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Cour administrative d’appel de Nantes, 11 avril 2014, req. n° 12NT00053 (Résiliation – clause indemnitaire)

L’Ecole …, aux droits et obligations de laquelle vient l'établissement public A., a conclu le 28 juillet 2003 avec la société X. un contrat de maintenance d'un photocopieur, d'une durée de soixante mois, prévoyant le versement par la personne publique d'un montant mensuel minimum de 913,20 euros hors taxes. A la suite de l'avis émis à sa demande par la commission interministérielle des matériels d'imprimerie et de reproduction (CIMIR) sur la régularité du marché, l'établissement public A. a notifié le 15 octobre 2004 à la société X. la résiliation du marché avec effet au 31 mars 2005, en raison de l'irrégularité de la passation de celui-ci en l'absence de toute procédure de publicité et de mise en concurrence. Après avoir réclamé les indemnités prévues au contrat par plusieurs courriers, la société X., aux droits de laquelle sont ensuite successivement venues la société anonyme Y. puis la société Z., a saisi le tribunal administratif de Rennes. En première instance, le tribunal a condamné l’établissement public à verser à la société Z. la somme de 38 171,76 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 31 mars 2005, au titre de l'indemnité de résiliation prévue par l'article 13 du contrat de maintenance. Le pouvoir adjudicateur a relevé appel de ce jugement. La Cour administrative d’appel de Nantes a annulé le jugement après avoir rappelé qu’un contrat administratif ne peut légalement prévoir une indemnité de résiliation qui serait, au détriment de la personne publique, manifestement disproportionnée au montant du préjudice subi par le cocontractant du fait de cette résiliation.

Vu la requête, enregistrée le 9 janvier 2012, présentée pour l'établissement public A., dont le siège est situé …, par Me E... et Me Mialot, avocats ; l'établissement public A. demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0804221 du 4 novembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Rennes l'a condamné à verser à la société Z. la somme de 38 171,76 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 31 mars 2005 ;

2°) de rejeter comme irrecevables les demandes de la société Z. venant aux droits de la société Y., laquelle venait aux droits de la société X. ;

3°) à titre subsidiaire de rejeter, après avoir constaté l'illégalité du marché conclu avec la société X., ces demandes et de condamner la société Z. à lui verser la somme de 15 661,33 euros en remboursement des sommes mandatées à tort ;

4°) à titre infiniment subsidiaire, de modérer le montant de l'indemnité de résiliation prévue à l'article 13 du contrat et de la fixer à 10 % du montant global du marché soit 5 979,20 euros hors taxes ;

5°) de mettre à la charge de la société Y. venant aux droits de la société X. le versement d'une somme de 7 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient que :

- le tribunal a méconnu le principe du contradictoire en ne lui communiquant pas " l'intervention " de la société Z. ;

- le jugement est insuffisamment motivé ;

- la requête était tardive : le défaut d'indication des voies et délais de recours a été couvert par le destinataire de la décision ;

- l'intervention de la société Z. est irrecevable ;

- le contrat était nul et ne pouvait servir de base au règlement du litige : l'absence de publicité et de mise en concurrence présente un caractère de gravité très important, dans un contexte très concurrentiel ;

- aucune faute ne peut lui être reprochée ;

- au titre de l'enrichissement sans cause, la société ne justifie d'aucune des dépenses qu'elle affirme avoir engagées, ni de l'existence d'un appauvrissement ;

- les sommes versées à la société doivent être remboursées ;

- la clause du contrat relative aux modalités de calcul de l'indemnité de résiliation est nulle ; il appartient au juge de moduler la sanction ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 9 février 2012, présenté pour la société Z., dont le siège est situé …, par Me …, avocat ;

elle demande à la cour :

1°) à titre principal de confirmer le jugement attaqué et de rejeter en conséquence la requête l'établissement public A. ;

2°) à titre subsidiaire, dans le cas où la nullité du marché serait retenue, de condamner l'établissement public A. à lui verser, sur le fondement de la responsabilité quasi-délictuelle, la somme de 25 268,70 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter du 25 mars 2005 ;

