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Conseil d’Etat, 27 mars 2009, n°301468 (Aide-soignant – Affectation – Handicap)

En l’espèce, le Conseil d’Etat est saisi d’un pourvoi d’un aide soignant exerçant au sein d’un centre hospitalier contre un arrêt de la Cour administrative d’appel de Lyon qui avait rejeté sa demande d’annulation de la décision du directeur de cet établissement de l’affecter en service de jour au lieu du service de nuit. Le requérant soutenait que cette affectation était incompatible avec son état de santé. Par cet arrêt, le Conseil d’Etat considère le moyen opérant et annule l’arrêt qui avait omis d’y répondre tout en précisant qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que, compte tenu des aménagements possibles, le poste de jour sur lequel cet agent public a été affecté par la décision litigieuse était incompatible avec le handicap dont il est atteint.

Conseil d'État

N° 301468
Mentionné dans les tables du recueil Lebon
5ème et 4ème sous-sections réunies
M. Daël, président
M. Marc Lambron, rapporteur
SCP DIDIER, PINET ; SCP PIWNICA, MOLINIE, avocats

lecture du vendredi 27 mars 2009

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 février et 11 mai 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Claude A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat ;

1°) d'annuler l'arrêt du 12 décembre 2006 en tant que, par cet arrêt, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du directeur du centre hospitalier de Néris-les-Bains du 14 septembre 2000 l'affectant en service de jour ;

2°) réglant l'affaire au fond, d'annuler la décision du 14 septembre 2000 ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Néris-les-Bains la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Marc Lambron, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Didier, Pinet, avocat de M. A et de la SCP Piwnica, Molinié, avocat du centre hospitalier de Néris- les- Bains,

- les conclusions de Mme Catherine de Salins, Rapporteur public,

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Didier, Pinet, avocat de M. A et à la SCP Piwnica, Molinié, avocat du centre hospitalier de Néris- les- Bains ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A, aide-soignant, était affecté au service de nuit du centre de rééducation fonctionnelle du centre hospitalier de Néris-les-Bains (Allier) depuis 1997 ; que, par une décision du 14 septembre 2000, le directeur de l'établissement l'a affecté à compter du 25 septembre 2000 au service de jour ; que l'intéressé demande l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 12 décembre 2006 en tant qu'il rejette ses conclusions tendant à l'annulation de cette décision ;

Considérant qu'il résulte des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A avait repris en appel le moyen, déjà soulevé devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand, tiré de ce que sa nouvelle affectation n'était pas compatible avec son état de santé ; que la cour n'a pas répondu à ce moyen ; que, par suite, l'arrêt attaqué doit être annulé en tant qu'il rejette les conclusions de M. A tendant à l'annulation de la décision l'affectant au service de jour ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler, dans cette mesure, l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par le centre hospitalier de Néris-les-Bains ;

Considérant que la décision du 14 septembre 2000 est motivée, d'une part, par une réorganisation du travail de nuit consistant dans une modification de la composition des équipes, et, d'autre part, par les difficultés rencontrées par l'intéressé dans l'accomplissement de son service de nuit ; que M. A met en doute la réalité du projet de réorganisation et soutient que l'administration a entendu sanctionner à nouveau des faits pour lesquels un blâme lui avait été infligé précédemment ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier, et notamment du compte-rendu du comité technique paritaire de l'établissement en date du 14 juin 2000, que le projet de réorganisation du travail de nuit a été défini antérieurement aux faits qui ont justifié la sanction infligée à M. A ; que, par ailleurs, le choix de modifier l'affectation de cet agent était justifié par le souci de mettre fin à des conflits au sein de l'équipe de nuit ; que, dans ces conditions, la décision du directeur de l'établissement du 14 septembre 2000 a été prise dans l'intérêt du service et ne constitue pas une sanction déguisée ; que le moyen tiré de ce que l'intéressé aurait été sanctionné deux fois pour les mêmes faits doit par suite être écarté ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que, compte tenu des aménagements possibles, le poste de jour sur lequel M. A a été affecté par la décision litigieuse était incompatible avec le handicap dont il est atteint ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du directeur du centre hospitalier de Néris-les-Bains du 14 septembre 2000 et, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au versement d'une indemnité réparant le préjudice que lui aurait causé son changement d'affectation ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mis à la charge du centre hospitalier de Néris-les-Bains, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, les frais exposés par M. A et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces mêmes dispositions et de mettre à la charge de M. A le versement au centre hospitalier de Néris-les-Bains de la somme que cet établissement demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 12 décembre 2006 est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de M. A tendant à l'annulation de la décision du directeur du centre hospitalier de Néris-les-Bains du 14 septembre 2000.

Article 2 : Les conclusions de M. A tendant à l'annulation du jugement du 6 juin 2002 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de la décision du directeur du centre hospitalier de Néris-les-Bains du 14 septembre 2000 sont rejetées.

Article 3 : Le surplus des conclusions du pourvoi est rejeté.

Article 4 : Les conclusions du centre hospitalier de Néris-les-Bains tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Claude A, au centre hospitalier de Néris-les-Bains et à la ministre de la santé et des sports.