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Conseil d’Etat, 11 mars 2009, n°282561 (Caisse des dépôts et consignations – Versement d’une pension de retraite)

Par cet arrêt, la Haute juridiction administrative considère que la liquidation et le paiement des arrérages des pensions de retraite des agents de la fonction publique hospitalière relèvent des attributions de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, dont la gestion est assurée par la Caisse des dépôts et consignations. Ainsi, en enjoignant un centre hospitalier de procéder au versement de la pension de retraite d’un agent, le vice-président du tribunal administratif de Lille a entaché son ordonnance d'une erreur de droit. Le juge administratif ne peut ainsi enjoindre à un centre hospitalier le versement d’une pension de retraite.

Conseil d'État

N° 282561
Inédit au recueil Lebon
9ème sous-section jugeant seule
M. Jouguelet, président
M. Eric Combes, rapporteur
SCP PIWNICA, MOLINIE ; LUC-THALER, avocats

lecture du mercredi 11 mars 2009

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 juillet et 18 novembre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER D'ARMENTIERES, dont le siège est BP 189 à Armentières Cedex (59421) ; le CENTRE HOSPITALIER D'ARMENTIERES demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 9 mai 2005 par laquelle le vice-président du tribunal administratif de Lille, faisant partiellement droit à la demande de M. Malik A, a, d'une part, annulé la décision du 7 mars 2003 du directeur de l'établissement refusant de prononcer la mise à la retraite de l'intéressé à compter du 1er septembre 2003, d'autre part, enjoint audit établissement de prononcer, dans le délai d'un mois suivant la notification de son ordonnance, la mise à la retraite de l'intéressé et d'en assurer le versement à compter de cette date ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter les demandes de M. A ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Eric Combes, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat du CENTRE HOSPITALIER D'ARMENTIERES et de Me Luc-Thaler, avocat de M. A,

- les conclusions de M. Pierre Collin, Commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité de l'ordonnance :

Considérant d'une part qu'il ressort des pièces du dossier que le tribunal administratif de Lille a procédé à la communication des mémoires déposés par les parties au litige avant de rendre l'ordonnance attaquée ; qu'ainsi les exigences de la procédure contradictoire ont été respectées ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article R. 742-6 du code de justice administrative : Les ordonnances ne sont pas prononcées en audience publique ; qu'il résulte de ces dispositions que le vice-président du tribunal administratif de Lille n'avait aucune obligation d'organiser une séance publique avant de prendre sa décision ;

Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative alors en vigueur : Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, le vice-président du tribunal administratif de Paris et les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours peuvent, par ordonnance : ... 6° Statuer sur les requêtes relevant d'une série, qui présentent à juger en droit et en fait, pour la juridiction saisie, des questions identiques à celles qu'elle a déjà tranchées ensemble par une même décision passée en force de chose jugée ; que la demande de M. A présentait à juger des questions de droit et de fait identiques à celles que le tribunal administratif de Lille avait déjà tranchées dans son jugement du 9 novembre 2004 ; qu'ainsi, en se fondant sur ce jugement passé en force de chose jugée, le vice-président du tribunal administratif de Lille a fait une exacte application de ces dispositions ; que la circonstance que son ordonnance n'est pas susceptible d'appel est sans incidence sur sa régularité ;

Sur l'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 de ce même code : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ;

Considérant, en premier lieu, que M. A a expressément sollicité, dans son mémoire introductif d'instance enregistré le 7 mai 2003, qu'il soit enjoint à son employeur, en vertu de l'article L. 911-1 précité, de lui notifier sa mise à la retraite avec jouissance immédiate au 1er septembre 2003 dans un délai de deux mois à compter de la décision à intervenir ; qu'en adressant une telle injonction au CENTRE HOSPITALIER D'ARMENTIERES, le vice-président du tribunal administratif n'a pas statué au-delà de ce qui lui était demandé ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 1er du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales : Les dispositions du présent décret s'appliquent aux fonctionnaires mentionnés à l'article 1er du décret du 19 septembre 1947 susvisé et à leurs ayants cause . ; qu'aux termes de l'article 2 du même décret : 'Les fonctionnaires mentionnés à l'article 1er peuvent prétendre à pension au titre du présent décret dans les conditions définies aux articles 25 et 26 après avoir été radiés des cadres soit d'office, soit sur leur demande. / (...) / L'admission à la retraite est prononcée, après avis de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, par l'autorité qui a qualité pour procéder à la nomination. ; qu'il est constant que la liquidation et le paiement des arrérages des pensions de retraite des agents de la fonction publique hospitalière relèvent des attributions de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, dont la gestion est assurée par la Caisse des dépôts et consignations ; qu'en enjoignant au CENTRE HOSPITALIER D'ARMENTIERES de procéder au versement de la pension de retraite de M. A, le vice-président du tribunal administratif de Lille a entaché son ordonnance d'une erreur de droit ; que le CENTRE HOSPITALIER D'ARMENTIERES est seulement fondé à demander l'annulation de l'article 2 de l'ordonnance qu'il attaque en ce que le tribunal administratif lui a adressé une telle injonction ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler, dans cette mesure, l'affaire au fond, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Considérant qu'il y a lieu d'enjoindre à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales de procéder à la liquidation et au versement de la pension de M. A dans le délai de six mois suivant la notification de la présente décision ;

D E C I D E :
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Article 1er : L'article 2 de l'ordonnance du 9 mai 2005 du vice-président du tribunal administratif de Lille est annulé en tant qu'il a enjoint au CENTRE
HOSPITALIER D'ARMENTIERES de procéder à la liquidation et au versement de la pension de retraite de M. A.

Article 2 : Il est enjoint à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales de procéder à la liquidation et au versement de la pension de retraite de l'intéressé dans le délai de six mois suivant la notification de la présente décision.

Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par le CENTRE HOSPITALIER D'ARMENTIERES devant le Conseil d'Etat est rejeté.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au CENTRE HOSPITALIER D'ARMENTIERES, à M. Malik A et à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales.

Une copie sera adressée pour information au ministre du budget, des comptes publiques et de la fonction publique.