Le Conseil d’État juge tout d’abord que la décision de mettre fin à l'alimentation et l'hydratation artificielles, prise le 11 janvier 2014 par le médecin alors en charge de M. Vincent L., ne peut plus recevoir application. Il déduit du code de la santé publique que les décisions de limiter ou d’arrêter les traitements dont la poursuite traduirait une obstination déraisonnable, qui ne peuvent intervenir qu'à la suite d’une procédure collégiale, sont prises par le médecin en charge du patient et ne peuvent être mises en œuvre que par ce même médecin ou sous sa responsabilité. Par suite, dans le cas où le médecin qui a pris une telle décision n’est plus en charge du patient à la date où cette décision peut commencer à être mise en œuvre, la décision en cause cesse de produire effet et ne peut plus légalement recevoir application. Le nouveau médecin en charge doit alors prendre lui-même une décision.
Le Conseil d’État juge ensuite que le nouveau médecin en charge de M. Vincent L., qui avait précisément engagé une nouvelle procédure collégiale pour examiner la question de l’arrêt des traitements, ne pouvait pas décider d’interrompre cette procédure pour les raisons qu’il a retenues. Selon le communiqué de la juridiction, ces raisons tenaient à ce que « les conditions de sérénité et de sécurité nécessaires à la poursuite de cette procédure tant pour Vincent L. que pour l’équipe soignante [n’étaient] pas réunies », étant précisé que « les conditions d’un échange serein [devaient] absolument être rétablies dans l’intérêt de Vincent L. et de son accompagnement ».
Le Conseil d’État juge qu’en l’espèce, les seules considérations relatives à la recherche d’un climat apaisé, telles qu’elles ont été exprimées de façon très générale, ne permettaient pas de suspendre, sans fixer de terme à cette suspension, le cours de la procédure collégiale. Il rappelle que l’existence d’éventuelles menaces pour la sécurité de M. Vincent L. et de l’équipe soignante n’est pas un motif légal pour justifier l’interruption d’une procédure engagée en vue d’évaluer si la poursuite de l’alimentation et de l’hydratation artificielles traduit une obstination déraisonnable.