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Cour de justice de l'Union européenne, 17 juillet 2014, C-173/13 (Retraite des fonctionnaires – Discrimination)

La Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) conclut que certains avantages accordés aux fonctionnaires en matière de retraite par la réglementation française introduisent une discrimination indirecte fondée sur le sexe. En l’espèce, un infirmier de la fonction publique hospitalière demandait à bénéficier d’une retraite anticipée avec pension à jouissance immédiate, en sa qualité de père de trois enfants, ce que sa caisse de retraite (CNRACL) lui avait refusé. «Cette inégalité de traitement, qui résulte d’une condition que les fonctionnaires féminins remplissent systématiquement grâce au caractère obligatoire du congé de maternité, ne semble pas justifiée, dès lors que la réglementation en cause ne parait pas répondre véritablement au souci d’atteindre l’objectif légitime de politique sociale invoqué en l’occurrence par la France, ni avoir été mise en œuvre de manière cohérente et systématique dans cette perspective ».

 

Cour de justice de l'Union européenne

ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

17 juillet 2014

«Politique sociale – Article 141 CE – Égalité des rémunérations entre travailleurs féminins et travailleurs masculins – Mise à la retraite anticipée avec pension à jouissance immédiate – Bonification aux fins du calcul de la pension – Avantages bénéficiant essentiellement aux fonctionnaires féminins – Discriminations indirectes – Justification objective – Souci véritable d’atteindre l’objectif allégué – Cohérence dans la mise en œuvre – Article 141, paragraphe 4, CE – Mesures visant à compenser des désavantages dans la carrière professionnelle des travailleurs féminins – Inapplicabilité»

Dans l’affaire C-173/13,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la cour administrative d’appel de Lyon (France), par décision du 3 avril 2013, parvenue à la Cour le 9 avril 2013, dans la procédure

Epoux X.,

contre

Garde des Sceaux, ministre de la Justice,

Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales,

 

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. L. Bay Larsen, président de chambre, MM. M. Safjan et J. Malenovský, Mmes A. Prechal (rapporteur) et K. Jürimäe, juges,

avocat général: M. N. Jääskinen,

greffier: M. A. Calot Escobar,

 

considérant les observations présentées:

–        pour M. et Mme X, par Me B. Madignier, avocat,

–        pour la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, par Me J.-M. Bacquer, en qualité d’agent,

–        pour le gouvernement français, par Mme M. Hours ainsi que par MM. G. de Bergues et S. Menez, en qualité d’agents,

–        pour la Commission européenne, par M. D. Martin, en qualité d’agent,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 27 février 2014,

rend le présent

 

Arrêt

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 157 TFUE.

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. et Mme X. au Garde des Sceaux, ministre de la Justice, et à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (ci-après la «CNRACL») au sujet d’une demande d’indemnisation, par l’État français, du préjudice qu’auraient subi les intéressés en conséquence du refus de la CNRACL d’accorder à M. X. le bénéfice d’une retraite anticipée avec pension à jouissance immédiate et une bonification d’ancienneté aux fins du calcul de sa pension.

 

 Le cadre juridique

3        L’article L. 1 du code des pensions civiles et militaires de retraite français (ci-après le «code des pensions») prévoit:

«La pension est une allocation pécuniaire personnelle et viagère accordée aux fonctionnaires civils et militaires et, après leur décès, à leurs ayants cause désignés par la loi, en rémunération des services qu’ils ont accomplis jusqu’à la cessation régulière de leurs fonctions.

Le montant de la pension, qui tient compte du niveau, de la durée et de la nature des services accomplis, garantit en fin de carrière à son bénéficiaire des conditions matérielles d’existence en rapport avec la dignité de sa fonction.»

 

 Les dispositions relatives à la mise à la retraite anticipée avec pension à jouissance immédiate

4        Il ressort de la décision de renvoi que les fonctionnaires civils peuvent, sous certaines conditions, bénéficier d’une mise à la retraite anticipée avec pension à jouissance immédiate.

5        Parmi ces conditions figurent celles fixées à l’article L. 24, I, 3°, du code des pensions, dans sa version résultant de l’article 136 de la loi n° 2004-1485, du 30 décembre 2004, de finances rectificative pour 2004 (JORF du 31 décembre 2004, p. 22522), lequel énonce:

«I.­ – La liquidation de la pension intervient:

[...]

3°       Lorsque le fonctionnaire civil est parent de trois enfants vivants, ou décédés par faits de guerre, ou d’un enfant vivant, âgé de plus d’un an et atteint d’une invalidité égale ou supérieure à 80%, à condition qu’il ait, pour chaque enfant, interrompu son activité dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.

Sont assimilées à l’interruption d’activité mentionnée à l’alinéa précédent les périodes n’ayant pas donné lieu à cotisation obligatoire dans un régime de retraite de base, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.

Sont assimilés aux enfants mentionnés au premier alinéa les enfants énumérés au II de l’article L. 18 que l’intéressé a élevés dans les conditions prévues au III dudit article».

6        L’article L. 18, II, troisième à sixième alinéas, du code des pensions comporte l’énumération suivante:

«Les enfants du conjoint issus d’un mariage précédent, ses enfants naturels dont la filiation est établie et ses enfants adoptifs;

Les enfants ayant fait l’objet d’une délégation de l’autorité parentale en faveur du titulaire de la pension ou de son conjoint;

Les enfants placés sous tutelle du titulaire de la pension ou de son conjoint, lorsque la tutelle s’accompagne de la garde effective et permanente de l’enfant;

Les enfants recueillis à son foyer par le titulaire de la pension ou son conjoint, qui justifie, dans les conditions fixées par décret en Conseil d’État, en avoir assumé la charge effective et permanente.»

7        L’article 18, III, du code des pensions comporte les précisions suivantes :

«À l’exception des enfants décédés par faits de guerre, les enfants devront avoir été élevés pendant au moins neuf ans, soit avant leur seizième anniversaire, soit avant l’âge où ils ont cessé d’être à charge au sens des articles L. 512-3 et R. 512-2 à R. 512-3 du code de la sécurité sociale.

Pour satisfaire la condition de durée ci-dessus, il sera tenu compte, le cas échéant, du temps pendant lequel les enfants auront été élevés par le conjoint après le décès du titulaire.»

8        L’article R. 37 du code des pensions, dans sa rédaction issue du décret n° 2005-449, du 10 mai 2005, pris pour l’application de l’article 136 de la loi de finances rectificative pour 2004 (loi n° 2004-1485, du 30 décembre 2004) et modifiant le code des pensions civiles et militaires de retraite (JORF du 11 mai 2005, p. 8174), prévoit:

«I. ­–       L’interruption d’activité prévue au premier alinéa du 3° du I de l’article L. 24 doit avoir eu une durée continue au moins égale à deux mois et être intervenue alors que le fonctionnaire était affilié à un régime de retraite obligatoire. En cas de naissances ou d’adoptions simultanées, la durée d’interruption d’activité prise en compte au titre de l’ensemble des enfants en cause est également de deux mois.

