Deux femmes formant un couple ont demandé au tribunal administratif de Toulouse l'annulation de la décision implicite par laquelle le centre d'assistance médicale à la procréation d’un CHU a rejeté leur demande d'assistance médicale à la procréation (AMP).
Elles soulèvent la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions de l'article L. 2141-2 du code de la santé publique, qui réservent l'accès à l’AMP aux couples composés d'un homme et d'une femme, vivants, en âge de procréer et souffrant d'une infertilité médicalement diagnostiquée. « Elles soutiennent que ces dispositions méconnaissent le principe d'égalité devant la loi, garanti par les articles 1er et 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, dans la mesure où elles introduisent une différence de traitement, qui ne serait pas justifiée par leur objet, entre les couples souffrant d'une infertilité médicalement diagnostiquée, selon qu'ils sont de même sexe ou de sexe différent. »
Avant de statuer le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a décidé de transmettre au Conseil d'Etat la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'article L. 2141-2 du code de la santé publique.
Dans cette décision le Conseil d’Etat précise qu’aux termes de l'article L. 2141-1 du code de la santé publique :
« L'assistance médicale à la procréation s'entend des pratiques cliniques et biologiques permettant la conception in vitro, la conservation des gamètes, des tissus germinaux et des embryons, le transfert d'embryons et l'insémination artificielle. (...) ". L'article L. 2141-2 du même code dispose que : " L'assistance médicale à la procréation a pour objet de remédier à l'infertilité d'un couple ou d'éviter la transmission à l'enfant ou à un membre du couple d'une maladie d'une particulière gravité. Le caractère pathologique de l'infertilité doit être médicalement diagnostiqué. / L'homme et la femme formant le couple doivent être vivants, en âge de procréer et consentir préalablement au transfert des embryons ou à l'insémination. Font obstacle à l'insémination ou au transfert des embryons le décès d'un des membres du couple, le dépôt d'une requête en divorce ou en séparation de corps ou la cessation de la communauté de vie, ainsi que la révocation par écrit du consentement par l'homme ou la femme auprès du médecin chargé de mettre en œuvre l'assistance médicale à la procréation ". »
Aux termes de l'article 1er de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen : " Les hommes naissent et demeurent... ". L'article 6 de cette déclaration dispose, en outre, que la loi " doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse ".
Le Conseil d’Etat précise que le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit.
« Les couples formés d'un homme et d'une femme sont, au regard de la procréation, dans une situation différente de celle des couples de personnes de même sexe. Il résulte des dispositions de l'article L. 2141-2 du code de la santé publique qu'en réservant l'accès à l'assistance médicale à la procréation aux couples composés d'un homme et d'une femme, vivants, en âge de procréer et souffrant d'une infertilité médicalement diagnostiquée, le législateur a entendu que l'assistance médicale à la procréation ait pour objet de remédier à l'infertilité pathologique d'un couple sans laquelle celui-ci serait en capacité de procréer. La différence de traitement, résultant des dispositions critiquées, entre les couples formés d'un homme et d'une femme et les couples de personnes de même sexe est en lien direct avec l'objet de la loi qui l'établit et n'est, ainsi, pas contraire au principe d'égalité. Il en résulte que la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux. »
Ainsi le Conseil d’Etat décide qu’il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée.