L'agent qui manque à son devoir de réserve en faisant état publiquement, notamment par le déploiement de banderoles en public et l'envoi de communiqués à la presse, du différend qui l'oppose à sa direction, commet une faute susceptible d'être sanctionnée d'une sanction disciplinaire :
" [...] Considérant, toutefois, qu'il ressort également des pièces du dossier qu'en faisant état publiquement du différend professionnel qui l'opposait à la direction de la MAISON DE RETRAITE DE GERBEVILLER, notamment par le déploiement de banderoles en public et l'envoi de communiqués à la presse, Mlle A a manqué au devoir de réserve qui s'impose à tout agent public ; qu'ainsi la commission des recours du conseil supérieur de la fonction publique hospitalière a inexactement qualifié les faits en estimant qu'aucune faute n'avait été commise par l'intéressée et qu'il n'y avait dès lors pas lieu de proposer de sanction à son encontre [...] " |
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête, enregistrée le 29 mars 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la MAISON DE RETRAITE DE GERBEVILLER représentée par le président de son conseil d'administration, à ce dûment autorisé par délibération dudit conseil en date du 23 décembre 2004, dont le siège est 16, rue Maurice Barrès à Gerbéviller (54830) ; la MAISON DE RETRAITE DE GERBEVILLER demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'avis en date du 2 février 2005 par lequel la commission des recours du conseil supérieur de la fonction publique hospitalière a déclaré recevable le recours de Mlle A et décidé qu'il n'y avait pas lieu de proposer de sanction à son encontre ;
2°) de prononcer la révocation de Mlle A ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la ;
Vu le décret n° 88-989 du 13 octobre 1988 ;
Vu le décret n° 89-822 du 7 novembre 1989 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Herbert Maisl, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Didier Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;
Sur la fin de non recevoir opposée par Mlle A :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, d'une part, que par une délibération du 23 décembre 2004, le conseil d'administration de la MAISON DE RETRAITE DE GERBEVILLER a autorisé son directeur à ester en justice dans l'affaire l'opposant à Mlle A et, d'autre part, que Maître Crouzier a produit le 15 avril 2005 le pouvoir lui donnant qualité pour agir au nom de la MAISON DE RETRAITE DE GERBEVILLER ; qu'ainsi, la fin de non recevoir présentée par Mlle A doit être écartée ;
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 84 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : Les fonctionnaires qui ont fait l'objet d'une sanction des deuxième, troisième et quatrième groupes peuvent introduire un recours auprès du conseil supérieur de la fonction publique hospitalière lorsque l'autorité investie du pouvoir disciplinaire a prononcé une sanction plus sévère que celle proposée par le conseil de discipline ; qu'aux termes de l'article 26 du décret du 13 octobre 1988 relatif au conseil supérieur de la fonction publique hospitalière : ( ) lorsque l'avis émis par la commission des recours prévoit une sanction moins sévère que celle qui a été prononcée par l'autorité investie du pouvoir disciplinaire, celle-ci est tenue de lui substituer une nouvelle décision, qui ne peut comporter de sanction plus sévère que celle retenue par la commission des recours ;
Considérant que Mlle A, infirmière diplômée d'Etat, employée à la MAISON DE RETRAITE DE GERBEVILLER, a fait l'objet le 26 octobre 2004 d'une décision du directeur de cette maison de retraite prononçant sa révocation pour « manquement à ses obligations professionnelles, comportement dégradé et irresponsable, incompatible avec les devoirs d'une infirmière diplômée d'Etat et avec les responsabilités qui lui étaient confiées et manquement à l'obligation de réserve » ; que le conseil de discipline de l'établissement s'étant prononcé le 7 octobre 2004 en faveur d'une absence de sanction, la décision du directeur devait être regardée comme plus sévère et pouvait, en conséquence, faire l'objet, de la part de l'intéressée, d'un recours devant la commission des recours du conseil supérieur de la fonction publique hospitalière ; que, dans l'avis qu'elle a émis le 2 février 2005, cette commission a estimé qu'il n'y avait pas lieu de proposer de sanction à l'encontre de Mlle A ; que la MAISON DE RETRAITE DE GERBEVILLER demande l'annulation de cet avis pour excès de pouvoir ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les fautes professionnelles reprochées par la MAISON DE RETRAITE DE GERBEVILLER à Mlle A, telles qu'elles résulteraient des faits mentionnés dans la lettre du 10 décembre 1997 visée par l'arrêté de révocation, fautes qui n'ont d'ailleurs fait l'objet à l'époque d'aucune suite disciplinaire ou judiciaire de la part de l'administration et qui ne se sont aucunement traduites dans la notation postérieure de Mlle A, soient établies ; que la commission des recours du conseil supérieur de la fonction publique hospitalière a pu, par une exacte qualification des faits, estimer que les autres manquements professionnels reprochés à l'intéressée ne justifiaient pas une sanction, dès lors que la direction de la MAISON DE RETRAITE DE GERBEVILLER avait décidé, en toute connaissance de cause, de confier à Mlle A des fonctions d'infirmière surveillante responsable des soins alors que cette dernière ne possédait pas les qualifications requises ;
Considérant, toutefois, qu'il ressort également des pièces du dossier qu'en faisant état publiquement du différend professionnel qui l'opposait à la direction de la MAISON DE RETRAITE DE GERBEVILLER, notamment par le déploiement de banderoles en public et l'envoi de communiqués à la presse, Mlle A a manqué au devoir de réserve qui s'impose à tout agent public ; qu'ainsi la commission des recours du conseil supérieur de la fonction publique hospitalière a inexactement qualifié les faits en estimant qu'aucune faute n'avait été commise par l'intéressée et qu'il n'y avait dès lors pas lieu de proposer de sanction à son encontre ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la MAISON DE RETRAITE DE GERBEVILLER est fondée à demander l'annulation de l'avis attaqué ;
Sur les conclusions tendant à confirmer la révocation de Mlle A ;
Considérant qu'il n'appartient pas au juge administratif, saisi par la voie de l'excès de pouvoir, de se substituer à l'administration et de prononcer des sanctions disciplinaires ; qu'ainsi, les conclusions susmentionnées sont irrecevables ;
DECIDE :
Article 1er : L'avis de la commission des recours du conseil supérieur de la fonction publique hospitalière du 2 février 2005 est annulé.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la MAISON DE RETRAITE DE GERBEVILLER est rejeté.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la MAISON DE RETRAITE DE GERBEVILLER, à Mlle Thérèse A, au ministre de la santé et des solidarités et à la commission des recours du conseil supérieur de la fonction publique hospitalière.