Cette interruption d’activité doit avoir eu lieu pendant la période comprise entre le premier jour de la quatrième semaine précédant la naissance ou l’adoption et le dernier jour de la seizième semaine suivant la naissance ou l’adoption.

Par dérogation aux dispositions de l’alinéa précédent, pour les enfants énumérés aux troisième, quatrième, cinquième et sixième alinéas du II de l’article L. 18 que l’intéressé a élevés dans les conditions prévues au III dudit article, l’interruption d’activité doit intervenir soit avant leur seizième anniversaire, soit avant l’âge où ils ont cessé d’être à charge au sens des articles L. 512-3 et R. 512-2 à R. 512-3 du code de la sécurité sociale.

II. –       Sont prises en compte pour le calcul de la durée d’interruption d’activité les périodes correspondant à une suspension de l’exécution du contrat de travail ou à une interruption du service effectif, intervenues dans le cadre:

a)       Du congé pour maternité [...];

b)       Du congé de paternité [...];

c)       Du congé d’adoption [...];

d)       Du congé parental [...];

e)       Du congé de présence parentale [...];

f)       D’une disponibilité pour élever un enfant de moins de huit ans [...].

III. –       Les périodes visées au deuxième alinéa du 3° du I de l’article L. 24 sont les périodes n’ayant pas donné lieu à cotisation de l’intéressé et pendant lesquelles celui-ci n’exerçait aucune activité professionnelle.»

 

 Les dispositions relatives à la bonification

9        Aux termes de l’article 15 du décret nº 2003-1306, du 26 décembre 2003, relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (JORF du 30 décembre 2003, p. 22477):

«I. –       Aux services effectifs s’ajoutent, dans les conditions prévues pour les fonctionnaires civils de l’État, les bonifications suivantes:

[...]

2°       Une bonification fixée à quatre trimestres, à condition que les fonctionnaires aient interrompu leur activité, pour chacun de leurs enfants légitimes et de leurs enfants naturels nés avant le 1er janvier 2004, pour chacun de leurs enfants dont l’adoption est antérieure au 1er janvier 2004 et, sous réserve qu’ils aient été élevés pendant neuf ans au moins avant leur vingt et unième anniversaire, pour chacun des autres enfants énumérés au paragraphe II de l’article 24 dont la prise en charge a débuté avant le 1er janvier 2004.

Cette interruption d’activité doit être d’une durée continue au moins égale à deux mois et intervenir dans le cadre d’un congé pour maternité, d’un congé pour adoption, d’un congé parental ou d’un congé de présence parentale [...] ou d’une disponibilité pour élever un enfant de moins de huit ans [...]

Les dispositions du 2° s’appliquent aux pensions liquidées à compter du 28 mai 2003;

3°       La bonification prévue au 2° est acquise aux femmes fonctionnaires ayant accouché au cours de leurs années d’études avant le 1er janvier 2004 et avant leur recrutement dans la fonction publique, dès lors que ce recrutement est intervenu dans un délai de deux ans après l’obtention du diplôme nécessaire pour se présenter au concours, sans que puisse leur être opposée une condition d’interruption d’activité;

[...]»

 

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

10      Des années 1984 à 2005, M. X. a exercé l’activité d’infirmier aux Hospices civils de Lyon, en qualité d’agent de la fonction publique hospitalière.

11      Le 4 avril 2005, M. X. a demandé à bénéficier d’une retraite anticipée avec pension à jouissance immédiate, en se prévalant de sa qualité de père de trois enfants nés, respectivement, les 9 octobre 1990, 31 août 1993 et 27 novembre 1996.

12      Cette demande a été rejetée par la CNRACL, par une décision du 18 avril 2005, au motif que M. X. n’avait pas interrompu son activité professionnelle pour chacun de ses trois enfants, ainsi que l’exige l’article L. 24, I, 3°, du code des pensions. Le recours introduit par M. X. à l’encontre de cette décision a été rejeté par une ordonnance du tribunal administratif de Lyon du 18 mai 2006.

13      Le 31 décembre 2008, les époux X. ont engagé une procédure juridictionnelle aux fins d’obtenir l’indemnisation du préjudice qu’ils considèrent avoir subi du fait de la discrimination indirecte, contraire au droit de l’Union, dont aurait été victime M. X.. Cette discrimination résulterait, d’une part, des dispositions combinées des articles L. 24 et R. 37 du code des pensions, relatives à la mise à la retraite anticipée avec pension à jouissance immédiate, et, d’autre part, de l’article 15, 2°, du décret n° 2003/1306, relatif à la bonification de pension.

14      Cette demande ayant été rejetée par un jugement du tribunal administratif de Lyon du 17 juillet 2012, les époux X. ont interjeté appel de ce jugement devant la cour administrative d’appel de Lyon.

15      C’est dans ce contexte que, ayant relevé que la responsabilité de l’État du fait des lois est susceptible d’être engagée lorsque celles-ci méconnaissent les engagements internationaux de la République française, la juridiction de renvoi a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1)      Les dispositions combinées de l’article L. 24 et de l’article R. 37 du [code des pensions] telles que résultant de l’application de la [loi n° 2004-1485] et [du décret n° 2005-449] peuvent-elles être regardées comme opérant une discrimination indirecte entre hommes et femmes au sens de l’article 157 [TFUE]?

2)      Les dispositions de l’article 15 du [décret 2003-1306] peuvent-elles être regardées comme opérant une discrimination indirecte entre hommes et femmes au sens de l’article 157 [TFUE]?

3)      En cas de réponse positive à l’une des deux premières questions, une telle discrimination indirecte est-elle justifiable par les stipulations du paragraphe 4 de l’article 157 [TFUE]?»

 

 La procédure devant la Cour

16      À la suite du prononcé des conclusions de M. l’avocat général, les époux X. ont, par acte déposé au greffe de la Cour le 25 mars 2014, demandé que la présente affaire soit réattribuée à la grande chambre de la Cour et que soit ordonnée la réouverture de la phase orale de la procédure.

17      À l’appui de ces demandes, les intéressés invoquent, en substance, outre le fait qu’ils sont en désaccord avec lesdites conclusions, premièrement, la circonstance qu’a été adoptée, le 20 janvier 2014, une réforme des retraites qui, sans modifier les avantages en cause au principal, prévoirait néanmoins l’adoption future d’un rapport gouvernemental lui-même annonciateur d’une refonte des avantages familiaux caractérisant les régimes de retraite. Il s’agirait d’un fait nouveau de nature à justifier une réouverture des débats.

18      Deuxièmement, les requérants au principal font valoir que la directive 86/378/CEE du Conseil, du 24 juillet 1986, relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre hommes et femmes dans les régimes professionnels de sécurité sociale (JO L 225, p. 40), telle que modifiée par la directive 96/97/CE du Conseil, du 20 décembre 1996 (JO 1997, L 46, p. 20), n’a été abordée ni par le gouvernement français dans ses observations écrites ni par M. l’avocat général dans ses conclusions. Ils pourraient, dès lors, se prévaloir de l’existence d’un argument non débattu entre les parties, propre à justifier une réouverture de la phase orale de la procédure.

