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Cour administrative d’appel de Paris, 19 janvier 2009, n°04PA01800 (Personne publique – Condamnation au paiement d’une somme d’argent – Principe général du droit) 

Par cet arrêt, la Cour administrative d’appel de Paris rappelle le principe suivant lequel une personne publique ne peut être condamné à payer une somme qu’elle ne doit pas et précise qu’il s’agit d’un principe général du droit.

04PA01800

DEPARTEMENT DES HAUTS DE SEINE

M. Roth Président

M. Privesse Rapporteur

Mme Desticourt
Commissaire du gouvernement

Audience du 5 janvier 2009 Lecture du 19 janvier 2009

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
La Cour administrative d'appel de Paris
(8ème Chambre)
04PA01800

Vu la requête, enregistrée le 24 mai 2004, présentée pour le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE, représenté par son président en exercice dûment habilité par délibération du conseil général, ayant pour siège l'Hôtel du Département, 2-16 boulevard Soufflot à Nanterre (92015) cedex, par Me Molas : le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0209199/6 en date du 16 mars 2004 en tant qu'il n'a pas fait droit à sa demande devant le Tribunal administratif de Paris, tendant à la condamnation de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris (AP-HP) à lui verser la somme de 59 431, 23 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter du 23 octobre 2003, capitalisés à compter du 1er juin 2004, en remboursement des rémunérations et charges versées pour M. T-M ;

2°) de mettre à la charge de l'AP-HP le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Le DEPARTEMENT DES HAUTS DE SEINE soutient en premier lieu que le jugement encourt l'annulation, du fait que le tribunal a retenu, à l'encontre de ses conclusions indemnitaires, le moyen tiré du défaut de lien de causalité entre l'infection nosocomiale dont son agent, M. T-M a été victime à l'occasion d'une opération chirurgicale, et ses préjudices, lien qui ne pouvait être d'ordre public, l'ayant informé au surplus si tardivement de ce moyen qu'il n'a pu y répondre ; que la faute commise par l'Assistance publique - hôpitaux de Paris, qu'au demeurant elle ne conteste pas, et son préjudice financier, sont établis ; qu'en effet, les premiers juges ayant retenu la responsabilité de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris, ils auraient dû nécessairement constater le lien de causalité entre la faute et la nécessité pour la

victime de bénéficier, eu égard à son état de santé, de congés de longue maladie, qu'il conviendra en définitive de limiter à la période du 8 avril 2001 au 9 mai 2003, lesquels ont été suivis d'un mi-temps thérapeutique ; que la somme réclamée est représentative de ces congés ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire complémentaire, enregistré le 21 septembre 2004, présenté pour le DEPARTEMENT DES HAUTS DE SEINE, par Me Bazin, précisant le montant des sommes demandées au titre de l'indemnisation résultant des prestations servies à son agent territorial, et les réduisant à la somme totale de 55 698, 69 euros ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 novembre 2004, présenté pour la Mutuelle Générale des Préfectures et de l'Administration Territoriale (MGPAT), par Me Manciet-Gabolde ; la MGPAT demande à la cour de confirmer la responsabilité de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris dans l'infection contractée par M. T-M, et de condamner par suite cet établissement à lui rembourser la somme de 23 907, 59 euros, ainsi que de mettre à sa charge le paiement de la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles ; la MGPAT soutient qu'en application de l'article 77 de ses statuts et au regard du caractère incontestable de la responsabilité de l'AP-HP, elle est en droit d'obtenir le remboursement des sommes qu'elle a déboursées du fait de l'infection contractée par M. T-M ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 janvier 2005, pour l'Assistance publique - hôpitaux de Paris, par Me Tsouderos, qui demande à la cour à titre principal d'annuler le jugement entrepris et de rejeter la requête du DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE, sur le fondement de l'absence de responsabilité de sa part, et à titre subsidiaire, de rejeter au fond cette même requête ainsi que les conclusions de M. T-M et de la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine, et de mettre à la charge de M. T-M et du DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE, pour chacun, la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; l'Assistance publique - hôpitaux de Paris soutient que l'ensemble des éléments du rapport d'expertise doit conduire à regarder le patient comme ayant été porteur du foyer infectieux antérieurement à l'intervention chirurgicale du 27 février 2001, et partant, à écarter de ce fait l'application de la présomption de faute à son égard ; que sa responsabilité ne pouvait dès lors être engagée ; que par ailleurs, les premiers juges pouvaient, pour rejeter les conclusions du DEPARTEMENT DES HAUTS DE SEINE, se fonder sur la circonstance que ce dernier ne rapportait pas la preuve de l'existence d'un lien de causalité entre l'infection litigieuse et le congé de longue maladie octroyé à M. T-M sans avoir à faire application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ; qu'il appartient d'office au juge de vérifier le bien fondé d'une créance invoquée à l'encontre d'une personne morale de droit public, alors même que cette dernière n'en aurait pas contesté le bien fondé, en vertu du principe selon lequel une personne morale de droit public ne peut être condamnée à payer une somme qu'elle ne doit pas ; que la nature de la pathologie, ayant justifié l'octroi d'un congé de longue maladie par un arrêté du 20 février 2001, était susceptible de conduire au renouvellement de celui-ci, voire à l'octroi ultérieur d'un congé de longue durée ; que l'imputabilité de la prolongation du congé de longue maladie à ladite infection, présente un caractère hypothétique, puisqu'il n'est pas établi que cette prolongation soit imputable à l'infection litigieuse ou à un autre fait dommageable ;

Vu le mémoire, enregistré le 31 janvier 2005, pour la mutuelle générale des préfectures et de l'administration territoriale (MGPAT), par Me Manciet-Gabolde, qui demande à la cour de confirmer le jugement entrepris, la responsabilité de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris ne pouvant être déniée, et qui maintient ses précédentes écritures en condamnation de celle-ci en les ramenant à la somme de 15 478, 79 euros, accompagnée des frais irrépétibles ;

Vu le mémoire, enregistré le 2 mars 2005, présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine, par Me Corbin-Deschanel ; la CPAM demande à la cour de confirmer les dispositions du jugement entrepris en ce qu'il a condamné l'Assistance publique -hôpitaux de Paris à lui payer la somme de 107 274, 25 euros avec intérêts à compter du 7 septembre 2002, de fixer ses frais futurs à la somme annuelle de 923, 45 euros, de condamner l'Assistance publique - hôpitaux de Paris à lui rembourser cette somme, sous réserve qu'elle ne préfère s'en libérer par le versement du capital représentatif, soit la somme de 11 414, 77 euros, et de mettre à la charge de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris la somme de 800 euros au titre des frais irrépétibles ; la caisse soutient qu'elle a été amenée à prendre en charge les suites de l'accident dont a été victime son assuré, au titre du risque maladie ; qu'elle est recevable et bien fondée à solliciter le remboursement de sa créance, à l'encontre du tiers responsable, en vertu des dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ; que c'est donc à bon droit que le tribunal, ayant retenu la responsabilité de l'AP-HP quant à l'infection nosocomiale contractée par M. T-M, l'a condamnée à en réparer les conséquences dommageables ; qu'il appartient aux juges du fond lorsqu'ils liquident le préjudice de la victime en son intégralité, de fixer le capital représentatif des dépenses futures des organismes sociaux ; qu'en effet, s'agissant des séquelles de l'infection nosocomiale qu'il contractée, M. T-M devra poursuivre à vie un traitement médical ;

Vu le mémoire, enregistré le 25 août 2005, présenté pour M. T-Me, par Me Thouroude ; M. T-M demande à la cour de confirmer le jugement entrepris et de rejeter les conclusions en défense et à fins d'appel incident présentées par l'Assistance publique -hôpitaux de Paris, ainsi que de mettre à la charge de cette dernière la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles ; M. T-M soutient que les conclusions incidentes présentées par l'AP-HP sont irrecevables, car elles ont pour objet un litige distinct de celui pour lequel le tribunal a été saisi au principal ; qu'à titre subsidiaire, le jugement attaqué a retenu à bon droit la responsabilité de l'AP-HP ; qu'il n'était pas porteur d'un foyer infectieux avant les interventions conduites ; que l'expert judiciaire n'a ni analysé, ni démontré qu'il n'y ait pas eu une infection croisée ou transmise d'un malade à l'autre ou par les instruments de travail du personnel médical ; que la contamination par infection nosocomiale n'est pas utilement contestée ; qu'il entend voir également confirmer le jugement attaqué en ce qui concerne le montant de la réparation de ses préjudices ;

