Des dispositions du décret du 24 janvier 1994 relatif à l'hémovigilance - dispositions codifiées sous les articles R. 666-12-24 et R. 666-12-25 du code de la santé publique et rappelées dans ma circulaire n° 40 du 7 juillet 1994 - prévoient que tout praticien ou auxiliaire médical qui constate des effets inattendus ou indésirables susceptibles d'être liés à un acte transfusionnel est tenu de les déclarer au correspondant d'hémovigilance de l'établissement de santé où le produit a été administré ou, à défaut, à tout correspondant d'hémovigilance d'un établissement de transfusion sanguine ou de santé.
Le correspondant ainsi informé établit, après enquête dans le service concerné et en liaison avec le correspondant d'hémovigilance de l'établissement de transfusion sanguine distributeur, une fiche d'incident transfusionnel qui est transmise au coordonnateur régional de l'hémovigilance dans tous les cas, ainsi qu'au préfet du département (médecin inspecteur départemental) où survient l'incident et à l'Agence française du sang lorsqu'il s'agit d'incident impliquant le décès du patient, une menace vitale immédiate ou une morbidité à long terme.
A ma circulaire du 7 juillet 1994 précitée est annexée la directive technique n° 1 de l'Agence française du sang qui précise le contenu et les modalités de transmission de la fiche d'incident transfusionnel.
J'appelle tout particulièrement votre attention sur ce que l'ensemble de ces dispositions est applicable aux découvertes de séroconversion ou d'une séropositivité virale chez des receveurs de produits sanguins labiles. Ces découvertes constituent en effet des incidents transfusionnels majeurs.
La présente circulaire :
- rappelle et précise les procédures à appliquer en cas de découverte d'une séroconversion ou d'une sérologie positive chez un receveur de produits sanguins labiles ;
- souligne l'importance de la mise en oeuvre de ces mesures au regard des enjeux de santé publique ;
- indique les suites à donner aux demandes d'enquêtes des établissements de transfusion sanguine en vue de retrouver les receveurs de produits sanguins labiles lorsque ces produits présentent un risque de contamination virale.
Vous vous assurerez que les établissements de santé assurent la plus large diffusion de la présente circulaire auprès de leurs correspondants d'hémovigilance, des comités de sécurité transfusionnelle et d'hémovigilance et des chefs des services consommateurs de produits sanguins labiles.
I. - APPLICATION DES PROCEDURES DE DECLARATION D'INCIDENT TRANSFUSIONNEL AUX SEROCONVERSIONS ET SEROPOSITIVITES VIRALES
1.1. Les enjeux de santé publique
S'il importe de traiter la découverte d'une séroconversion, dans le cadre de l'hémovigilance, comme un incident transfusionnel majeur, c'est que le défaut d'alerte à l'occasion d'un tel incident peut avoir des conséquences très graves au regard de la santé publique. Cela est vrai même si la date de la découverte de la séropositivité est éloignée de la date de l'administration de produits sanguins labiles.
Ainsi, dès lors qu'une séroconversion ou une séropositivité est constatée dans les suites, précoces ou tardives, de l'administration de produits sanguins labiles, cette séropositivité doit être déclarée comme incident transfusionnel quarante-huit heures au plus tard après la date de sa découverte.
En effet, si la fiche d'incident transfusionnel n'est pas envoyée dans les plus brefs délais, et au plus tard dans les quarante-huit heures, les enquêtes destinées à retrouver le ou les donneurs dont le sang a été utilisé pour préparer le produit transfusé, puis les autres produits - labiles et stables - préparés à partir du sang de ces donneurs sont retardées d'autant. Par suite, le rappel de ces produits, qui doit être effectué en attendant de disposer des résultats d'un nouveau contrôle sur le ou les donneurs concernés confirmant ou infirmant l'hypothèse d'une contamination de l'un d'eux, est également retardé. Ce retard peut avoir des conséquences aussi graves que la contamination d'autres receveurs, voire de leur entourage.
Enfin, si l'hypothèse de la contamination d'un donneur est confirmée, le retard pris pour le contrôler constitue autant de retard pour rompre la chaîne de la contamination de ses partenaires éventuels.
1.2. Rappels et précisions sur la conduite à tenir en cas de découverte d'une séroconversion ou d'une séropositivité virale chez un receveur de produits sanguins labiles
1.2.1. En cas de découverte d'une séroconversion ou d'une séropositivité virale chez un receveur, les correspondants d'hémovigilance de l'établissement de santé et de l'établissement de transfusion sanguine remplissent, en collaboration, une F.I.T. (fiche d'incident transfusionnel). En cas d'absence ou de défaillance de l'un des deux correspondants, l'autre correspondant se charge de l'établissement et de l'envoi de la F.I.T. dans le délai de quarante-huit heures.
La F.I.T. a pour objet le constat de l'incident et une amorce d'analyse relative à son imputabilité telle qu'elle peut être appréhendée en quarante-huit heures. De plus, en cas de transfusion récente mais toutefois compatible avec le délai de séroconversion du receveur, la déclaration va permettre la mise en oeuvre rapide des mesures conservatoires décrites au point II-2 ci-dessous.