19      À cet égard, et s’agissant, en premier lieu, de la demande de réattribution de l’affaire à la grande chambre de la Cour, il y a lieu de relever d’emblée qu’aucune disposition du statut de la Cour de justice de l’Union européenne ou du règlement de procédure de celle-ci ne prévoit le traitement de ce type de demande dans le cadre d’une procédure de renvoi préjudiciel.

20      En vertu de l’article 60, paragraphe 3, de ce règlement de procédure, la formation de jugement devant laquelle une affaire a été renvoyée peut, certes, à tout stade de la procédure, demander à la Cour de renvoyer cette affaire à une formation de jugement plus importante, mais il s’agit là d’une mesure que la chambre à laquelle l’affaire a été attribuée adopte, en principe, d’office et librement (voir, en ce sens, arrêt Espagne/Conseil, C‑310/04, EU:C:2006:521, point 22).

21      En l’occurrence, la quatrième chambre de la Cour considère qu’il n’y a pas lieu de demander à la Cour de renvoyer la présente affaire à la grande chambre.

22      En second lieu, il convient de rappeler que, selon l’article 83 dudit règlement de procédure, la Cour peut, l’avocat général entendu, ordonner la réouverture de la phase orale de la procédure, notamment si elle considère qu’elle est insuffisamment éclairée, ou lorsqu’une partie a soumis, après la clôture de cette phase, un fait nouveau de nature à exercer une influence décisive sur la décision de la Cour, ou encore lorsque l’affaire doit être tranchée sur la base d’un argument qui n’a pas été débattu entre les parties ou les intéressés visés à l’article 23 du statut de la Cour.

23      En l’occurrence, la Cour relève, premièrement, que, après avoir été mises en mesure de prendre connaissance des observations présentées, aucune de ces parties non plus qu’aucun de ces intéressés n’a sollicité l’organisation d’une audience, ainsi que l’article 76 du règlement de procédure de la Cour en prévoyait la possibilité.

24      Deuxièmement, la Cour considère, l’avocat général entendu, qu’elle dispose de tous les éléments nécessaires pour statuer.

25      S’agissant, en particulier, du fait nouveau allégué par les époux X., il n’apparaît pas que la loi invoquée par ceux-ci, dont l’entrée en vigueur est postérieure aux faits litigieux, soit de nature à exercer une influence décisive sur la décision que la Cour est appelée à rendre.

26      Par ailleurs, la circonstance que le gouvernement français se serait abstenu de faire état de la directive 86/378 dans ses observations écrites ou à l’occasion d’une audience qu’il aurait pu solliciter à cet effet et le fait que M. l’avocat général n’aurait pas davantage abordé cette directive dans ses conclusions, alors que les époux X. y ont fait référence dans leurs observations, ne sont, en aucune manière, de nature à justifier une réouverture des débats au motif qu’un tel élément n’aurait pas été débattu entre les parties.

27      Eu égard aux considérations qui précèdent, la Cour estime qu’il n’y a pas lieu d’ordonner la réouverture de la phase orale de la procédure.

 

 Sur les questions préjudicielles

 Sur la recevabilité

28      Le gouvernement français conclut, à titre principal, à l’irrecevabilité de la demande de décision préjudicielle au motif que la juridiction de renvoi n’a exposé ni le lien qu’elle établit entre les dispositions nationales en cause au principal et l’article 157 TFUE ni les raisons l’amenant à douter de la conformité de ces dispositions nationales à cet article.

29      Selon ce gouvernement, la juridiction de renvoi aurait dû expliquer quels sont les effets s’attachant auxdites dispositions nationales qui lui paraissent, eu égard aux critères dégagés par la Cour dans sa jurisprudence, de nature à conduire à la constatation de l’existence de discriminations indirectes. De même, cette juridiction aurait dû exposer les raisons pour lesquelles elle ne partage pas la position du Conseil d’État (France) qui, dans sa jurisprudence, aurait déjà conclu à l’absence de telles discriminations indirectes tout en considérant qu’il n’était pas nécessaire de saisir la Cour à titre préjudiciel à ce sujet.

30      À cet égard, il convient de rappeler, d’une part, qu’il est de jurisprudence constante que, dans le cadre de la procédure instituée à l’article 267 TFUE, il appartient au seul juge national, qui est saisi du litige et qui doit assumer la responsabilité de la décision juridictionnelle à intervenir, d’apprécier, au regard des particularités de l’affaire, tant la nécessité d’une décision préjudicielle pour être en mesure de rendre son jugement que la pertinence des questions qu’il pose à la Cour. En conséquence, dès lors que les questions posées portent sur l’interprétation du droit de l’Union, la Cour est, en principe, tenue de statuer (voir, notamment, arrêt Carmen Media Group, C‑46/08, EU:C:2010:505, point 75 et jurisprudence citée).

31      Le refus de statuer sur une question préjudicielle posée par une juridiction nationale n’est possible que lorsqu’il apparaît de manière manifeste que l’interprétation du droit de l’Union sollicitée n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal, lorsque le problème est de nature hypothétique ou encore lorsque la Cour ne dispose pas des éléments de fait et de droit nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées (voir, notamment, arrêt Carmen Media Group, EU:C:2010:505, point 76 et jurisprudence citée).

32      Or, en l’occurrence, les éléments du droit national et les éléments de fait qui figurent dans la décision de renvoi suffisent pour permettre à la Cour de répondre utilement aux questions qui lui sont posées et ces dernières présentent des rapports évidents avec l’objet du litige au principal. Quant aux raisons ayant amené la juridiction de renvoi à s’interroger sur l’interprétation des dispositions du droit de l’Union, auxquelles elle se réfère dans ses questions, et aux liens qu’elle considère qu’il existe entre ces dispositions et les dispositions nationales en cause au principal, il y a lieu de relever qu’ils peuvent aisément être inférés de la décision de renvoi et, en particulier, de l’exposé des prétentions et des arguments des parties au principal figurant dans cette décision.

33      D’autre part, il y a lieu de rappeler qu’il est de jurisprudence constante que l’article 267 TFUE confère aux juridictions nationales la faculté la plus étendue de saisir la Cour si elles considèrent qu’une affaire pendante devant elles soulève des questions exigeant une interprétation des dispositions du droit de l’Union nécessaires au règlement du litige qui leur est soumis. C’est ainsi, notamment, que la juridiction qui ne statue pas en dernière instance doit être libre, si elle considère que l’appréciation en droit faite au degré supérieur pourrait l’amener à rendre un jugement contraire au droit de l’Union, de saisir la Cour des questions qui la préoccupent (voir, notamment, arrêt Elchinov, C‑173/09, EU:C:2010:581, points 26 et 27 ainsi que jurisprudence citée).

34      Il découle de tout ce qui précède que les objections formulées par le gouvernement français doivent être écartées et que la demande de décision préjudicielle doit être considérée comme recevable.

 

 Sur le fond

 Observations liminaires

35      Il y a lieu de rappeler, d’une part, que l’affaire au principal a trait à une demande d’indemnisation fondée sur la circonstance que, en application des dispositions nationales alors en vigueur, le requérant au principal n’a pas pu bénéficier, à compter du mois d’avril 2005, d’une retraite anticipée avec pension à jouissance immédiate et d’une bonification d’ancienneté après le rejet, par une décision de la CNRACL du 18 avril 2005, de sa demande tendant à l’obtention de ces avantages. Dans ces conditions, et eu égard au fait que le traité de Lisbonne n’est entré en vigueur que le 1er décembre 2009, il convient, aux fins de répondre aux interrogations que soulèvent les questions posées, de prendre en considération, ainsi que l’ont notamment fait valoir la Commission et les époux X., l’article 141 CE, plutôt que l’article 157 TFUE, auquel s’est formellement référée la juridiction de renvoi dans ces questions.

36      D’autre part, il importe de relever que les dispositions nationales relatives aux bonifications de pension en cause au principal, auxquelles a trait la deuxième question, ont été adoptées à la suite de l’arrêt Griesmar (C‑366/99, EU:C:2001:648), dont il découle que la réglementation nationale en vigueur antérieurement méconnaissait le principe de l’égalité des rémunérations consacré à l’article 141 CE.

37      Dans cet arrêt, la Cour a en effet jugé que, s’agissant de la bonification de pension prévue par cette réglementation nationale antérieure, dont l’octroi dépendait du seul critère relatif à l’éducation des enfants, les fonctionnaires féminins et les fonctionnaires masculins se trouvaient, au regard de ce critère, dans une situation comparable, de sorte que, en réservant le bénéfice de ladite bonification aux seuls fonctionnaires féminins et en en excluant les fonctionnaires masculins qui étaient à même de prouver avoir assumé l’éducation de leurs enfants, cette réglementation avait introduit une discrimination directe en raison du sexe, contraire à l’article 141 CE (voir arrêt Griesmar, EU:C:2001:648, en particulier, points 53 à 58 et 67).

 

 Sur la deuxième question

38      Par sa deuxième question qu’il convient d’examiner en premier lieu, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 141 CE doit être interprété en ce sens qu’un régime de bonification de pension, tel que celui en cause au principal, engendre une discrimination indirecte en matière de rémunération entre travailleurs féminins et travailleurs masculins contraire à cet article.

39      Il importe de rappeler, à titre liminaire, que la Cour a dit pour droit que les pensions servies au titre d’un régime présentant des caractéristiques telles que celles du régime français de retraite des fonctionnaires en cause au principal relèvent de la notion de rémunération, au sens de l’article 141 CE (voir, en ce sens, arrêts Griesmar, EU:C:2001:648, points 26 à 38, et Mouflin, C‑206/00, EU:C:2001:695, points 22 et 23).

40      Selon une jurisprudence constante, le principe d’égalité des rémunérations consacré à l’article 141 CE s’oppose non seulement à l’application de dispositions qui établissent des discriminations directement fondées sur le sexe, mais également à l’application de dispositions qui maintiennent des différences de traitement entre travailleurs masculins et travailleurs féminins en application de critères non fondés sur le sexe, dès lors que ces différences de traitement ne peuvent s’expliquer par des facteurs objectivement justifiés et étrangers à toute discrimination fondée sur le sexe (voir, notamment, arrêts Seymour-Smith et Perez, C‑167/97, EU:C:1999:60, point 52, et Voß, C‑300/06, EU:C:2007:757, point 25 et jurisprudence citée).

41      Plus précisément, il ressort de la jurisprudence de la Cour qu’il y a discrimination indirecte en raison du sexe lorsque l’application d’une mesure nationale, bien que formulée de façon neutre, désavantage en fait un nombre beaucoup plus élevé de travailleurs d’un sexe par rapport à l’autre (voir, notamment, arrêt Z, C‑363/12, EU:C:2014:159, point 53 et jurisprudence citée). Une telle mesure n’est compatible avec le principe d’égalité de traitement qu’à la condition que la différence de traitement entre les deux catégories de travailleurs qu’elle engendre soit justifiée par des facteurs objectifs étrangers à toute discrimination fondée sur le sexe (voir, notamment, arrêts Rinner-Kühn, 171/88, EU:C:1989:328, point 12; Voß, EU:C:2007:757, point 38, et Brachner, C‑123/10, EU:C:2011:675, point 70).

42      En l’occurrence, il y a lieu de relever que, en vertu de l’article 15 du décret n° 2003-1306, une bonification d’ancienneté fixée à quatre trimestres est accordée, en vue du calcul du montant de la pension, à tout fonctionnaire, pour chacun de ses enfants nés ou adoptés avant le 1er janvier 2004, ou pris en charge avant cette date et élevés durant neuf années, à la condition que ledit fonctionnaire puisse justifier d’une interruption d’activité d’une durée continue au moins égale à deux mois intervenue dans le cadre d’un congé de maternité, d’un congé pour adoption, d’un congé parental ou d’un congé de présence parentale ou d’une disponibilité pour élever un enfant de moins de huit ans. En vertu de ladite disposition, cette bonification est également accordée aux femmes fonctionnaires ayant accouché au cours de leurs années d’études avant le 1er janvier 2004 et avant leur recrutement dans la fonction publique, dès lors que ce recrutement est intervenu dans un délai de deux ans après l’obtention du diplôme nécessaire pour se présenter au concours.

43      Or, il convient de constater que, envisagée en tant que telle, une disposition prévoyant ainsi qu’une bonification telle que celle en cause au principal est appelée à bénéficier aux fonctionnaires des deux sexes à condition qu’ils aient interrompu leur carrière durant une période minimale de deux mois consécutifs pour se consacrer à un enfant revêt une apparence de neutralité en ce qui concerne le sexe de l’intéressé, dès lors, notamment, qu’il n’apparaît pas que les possibilités d’interruption de carrière prévues par la réglementation en cause au principal ne sont légalement ouvertes qu’aux fonctionnaires de l’un des deux sexes.

44      À cet égard, il est constant que tant les fonctionnaires masculins que les fonctionnaires féminins peuvent bénéficier de telles possibilités d’interruption de carrière dans le cadre d’un congé d’adoption, d’un congé parental ou d’un congé de présence parentale ou, encore, dans le cadre d’une disponibilité pour élever un enfant de moins de huit ans.

45      Toutefois, nonobstant cette apparence de neutralité, force est de constater que le critère retenu à l’article 15 du décret n° 2003-1306 conduit à ce qu’un pourcentage beaucoup plus élevé de femmes que d’hommes bénéficie de l’avantage concerné.

46      En effet, la circonstance que le régime de bonification de pension en cause au principal inclut, parmi les formes statutaires d’interruption d’activité donnant droit à une bonification, le congé de maternité, implique, eu égard à la durée minimale et au caractère obligatoire de ce congé en droit français, que les fonctionnaires féminins qui sont le parent biologique de leur enfant se trouvent, en principe, en position de bénéficier de l’avantage que constitue cette bonification.

47      En revanche, s’agissant des fonctionnaires masculins, divers facteurs concourent, en l’occurrence, à réduire considérablement le nombre de ceux d’entre eux qui seront effectivement susceptibles de bénéficier dudit avantage.

