En l’espèce, un établissement pour personnes âgées dépendantes exploité par une société a fait l’objet d’une inspection « surprise » par les services de la direction des affaires sanitaires et sociales (DASS). A la suite de cette visite, le préfet a enjoint la société de mettre en œuvre les mesures propres à assurer la sécurité des résidents, la continuité de leur prise en charge, le bien-être des personnes désorientées ainsi que la conformité des contrats de séjour. Il a également avisé la société que le défaut de respect de ces injonctions serait de nature à entraîner une fermeture de l’établissement. Toutefois, à la suite d’une nouvelle inspection non annoncée, l’administration a considéré que cette injonction n’avait pas été respectée, entraînant la fermeture de l’établissement. La société a formé un recours contre cette décision. La Cour administrative d’appel rejette la requête de la société au motif que « le caractère proportionné de l'ingérence que constitue la mise en œuvre, par une autorité publique, de ses pouvoirs de visite et de contrôle des locaux professionnels résulte de l'existence de garanties effectives et appropriées, compte tenu, pour chaque procédure, de l'ampleur et de la finalité de ces pouvoirs ». |
Cour Administrative d'Appel de Versailles
N° 09VE02655
4ème Chambre
M. BROTONS, président
M. Christophe HUON, rapporteur
Mme JARREAU, rapporteur public
DUGAST, avocat
lecture du jeudi 2 septembre 2010
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête, enregistrée le 4 août 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, pour la société LE CHATEAU DE LORMOY, dont le siège est situé 47 / 51 route de Lormoy à Longpont-sur-Orge (91310), par Me Dugast ; la société LE CHATEAU DE LORMOY demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0809274 en date du 15 juin 2009 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 septembre 2008 du préfet de l'Essonne ordonnant la fermeture définitive de l'aile 3B de l'établissement Le Château de Lormoy ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ledit arrêté ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que l'arrêté litigieux a été pris au terme d'une procédure irrégulière faute de respect de la procédure contradictoire prévue par l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 à laquelle ne saurait se substituer la procédure particulière prévue par l'article L. 331-5 du code de l'action sociale et des familles, qui a d'ailleurs disparu depuis la modification de cet article par l'ordonnance n°2 005-1477 du 1er décembre 2005 ; qu'à cet égard, les observations formulées dans le cadre du rapport d'inspection, lesquelles ne préjugent pas d'une éventuelle décision du préfet, ne répondent pas à l'exigence légale du respect du contradictoire ; qu'en outre, la lettre du 30 juillet 2008 sollicitant des observations sur le rapport provisoire n'a pas été signée par le préfet, ne mentionnait pas la possibilité de présenter des observations orales et ne contenait aucune indication sur les mesures envisagées ; que les différentes procédures d'inspection menées dans l'établissement sont entachées d'irrégularité ; qu'en effet, d'une part, les membres de la mission d'inspection n'ont pas recueilli le témoignage du personnel de l'établissement ni des personnes hébergées et de leurs familles ; que, d'autre part, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 331-3 du code de l'action sociale et des familles, les inspecteurs n'ont pas consigné leurs constatations et observations sur le registre mentionné à l'article L. 331-2 du même code, de sorte que le préfet ne pouvait légalement se fonder sur des éléments non consignés dans ce registre et contredits, par ailleurs, par des attestations contraires ; qu'enfin, la visite effectuée dans la nuit du 3 au 4 septembre 2008 est intervenue en violation du 3ème alinéa de l'article L. 331-3 du code précité ; que l'arrêté litigieux est dépourvu de base légale en ce qu'il ne pouvait se fonder sur l'article L. 331-5 du code de l'action sociale et des familles dès lors qu'aucun manquement relevant de cet article n'a été constaté ; qu'en effet, aucun des prétendus signalements ou plaintes portés à la connaissance de l'administration ne permet de remettre en cause les conditions d'accueil des personnes hébergées ni d'attester de l'absence de projets de vie et d'animation spécifiques ; qu'en outre, le préfet ne pouvait s'appuyer sur de prétendus dysfonctionnements au regard tant de la charte des droits et libertés de la personne accueillie prévue par l'arrêté du 8 septembre 2003 que de l'arrêté du 26 avril 1999 fixant le contenu du cahier des charges de la convention tripartite prévue par l'article L. 313-12 du code de l'action sociale et des familles dès lors que ces textes ne comportent que des recommandations et non des normes qui seraient opposables à l'établissement ; que c'est par une inexacte appréciation des circonstances de l'espèce que le préfet a édicté la mesure litigieuse au motif que son injonction du 20 février 2008 n'avait pas été respectée en ce qui concerne l'absence d'établissement du projet d'animation et du projet de vie spécifique ; qu'en effet, ainsi que le relève le rapport d'inspection du 21 janvier 20008, l'établissement a établi un projet de vie intéressant, qui regroupe différentes activités menées par l'équipe pluridisciplinaire avec des animations variées ; que, si ce rapport note l'absence de projets de vie individuels, l'injonction préfectorale ne portait pas sur ces projets de vie de sorte que leur absence ne saurait être retenue pour justifier la mesure attaquée ; qu'en outre, ladite mesure ne saurait pas plus être justifiée par une appréciation qualitative du projet de vie et d'animation spécifique dès lors qu'une telle appréciation excède également la portée de l'injonction ; que, de surcroît, le préfet ne pouvait se fonder sur la circonstance que le projet de vie devait inclure des locaux adaptés aux personnes dépendantes et désorientées dès lors que l'injonction ne contenait aucune prescription quant à l'adaptation des locaux ; qu'en tout état de cause, la décision de fermeture ne pouvait reposer sur le non-respect de l'injonction dès lors que cette dernière était elle-même illégale ; qu'à cet égard, aucune disposition législative ou réglementaire ne donne pouvoir à l'administration d'enjoindre d'établir un projet de vie et un projet d'animation spécifique pas plus qu'elle ne prescrit la mise en place de tels documents ;
.....................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'action sociale et des familles ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
Vu l'arrêté du 26 avril 1999 fixant le cahier des charges de la convention tripartite prévue par l'article L. 313-12 du code de l'action sociale et des familles ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 juillet 2010 :
- le rapport de M. Huon, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Jarreau, rapporteur public ;
- et les observations de Me Dugast, pour la société LE CHATEAU DE LORMOY ;
Considérant que la société LE CHATEAU DE LORMOY exploite à Longpont-sur-Orge un établissement pour personnes âgées dépendantes dénommé Le Château de Lormoy , qui a fait l'objet les 24, 25 et 27 septembre 2007 d'une inspection par les services de la direction des affaires sanitaires et sociales dans le cadre des articles L. 331-1 et suivants du code de l'action sociale et des familles à la suite de laquelle le préfet de l'Essonne a, le 20 février 2008, enjoint à la requérante, sous peine d'application des articles L. 331-5 et L. 331-6 du code précité, de remédier à certains dysfonctionnements constatés, et notamment de réorganiser la prise en charge des personnes désorientées au moyen d'un projet de vie et d'un projet d'animation spécifique ; qu'à l'issue d'une nouvelle inspection, conduite le 21 juillet 2008, le préfet a estimé que cette injonction n'avait pas été respectée et a, pour ce motif, par arrêté du 17 septembre 2008, ordonné la fermeture définitive de l'aile 3B de l'établissement accueillant les personnes les plus dépendantes ; que la société LE CHATEAU DE LORMOY relève appel du jugement du 15 juin 2009 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la légalité externe :
Sur le respect du principe du contradictoire :
Considérant qu'aux termes de l'article 24 de la loi 12 avril 2000 susvisée : Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales (...) ; que les dispositions de l'article L. 331-5 du code de l'action sociale et des familles qui prévoient que si la santé, la sécurité ou le bien-être moral ou physique des personnes hébergées sont menacés ou compromis par les conditions d'installation, d'organisation ou de fonctionnement de l'établissement, le représentant de l'Etat enjoint aux responsables de celui-ci de remédier aux insuffisances, inconvénients ou abus dans le délai qu'il leur fixe à cet effet , n'organisent pas une procédure distincte de celle fixée par les dispositions précitées de la loi du 12 avril 2000 ;
Considérant qu'il est constant que, par lettre en date du 20 février 2008, le préfet de l'Essonne a, conformément aux conclusions de la mission d'inspection des 24, 25 et 27 septembre 2007, enjoint à la société LE CHATEAU DE LORMOY de mettre en oeuvre les mesures propres à assurer la sécurité des résidents, la continuité de leur prise en charge, le bien-être des personnes désorientées ainsi que la conformité des contrats de séjour et a avisé la société que le défaut de respect de ces injonctions serait de nature à entraîner une fermeture de l'établissement ; que, par lettre du 30 juillet 2008, la société a reçu communication du rapport de la mission d'inspection diligentée le 21 juillet aux fins de s'assurer de la mise en oeuvre des mesures prescrites et a été informé de sa possibilité de présenter des observations écrites, ce qu'elle a d'ailleurs fait le 12 août suivant ;
Considérant, d'une part, que la lettre du 30 juillet 2008 n'avait pas à indiquer les mesures envisagées par le préfet, dès lors que cette information avait déjà été portée à la connaissance de la société le 20 février 2008 ;
Considérant, d'autre part, que si les dispositions précitées de la loi du 12 avril 2000 impliquent que l'intéressé ait été avertie de la mesure que l'administration envisage de prendre, des motifs sur lesquels elle se fonde, et qu'il bénéficie d'un délai suffisant pour présenter ses observations, elles n'imposent pas à l'administration d'informer l'intéressé de sa faculté de présenter des observations orales ; qu'elles n'imposent pas plus que les observations de la personne intéressée soit recueillies par l'autorité investie du pouvoir de décision elle-même, mais seulement qu'elles soient portées à la connaissance de cette autorité avant que cette dernière ne se prononce ; que, par suite, les moyens tirés de ce que le courrier du 30 juillet 2008 n'était pas signé par le préfet, seul compétent pour ordonner la fermeture de l'établissement et ne mentionnait pas la possibilité de présenter des observations orales sont inopérants ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société LE CHATEAU DE LORMOY n'est pas fondée à soutenir que la procédure suivie à son encontre aurait été entachée d'irrégularité au regard des exigences de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;
Sur la régularité de la procédure d'inspection :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 331-3 du code de l'action sociale et des familles : Les personnes responsables d'un établissement sont tenues de fournir aux autorités et agents chargés du contrôle tous renseignements qui leur sont demandés relatifs aux points mentionnés dans la déclaration d'ouverture et à l'identité des personnes hébergées. / Elles sont également tenues de laisser pénétrer dans l'établissement, à toute heure du jour et de la nuit, les autorités et agents chargés du contrôle. Ceux-ci peuvent visiter tous les locaux, se faire présenter toute personne hébergée et demander tous renseignements nécessaires pour apprécier les conditions matérielles et morales de fonctionnement de l'établissement. Ils peuvent se faire accompagner, le cas échéant, par l'homme de l'art compétent en la matière. Ils signent le registre mentionné à l'article L. 331-2 et y consignent leurs constatations et observations. / Toutefois, sans préjudice des dispositions du titre II du livre Ier du code de procédure pénale, et sauf exceptions prévues par la loi, il ne pourra être procédé aux visites de nuit prévues à l'alinéa précédent, si elles doivent commencer après vingt et une heures et avant six heures, qu'en cas d'appel provenant de l'intérieur de l'établissement, ou sur plainte ou réclamation, ou sur autorisation du procureur de la République. En cas de visite de nuit, les motifs de l'inspection doivent être portés par écrit à la connaissance du directeur de l'établissement./ Les contrôles s'effectuent dans les conditions prévues à l'article L. 1421-3 du code de la santé publique avec le concours des professionnels mentionnés à l'article L. 1421-1 du même code. / Les personnes chargées du contrôle sont tenues au secret professionnel dans les conditions et sous les peines fixées par l'article 226-13 du code pénal ; qu'aux termes de l'article L. 313-13 du même code : Le contrôle des établissements et services sociaux et médico-sociaux et des lieux de vie et d'accueil est exercé par l'autorité qui a délivré l'autorisation. / Lorsque le contrôle a pour objet d'apprécier l'état de santé, la sécurité, l'intégrité ou le bien-être physique ou moral des bénéficiaires, il est procédé, dans le respect de l'article L. 331-3, à des visites d'inspection conduites, en fonction de la nature du contrôle, par un médecin inspecteur de santé publique ou par un inspecteur de l'action sanitaire et sociale. Le médecin inspecteur ou l'inspecteur veille à entendre les usagers et leurs familles et à recueillir leurs témoignages. Il recueille également les témoignages des personnels de l'établissement ou du service (...) ;
Considérant, d'une part, que, si aucune mention en ce sens n'a été portée sur le registre mentionné à l'article L. 331-2 du code de l'action sociale et des familles, il ressort des termes mêmes du rapport établi le 23 juillet 2008 que la mission d'inspection du 21 juillet 2008, composée d'un médecin inspecteur de santé publique, d'une inspecteur de l'action sanitaire et sociale, d'une infirmière de santé publique et d'une secrétaire administrative, a procédé à l'audition de plusieurs résidents et de membres du personnel ; qu'au surplus, le compte-rendu de l'inspection des 24, 25 et 27 septembre 2007 fait état de ce que des entretiens ont été conduits avec les professionnels et les résidents par le médecin inspecteur et l'infirmière de santé publique pour la partie médicale et par les agents administratifs pour les autres domaines ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les membres de la mission d'inspection, auxquels l'article L. 313-3 précité ne faisait pas obligation d'entendre l'ensemble des personnes concernées, n'auraient pas recueilli les témoignages des usagers et des personnels afin comme le prévoit cet article, d'apprécier l'état de santé, la sécurité, l'intégrité ou le bien-être physique ou moral des bénéficiaires manque en fait ;
Considérant, d'autre part, que la circonstance que les constatations ou les auditions opérées par les agents chargés du contrôle n'aient pas été mentionnées sur le registre des entrées et sorties de l'établissement est sans incidence sur la légalité de l'arrêté attaqué, dès lors que, si l'article L. 331-5 du code de l'action sociale et des familles prévoit que les faits retenus par le préfet pour ordonner la fermeture d'un établissement doivent avoir fait l'objet, au préalable, d'une injonction du préfet, ni cet article ni aucune autre disposition législative ou réglementaire n'impose qu'ils aient été auparavant consignés sur le registre en cause ;
Considérant, enfin, que la société DU CHATEAU DE LORMOY soutient que la visite que la mission d'inspection a effectuée dans la nuit du 3 au 4 septembre 2008 aurait été conduite en violation du 3ème alinéa de l'article L. 331-3 du code de l'action sociale et des familles précité ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que le préfet de l'Essonne s'est fondé, pour prendre sa décision, non pas sur cette visite, mais sur celles menées les 24, 25 et 27 septembre 2007 et le 21 juillet 2008 ; que par suite, le moyen susanalysé est inopérant ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;
Considérant que si le droit au respect du domicile que ces stipulations protègent s'applique également, dans certaines circonstances, aux locaux professionnels où des personnes morales exercent leurs activités, il doit être concilié avec les finalités légitimes du contrôle, par les autorités publiques, du respect des règles qui s'imposent à ces personnes morales dans l'exercice de leurs activités professionnelles ; que le caractère proportionné de l'ingérence que constitue la mise en oeuvre, par une autorité publique, de ses pouvoirs de visite et de contrôle des locaux professionnels résulte de l'existence de garanties effectives et appropriées, compte tenu, pour chaque procédure, de l'ampleur et de la finalité de ces pouvoirs ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et de la famille : I.-Sont des établissements et services sociaux et médico-sociaux, au sens du présent code, les établissements et les services, dotés ou non d'une personnalité morale propre, énumérés ci-après : / (...) 