Vu le mémoire, enregistré le 13 mars 2006, présenté pour l'Assistance publique -hôpitaux de Paris, par Me Tsouderos ; l'AP-HP conclut aux mêmes fins et par les mêmes moyens que ses précédentes écritures, ainsi qu'à la condamnation de la CPAM des Hauts-de-Seine et de la MGPAT, chacune, à lui verser la somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles, y ajoutant que l'appel provoqué du service public hospitalier à la suite d'un appel principal d'un demandeur incident en première instance, faute pour ce dernier d'avoir obtenu l'indemnisation souhaitée, ouvre naturellement droit pour l'établissement hospitalier à contester le principe même de sa responsabilité ; que les premiers juges auraient dû écarter la présomption de faute et la responsabilité de l'établissement public ; qu'ils ont doublement indemnisé les troubles dans les conditions d'existence du fait d'une I.P.P de 10% ; qu'ils ont évalué de manière excessive les autres postes de préjudice ; que la demande du DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE ne peut qu'être rejetée du fait de l'absence de démonstration du lien de causalité ; que les frais futurs demandés par la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine ne revêtent pas un caractère certain ; que les pièces versées au débat par la MGPAT, correspondant à des impressions informatiques « codées », ne permettent nullement de vérifier si ces prestations présentent le caractère indemnitaire exigé par les articles L. 224-8 et L. 224-9 du code de la mutualité, pour ouvrir droit à un recours contre le tiers responsable ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 mai 2006, pour la MGPAT, par Me Mancies-Gabolde, qui reprend ses précédentes écritures, en ramenant ses conclusions à fin d'indemnisation à la somme de 14 776, 87 euros, dont la mutuelle est en droit d'obtenir le paiement dans le cadre de son action subrogatoire à l'encontre du tiers responsable ;

Vu le mémoire, enregistré le 26 mai 2006, présenté pour M. T-M, par Me Thouroude, qui persiste dans ses précédentes écritures, en soulignant que la remise en cause du principe de responsabilité ne saurait avoir d'effet qu'à l'encontre du département requérant ;

Vu le mémoire, enregistré le 18 septembre 2008, présenté pour l'Assistance publique -hôpitaux de Paris, par Me Tsouderos, qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens, y ajoutant que son appel provoqué repose sur le même litige, et qu'il est dirigé tant à l'égard de M. T-M qu'à l'égard de son employeur ; que les conclusions de la mutuelle MGPAT devront être rejetées, le lien de causalité entre les prestations versées et l'infection développée n'étant pas établi ; que les conditions de la subrogation légale ne sont pas davantage réunies ;

Vu le mémoire, enregistré le 29 décembre 2008, présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine, par Me Corbin-Deschanel ; la CPAM demande à la cour, par la voie de l'appel incident, de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné 1 'AP-HP à lui payer la somme de 107 274, 25 euros avec intérêts à compter du 7 septembre 2002, d'y ajouter la capitalisation de ces derniers, ainsi que de fixer les frais futurs de la caisse à hauteur de la somme annuelle de 923, 45 euros au fur et à mesure de leur prise en charge, ou de s'en libérer par le versement d'un capital représentatif de 11 414, 77 euros, les frais irrépétibles devant être évalués à 600 euros ; qu'en effet, les frais futurs consistent en un traitement médical à vie dont le coût annuel s'élève à la somme susmentionnée ;

Vu le mémoire en observations complémentaires, enregistré le 30 décembre 2008, présenté pour le DEPARTEMENT DES HAUTS DE SEINE, par Me Bazin, par lequel la collectivité entend actualiser sa demande indemnitaire ; elle précise en effet que si M. T-M a été réintégré dans ses fonctions à temps plein à compter du 9 mai 2004, il a cependant bénéficié à compter du 1er mai 2006 et sur avis du service de médecine professionnelle et préventive, d'un aménagement d'horaires compte-tenu de son handicap, réduisant ainsi son temps de travail à 21 heures 30 par semaine pour la période du 1er mai 2006 au 30 avril 2008, puis à 20 heures par semaine à compter du 1er mai 2008 ; que cette diminution du temps de travail avec maintien d'un plein traitement, a entraîné un nouveau préjudice pour le département correspondant à 13,5/35 ème des sommes versées pour la première période, et à 15/35 ème des sommes versées à compter du 1er mai 2008, soit en comptant les cotisations patronales, une indemnisation totale passant de 55 698, 69 euros à 102 655, 27 euros ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de sécurité sociale et le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 janvier 2009 :
- le rapport de M. Privesse, rapporteur,
- les observations de Me Rojano pour le DEPARTEMENT DES HAUTS DE SEINE, et Me Tsouderos pour l'Assistance publique - hôpitaux de Paris, et les conclusions de Mme Desticourt, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, que M. T-M, né le 2 septembre 1947, a été hospitalisé à l'hôpital Beaujon, pour y subir l'exérèse d'un ostéome, ayant nécessité une trachéotomie ; qu'à la suite de cette opération, pratiquée le 27 février 2001, une infection trachéale et bronchique s'est déclarée, due à la présence d'un staphylocoque doré sensible à tous les antibiotiques sauf à la pénicilline ; qu'il a dû subir une seconde intervention d'urgence le 2 avril 2001 à la suite d'une tétraparésie, une IRM ayant révélé l'existence d'une spondylo-discite ; que M. T-M a, par une requête en date du 10 juin 2002, demandé la réparation des conséquences dommageables des soins qu'il a reçus à l'hôpital Beaujon ; que le Tribunal administratif de Paris, par le jugement attaqué, a reconnu la responsabilité de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris (AP-HP) ; que le DEPARTEMENT DES HAUTS DE SEINE, employeur de la victime, relève régulièrement appel de ce jugement, la Mutuelle Générale des Préfectures et de l'Administration Territoriale (MGPAT) intervenant au litige, et l'Assistance publique - hôpitaux de Paris présentant des conclusions tendant à la remise en cause de sa responsabilité ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que, lorsque le juge rejette la demande de réparation d'un préjudice en se fondant sur l'absence de lien de causalité directe entre ce préjudice et l'action de la personne publique en cause, le juge ne soulève pas d'office ce moyen, mais relève seulement que l'une des conditions de la mise en jeu de la responsabilité de la puissance publique n'est pas remplie ; que, si le tribunal n'avait pas à procéder à la communication prévue par l'article R. 611-7 du code de justice administrative, il lui appartenait d'examiner si le lien de causalité était établi entre l'infection litigieuse et le préjudice financier allégué par le Département requérant, en vertu du principe général du droit selon lequel une personne publique ne peut être condamnée à payer une somme qu'elle ne doit pas ; que par suite d'un tel examen, le jugement n'est entaché d'aucune irrégularité de ce chef ;

Sur la recevabilité des conclusions de la MGPAT :

Considérant que la Mutuelle Générale des Préfectures et de l'Administration Territoriale a demandé la condamnation de l'AP-HP à lui reverser les sommes déboursées pour le compte de M. T-M, dans un mémoire enregistré au greffe du Tribunal administratif de Paris le 12 mars 2004, c'est-à-dire postérieurement à l'audience tenue le 17 février 2004 ; qu'ayant été cependant mis à même de faire valoir ses droits devant ce même tribunal en temps utile, mais ayant omis de le faire antérieurement à la clôture d'instruction, la MGPAT n'est plus recevable à le demander pour la première fois en appel ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par M. T-M

Considérant que l'action en indemnisation du DEPARTEMENT DES HAUTS DE SEINE, relative à son préjudice subi du fait des congés de maladie et de longue durée pris par son agent du fait de son état de santé, ne porte pas sur un litige distinct de celui soulevé par l'AP-HP, qui concerne l'absence de responsabilité de sa part quant aux dommages subis par M. T-M, et dont l'issue est susceptible d'aggraver sa situation ; que par suite, l'action en cause est, pour ces motifs, recevable ;