48      À ce titre, il convient de relever, premièrement, que, à la différence du congé de maternité, les situations de congé ou de disponibilité susceptibles d’ouvrir un droit à ladite bonification de pension revêtent, pour un fonctionnaire, un caractère facultatif.

49      Deuxièmement, il ressort, notamment des observations écrites du gouvernement français que des situations statutaires telles que le congé parental, le congé de présence parentale ou la disponibilité s’accompagnent d’une absence tant de rémunération que d’acquisition de droits à pension. En outre, le congé de présence parentale et la disponibilité s’accompagnent, respectivement, d’une réduction et d’une absence d’acquisition du droit à avancement d’échelon.

50      Le fait qu’un régime de bonification, tel que celui en cause au principal, est de nature à bénéficier principalement aux fonctionnaires féminins a d’ailleurs été expressément constaté par le Conseil d’État dans son arrêt du 29 décembre 2004, D’Amato et autres (n° 265097), qu’a produit le gouvernement français à l’appui de ses observations. Un constat similaire a également été opéré par la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité dans sa délibération n° 2005-32, du 26 septembre 2005, à laquelle se sont référés les époux X. dans leurs observations écrites.

51      Eu égard à tout ce qui précède, la condition d’interruption d’activité professionnelle de deux mois à laquelle le régime en cause au principal subordonne, en principe, l’octroi de la bonification, bien que d’apparence neutre sur le plan du sexe des fonctionnaires concernés, est, en l’occurrence, de nature à être remplie par un pourcentage considérablement plus faible de fonctionnaires masculins que de fonctionnaires féminins, de sorte qu’elle désavantage en fait un nombre beaucoup plus élevé de travailleurs d’un sexe que de travailleurs de l’autre sexe.

52      Dans ces conditions, il convient de vérifier si la différence de traitement entre les travailleurs féminins et les travailleurs masculins ainsi engendrée est, le cas échéant, susceptible d’être justifiée par des facteurs objectifs étrangers à toute discrimination fondée sur le sexe.

53      À cet égard, il ressort de la jurisprudence de la Cour que tel est en particulier le cas si les moyens choisis répondent à un but légitime de politique sociale, sont aptes à atteindre l’objectif poursuivi par la réglementation en cause et sont nécessaires à cet effet (voir, notamment, arrêts Seymour-Smith et Perez, EU:C:1999:60, point 69 et jurisprudence citée, ainsi que Brachner, EU:C:2011:675, point 70 et jurisprudence citée).

54      En outre, de tels moyens ne sauraient être considérés comme étant propres à garantir l’objectif invoqué que s’ils répondent véritablement au souci de l’atteindre et s’ils sont mis en œuvre de manière cohérente et systématique (arrêts Hartlauer, C‑169/07, EU:C:2009:141, point 55; Georgiev, C-250/09 et C‑268/09, EU:C:2010:699, point 56; Fuchs et Köhler, C-159/10 et C‑160/10, EU:C:2011:508, point 85, ainsi que Brachner, EU:C:2011:675, point 71).

55      C’est à l’État membre concerné, en sa qualité d’auteur de la règle présumée discriminatoire, qu’il incombe de faire apparaître que cette règle répond à un objectif légitime de politique sociale, que cet objectif est étranger à toute discrimination fondée sur le sexe et qu’il pouvait raisonnablement estimer que les moyens choisis étaient aptes à la réalisation dudit objectif (arrêt Brachner, EU:C:2011:675, point 74 et jurisprudence citée).

56      Par ailleurs, il ressort également de la jurisprudence de la Cour que, s’il appartient en dernier lieu au juge national, qui est seul compétent pour apprécier les faits et pour interpréter la législation nationale, de déterminer si et dans quelle mesure la disposition législative concernée est justifiée par un tel facteur objectif, la Cour, appelée à fournir à celui-ci des réponses utiles dans le cadre d’un renvoi préjudiciel, est compétente pour donner des indications, tirées du dossier de l’affaire au principal ainsi que des observations écrites et orales qui lui ont été soumises, de nature à permettre à la juridiction nationale de statuer (voir, notamment, arrêt Brachner, EU:C:2011:675, point 72 et jurisprudence citée).

57      S’agissant de l’identification des objectifs poursuivis par le régime de bonification en cause au principal, le gouvernement français auquel incombe, ainsi qu’il a été rappelé au point 55 du présent arrêt, la charge de faire apparaître que ledit régime répond, le cas échéant, à un objectif légitime et que ce dernier est étranger à toute discrimination fondée sur le sexe, a indiqué, dans ses observations, que la bonification concernée a pour finalité de compenser les désavantages de carrière qui résultent de l’interruption de l’activité professionnelle en raison de la naissance, de l’arrivée au foyer ou de l’éducation des enfants.

58      À cet égard, le souci de compenser les désavantages subis dans le déroulement de leur carrière par l’ensemble des travailleurs tant féminins que masculins ayant interrompu celle-ci durant un certain laps de temps aux fins de se consacrer à leurs enfants constitue, certes, en tant que tel, un objectif légitime de politique sociale.

59      Toutefois, de simples affirmations générales ne suffisent pas pour faire apparaître que l’objectif d’une règle nationale, telle que celle en cause au principal, est étranger à toute discrimination fondée sur le sexe ni à fournir des éléments permettant raisonnablement d’estimer que les moyens choisis étaient aptes à la réalisation de cet objectif (voir en ce sens, notamment, arrêts Seymour-Smith et Perez, EU:C:1999:60, point 76, ainsi que Nikoloudi, C‑196/02, EU:C:2005:141, point 52).

60      En l’occurrence, il y a lieu d’être d’autant plus attentif au respect effectif des exigences diverses rappelées aux points 52 à 55 du présent arrêt que, ainsi qu’il a été souligné aux points 36 et 37 de celui-ci, le régime de bonification en cause au principal a été adopté aux fins de mettre le droit national en conformité avec le principe de l’égalité des rémunérations entre hommes et femmes après que la Cour eut constaté la non-conformité à ce principe du dispositif normatif national antérieur.

61      Or, la Commission et les époux X ont notamment soutenu, à cet égard, que la République française a substitué à ce dispositif antérieur un nouveau dispositif qui, sous couvert de mesures apparemment neutres au regard du sexe des personnes auxquelles ces mesures s’appliquent, aurait en réalité maintenu les objectifs dudit dispositif antérieur et assuré un statu quo et une pérennisation des effets concrets de celui-ci.

62      Selon les époux X, le nouveau dispositif applicable conserverait, en effet, le même objet et la même cause que l’ancien, à savoir, en substance, compenser les désavantages professionnels résultant du temps passé pour l’éducation des enfants, par le fonctionnaire, au cours de sa carrière. La République française aurait ainsi eu recours au critère artificiel tiré de l’interruption de carrière aux seules fins d’éviter les conséquences financières susceptibles de découler d’une correcte application du droit de l’Union et cet État membre demeurerait en défaut d’établir que les modifications ainsi introduites poursuivent un but légitime étranger à toute discrimination fondée sur le sexe.

