies de recours ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, si la décision du 18 octobre 2002 par laquelle le directeur du CENTRE HOSPITALIER MONTPERRIN a procédé, à la demande d'un tiers, à l'hospitalisation de M. A dans cet établissement a été portée à la connaissance de l'intéressé le 23 du même mois, cette information lui a alors été communiquée par la seule présentation à sa signature d'un document comportant la date et la nature de la décision ainsi que les délais et voies de recours ; que le centre hospitalier n'a pas contesté, devant les juges du fond, l'affirmation de M. A suivant laquelle il n'a eu copie de ce document que lors d'une notification qui ne lui a été délivrée que le 11 octobre 2006 ; qu'ainsi, la cour administrative d'appel de Marseille n'a pas dénaturé les pièces du dossier ni commis d'erreur de droit en jugeant que le recours pour excès de pouvoir présenté le 28 novembre 2006 par M. A à l'encontre de cette décision n'était pas tardif ;

Sur le moyen relatif à la légalité de la décision litigieuse :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 3212-1 du code de la santé publique : Une personne atteinte de troubles mentaux ne peut être hospitalisée sans son consentement sur demande d'un tiers que si : / 1° Ses troubles rendent impossible son consentement ; / 2° Son état impose des soins immédiats assortis d'une surveillance constante en milieu hospitalier./ La demande d'admission est présentée soit par un membre de la famille du malade, soit par une personne susceptible d'agir dans l'intérêt de celui-ci, à l'exclusion des personnels soignants dès lors qu'ils exercent dans l'établissement d'accueil. / Cette demande (...) comporte les nom, prénoms, profession, âge et domicile tant de la personne qui demande l'hospitalisation que de celle dont l'hospitalisation est demandée et l'indication de la nature des relations qui existent entre elles ainsi que, s'il y a lieu, de leur degré de parenté (...) ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que l'hospitalisation, sans son consentement, d'une personne atteinte de troubles mentaux ne peut être décidée sur demande d'un tiers que si celui-ci, à défaut de pouvoir faire état d'un lien de parenté avec le malade, est en mesure de justifier de l'existence de relations antérieures à la demande, lui donnant qualité pour agir dans l'intérêt de celui-ci ; que, dès lors, la cour n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant, après avoir relevé que l'auteur de la demande indiquait seulement sa qualité de cadre infirmier au centre hospitalier du pays d'Aix, que cette demande ne satisfaisait pas aux exigences posées par les dispositions citées ci-dessus du code de la santé publique ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le CENTRE HOSPITALIER MONTPERRIN n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi du CENTRE HOSPITALIER MONTPERRIN est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée au CENTRE HOSPITALIER MONTPERRIN et à M. Philippe A.