Sur la responsabilité de l'Assistance publique hôpitaux de Paris :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. T-M a été admis à l'hôpital Beaujon en raison de troubles graves de la déglutition et de la ventilation, secondaires à un ostéome ; que, le 27 février 2001, M. T-M a subi une intervention chirurgicale, ayant consisté à l'exérèse de cet ostéome et ayant nécessité une trachéotomie en pré-opératoire

immédiat ; que quelques jours plus tard, des examens bactériologiques ont révélé la présence d'un staphylocoque doré sensible à tous les antibiotiques, sauf à la pénicilline ; que l'infection trachéale et bronchique qui s'est déclarée, a été traitée par antibiotiques pendant quinze jours, au terme desquels il a été admis dans un autre établissement pour des soins de convalescence ; que le 2 avril suivant, alors qu'il présentait une tétraparésie, il a été de nouveau dirigé vers l'hôpital Beaujon où, une IRM ayant révélé l'existence d'une spondylo-discite, il a subi une nouvelle intervention d'urgence ;

Considérant que, par son mémoire enregistré le 19 janvier 2005, faisant suite à l'introduction de la requête du DEPARTEMENT DES HAUTS DE SEINE, l'Assistance publique - hôpitaux de Paris (AP-HP) soutient que plusieurs éléments relevés par l'expert devraient conduire à regarder M. T-M comme ayant été porteur du foyer infectieux antérieurement à l'intervention chirurgicale du 27 février 2001, et partant à écarter de ce fait l'application de la présomption de faute à son égard ; que la requête est de nature à entraîner l'aggravation de la situation de 1 'AP-HP, les conclusions de celle-ci ne constituant pas un appel principal présenté hors délai et irrecevable à ce titre, mais un appel à la fois incident et provoqué, dès lors recevable ;

Considérant qu'il résulte des constatations réalisées par l'expert, qu'aucun examen bactériologique n'a été pratiqué sur le patient préalablement à l'intervention chirurgicale du 27 février 2001, alors au demeurant que l'établissement hospitalier concerné ne pouvait ignorer les antécédents pathologiques de celui-ci ; qu'en outre, les compte-rendus d'hospitalisation établis par l'établissement hospitalier, ne mentionnent pas la prescription d'antibiotiques préalablement à cette même intervention ; que dans ces conditions, rien ne permet de présumer que M. T-M aurait été porteur, avant le 27 février 2001, d'un foyer infectieux ou que l'infection dont il a été victime aurait eu une origine endogène ; qu'en conséquence, l'introduction accidentelle d'un germe microbien dans son organisme, lors de cette intervention chirurgicale, révèle une faute dans l'organisation ou le fonctionnement du service hospitalier, et engage la responsabilité de celui-ci envers la victime pour les conséquences dommageables résultant de l'infection ; que par voie de conséquence, cette responsabilité implique que le DEPARTEMENT DES HAUTS DE SEINE, en sa qualité d'employeur de M. T-M, soit en droit, dans le même recours, de demander au tiers responsable du dommage la réparation de tout préjudice direct et certain, dûment justifié, subi par lui et imputable audit dommage ;

Sur le préjudice du DEPARTEMENT DES HAUTS DE SEINE :

Considérant que dans un premier état de ses écritures d'appel, le DEPARTEMENT DES HAUTS DE SEINE limite l'état de sa demande à la période du 8 avril 2001 au 9 mai 2003, suivie d'un mi-temps thérapeutique, durant laquelle il a été amené à verser à son agent territorial des prestations liées à son congé de longue maladie, pour un montant de 55 698, 69 euros ; qu'il résulte par ailleurs des conclusions du rapport d'expertise, qu'en l'absence de la complication infectieuse qui s'est produite, l'incapacité temporaire totale aurait été d'un minimum de trois mois, c'est-à-dire jusqu'au 27 mai 2001, la date de consolidation étant fixée au 29 octobre 2002 ; que dans ces conditions, il y a lieu de regarder les conclusions présentées par l'appelant principal comme étant justifiées par le lien de causalité existant avec l'infection litigieuse, à compter du 27 mai 2001 et jusqu'au 29 octobre 2002 ; que par voie de conséquence, le montant ci-dessus mentionné sera ramené à la somme de 37 875, 11 euros correspondant à cette seule période ;