3°) de mettre à la charge de l'établissement public A.la somme de 7 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- le principe du contradictoire n'a pas été méconnu ;

- le jugement est régulièrement motivé ;

- la requête n'était pas tardive, et son " intervention " était recevable ;

- un marché sans formalités préalables pouvait être conclu ;

- un manquement aux règles de passation ne saurait suffire à écarter l'application du contrat pour le règlement du litige ;

- la clause d'indemnisation prévue par le contrat n'aboutit pas à une indemnité manifestement excessive ;

- la demande reconventionelle de l'établissement public A. sera rejetée ;

- l'établissement public A. a commis une faute en concluant un marché illégal ;

Vu le mémoire, enregistré le 26 juin 2013, présenté pour l'établissement public A., qui reprend ses conclusions et ses moyens ;

il soutient en outre que :

- il n'a pas donné son accord au transfert du marché ;

- le marché ne pouvait être conclu sans mise en concurrence ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 30 octobre 2013, présenté pour la société Z., qui reprend ses conclusions et ses moyens mais porte à 35 000 euros le montant de l'indemnité sollicitée sur le fondement de la responsabilité quasi-délictuelle ;

Vu le courrier en date du 1er octobre 2013 adressé aux parties en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative ;

Vu l'ordonnance en date du 7 novembre 2013 portant clôture immédiate de l'instruction en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 8 novembre 2013, après clôture de l'instruction, présenté pour l'établissement public A. qui reprend ses conclusions et ses moyens ;

Vu l'ordonnance en date du 27 février 2014 prononçant la réouverture de l'instruction ;

Vu le mémoire, enregistré le 17 mars 2014, présenté pour l'établissement public A. qui reprend ses conclusions et ses moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 mars 2014 :

- le rapport de M. Madelaine, faisant fonction de premier conseiller,

- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public,

- les observations de Me Mialot, avocat de l'établissement public A.;

- et les observations de Me Adamczyk, avocat de la société Z. ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 25 mars 2014, présentée pour société Z. ;
 

1. Considérant que l'Ecole …, aux droits et obligations de laquelle vient l'établissement public A., a conclu le 28 juillet 2003 avec la société X. un contrat de maintenance d'un photocopieur, d'une durée de soixante mois, prévoyant le versement par la personne publique d'un montant mensuel minimum de 913,20 euros hors taxes ; qu'à la suite de l'avis émis à sa demande par la commission interministérielle des matériels d'imprimerie et de reproduction (CIMIR) sur la régularité du marché, l'établissement public A. a notifié le 15 octobre 2004 à la société X. la résiliation du marché avec effet au 31 mars 2005, en raison de l'irrégularité de la passation de celui-ci en l'absence de toute procédure de publicité et de mise en concurrence ; qu'après avoir réclamé les indemnités prévues au contrat par plusieurs courriers, la société X., aux droits de laquelle sont ensuite successivement venues la société anonyme Y. puis la société Z., a saisi le tribunal administratif de Rennes ; que l'établissement public A. relève appel du jugement du 4 novembre 2011 par lequel le tribunal l'a condamné à verser à la société Z. la somme de 38 171,76 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 31 mars 2005, au titre de l'indemnité de résiliation prévue par l'article 13 du contrat de maintenance ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que l'établissement public A. soutient que le tribunal a prononcé sa condamnation au bénéfice de la société Z. alors que celle-ci n'est intervenue à la procédure que par un mémoire d'observations produit à la suite de la communication aux parties des moyens d'ordre public sur lesquels le tribunal était susceptible de fonder sa décision ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le mémoire, par lequel la société Z. a fait connaître au tribunal qu'elle venait aux droits de la société Y., en sa qualité d'associée unique à la suite de la radiation de cette dernière société en raison de la transmission universelle de son patrimoine, a été enregistré au greffe du tribunal le 27 septembre 2011 alors que l'audience était prévue et s'est tenue le 29 septembre 2011 ; que ce mémoire n'a pas été communiqué par le tribunal à l'établissement public A. ; que, si ce mémoire avait pour objet principal de répondre aux moyens d'ordre public soulevés par le tribunal, il comportait des éléments nouveaux tenant à la qualité de la personne revendiquant la qualité de créancier et qui ne pouvaient être retenus par le tribunal sans que le défendeur ait pu être mis en mesure de les discuter utilement ; que, dès lors, l'établissement public A. est fondé à soutenir qu'en prenant en compte ces éléments pour prononcer sa condamnation au profit de la société Z., le tribunal a méconnu le caractère contradictoire de la procédure et, par suite, entaché son jugement d'irrégularité ; que ce jugement doit, en conséquence, être annulé ;

4. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la société Y., à laquelle a succédé la société Z., devant
le tribunal administratif de Rennes ;

Sur les fins de non recevoir soulevées par l'établissement public A.:

5. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. " ; qu'aux termes de l'article R. 421-5 du même code : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision. " ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que ni la lettre du 12 octobre 2005 par laquelle la personne publique a rejeté la demande indemnitaire de la société X. ni celle du 2 novembre 2005, par laquelle il a été répondu à la demande préalable présentée par son conseil, ne comportaient la mention des voies et délais de recours ; que, par conséquent, et alors même que la société X. aurait indiqué dans sa demande qu'elle envisageait de déposer un recours devant le tribunal administratif dans un délai de deux mois à compter de l'éventuelle décision de rejet de sa demande, l'établissement public A. n'est pas fondé à soutenir que la requête a été présentée tardivement au greffe du tribunal ; que, par suite, cette fin de non-recevoir doit être écartée ;

7. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que la société Y. , qui a introduit la requête devant le tribunal, a produit l'extrait du fichier K Bis relatif à l'immatriculation au registre du commerce et des sociétés et a ainsi établi qu'elle venait aux droits de la société X. à laquelle elle a succédé à la suite d'une opération de fusion ; que, par suite, la société Y. justifiait d'un intérêt lui donnant qualité pour agir ;

8. Considérant, en troisième lieu, que la société Z. a déclaré, par mémoire enregistré le 27 septembre 2011, poursuivre la procédure engagée devant le tribunal ; qu'elle a produit un extrait du fichier K bis de la société Y. établi au 25 septembre 2011, faisant état de la dissolution de cette dernière société à la suite de la réunion de toutes les parts entre les mains de la société Z., ainsi, au surplus, qu'un certificat établi par le greffe du tribunal de commerce de Créteil précisant que cette opération de dissolution, publiée dans le journal d'annonces légales " Les Petites Affiches " n'avait fait l'objet d'aucune opposition ; qu'ainsi l'établissement public A. n'est pas fondé à soutenir que la société Z. ne justifie pas d'un intérêt lui donnant qualité pour poursuivre en droit la procédure ;

9. Considérant, enfin, que la société Z., venant aux droits de la société Y. qui elle-même venait aux droits de la société X., ne poursuit que l'indemnisation du préjudice qu'aurait subi l'entreprise titulaire du contrat de maintenance d'un photocopieur, conclu le 28 juillet 2003, du fait de la résiliation anticipée de ce contrat ; que l'exercice de cette action, qui n'est pas relatif à la réalisation des prestations prévues au contrat, n'est pas subordonné à l'accord de la personne publique cocontractante sur la substitution d'une société à une autre ;

Sur le droit à indemnisation de la société Z. :