6° Les établissements et les services qui accueillent des personnes âgées ou qui leur apportent à domicile une assistance dans les actes quotidiens de la vie, des prestations de soins ou une aide à l'insertion sociale (...) ; qu'aux termes de l'article L. 313-1 du même code : La création, la transformation ou l'extension des établissements et services mentionnés à l'article L. 312-1 sont soumises à autorisation, sous réserve des dispositions de l'article L. 313-1-1 (...) ; qu'aux termes de l'article L. 313-6 dudit code : L'autorisation mentionnée à l'article L. 313-1 ou son renouvellement sont valables sous réserve du résultat d'une visite de conformité aux conditions techniques minimales d'organisation et de fonctionnement mentionnées au II de l'article L. 312-1 dont les modalités sont fixées par décret et, s'agissant des établissements accueillant des personnes âgées dépendantes, de la conclusion de la convention tripartite mentionnée à l'article L. 313-12 ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 331-1 de ce code : Le contrôle des établissements, services, lieux de vie ou d'accueil, autorisés, agréés ou déclarés dans les conditions du présent code, est exercé, sous l'autorité du ministre chargé de l'action sociale et du représentant de l'Etat dans le département, par les agents qualifiés statutairement des directions des affaires sanitaires et sociales dans les conditions précisées à l'article L. 313-13 ainsi que par les membres de l'inspection générale des affaires sociales. Ce contrôle tend, notamment, à s'assurer de la sécurité des personnes accueillies ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'eu égard à la nature de leurs activités, les établissements pour personnes âgées dépendantes sont soumis à un régime d'autorisation et à la conclusion d'une convention avec l'autorité publique, laquelle, aux termes de l'arrêté du 26 avril 1999 susvisé, définit en particulier les conditions de fonctionnement de l'établissement tant au plan financier qu'à celui de la qualité de la prise en charge des personnes et des soins afin, notamment, de garantir à chaque résident un bon état de santé et la plus grande autonomie sociale, physique et psychique possible ; que, dans ce cadre, l'exercice par l'administration de son pouvoir de contrôle ne vise qu'à s'assurer du respect des obligations auxquelles ces établissements ont eux-mêmes consenti en décidant de se placer sous le régime du 6° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles ; que, par suite, et eu égard aux règles qui s'imposent à elle dans l'exercice de son activité professionnelle et aux finalités du contrôle litigieux, la société LE CHATEAU DE LORMOY, qui, en sollicitant et en obtenant le bénéfice de l'autorisation prévue par ces dispositions, a nécessairement accepté les contraintes qui en découlent, au nombre desquelles figure la procédure de visite prévue par l'article L. 331-1 du code précité, n'est pas fondée à soutenir que, faute de toute autorisation judiciaire ou même de toute information préalable du responsable de l'établissement sur les modalités lui permettant d'assurer le respect de ses droits, l'ingérence résultant de la mise en oeuvre de cette procédure présenterait un caractère disproportionné au sens des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
En ce qui concerne la légalité interne :
Sur la base légale :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 331-5 du code de l'action sociale et des familles : Sans préjudice de l'application des dispositions prévues à l'article L. 313-16, si la santé, la sécurité ou le bien-être moral ou physique des personnes hébergées sont menacés ou compromis par les conditions d'installation, d'organisation ou de fonctionnement de l'établissement, le représentant de l'Etat enjoint aux responsables de celui-ci de remédier aux insuffisances, inconvénients ou abus dans le délai qu'il leur fixe à cet effet. / S'il n'a pas été satisfait à l'injonction dans ce délai, le représentant de l'Etat ordonne la fermeture totale ou partielle, définitive ou provisoire, de l'établissement ;