63      Le gouvernement français fait valoir que l’interruption de carrière en vue de la prise en charge des enfants a un impact direct sur le montant de la pension du fonctionnaire soit en raison de l’absence de prise en considération des périodes d’interruption pour le calcul de celui-ci, soit en raison du ralentissement de la carrière qu’elles induisent, et que la bonification en cause au principal vise ainsi à compenser financièrement un tel impact lors de la liquidation de cette pension.

64      Conformément à la jurisprudence rappelée au point 56 du présent arrêt, il appartient à la Cour, eu égard aux éléments que comporte le dossier dont elle dispose et aux observations qui lui ont été soumises, de donner les indications suivantes, de nature à permettre à la juridiction nationale de statuer.

65      Premièrement, ainsi qu’il ressort des observations du gouvernement français, les congés de maternité et d’adoption s’accompagnent d’un maintien de l’acquisition des droits à pension et des droits à avancement, alors que le congé parental et le congé de présence parentale se caractérisent, le premier, par un maintien total, le second, par un maintien partiel des droits à avancement. Dans ces conditions, il est permis de s’interroger sur le point de savoir dans quelle mesure l’octroi de la bonification en cause au principal vise véritablement à compenser une absence de prise en considération de ces périodes d’interruption pour le calcul de la pension ou des désavantages liés à un ralentissement de la carrière du fonctionnaire, ainsi que le soutient ce gouvernement.

66      Il en va a priori de même du fait que cette bonification est fixée, de manière uniforme, à une année entière, sans considération de la durée réelle de l’interruption.

67      Dans ce contexte, il importe de souligner, en outre, que l’ampleur de ladite bonification est demeurée inchangée par rapport à celle qui caractérisait le régime de bonification antérieur, jugé contraire à l’article 141 CE en conséquence de l’arrêt Griesmar (EU:C:2001:648). Toutefois, ainsi qu’il a été relevé dans cet arrêt, dans le cadre de ce régime, la bonification alors en vigueur poursuivait un objectif différent, à savoir compenser les désavantages de carrière subis par les femmes en raison du fait qu’elles s’étaient consacrées à l’éducation des enfants durant le déroulement de leur carrière.

68      Or, il peut être observé, à cet égard, que, si une bonification de pension équivalente à un an par enfant élevé au foyer se conçoit sans doute au regard de ce dernier objectif, le maintien inchangé de l’ampleur de cet avantage dans le cadre du dispositif en cause au principal ne va pas, en revanche et ainsi qu’il vient d’être relevé, sans susciter des interrogations, s’agissant de sa capacité à poursuivre l’objectif rappelé au point 57 du présent arrêt.

69      Deuxièmement, s’agissant de l’exigence, rappelée au point 54 de cet arrêt, afférente à la mise en œuvre cohérente et systématique de ce dernier objectif, il convient de relever ce qui suit.

70      D’une part, ainsi qu’il ressort de l’article 15, paragraphe 3, du décret n° 2003-1306, la bonification en cause au principal est également acquise aux femmes fonctionnaires ayant accouché au cours de leurs années d’études, avant le 1er janvier 2004 et avant leur recrutement dans la fonction publique, dès lors que ce recrutement est intervenu dans un délai de deux ans après l’obtention du diplôme nécessaire pour se présenter au concours, sans que puisse leur être opposée une condition d’interruption d’activité.

71      Or, dans la mesure où l’exception ainsi introduite implique l’octroi d’une bonification à un fonctionnaire n’ayant pas interrompu sa carrière, et n’ayant, dès lors, pu subir les désavantages auxquels cette bonification est censée remédier, une telle disposition paraît, a priori, de nature à pouvoir porter atteinte à l’exigence de cohérence et de systématisme susmentionnée.

72      D’autre part, en vertu du régime de bonification en cause au principal, en présence de certains enfants, tels ceux du conjoint, ceux ayant fait l’objet d’une délégation de l’autorité parentale en faveur du titulaire de la pension ou de son conjoint, ceux qui sont placés sous tutelle du titulaire de la pension ou de son conjoint lorsque la tutelle s’accompagne de la garde effective et permanente de l’enfant ou ceux qui ont été recueillis à son foyer par le titulaire de la pension ou son conjoint, l’octroi de la bonification concernée est subordonné non seulement à une interruption d’activité professionnelle de deux mois, mais également à la condition que ces enfants aient été élevés pendant neuf ans au moins.

73      Or, une telle condition supplémentaire ne paraît pas, a priori, être davantage en concordance avec l’objectif allégué en l’occurrence par le gouvernement français.

74      Enfin, il convient de tenir compte de ce que, en l’occurrence et ainsi qu’il a été rappelé précédemment, l’adoption du régime de bonification en cause au principal est la conséquence de la nécessité de remédier à la non-conformité au principe d’égalité de rémunération du régime de bonification antérieurement en vigueur, découlant de l’arrêt Griesmar (EU:C:2001:648).

75      Étant destiné à s’appliquer aux liquidations de pensions intervenant à compter du 28 mai 2003 et en considération des enfants nés, adoptés ou accueillis au foyer avant le 1er janvier 2004, le régime de bonification en cause au principal a ainsi eu pour objet de régler le sort de bonifications dont la liquidation relevait jusqu’alors de ce régime antérieur.

76      Or, il y a lieu de rappeler que, dans cet arrêt, la Cour a jugé que ledit régime antérieur méconnaissait le principe de l’égalité de traitement en ce qu’il excluait du bénéfice de la bonification les fonctionnaires masculins qui étaient à même de prouver avoir assumé l’éducation de leurs enfants (arrêt Griesmar, EU:C:2001:648, point 67).

77      À cet égard, il importe de souligner que, bien que les modalités d’octroi de la bonification prévues par le régime en cause au principal soient destinées à s’appliquer uniquement aux pensions qui, pour l’essentiel, font l’objet d’une liquidation après l’entrée en vigueur de ce régime, il n’en demeure pas moins que ce dernier est susceptible d’avoir eu pour effet de retirer, pour l’avenir, à certains fonctionnaires masculins, un droit qu’ils tiraient de l’effet direct de l’article 141 CE. Or, il convient de rappeler que, si le droit de l’Union ne s’oppose pas à ce qu’un État membre agisse de la sorte, c’est à la condition, notamment, que les mesures qu’il adopte à cet égard respectent le principe de l’égalité de traitement entre hommes et femmes (voir, en ce sens, arrêt Roks e.a., C‑343/92, EU:C:1994:71, points 29 et 30).

78      Cependant, ainsi qu’il ressort des points 65 à 73 du présent arrêt, tel ne paraît pas, sous réserve des appréciations finales revenant à cet égard aux juridictions nationales, être le cas du régime de bonification en cause au principal.

