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Conseil d’Etat, 4 avril 2012, n° 344387 (FHP – SROS – Opposabilité)

La Fédérationde l’hospitalisation privée (FHP) demande au Conseil d’Etat d’abroger l’article R. 1434-4 1° du Code de la santé publique dans sa rédaction résultant du décret n° 2010-514 du 18 mai 2010 relatif au projet régional de santé. Cet article dispose que « Le schéma régional d'organisation des soins comporte : 1° Une partie relative à l'offre de soins définie à l'article L. 1434-9. Cette partie est opposable aux établissements de santé, aux autres titulaires d'autorisations d'activités de soins et d'équipements matériels lourds, ainsi qu'aux établissements et services qui sollicitent de telles autorisations ; (…) ».
Par cette décision, le Conseil d’Etat rejette la requête de la FHP en considérant d’une part que le Code de la santé publique ne rendait pas obligatoire la consultation de la section sanitaire du comité national de l’organisation sanitaire et social dans ce domaine. D’autre part, il estime que « ces dispositions n'ont pas pour effet de remettre en cause les autorisations délivrées précédemment et ne trouveront à s'appliquer aux établissements de santé déjà titulaires d'une autorisation d'activités de soins ou d'équipements matériels lourds qu'en cas de demande de renouvellement d'une autorisation ».
 
 
Conseil d'État
1ère et 6ème sous-sections réunies
N° 344387

Inédit au recueil Lebon

M. Jacques Arrighi de Casanova, président
M. Didier-Roland Tabuteau, rapporteur
Mme Claire Landais, rapporteur public
SCP BARTHELEMY, MATUCHANSKY, VEXLIARD, avocats

Lecture du mercredi 4 avril 2012

 
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

 

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 17 novembre 2010 et 17 février 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la FEDERATION DE L'HOSPITALISATION PRIVEE, représentée par son président ; la fédération requérante demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle le Premier ministre a refusé d'abroger le 1° de l'article R. 1434-4 du code de la santé publique, dans sa rédaction résultant du décret n° 2010-514 du 18 mai 2010 relatif au projet régional de santé, ainsi que la décision du 23 novembre 2010 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a refusé de proposer au Premier ministre de procéder à cette abrogation ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique, modifié notamment par le décret n° 2010-514 du 18 mai 2010 ;
Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Didier-Roland Tabuteau, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, avocat de la FEDERATION DE L'HOSPITALISATION PRIVEE,

- les conclusions de Mme Claire Landais, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, avocat de la FEDERATION DE L'HOSPITALISATION PRIVEE ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 1434 -7 du code de la santé publique : " Le schéma régional d'organisation des soins a pour objet de prévoir et de susciter les évolutions nécessaires de l'offre de soins afin de répondre aux besoins de santé de la population et aux exigences d'efficacité et d'accessibilité géographique " ; qu'en vertu de l'article L. 1434-9 du même code, ce schéma " fixe, en fonction des besoins de la population, par territoire de santé : / 1° Les objectifs de l'offre de soins par activité de soins et équipements matériels lourds, dont les modalités de quantification sont fixées par décret ; / 2° Les créations et les suppressions d'activités de soins et d'équipements matériels lourds ; / 3° Les transformations et regroupements d'établissements de santé ainsi que les coopérations entre ces établissements ; / (...) Les autorisations accordées par le directeur général de l'agence régionale de santé en vertu des 2° et 3° doivent être compatibles avec les objectifs fixés par le schéma régional d'organisation des soins (...) " ; qu'en vertu de l'article L. 6122-2 du même code : " L'autorisation est accordée lorsque le projet : / 1° Répond aux besoins de santé de la population identifiés par les schémas mentionnés aux articles L. 1434-7 et L. 1434-10 ; / 2° Est compatible avec les objectifs fixés par ce schéma ; / 3° Satisfait à des conditions d'implantation et à des conditions techniques de fonctionnement " ;

Considérant qu'en application de ces dispositions, le décret du 18 mai 2010 relatif au projet régional de santé a inséré au code de la santé publique un article R. 1434-4 aux termes duquel : " Le schéma régional d'organisation des soins comporte : / 1° Une partie relative à l'offre de soins définie à l'article L. 1434-9. Cette partie est opposable aux établissements de santé, aux autres titulaires d'autorisations d'activités de soins et d'équipements matériels lourds, ainsi qu'aux établissements et services qui sollicitent de telles autorisations (...) " ; que la fédération requérante a demandé au Premier ministre de procéder à l'abrogation de ces dernières dispositions ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 6122-2 du code de la santé publique : " La section sanitaire du comité est consultée par le ministre chargé de la santé sur : / 1° Les projets de décrets relatifs aux conditions d'implantation des activités de soins et des équipements matériels lourds pris en vertu de l'article L. 6123-1 ; / 2° Les projets de décrets relatifs aux conditions techniques de fonctionnement pris en vertu de l'article L. 6124-1 (...) " ;

Considérant que les dispositions contestées du 1° de l'article R. 1434-4 du même code se bornent à prévoir que la partie relative à l'offre de soins définie à l'article L. 1434-9 du schéma régional d'organisation des soins est opposable aux établissements de santé, aux autres titulaires d'autorisations d'activités de soins et d'équipements matériels lourds ainsi qu'aux établissements et services qui sollicitent de telles autorisations ; qu'elles ne définissent ni des conditions d'implantation, ni des conditions techniques de fonctionnement de ces activités et équipements ; que, dès lors, les dispositions précitées de l'article R. 6122-2 n'imposaient pas la consultation de la section sanitaire du comité national de l'organisation sanitaire et sociale préalablement à l'édiction des dispositions contestées ;

Considérant, en second lieu, que sur le fondement des dispositions de l'article L. 1434-9, en vertu desquelles le schéma régional d'organisation fixe les objectifs de l'offre de soins, le pouvoir réglementaire pouvait légalement prévoir que la partie relative à l'offre de soins de ce schéma serait opposable aux établissements de santé, aux autres titulaires d'autorisations d'activités de soins et d'équipements matériels lourds ainsi qu'aux établissements et services qui sollicitent de telles autorisations ; que l'opposabilité de cette partie du schéma régional d'organisation des soins se traduit par l'obligation, pour les autorisations accordées par le directeur général de l'agence régionale de santé au titre des 2° et 3° de l'article L. 1434-9, soit pour une première demande d'autorisation soit pour le renouvellement d'une autorisation précédemment accordée, d'être compatibles avec les objectifs fixés par le schéma régional d'organisation des soins ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que les dispositions contestées auraient illégalement étendu le champ de l'opposabilité à l'ensemble des prescriptions de la partie relative à l'offre de soins du schéma régional d'organisation des soins ne peut qu'être écarté ; que, par ailleurs, ces dispositions n'ont pas pour effet de remettre en cause les autorisations délivrées précédemment et ne trouveront à s'appliquer aux établissements de santé déjà titulaires d'une autorisation d'activités de soins ou d'équipements matériels lourds qu'en cas de demande de renouvellement d'une autorisation ; que, par suite, le moyen tiré de ce que ces prescriptions ne pouvaient être légalement rendues opposables à ces établissements doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les moyens tirés de l'illégalité des dispositions contestées du décret du 18 mai 2010 ne peuvent être accueillis ; que, par suite, les conclusions tendant à l'annulation du refus de les abroger doivent être rejetées, ainsi que, par voie de conséquence, les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :
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Article 1er : La requête de la FEDERATION DE L'HOSPITALISATION PRIVEE est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la FEDERATION DE L'HOSPITALISATION PRIVEE, au Premier ministre et au ministre du travail, de l'emploi et de la santé.