10. Considérant que lorsque les parties soumettent au juge un litige relatif à l'exécution du contrat qui les lie, il incombe en principe à celui-ci, eu égard à l'exigence de loyauté des relations contractuelles, de faire application du contrat ; que, toutefois, dans le cas seulement où il constate une irrégularité invoquée par une partie ou relevée d'office par lui, tenant au caractère illicite du contrat ou à un vice d'une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, il doit écarter le contrat et ne peut régler le litige sur le terrain contractuel ; qu'ainsi, lorsque le juge est saisi d'un litige relatif à l'exécution d'un contrat, les parties à ce contrat ne peuvent invoquer un manquement aux règles de passation, ni le juge le relever d'office, aux fins d'écarter le contrat pour le règlement du litige ; que, par exception, il en va autrement lorsque, eu égard d'une part à la gravité de l'illégalité et d'autre part aux circonstances dans lesquelles elle a été commise, le litige ne peut être réglé sur le fondement de ce contrat ;

11. Considérant, en premier lieu, que les marchés passés selon la procédure adaptée prévue par l'article 28 du code des marchés publics sont soumis, et ce, quel que soit leur montant, aux principes généraux posés au deuxième alinéa du I de l'article 1er du même code, dans sa version applicable au marché en cause selon lequel " les marchés publics respectent les principes de liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures (...) " ; que si la personne responsable du marché est libre, lorsqu'elle décide de recourir à la procédure adaptée, de déterminer, sous le contrôle du juge administratif, les modalités de publicité et de mise en concurrence appropriées aux caractéristiques de ce marché, et notamment à son objet, à son montant, au degré de concurrence entre les entreprises concernées et aux conditions dans lesquelles il est passé, ce choix, toutefois, doit lui permettre de respecter les principes généraux précités qui s'imposent à elle ;

12. Considérant qu'il est constant que le contrat litigieux a été conclu directement avec la société X., sur la proposition de celle-ci, sans que soient respectés les principes de liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures ; que toutefois ce vice, qui constitue un manquement aux règles de passation du contrat, dont il n'est pas établi qu'il aurait en l'espèce affecté les conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, ne saurait être regardé, eu égard à l'exigence de loyauté des relations contractuelles, comme d'une gravité telle que le juge doive écarter le contrat et que le litige qui oppose les parties ne doive pas être tranché sur le terrain contractuel ;

13. Considérant, en second lieu, qu'en vertu de l'interdiction faite aux personnes publiques de consentir des libéralités, un contrat administratif ne peut légalement prévoir une indemnité de résiliation qui serait, au détriment de la personne publique, manifestement disproportionnée au montant du préjudice subi par le cocontractant du fait de cette résiliation ;

14. Considérant qu'aux termes de l'article 13 du marché litigieux, " en cas de résiliation anticipée du contrat ... par le Client, celui-ci s'engage à payer une indemnité de résiliation égale à 95 % des redevances minimales qui lui auraient été facturées jusqu'au terme du contrat (période initiale ou renouvelée) conformément aux engagements contractuels (...) " ;

15. Considérant qu'il est constant que le contrat, signé pour une durée de soixante mois, a pris effet à compter du 4 décembre 2003 ; que la facturation minimum mensuelle s'élevant à 913,20 euros hors taxes et, à la date de la résiliation anticipée du contrat le 31 mars 2005, seize mois s'étant écoulés depuis sa signature, l'indemnité résultant de la clause précitée au titre de la résiliation anticipée s'élèverait à 95 % de la somme de 40 180,80 euros, soit 38 171,76 euros hors taxes ; que le versement, en sus de la rémunération déjà acquise des seize premiers mois de prestations, d'une telle indemnité, qui représente 69,6 % du montant global du contrat et 95 % du montant restant à exécuter et assurerait ainsi à l'entreprise une rémunération supérieure à celle qu'elle aurait retirée de l'exécution normale du marché, eu égard notamment à l'absence de dépenses effectives de maintenance telles que les déplacements pour intervention et la fourniture des consommables compris dans le contrat, atteint un montant manifestement disproportionné par rapport au préjudice réellement subi par l'entreprise ; que la clause d'indemnisation prévue à l'article 13 du contrat doit, dans ces conditions, être regardée comme entachée de nullité ;

16. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction, et qu'il n'est d'ailleurs pas soutenu, qu'eu égard aux modalités prévues par le contrat pour la détermination de la rémunération du cocontractant de l'administration, cette clause constituerait un des éléments nécessaires à l'équilibre financier du contrat ; que, par suite, une telle clause, qui n'affecte pas l'économie du contrat, doit être regardée comme divisible des autres stipulations de ce contrat ; que, dès lors, sa nullité n'entache pas de nullité l'ensemble du contrat ;

17. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le litige opposant l'établissement public A. à la société X., aux droits de laquelle vient en dernier lieu la société Z., doit être réglé sur le terrain contractuel ; que l'existence de ces relations contractuelles s'oppose à ce que la société Z. puisse utilement invoquer l'enrichissement sans cause ou la responsabilité quasi-délictuelle de l'établissement public ;

Sur le montant de l'indemnisation :

18. Considérant qu'en raison de la nullité qui affecte la clause de résiliation, la société Z. ne saurait soutenir que le montant de l'indemnité, qui lui est due, du fait de la résiliation anticipée du contrat prononcée pour un motif d'intérêt général en raison de l'irrégularité de sa passation devrait être calculé par application des stipulations de l'article 13 du contrat, citées au point 14 ;

19. Mais considérant qu'en cas de résiliation d'un contrat pour un motif d'intérêt général, le cocontractant de la personne publique a droit à la réparation intégrale du préjudice résultant pour lui de cette résiliation ; qu'il n'en va différemment que dans le cas où il est établi que le cocontractant a concouru par son attitude à la survenance du préjudice dont il demande réparation ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que tel soit le cas en l'espèce ;

20. Considérant, d'une part, que l'indemnisation du manque à gagner de la société X. doit être calculée sur la base de la marge nette qu'aurait engendrée la complète exécution des prestations prévues par le marché résilié ; que la société fait état d'un taux de marge nette de 38 %, qui n'est pas contesté et qui n'apparaît pas excessif ; qu'ainsi compte tenu de la part du marché résilié qui restait à exécuter d'un montant de 40 180,80 euros, il sera fait une exacte appréciation du manque à gagner subi par la société X. en le fixant à la somme de 15 268,70 euros ; que cette somme, qui répare le préjudice subi à la suite de la rupture du contrat, est sans lien direct avec un quelconque service rendu à titre onéreux et, en tant que telle, n'est pas soumise à la taxe sur la valeur ajoutée ; que, par suite, il n'y a pas lieu de majorer l'indemnité due du montant de cette taxe ;

21. Considérant, d'autre part, que si la requérante sollicite l'indemnisation des charges fixes non amorties, et des frais qu'elle aurait engagés en vue de l'exécution du marché, elle n'en établit pas l'existence ;

22. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de condamner l'établissement public A. à verser à la société Z. la somme de 15 268,70 euros ; que cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 31 mars 2005, date d'effet de la résiliation et constituant le point de départ de la créance dont elle se prévaut, cette date étant postérieure à celle de la réception de la demande préalable adressée par le titulaire du contrat, et non, comme le demande la société, à compter du 25 mars 2005 ;

Sur les conclusions reconventionnelles présentées par l'établissement public A.:

23. Considérant que l'établissement public A. sollicite, en se prévalant de la nullité du contrat conclu avec la société, la condamnation de la société Z. à lui rembourser les sommes qu'elle a versées en exécution du contrat litigieux ; que, toutefois, dès lors que les vices qui affectent le contrat n'ont pas été regardés, ainsi qu'il est précisé aux points 12 et 16 du présent arrêt, comme devant conduire le juge à écarter en totalité le contrat qui en est entaché, les conclusions reconventionnelles présentées par l'établissement public A. ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

24. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mises à la charge de la société Z., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, les sommes que demande à ce titre l'établissement public A. ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la société Z. présentées sur le fondement de ces dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Rennes du 4 novembre 2011 est annulé.

Article 2 : l'établissement public A. versera à la société Z. la somme de 15 268,70 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter du 31 mars 2005.

Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par l'établissement public A. et la société Z. est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'établissement public A. et à la société Z.