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Conseil d’Etat, 27 mai 2011, n° 330266 (Hospitalisation d’office – Maintien de la mesure délai)

Par arrêté du 6 mai 2002, une patiente a fait l’objet d’une mesure d’hospitalisation d’office pour une durée d’un mois à compter du 4 mai 2002. Par arrêté en date du 31 mai 2002, le préfet a ordonné le maintien de l’hospitalisation d’office de cette dernière. La requérante a alors contesté devant le Tribunal administratif la légalité de cet arrêté, intervenu plus de trois jours avant l’expiration du premier mois, en méconnaissance des dispositions de l’article L. 3213-4 du Code de la santé publique. Le Tribunal administratif a rejeté ses demandes et la Cour administrative d’appel est venue confirmer ce jugement. Néanmoins, le Conseil d’Etat a cassé l’arrêt de la cour administrative d’appel en considérant que « la Cour administrative d’appel a commis une erreur de droit en estimant qu'était sans incidence sur la légalité de l'arrêté du 31 mai 2002 qui prolongeait l'hospitalisation d'office visant Mme A la circonstance que cet arrêté était intervenu quatre jours avant l'expiration de la période d'hospitalisation précédente ».

Conseil d'État
1ère et 6ème sous-sections réunies
N° 330266   

Mentionné dans les tables du recueil Lebon

M. Jacques Arrighi de Casanova, président
Mme Christine Grenier, rapporteur
Mme Claire Landais, rapporteur public
SCP WAQUET, FARGE, HAZAN, avocats

Lecture du vendredi 27 mai 2011

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la décision n° 330266 du 30 décembre 2009 par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi de Mme Catherine A dirigées contre l'arrêt n° 07VE00324 du 18 novembre 2008 de la cour administrative d'appel de Versailles, en tant que cet arrêt s'est prononcé sur l'arrêté du 31 mai 2002 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a ordonné le maintien de son hospitalisation d'office prononcée par un arrêté du 6 mai 2002 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Christine Grenier, chargée des fonctions de Maître des requêtes,

- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de Mme A,

- les conclusions de Mme Claire Landais, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de Mme A ;

Considérant que l'article L. 3213-4 du code de la santé publique prévoit que, pour les personnes qui ont fait l'objet d'une hospitalisation d'office en application de l'article L. 3213-1 du même code : Dans les trois jours précédant l'expiration du premier mois d'hospitalisation, le représentant de l'Etat dans le département peut prononcer, après avis motivé d'un psychiatre, le maintien de l'hospitalisation d'office pour une nouvelle durée de trois mois. Au-delà de cette durée, l'hospitalisation peut être maintenue par le représentant de l'Etat dans le département pour des périodes de six mois maximum renouvelables selon les mêmes modalités. / Faute de décision du représentant de l'Etat à l'issue de chacun des délais prévus à l'alinéa précédent, la mainlevée de l'hospitalisation est acquise (...) ; que l'intervalle de temps de trois jours ainsi imparti au représentant de l'Etat pour décider, le cas échéant, d'une prolongation d'une hospitalisation d'office est constitutif d'une garantie pour les intéressés ; qu'il fait ainsi obstacle à ce qu'une décision prononçant le maintien d'une hospitalisation d'office puisse être légalement prise plus de trois jours avant l'expiration de la période couverte par la précédente décision ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la cour administrative d'appel de Versailles a commis une erreur de droit en estimant qu'était sans incidence sur la légalité de l'arrêté du 31 mai 2002 qui prolongeait l'hospitalisation d'office visant Mme A la circonstance que cet arrêté était intervenu quatre jours avant l'expiration de la période d'hospitalisation précédente ; que dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, son arrêt doit être annulé en tant qu'il porte sur cet arrêté ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler dans cette mesure l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par un arrêté du 6 mai 2002, le préfet des Hauts-de-Seine a prononcé l'hospitalisation d'office de Mme A pour une durée d'un mois à compter du 4 mai 2002, date à laquelle l'intéressée avait fait l'objet d'un placement provisoire ordonné par le maire de Boulogne-Billancourt ; que cette mesure expirait ainsi le 3 juin 2002 en fin de journée ; que l'arrêté litigieux du 31 mai 2002 décidant de prolonger l'hospitalisation d'office de Mme A est, dès lors, intervenu plus de trois jours avant l'expiration du premier mois d'hospitalisation, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 3213-4 du code de la santé publique ; que Mme A est, par suite, fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Considérant que Mme A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de Mme A, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à cette société de la somme de 3 000 euros ;

D E C I D E :

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles du 18 novembre 2008 est annulé, en tant qu'il statue sur les conclusions de Mme A dirigées contre l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine du 31 mai 2002.
Article 2 : L'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine du 31 mai 2002 est annulé.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Versailles du 24 novembre 2006 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 4 : L'Etat versera à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de Mme A, une somme de 3 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme Catherine A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.