Considérant par ailleurs que le DEPARTEMENT DES HAUTS DE SEINE, fait encore valoir, dans le dernier état de ses écritures, que cette même infection litigieuse a généré chez son agent un handicap tel, qu'alors qu'il avait été réintégré dans ses fonctions à temps plein à compter du 9 mai 2004, il a dû, à la suite d'un avis rendu par le service de médecine professionnelle et préventive, procéder à la réduction de son temps de travail, sans incidence sur sa rémunération

calculée sur un temps plein, à compter du ler mai 2006 et jusqu'au 30 avril 2008 à hauteur de 21 heures 30 par semaine, puis à compter du ler mai 2008 à hauteur de 20 heures par semaine ; que cette réduction lui a causé un préjudice en sa qualité d'employeur de M. T-M correspondant à 13,5/35 ème des sommes versées sur la première période, et à 15/35 ème de celles versées sur la période suivante, soit un total de 46 956, 58 euros y compris les cotisations patronales, venant en sus de la somme précédemment demandée au titre de la longue maladie ;

Considérant cependant, que le DEPARTEMENT DES HAUTS DE SEINE ne produit, à l'appui de ses allégations relatives à son préjudice causé par la réduction du temps de travail de M. T-M, aucun document de nature à justifier le lien de causalité direct et certain entre la réduction en question et le handicap de l'intéressé, au demeurant non défini, non plus d'ailleurs que l'avis du service de médecine professionnelle à l'origine de l'aménagement d'horaires octroyé ; que dans ces conditions, et alors qu'en 2006, soit cinq ans après les faits, M. T-M entrait dans sa 59ème année, le département requérant ne peut être accueilli dans ses conclusions complémentaires à fin de condamnation de l'AP-HP à l'indemniser au titre d'une réduction du temps de travail de son agent territorial intervenue à compter du ler mai 2006 ;

Considérant dès lors, que la seule condamnation de l'AP-HP, correspondant à la somme de 37 875, 11 euros, portera intérêt au taux légal à compter du 23 octobre 2003, date d'introduction de la demande d'indemnisation formée par le département ; qu'il y a lieu d'accorder également la capitalisation de ces intérêts, demandée par la requête, à compter de la date à laquelle ils étaient dus pour une année entière, c'est-à-dire à compter du 23 octobre 2004, cette capitalisation s'accomplissant à nouveau à l'expiration de chaque échéance annuelle ultérieure sans qu'il soit besoin de formuler une nouvelle demande ;

Sur le préjudice de M. T-M :

Considérant que, par son appel provoqué à l'endroit de M. T-M, l'Assistance publique - hôpitaux de Paris fait valoir que les indemnisations accordées par le tribunal à celui-ci présentent un caractère excessif ; qu'il y a lieu dès lors pour la cour d'examiner les indemnisations qui lui ont été accordées par le jugement attaqué, et l'intéressé demandant la confirmation du jugement entrepris, il doit être ainsi regardé comme acceptant les rejets de chefs de préjudice prononcés par ce même jugement ;

Considérant que M. T-M a subi une incapacité temporaire totale de 17 mois qui a été précédemment évoquée, du 27 mai 2001 au 29 octobre 2002, entraînant une incapacité permanente partielle résultant des séquelles de l'infection dont il a été victime qui a été évaluée selon l'expert à 10 % ; qu'il sera dès lors fait une juste appréciation globale de ses troubles dans ses conditions d'existence à la fois permanents et temporaires, durant ses hospitalisations successives, en en fixant le montant à la somme de 13 500 euros ; que les souffrances endurées, chiffrées par l'expert à un niveau de 4,5 sur une échelle de 7, seront justement réparées par la somme de 7 000 euros, déjà allouée par les premiers juges ; que le préjudice esthétique, évalué à 2,5/7, sera plus justement indemnisé par une somme de 2 000 euros ; que par suite, la condamnation de l'AP-HP doit être ramenée à un total de 22 500 euros au profit de M. T-M ; que cette somme portera intérêt à compter du 27 mars 2002, date de réception de sa réclamation préalable par l'AP-HP ;