79      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la deuxième question que l’article 141 CE doit être interprété en ce sens que, sauf à pouvoir être justifié par des facteurs objectifs étrangers à toute discrimination fondée sur le sexe, tels qu’un objectif légitime de politique sociale, et à être propre à garantir l’objectif invoqué et nécessaire à cet effet, ce qui exige qu’il réponde véritablement au souci d’atteindre ce dernier et qu’il soit mis en œuvre de manière cohérente et systématique dans cette perspective, un régime de bonification de pension tel que celui en cause au principal engendre une discrimination indirecte en matière de rémunération entre travailleurs féminins et travailleurs masculins contraire à cet article.

 

 Sur la première question

80      Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 141 CE doit être interprété en ce sens que des dispositions relatives à la retraite anticipée avec pension à jouissance immédiate, telles que celles en cause au principal, engendrent une discrimination indirecte en matière de rémunération entre travailleurs féminins et travailleurs masculins contraire à cet article.

81      À titre liminaire, il importe de souligner que les articles L. 24 et R. 37 du code des pensions, qui concernent la retraite anticipée avec pension à jouissance immédiate, ont, à l’instar de celles caractérisant le régime de bonification en cause au principal, été adoptées afin de tenir compte des enseignements découlant de l’arrêt Griesmar (EU:C:2001:648).

82      Ces articles subordonnent le droit, pour un fonctionnaire, parent de trois enfants ou d’un enfant âgé de plus d’un an et atteint d’une invalidité égale ou supérieure à 80 %, de bénéficier d’une telle retraite anticipée, à la condition que l’intéressé puisse justifier, pour chaque enfant, d’une interruption d’activité d’une durée continue au moins égale à deux mois intervenue dans le cadre d’un congé de maternité, d’un congé de paternité, d’un congé d’adoption, d’un congé parental ou d’un congé de présence parentale ou d’une disponibilité pour élever un enfant de moins de huit ans. En cas de naissances ou d’adoptions simultanées, la durée d’interruption d’activité prise en compte au titre de l’ensemble des enfants concernés est également de deux mois.

83      S’agissant des enfants biologiques ou adoptés, ladite interruption doit être intervenue pendant la période comprise entre le premier jour de la quatrième semaine précédant la naissance ou l’adoption et le dernier jour de la seizième semaine suivant la naissance ou l’adoption.

84      En ce qui concerne les enfants pris en charge, les dispositions susmentionnées prévoient que ceux-ci doivent avoir été élevés durant au moins neuf années par le fonctionnaire concerné et que l’interruption d’activité doit être intervenue soit avant leur seizième anniversaire, soit avant l’âge auquel ils ont cessé d’être à charge.

85      Il ressort également de ces dispositions que sont assimilées à l’interruption d’activité les périodes n’ayant pas donné lieu à cotisation de l’intéressé et pendant lesquelles celui-ci n’exerçait aucune activité professionnelle.

86      Or, pour des raisons mutatis mutandis identiques à celles exposées aux points 43 à 49 du présent arrêt, force est de constater, tout d’abord, que, bien que de telles dispositions revêtent une apparence de neutralité en ce qui concerne le sexe des fonctionnaires concernés, les modalités auxquelles celles-ci subordonnent ainsi l’octroi de l’avantage en cause au principal sont en l’occurrence de nature à conduire à ce qu’un pourcentage beaucoup plus élevé de femmes que d’hommes bénéficie de celui-ci.

87      Dans ces conditions, il convient, ensuite, de vérifier, conformément aux principes jurisprudentiels rappelés aux points 52 à 55 du présent arrêt, si la différence de traitement entre les travailleurs féminins et les travailleurs masculins ainsi engendrée est néanmoins susceptible d’être justifiée par des facteurs objectifs étrangers à toute discrimination fondée sur le sexe.

88      À cet égard, le gouvernement français a affirmé, dans ses observations, que les dispositions nationales concernées poursuivent une finalité identique à celle de la bonification en cause au principal, à savoir compenser les désavantages de carrière qui résultent de l’interruption de l’activité professionnelle en raison de la naissance, de l’arrivée au foyer ou de l’éducation des enfants.

89      Ainsi qu’il a été rappelé au point 56 du présent arrêt, c’est à la juridiction nationale qu’il appartient, en dernier lieu, de vérifier, au vu de tous les éléments pertinents, si, compte tenu des modalités qui le caractérisent, le régime de retraite anticipée avec pension à jouissance immédiate en cause au principal, en tant que moyen destiné à atteindre cet objectif, est à même de contribuer à la réalisation de ce dernier et s’il répond véritablement au souci de l’atteindre et est mis en œuvre de manière cohérente et systématique au regard de cet objectif. La Cour est toutefois compétente pour donner à ladite juridiction des indications de nature à lui permettre de statuer.

90      Or, s’agissant, en particulier, du souci véritable d’atteindre l’objectif allégué en l’occurrence et de l’exigence de cohérence et de systématisme dans cette perspective, il convient de relever, en premier lieu, qu’il n’apparaît pas, a priori, que le fait d’admettre des fonctionnaires, de manière anticipée, à la retraite avec pension à jouissance immédiate puisse être de nature à compenser des désavantages de carrière résultant d’une triple interruption d’activité professionnelle de deux mois en raison de la naissance, de l’arrivée au foyer ou de l’éducation des enfants ou d’une interruption unique de carrière de deux mois en raison de la naissance ou de l’arrivée au foyer d’un enfant atteint d’une invalidité supérieure à 80 %. Le gouvernement français n’a pas non plus établi en quoi ce fait pourrait être de nature à compenser ces désavantages de carrière.

91      Ensuite, force est de relever que divers éléments caractérisant l’avantage en cause au principal ne paraissent pas, a priori, pouvoir être justifiés de manière cohérente au regard de l’objectif de compensation desdits désavantages ainsi allégué.

92      Il en va ainsi, premièrement et ainsi qu’il a déjà été relevé en ce qui concerne la bonification en cause au principal aux points 72 et 73 du présent arrêt, de la circonstance selon laquelle, en présence de certains enfants, le bénéfice de la retraite anticipée avec pension à jouissance immédiate est subordonné non seulement à une interruption d’activité professionnelle de deux mois, mais également à la condition supplémentaire que ces enfants aient été élevés pendant neuf ans au moins par le fonctionnaire concerné.

93      Tel est également le cas, deuxièmement, du fait que l’avantage en cause au principal est accordé aux fonctionnaires indifféremment, selon qu’ils ont interrompu leur carrière à raison de trois périodes de deux mois pour trois enfants distincts ou à raison d’une seule période de deux mois pour un enfant atteint d’une invalidité égale ou supérieure à 80 %. En effet, il n’apparaît pas, a priori, que les désavantages de carrière censés découler d’une interruption de carrière d’une durée de deux mois et que vise prétendument à compenser ledit avantage soient différents selon que l’enfant né ou adopté est ou non atteint d’un handicap.

94      Il en va de même, troisièmement, de la circonstance selon laquelle il semble ressortir des dispositions en cause au principal que, en cas de naissances ou d’adoptions simultanées, l’unique période de deux mois d’interruption de carrière en ayant résulté est comptabilisée autant de fois qu’il y a d’enfants concernés. Or, il n’apparaît pas, a priori, que les désavantages de carrière censés découler d’une interruption de carrière d’une durée de deux mois et que vise à compenser cet avantage soient différents selon que cette interruption a lieu en raison de naissances ou d’adoptions uniques ou multiples.