Considérant qu'alors même que l'arrêté du 26 avril 1999 fixant le cahier des charges de la convention tripartite prévue par l'article L. 313-12 du code de l'action sociale et des familles, lequel, contrairement à ce que soutient la requérante, a valeur réglementaire, s'est borné à fixer des objectifs et recommandations pour la qualité de la prise en charge des personnes âgées dépendantes en laissant une marge d'interprétation liée à la spécificité de chaque établissement, le préfet, tenait des dispositions précitées de l'article L. 331-5, qui visent expressément, non seulement la santé et la sécurité mais aussi le bien-être moral des personnes hébergées, le pouvoir d'enjoindre à la société LE CHATEAU DE LORMOY de réorganiser la prise en charge des personnes désorientés au moyen d'un projet de vie et d'animation spécifique - dès lors, ainsi que l'avait conclu la mission d'inspection de septembre 2007, que cette prise en charge n'était pas adaptée sur le plan tant de la vie quotidienne que des soins - puis de prononcer la mesure de fermeture litigieuse ; qu'est sans incidence à cet égard la circonstance qu'aucun manquement aux conditions techniques minimales d'organisation et de fonctionnement des établissements recevant des personnes âgées prévues par les articles D. 312-156 et suivants du code de l'action sociale et des familles n'ait été relevé ; qu'est également sans incidence la circonstance que les signalements ayant conduit aux inspections de l'établissement ne portaient pas sur les conditions de prise en charge des personnes fortement dépendantes ;
Sur l'erreur de fait et l'erreur d'appréciation :
Considérant que la société LE CHATEAU DE LORMOY fait valoir qu'elle a remis aux membres de l'inspection, le 21 juillet 2008, les projets de vie et d'animation spécifiques à destination des personnes désorientées ; que, toutefois, il ressort du rapport d'inspection que si la structure a établi un projet de vie intéressant, qui regroupe différentes activités menées par l'équipe pluridisciplinaire d'animation (...) il n'existe pas de réflexion ni de projet relatif à la prise en charge des personnes désorientées ; que les inspecteurs ont ainsi noté de manière circonstanciée l'insuffisance des activités spécifiques destinées aux résidents concernés, l'absence de projets de vie individuels permettant d'identifier les possibilités de chaque personne afin d'adapter notamment les animations à son histoire, à ses possibilités, à ses désirs à ses besoins, et le caractère inadapté des activités communes proposées, renouvelant ainsi les observations issues de l'inspection de novembre 2007 aux termes de laquelle il avait déjà été constaté que l'unité 3 B regroupant les personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer ne faisait pas l'objet d'un projet particulier de prise en charge ; que, pour soutenir qu'elle aurait respecté l'injonction préfectorale, la société se borne à se prévaloir de l'existence d'un projet de vie et d'animation et à faire état, en termes généraux, de la marge d'appréciation dont elle dispose dans l'élaboration de ce document mais ne discute pas sérieusement les conclusions du rapport d'inspection qui relève l'inadaptation du projet en cause dont les insuffisances ont d'ailleurs été constatées sur place ; que, par ailleurs, si la société LE CHATEAU DE LORMOY produit plusieurs attestations de membres de son équipe d'animation faisant état d'une réflexion approfondie en ce qui concerne la prise en charge des résidents présentant des troubles cognitifs majeurs, il n'est pas établi que l'établissement aurait remédié à ces insuffisances à la date de l'arrêté attaqué ; que, dans ces conditions, le préfet de l'Essonne, à qui il appartenait, contrairement à ce que soutient la requérante, non seulement de constater l'existence de projets de vie mais aussi d'en apprécier la pertinence, a pu, sans entacher sa décision d'erreur de fait ou d'erreur d'appréciation, estimer que, nonobstant l'injonction faite en ce sens, le bien-être moral des personnes désorientées hébergés au sein de l'aile 3 B de l'établissement Le Château de Lormoy n'était pas assuré et, pour ce motif, ordonner la fermeture de cette unité sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 331-5 du code de l'action sociale et des familles ;
Considérant que, si la société LE CHATEAU DE LORMOY fait valoir que si l'arrêté attaqué ne pouvait, par ailleurs, se fonder sur l'inadaptation des locaux, dès lors qu'aucune injonction n'avait été formulée à ce titre, il ressort des pièces du dossier que le préfet de l'Essonne aurait pris la même décision s'il s'était fondé sur le seul motif tiré de l'absence de projet d'animation ni projet de vie spécifiques à la prise en charge des personnes désorientées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que la SOCIETE LE CHATEAU DE LORMOY demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société LE CHATEAU DE LORMOY est rejetée.