Sur les conclusions de la Caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine :

Considérant que, par le jugement attaqué, la Caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine, qui avait demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner l'AP-HP à lui rembourser le montant de ses débours consécutifs aux interventions subies par M. T-M, a obtenu partiellement satisfaction, les premiers juges lui allouant la somme de 106 514, 25 euros, complétée de l'indemnité de gestion de 760 euros, soit au total la somme de
107 274, 25 euros qu'elle sollicitait ; que cependant, les premiers juges ont rejeté sa demande relative au remboursement des frais futurs qu'elle sera amenée à verser, consistant surtout en l'administration à vie d'un médicament, qu'elle chiffre à une somme de 923, 45 euros annuelle, ou par un capital représentatif de 11 414, 77 euros ; qu'elle demande également par son mémoire enregistré le 29 décembre 2008, la capitalisation des intérêts qui lui ont été alloués par le même jugement ; que le recours incident de I 'AP-HP ayant pu aggraver la situation de la caisse, ses conclusions, bien que présentées au-delà des délais d'appel, sont recevables ;

Considérant d'une part, qu'il n'apparaît pas davantage en appel que les frais futurs dont le remboursement est demandé par la caisse présentent un caractère certain dans leur principe en l'absence de justifications formelles ; qu'il y a donc lieu de rejeter de telles conclusions et de confirmer le jugement sur ce point ; que d'autre part, la Caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine a droit à ce que les intérêts de la somme de 106 514. 25 euros, qui lui a été allouée par les premiers juges, soient capitalisés à compter de la date de sa demande, soit le 29 décembre 2008, date à laquelle les intérêts étaient dus pour une année entière ;

Sur les frais irrépétibles

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'AP-HP, dont les conclusions à fin de rejet de la requête présentée par le DEPARTEMENT DES HAUTS DE SEINE ont été écartées, soit recevable à demander à celui-ci le versement d'une somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles ; que, dans les circonstances de l'espèce, les conclusions du DEPARTEMENT DES HAUTS DE SEINE tendant à mettre à la charge de l'AP-HP le versement de frais irrépétibles, seront accueillies à hauteur de 800 euros ; que par ailleurs, sur le fondement des mêmes dispositions, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. T-M, de la caisse primaire d'assurance-maladie des Hauts-de-Seine et de la MGPAT tendant à mettre à la charge de l'AP-HP le versement de tels frais ;

DECIDE:

Article 1er : L'Assistance publique - hôpitaux de Paris est condamnée à verser au DEPARTEMENT DES HAUTS DE SEINE la somme de 37 875, 11 euros. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 23 octobre 2003, lesquels seront capitalisées à compter du 23 octobre 2004, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 2 : L'Assistance publique - hôpitaux de Paris est condamnée à verser à M. T-M la somme de 22 500 euros. Cette somme portera intérêt à compter du 27 mars 2002.

Article 3 : L'Assistance publique - hôpitaux de Paris est condamnée à verser à la caisse primaire d'assurance-maladie des Hauts-de-Seine les intérêts capitalisés sur la somme de 106 514, 25 euros, à la date du 29 décembre 2008.

Article 4 : Le jugement susmentionné du Tribunal administratif de Paris en date du 16 mars 2004 est réformé en ce qu'il a de contraire à ce qui précède.

Article 5 : L'Assistance publique-hôpitaux de Paris est condamnée à verser au DEPARTEMENT DES HAUTS DE SEINE une somme de 800 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

l'Administration Territoriale et la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine, sont rejetées.

Article 7: Le présent arrêt sera notifié au DEPARTEMENT DES HAUTS DE SEINE, à M. S T-M, à l'Assistance publique - hôpitaux de Paris, à la Mutuelle Générale des Préfectures et de l'Administration Territoriale et à la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine. Copie en sera adressée au ministre de la santé et des sports.

Délibéré après l'audience du 5 janvier 2009 à laquelle siégeaient :

M. Roth, président,

M. Privesse, premier conseiller,

M. Luben, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 19 janvier 2009.

La République mande et ordonne au ministre de la santé et des sports en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.