95      Quatrièmement, il appartiendra à la juridiction de renvoi d’examiner si, en fonction de leur portée exacte, les dispositions des articles L. 24, I, 3°, et R. 37, III, du code des pensions, qui prévoient que le bénéfice de l’avantage en cause au principal est accordé en considération de périodes pendant lesquelles l’intéressé n’exerçait aucune activité professionnelle, sont, le cas échéant, également de nature à porter atteinte à l’exigence de cohérence susmentionnée.

96      Il convient d’ajouter que, dans l’examen qu’elle est ainsi appelée à effectuer aux fins de s’assurer que le régime en cause au principal répond véritablement au souci d’atteindre l’objectif allégué et qu’il est mis en œuvre de manière cohérente et systématique au regard de ce dernier, cette juridiction pourra également être amenée à tenir compte des relations éventuelles qu’entretient le régime de mise à la retraite anticipée avec pension à jouissance immédiate en cause au principal avec le dispositif national antérieur, auquel il a succédé et au sujet duquel la Cour ne dispose pas d’informations suffisantes. À cet égard, ladite juridiction nationale pourra, en particulier, être conduite à vérifier dans quelle mesure de telles relations pourraient, à l’instar de ce qui a été relevé dans le présent arrêt au sujet du régime de bonification en cause au principal, exercer une influence sur cet examen.

97      Dans la présente affaire, et compte tenu de ce qui a été rappelé au point 81 du présent arrêt, il y a lieu de relever, enfin, que les considérations énoncées, à propos dudit régime de bonification, aux points 74 à 78 de cet arrêt, ont, le cas échéant, également vocation à s’appliquer, mutatis mutandis, en ce qui concerne le régime de mise à la retraite anticipée avec pension à jouissance immédiate en cause au principal.

98      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la première question que l’article 141 CE doit être interprété en ce sens que, sauf à pouvoir être justifié par des facteurs objectifs étrangers à toute discrimination fondée sur le sexe, tels qu’un objectif légitime de politique sociale, et à être propre à garantir l’objectif invoqué et nécessaire à cet effet, ce qui exige qu’il réponde véritablement au souci d’atteindre ce dernier et qu’il soit mis en œuvre de manière cohérente et systématique dans cette perspective, un régime de mise à la retraite anticipée avec pension à jouissance immédiate, tel que celui en cause au principal, engendre une discrimination indirecte en matière de rémunération entre travailleurs féminins et travailleurs masculins contraire à cet article.

 

 Sur la troisième question

99      Par sa troisième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si les discriminations indirectes qui auraient le cas échéant été identifiées dans le cadre de l’examen des première et deuxième questions peuvent être justifiées en vertu de l’article 141, paragraphe 4, CE.

100    Cette dernière disposition prévoit que, pour assurer concrètement une pleine égalité entre hommes et femmes dans la vie professionnelle, le principe de l’égalité de traitement n’empêche pas un État membre de maintenir ou d’adopter des mesures prévoyant des avantages spécifiques destinés à faciliter l’exercice d’une activité professionnelle par le sexe sous-représenté ou à prévenir ou à compenser des désavantages dans la carrière professionnelle.

101    En l’occurrence, il suffit de rappeler, à cet égard, que la Cour a déjà jugé qu’une mesure telle que la bonification en cause au principal ne constitue pas une mesure visée par cette disposition du traité CE, dès lors qu’elle se borne à accorder aux fonctionnaires une bonification d’ancienneté au moment de leur départ à la retraite, sans porter remède aux problèmes qu’ils peuvent rencontrer durant leur carrière professionnelle, et qu’elle n’apparaît pas comme étant de nature à compenser les désavantages auxquels seraient exposés lesdits travailleurs en aidant ceux-ci dans cette carrière et à assurer ainsi concrètement une pleine égalité entre hommes et femmes dans la vie professionnelle (voir, en ce sens, arrêt Griesmar, EU:C:2001:648, points 63 à 65; voir, également, arrêts Commission/Italie, C‑46/07, EU:C:2008:618, points 57 et 58, ainsi que Commission/Grèce, C‑559/07, EU:C:2009:198, points 66 à 68).

102    Il en va de même d’une mesure telle que la mise à la retraite anticipée avec pension à jouissance immédiate, dès lors que cette mesure, qui se borne à favoriser une fin anticipée de la carrière professionnelle, n’est pas davantage de nature à porter remède aux problèmes que peuvent rencontrer les fonctionnaires durant leur carrière professionnelle en aidant ceux-ci dans cette carrière ni à assurer ainsi, concrètement, une pleine égalité entre hommes et femmes dans la vie professionnelle.

103    Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de répondre à la troisième question que l’article 141, paragraphe 4, CE doit être interprété en ce sens que ne relèvent pas des mesures visées à cette disposition des mesures nationales, telles que celles en cause au principal, qui se bornent à permettre aux travailleurs concernés de bénéficier d’une retraite anticipée avec pension à jouissance immédiate et à leur accorder une bonification d’ancienneté lors de leur départ à la retraite, sans porter remède aux problèmes qu’ils peuvent rencontrer durant leur carrière professionnelle.

 

 Sur les dépens

104    La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) dit pour droit:

1)      L’article 141 CE doit être interprété en ce sens que, sauf à pouvoir être justifié par des facteurs objectifs étrangers à toute discrimination fondée sur le sexe, tels qu’un objectif légitime de politique sociale, et à être propre à garantir l’objectif invoqué et nécessaire à cet effet, ce qui exige qu’il réponde véritablement au souci d’atteindre ce dernier et qu’il soit mis en œuvre de manière cohérente et systématique dans cette perspective, un régime de bonification de pension tel que celui en cause au principal engendre une discrimination indirecte en matière de rémunération entre travailleurs féminins et travailleurs masculins contraire à cet article.

2)      L’article 141 CE doit être interprété en ce sens que, sauf à pouvoir être justifié par des facteurs objectifs étrangers à toute discrimination fondée sur le sexe, tels qu’un objectif légitime de politique sociale, et à être propre à garantir l’objectif invoqué et nécessaire à cet effet, ce qui exige qu’il réponde véritablement au souci d’atteindre ce dernier et qu’il soit mis en œuvre de manière cohérente et systématique dans cette perspective, un régime de mise à la retraite anticipée avec pension à jouissance immédiate, tel que celui en cause au principal, engendre une discrimination indirecte en matière de rémunération entre travailleurs féminins et travailleurs masculins contraire à cet article.

3)      L’article 141, paragraphe 4, CE doit être interprété en ce sens que ne relèvent pas des mesures visées à cette disposition des mesures nationales, telles que celles en cause au principal, qui se bornent à permettre aux travailleurs concernés de bénéficier d’une retraite anticipée avec pension à jouissance immédiate et à leur accorder une bonification d’ancienneté lors de leur départ à la retraite, sans porter remède aux problèmes qu’ils peuvent rencontrer durant leur carrière professionnelle.

Signatures