Abstrats : 04-03-01-05 AIDE SOCIALE. INSTITUTIONS SOCIALES ET MÉDICO-SOCIALES. ÉTABLISSEMENTS - QUESTIONS COMMUNES. ÉTABLISSEMENTS D'HÉBERGEMENT DES PERSONNES ÂGÉES, DES ADULTES HANDICAPÉS. - POUVOIRS DE CONTRÔLE PAR L'ADMINISTRATION (ARTICLE L 331-1 DU CODE L'ACTION SOCIALE ET DES FAMILLES) - COMPATIBILITÉ AVEC LA PROTECTION DU DROIT AU RESPECT DE LA VIE PRIVÉE ET FAMILIALE (ART. 8 DE LA CONV. EDH) - ABSENCE D'INGÉRENCE DISPROPORTIONNÉE AU SENS DES STIPULATIONS DE L'ARTICLE 8 DE LA CONVENTION EUROPÉENNE DE SAUVEGARDE DES DROITS DE L'HOMME ET DES LIBERTÉS FONDAMENTALES (CONV. EDH) MÊME EN L'ABSENCE D'INFORMATION DU RESPONSABLE DES LOCAUX SUR SON DROIT DE S'OPPOSER À LA VISITE.
26-055-01-08 DROITS CIVILS ET INDIVIDUELS. CONVENTION EUROPÉENNE DES DROITS DE L'HOMME. DROITS GARANTIS PAR LA CONVENTION. DROIT AU RESPECT DE LA VIE PRIVÉE ET FAMILIALE (ART. 8). - LOCAUX PROFESSIONNELS DE PERSONNES MORALES - 1) APPLICABILITÉ - EXISTENCE DANS CERTAINES CIRCONSTANCES - 2) CONDITIONS D'APPLICATION - CAS DES POUVOIRS DE VISITE ET DE CONTRÔLE DES LOCAUX PROFESSIONNELS INSTITUÉS AU BÉNÉFICE DES AUTORITÉS PUBLIQUES.[RJ1].
26-055-01-08-01 DROITS CIVILS ET INDIVIDUELS. CONVENTION EUROPÉENNE DES DROITS DE L'HOMME. DROITS GARANTIS PAR LA CONVENTION. DROIT AU RESPECT DE LA VIE PRIVÉE ET FAMILIALE (ART. 8). CHAMP D'APPLICATION. - PERSONNES MORALES - INCLUSION DANS CERTAINES CIRCONSTANCES.
26-055-01-08-02 DROITS CIVILS ET INDIVIDUELS. CONVENTION EUROPÉENNE DES DROITS DE L'HOMME. DROITS GARANTIS PAR LA CONVENTION. DROIT AU RESPECT DE LA VIE PRIVÉE ET FAMILIALE (ART. 8). VIOLATION. - CONTRÔLE DES LOCAUX DES ÉTABLISSEMENTS POUR PERSONNES ÂGÉES DÉPENDANTES SOUMISES À UN RÉGIME D'AUTORISATION ET À LA CONCLUSION D'UNE CONVENTION AVEC L'AUTORITÉ PUBLIQUE - ABSENCE D'INGÉRENCE DISPROPORTIONNÉE AU SENS DES STIPULATIONS DE L'ARTICLE 8 DE LA CONVENTION EUROPÉENNE DE SAUVEGARDE DES DROITS DE L'HOMME ET DES LIBERTÉS FONDAMENTALES (CONV. EDH), MÊME EN L'ABSENCE D'INFORMATION DU RESPONSABLE DES LOCAUX SUR SON DROIT DE S'OPPOSER À LA VISITE.
