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Cour administrative d’appel de Versailles, 22 janvier 2009, n° 07VEN1198 (Protection des agents – A l’occasion des fonctions – Réparation – Préjudice)

Par cet arrêt, la Cour administrative d’appel de Versailles rappelle que la collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l’occasion de leurs fonctions et de répare, le cas échant, le préjudice qui en est résulté. La cour ajoute qu’il faut toutefois que les faits entrent dans ces dispositifs et ne se bornent pas à de vagues explications.

Cour Administrative d'Appel de Versailles
5ème chambre

N° 07VE01198

Inédit au recueil Lebon

M. MOUSSARON, président
Mme Christine COURAULT, rapporteur
M. DAVESNE, commissaire du gouvernement
SCP ARENTS - TRENNEC, avocat

Lecture du jeudi 22 janvier 2009

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée le 29 mai 2007 en télécopie et le 1er juin 2007 en original au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour Mme Bénédicte X, demeurant ..., par la SCP Arents-Trennec ; Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0400372 du 3 avril 2007 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger à lui verser la somme de 50 000 euros avec intérêts et capitalisation de ces derniers en réparation des préjudices occasionnés par le comportement de certains de ses agents ;

2°) de condamner le centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger à lui verser l'indemnité demandée en première instance ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Mme X soutient que la responsabilité du centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger est engagée en raison des fautes commises par des agents de cet établissement dans leur comportement à son égard ; qu'un collègue l'a agressée ; que son chef de service a usé de ses prérogatives pour peser sur la décision du médecin du travail quant à son aptitude à reprendre le travail, décision déclarée illégale par le médecin inspecteur régional du travail ; que la surveillante du service de psychiatrie lui a refusé l'accès au service alors qu'aucune décision d'inaptitude n'avait été prise à son encontre ; que le centre hospitalier a refusé de prendre des mesures à l'encontre de son agresseur et ne lui a pas accordé la protection prévue par l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 ; qu'elle évalue son préjudice moral et l'atteinte à sa réputation à la somme de 40 000 euros et les troubles dans les conditions d'existence à la somme de 10 000 euros ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 janvier 2009 :

- le rapport de Mme Courault, premier conseiller,
- les observations de Me Trennec pour Mme X,
- et les conclusions de M. Davesne, commissaire du gouvernement ;

Et pris connaissance de la note en délibéré produite le 12 janvier 2009 pour Mme X ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée : « Les fonctionnaires bénéficient, à l'occasion de leurs fonctions, d'une protection organisée par la collectivité publique dont ils dépendent, conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales. » ; qu'aux termes du troisième alinéa de cet article : « La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté. » ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, le 17 janvier 2003, lors d'une discussion professionnelle, un des collègues de Mme X au centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger s'est avancé vers elle en exprimant dans des termes vifs son exaspération à son égard ; que cette attitude, qui n'a pas été accompagnée de menaces ou d'injures, ni de violences, n'imposait pas la mise en oeuvre par l'administration de la protection prévue par l'article 11 précité de la loi du 13 juillet 1983 ; qu'ainsi, en admettant que les doléances exprimées dans les courriers adressés par Mme X à la directrice des ressources humaines du centre hospitalier puissent être regardées comme sollicitant la mise en oeuvre de cette protection, la requérante ne peut se prévaloir d'aucun préjudice entrant dans les prévisions du troisième alinéa précité dudit article ;

Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que le comportement du collègue de travail de Mme X soit constitutif d'une faute de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger ;

Considérant qu'aux termes de l'article R. 242-18 du code du travail, en vigueur à la date des faits en litige, dont les dispositions sont actuellement reprises aux articles R. 4624-22 et R. 4626-29 du code du travail : « Après une absence pour cause de maladie professionnelle, d'accident du travail, de maternité, ou après une absence de trois semaines au moins pour cause de maladie non professionnelle et, dans tous les cas, après une absence de plus de trois mois, un agent ne peut reprendre son poste de travail qu'après examen par le médecin du travail. Cet examen a pour seul objet d'apprécier l'aptitude de l'intéressé à reprendre son ancien emploi, la nécessité d'une adaptation des conditions de travail ou d'une réadaptation de l'agent ou éventuellement de l'une et de l'autre de ces mesures. L'examen doit avoir lieu lors de la reprise du travail et au plus tard dans un délai de huit jours » ;

Considérant qu'à la suite de l'examen médical de la requérante, en congé de maladie du 23 janvier au 25 avril 2003, le médecin du travail a décidé, le 24 avril 2003, de différer son avis sur son aptitude à reprendre son ancien emploi dans l'attente de l'avis d'un médecin spécialisé ; que la circonstance que l'inspecteur du travail ait annulé cette décision ne suffit pas à elle seule à établir que la supérieure hiérarchique de Mme X serait intervenue auprès du médecin du travail afin que celui-ci ne se prononce pas sur l'aptitude de la requérante à reprendre le travail à l'issue de son congé de maladie ; qu'une telle intervention ne résulte d'aucune des pièces du dossier ;

Considérant que si la requérante soutient que son médecin traitant a prolongé son arrêt de travail après une intervention du médecin du travail, lequel avait émis le 23 mai 2003 un avis d'inaptitude temporaire à la reprise de son emploi, elle n'établit pas, en tout état de cause, le préjudice qu'elle aurait subi de ce fait ;

Considérant, enfin, que l'absence d'avis favorable du médecin du travail à la reprise de son emploi a eu pour effet de différer la reprise d'activité de Mme X ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que les agents du centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger ne pouvaient, sans commettre de faute, la contraindre à quitter le lieu de travail où elle s'était présentée les 29 avril, 2 mai et 3 mai 2003 alors qu'elle perturbait par son comportement le bon fonctionnement du service ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy- Pontoise a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme X est rejetée.