Les items de la F.I.T. doivent être correctement remplis en fonction des données disponibles, et surtout :
- les antécédents, les dates de déclaration et de découverte, les délais après la transfusion, les coordonnées des correspondants ;
- l'indication précise de la transfusion ;
- la nature des P.S.L. transfusés.
Cependant, ces rubriques peuvent être laissées incomplètes du fait de la difficulté de réunir les informations souvent éparses, jusqu'à ce que l'enquête consécutive à la rédaction de la F.I.T. permette de recueillir et d'établir les informations manquantes. Ces éventuelles lacunes ne doivent en aucun cas retarder la rédaction et l'envoi de la F.I.T. dans les quarante-huit heures à ses différents destinataires : coordonnateur régional, préfet de département et, selon le cas, Agence française du sang.
Si la F.I.T ne permet pas de déterminer avec précision et certitude l'imputabilité de l'incident et ses éventuelles conséquences en particulier pour les autres receveurs, les correspondants, en liaison avec le coordonnateur régional, poursuivent leur enquête, qui comporte notamment :
- la recherche des autres facteurs de risque, des diagnostics différentiels ;
- les résultats de l'enquête ascendante chez les donneurs impliqués ;
- le statut sérologique des autres receveurs éventuels des P.S.L. préparés à partir du même don.
Ils font parvenir ensuite leur rapport au coordonnateur et à l'A.F.S. dans les meilleurs délais. Les procédures rappelées doivent être mises en oeuvre dans tous les cas de découverte de séropositivité virale chez une personne transfusée, et même si la transfusion est ancienne.
1.2.2. Dès la connaissance de l'incident, différentes mesures doivent être mises en oeuvre immédiatement :
- les E.T.S. ayant fourni les P.S.L. transfusés au receveur trouvé positif doivent être informés par les correspondants d'hémovigilance, afin qu'ils initient les enquêtes ascendantes auprès des donneurs concernés. A réception de l'information, les E.T.S. doivent immédiatement identifier les donneurs à l'origine des P.S.L. suspectés et rappeler tous les P.S.L. en circulation issus de ces donneurs en attendant de disposer de résultats d'un recontrôle de ces donneurs. Ils devront également informer le L.F.B. sans délai si du plasma pour fractionnement lui a été cédé ;
- en cas de coprescription de produit stable, il convient de communiquer une copie de la F.I.T. au correspondant de pharmacovigilance de l'E.S. dans lequel ces médicaments ont été administrés ; ces derniers avertissent l'agence du médicament conformément au dispositions relatives à la pharmacovigilance sur les médicaments dérivés du sang (art. R. 666-12-24 et R. 5144-37 du code de la santé publique).
II. - MISE EN OEUVRE D'ENQUETES DESCENDANTES
L'Agence française du sang a envoyé aux établissements de transfusion sanguine une note datée du 7 mai 1996 et relative à la mise en oeuvre d'enquêtes descendantes. Il s'agit d'enquêtes visant à retrouver les patients ayant reçu des produits sanguins labiles qui présentent un risque viral pour les receveurs, c'est-à-dire des produits issus de dons précédant la découverte d'une séroconversion ou d'une anomalie chez un donneur, afin de proposer à ces receveurs un contrôle sérologique.
Ces enquêtes concernent l'hépatite B, l'hépatite C, les infections à V.I.H. et à H.T.L.V.
Il m'apparaît indispensable que les médecins prescripteurs saisis par un E.T.S. d'une telle demande d'enquête lui donnent suite dans les meilleurs délais. Dans ce but, il convient :
- de vérifier le devenir des produits concernés dans l'établissement ou le service (administration, retour, péremption...) ;
- le cas échéant, d'identifier le receveur, de le reconvoquer et de lui proposer les contrôles sérologiques adaptés (dépistages antigène H.B.s., anticorps anti V.I.H. 1 et V.I.H. 2, anticorps anti V.H.C. ou anticorps anti H.T.L.V.I. 1 et H.T.L.V.I.I. 2, selon le cas). Quel que soit le résultat de l'enquête - qui peut ne pas aboutir en cas de receveurs perdus de vue, par exemple - ce résultat doit être communiqué à l'E.T.S.
Là encore, l'enjeu de santé publique est important puisque ces enquêtes descendantes sont le moyen indispensable pour interrompre une éventuelle chaîne de contamination entre le donneur contaminé et ses partenaires et pour faire bénéficier ce donneur d'un traitement adapté le plus précocement possible.
Vous voudrez bien me faire connaître les éventuelles difficultés que pourrait soulever la mise en oeuvre de la présente circulaire.
Référence : articles L. 666-12 et R. 666-12-1 à R. 666-12-26 du code de la santé publique. Circulaire DGS/DH n° 40 du 7 juillet 1994 relative au décret n° 94-68 du 14 janvier 1994 relatif à l'hémovigilance.
Le ministre du travail et des affaires sociales. Direction générale de la santé. Direction des hôpitaux.
à Mesdames et Messieurs les préfets de région (directions régionales des affaires sanitaires et sociales [pour mise en oeuvre] et diffusion aux établissements de santé) ; Mesdames et Messieurs les préfets de département (directions départementales des affaires sanitaires et sociales [pour information]).
Texte non paru au Journal officiel.