Résumé : 04-03-01-05 Il résulte des dispositions des articles L 312-1, L 313-1, L 313-6 et L 331-1 du code de l'action sociale et des familles qu'eu égard à la nature de leurs activités, les établissements pour personnes âgées dépendantes sont soumis à un régime d'autorisation et à la conclusion d'une convention avec l'autorité publique, laquelle, aux termes de l'arrêté du 26 avril 1999 susvisé, définit en particulier les conditions de fonctionnement de l'établissement tant au plan financier qu'à celui de la qualité de la prise en charge des personnes et des soins afin, notamment, de garantir à chaque résident un bon état de santé et la plus grande autonomie sociale, physique et psychique possible. Dans ce cadre, l'exercice par l'administration de son pouvoir de contrôle ne vise qu'à s'assurer du respect des obligations auxquelles ces établissements ont eux-mêmes consenti en décidant de se placer sous le régime du 6° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles. Par suite, l'établissement n'est pas fondé à soutenir que, faute de toute autorisation judiciaire ou même de toute information préalable du responsable de l'établissement sur les modalités lui permettant d'assurer le respect de ses droits, l'ingérence résultant de la mise en oeuvre de cette procédure présenterait un caractère disproportionné au sens des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
26-055-01-08 1) Le droit au respect du domicile que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (conv. EDH) protègent s'applique également, dans certaines circonstances, aux locaux professionnels où des personnes morales exercent leurs activités. 2) Ce droit doit être concilié avec les finalités légitimes du contrôle, par les autorités publiques, du respect des règles qui s'imposent à ces personnes morales dans l'exercice de leurs activités professionnelles. Le caractère proportionné de l'ingérence que constitue la mise en oeuvre, par une autorité publique, de ses pouvoirs de visite et de contrôle des locaux professionnels résulte de l'existence de garanties effectives et appropriées, compte tenu, pour chaque procédure, de l'ampleur et de la finalité de ces pouvoirs.
26-055-01-08-01 Le droit au respect du domicile que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (conv. EDH) protègent s'applique également, dans certaines circonstances, aux locaux professionnels où des personnes morales exercent leurs activités.
26-055-01-08-02 Il résulte des dispositions des articles L 312-1, L 313-1, L 313-6 et L 331-1 du code de l'action sociale et des familles qu'eu égard à la nature de leurs activités, les établissements pour personnes âgées dépendantes sont soumis à un régime d'autorisation et à la conclusion d'une convention avec l'autorité publique, laquelle, aux termes de l'arrêté du 26 avril 1999 susvisé, définit en particulier les conditions de fonctionnement de l'établissement tant au plan financier qu'à celui de la qualité de la prise en charge des personnes et des soins afin, notamment, de garantir à chaque résident un bon état de santé et la plus grande autonomie sociale, physique et psychique possible. Dans ce cadre, l'exercice par l'administration de son pouvoir de contrôle ne vise qu'à s'assurer du respect des obligations auxquelles ces établissements ont eux-mêmes consenti en décidant de se placer sous le régime du 6° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles. Par suite, l'établissement n'est pas fondé à soutenir que, faute de toute autorisation judiciaire ou même de toute information préalable du responsable de l'établissement sur les modalités lui permettant d'assurer le respect de ses droits, l'ingérence résultant de la mise en oeuvre de cette procédure présenterait un caractère disproportionné au sens des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
[RJ1] Comp. CE Sect. 6 juin 2009 Société Inter Confort n° 304300 à paraître au Rec.