Saisie d’une demande d’annulation d’une décision préfectorale d’internement d’office, la Cour administrative d’appel a affirmé que les arrêtés préfectoraux d’hospitalisation d’office, bien que soumis à l’obligation de motivation prévue par l’article L. 3213-1 du code de la santé publique, n’en demeurent pas moins compris dans le champ d’application de l’article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, que relevant de l’obligation générale de motivation de l’article 1er de la loi du 11 juillet 1979 instituée pour les mesures de police, ils ne peuvent intervenir, en l’absence de dispositions du code de la santé publique organisant une procédure particulière, sauf urgence ou circonstances exceptionnelles, qu’après que l’intéressé a été mis à même de présenter ses observations, ou qu’a été constatée l’impossibilité de les recueillir.
Cours administratives d'appel
LA COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE LYON.
4ème chambre
N° 07LY02624
9 juillet 2009
Vu la requête enregistrée le 26 novembre 2007, présentée pour M. X domicilié (...) ;
M. X demande à la Cour :
1°) d’annuler le jugement n° 0404493 du Tribunal administratif de Grenoble en date du 2 octobre 2007, en ce qu’il a rejeté sa demande d’annulation de l’arrêté du 17 juin 2004 par lequel le préfet de la Savoie a ordonné son hospitalisation d’office ;
2°) d’annuler pour excès de pouvoir ledit arrêté ;
3°) de condamner l’Etat à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761 1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, notamment l’article 5 ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Sur les conclusions à fin d’annulation :
Sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ;
Considérant qu’aux termes de l’article 1er du 11 juillet 1979 : « (…) doivent être motivées les décisions qui : - restreignent l’exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (…) » ; qu’aux termes de l’article 24 de la loi du 12 avril 2000 : « Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 (…) n’interviennent qu’après que la personne intéressée a été mise à même de présenter ses observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, ses observations orales (…) / Les dispositions de l’alinéa précédent ne sont pas applicables : 1° En cas d’urgence ou de circonstances exceptionnelles ; (…) 3° Aux décisions pour lesquelles des dispositions législatives ont instauré une procédure contradictoire particulière » ; que, d’autre part, aux termes de l’article L. 3213-1 du code de la santé publique : « (…) les représentants de l’Etat prononcent par arrêté, au vu d’un certificat médical circonstancié, l’hospitalisation d’office (…) des personnes dont les troubles mentaux nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l’ordre public. Le certificat médical circonstancié ne peut émaner d’un psychiatre exerçant dans l’établissement accueillant le malade. Les arrêtés préfectoraux sont motivés et énoncent avec précision les circonstances qui ont rendu l’hospitalisation nécessaire (…) » ;
Considérant que les arrêtés préfectoraux d’hospitalisation d’office, bien que soumis à l’obligation de motivation prévue par l’article L. 3213-1 précité du code de la santé publique, n’en demeurent pas moins compris dans le champ d’application de l’article 24 précité de la loi du 12 avril 2000 ; que relevant de l’obligation générale de motivation de l’article 1er précité de la loi du 11 juillet 1979 instituée pour les mesures de police, ils ne peuvent intervenir, en l’absence de dispositions du code de la santé publique organisant une procédure particulière, sauf urgence ou circonstances exceptionnelles, qu’après que l’intéressé a été mis à même de présenter ses observations, ou qu’a été constatée l’impossibilité de les recueillir ;
Considérant qu’il est constant que l’arrêté du 17 juin 2004 a été pris sans que M. X ait été mis à même de présenter ses observations, alors qu’il n’est pas allégué que son état de santé aurait rendu cette formalité impossible et qu’il ressort des pièces du dossier qu’il n’y avait en l’espèce ni urgence, ni circonstances exceptionnelles ; que celui-ci est, dès lors, fondé à en demander l’annulation, ainsi que du jugement attaqué en ce qu’il a rejeté sa demande d’annulation dudit arrêté ;
Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de condamner l’Etat à verser à M. X une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : L’arrêté du 17 juin 2004 par lequel le préfet de la Savoie a ordonné l’hospitalisation d’office de M. X ainsi que le jugement n° 0404493 du Tribunal administratif de Grenoble en date du 2 octobre 2007, en ce qu’il a rejeté la demande d’annulation dudit arrêté, sont annulés.
Article 2 : L’Etat versera à M. X une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 juin 2009 :
- le rapport de M. Arbarétaz, premier conseiller ;
- les observations de Me Mayet, avocat de M. X ;
- et les conclusions de M. Besle, rapporteur public ;
La parole ayant été de nouveau donnée à Me Mayet ;
M. du Besset, Président.