Le référé suspension ne peut plus être exercé après la signature du marché, car la décision attaquée serait alors déjà exécutée. |
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête, enregistrée le 21 juin 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la REGION CENTRE, représentée par le président du conseil régional, domicilié à l'Hôtel de Région, 9 rue Saint-Pierre Lentin à Orléans cedex (45041) ; la REGION CENTRE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance du 5 juin 2002 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif d'Orléans, statuant en application de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a, à la demande de la société Canale 3 et autres, suspendu les effets des actes ayant conduit à la signature de l'acte d'engagement du marché de maîtrise d'oeuvre de la construction d'un établissement public d'enseignement et de formation professionnelle sur la commune de Subdray ;
2°) de condamner les demandeurs de première instance à lui verser la somme de 4 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Lenica, Auditeur,
- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de la REGION CENTRE et de la SCP Parmentier, Didier, avocat de la société Canale 3 et autres,
- les conclusions de M. Le Chatelier, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par une ordonnance du 5 juin 2002, le juge des référés du tribunal administratif d'Orléans a prononcé la suspension des effets des actes ayant conduit à la signature, par le maître d'ouvrage délégué, de l'acte d'engagement du marché de maîtrise d'oeuvre confié par la REGION CENTRE au cabinet X. pour la construction d'un établissement d'enseignement sur le territoire de la commune du Subdray ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : "Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (.)" ;
Considérant que l'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre ; qu'il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue ; qu'il lui appartient également, l'urgence s'appréciant objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de chaque espèce, de faire apparaître dans sa décision tous les éléments qui, eu égard notamment à l'argumentation des parties, l'ont conduit à considérer que la suspension demandée revêtait un caractère d'urgence ;
Considérant que, pour prononcer la suspension de la décision litigieuse, le juge des référés du tribunal administratif d'Orléans s'est borné à indiquer que l'urgence était établie "compte tenu des intérêts en présence", sans faire apparaître dans sa décision les éléments qui justifiaient une telle suspension ; que l'ordonnance attaquée est ainsi entachée d'une insuffisance de motivation et doit être annulée ;
Considérant qu'il y a lieu, par application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire engagée au titre de la procédure de référé par la société Canale 3 et les autres demandeurs de première instance ;
Considérant que ces derniers demandent au juge des référés la suspension des effets de la seule décision du maître d'ouvrage délégué par la REGION CENTRE de passer le marché de maîtrise d'oeuvre avec le cabinet X. en vue de la construction de l'établissement public d'enseignement du Subdray ; que cette décision, matérialisée par la seule signature apposée sur l'acte d'engagement, était entièrement exécutée à la date à laquelle le juge des référés a été saisi de conclusions tendant à ce qu'il prononce la suspension de ses effets ; que ces conclusions étaient ainsi sans objet et par suite irrecevables ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à que la REGION CENTRE, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamnée à payer à la société Canale 3, au bureau d'études techniques BET ING, à M. X., à la Sarl Etic, à la Sarl Bureau Michel Forgues, à Mme Y., à M. Z. et à M. A... la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche de condamner la société Canale 3, mandataire du groupement formé par ces derniers, à payer à la REGION CENTRE une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif d'Orléans en date du 5 juin 2002 est annulée.
Article 2 : La demande présentée par la société Canale 3 et autres devant le tribunal administratif d'Orléans est rejetée.
Article 3 : La société Canale 3 versera une somme de 2 000 euros à la REGION CENTRE au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la REGION CENTRE est rejeté.
Article 5 : Les conclusions de la société Canale 3, du bureau d'études techniques BET ING, de M. X., de la Sarl ETIC, de la Sarl Bureau Michel Forgues, de Mme Y., de M. Z. et de M. A. tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : La présente décision sera notifiée à la REGION CENTRE, à la société Canale 3, au bureau d'études techniques BET ING, à M. X., à la Sarl ETIC, à la Sarl Bureau Michel Forgues, à Mme Y., à M. Z., à M. A. et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.