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Avis CADA, 12 janvier 2012, n°20120019-ND (Communication dossier médical - ayant droit)

La commission d'accès aux documents administratifs a été saisie d'une demande de communication d'un dossier médical des parents d'un patient majeur décédé. Elle rappelle que c'est uniquement dans les cas où ils justifient de leur qualité d'ayant droit au sens des articles 734 et 756 du code civil que les membres d'une famille peuvent obtenir communication du dossier médical d'un patient décédé.
Elle émet en l'espèce un avis défavorable puisque les documents transmis par les demandeurs (extrait du livret de famille et cartes d'identité) ne suffisent pas à prouver leur qualité d'ayant droit : "Rien n'atteste en effet en l'absence d'enfants du défunt ou, en présence d'enfants, la qualité de légataires de Monsieur et Madame T".

Monsieur et Madame ... ont saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 6 décembre 2011, à la suite du refus opposé par la directrice générale de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (hôpital ...) à leur demande de communication du dossier médical de leur fils décédé, afin de faire valoir leurs droits et de défendre la mémoire de leur fils.

En l'absence de réponse de l'administration, la commission relève que le dernier alinéa de l'article L.1110-4 du code de la santé publique, auquel renvoie l'article L.1111-7 du même code, prévoit que le secret médical ne fait pas obstacle à ce que les informations médicales concernant une personne décédée soient délivrées à ses ayants droit, dans la mesure où elles leur sont nécessaires pour leur permettre de connaître les causes de la mort, de défendre la mémoire du défunt ou de faire valoir leurs droits, sauf volonté contraire opposée par la personne avant son décès.

Si l'objectif relatif aux causes de la mort n'appelle, en général, pas de précisions supplémentaires de la part du demandeur, il en va différemment des deux autres objectifs. Invoqués tels quels, ils ne sauraient ouvrir droit à communication d'un document médical. Il appartient au demandeur de préciser les circonstances qui le conduisent à défendre la mémoire du défunt ou la nature des droits qu'il souhaite faire valoir.

La commission précise que le Conseil d'Etat, dans une décision du 26 septembre 2005, Conseil national de l'ordre des médecins, n° 270234, a interprété les dispositions de l'article L. 1110-4 du code de la santé publique comme ayant entendu autoriser l'accès des ayants droit aux seules informations nécessaires à l'objectif qu'ils poursuivent. L'application de ces dispositions à chaque dossier d'espèce relève de l'équipe médicale qui a suivi le patient décédé, seule compétente pour apprécier si un document composant le dossier se rattache à l'objectif invoqué.

En outre, la commission souligne que, par ces dispositions, le législateur a clairement entendu restreindre aux seules personnes qui peuvent se prévaloir de la qualité d'ayant droit, à l'exclusion de toute autre catégorie de tiers tels que la famille et les proches, la dérogation ainsi aménagée au secret médical du défunt. C'est donc uniquement dans les cas où ils justifient de la qualité d'ayant droit que les membres de la famille peuvent obtenir communication du dossier médical.

En ce qui concerne la notion d'ayant droit, la commission considère que sont ainsi visés, en premier lieu, les successeurs légaux du défunt. La commission rappelle qu'en application des 734 et 756 de ce code, les père et mère du défunt ne sont appelés à lui succéder qu'en l'absence d'enfants et de descendants. La commission considère que doivent être regardés en second lieu comme des ayants droit au sens et pour l'application de l'article L. 1110-4 du code de la santé publique, les successeurs testamentaires du défunt, La commission rappelle que cette qualité d'ayant droit, qu'il appartient à l'administration de vérifier, peut être établie par tout moyen, par exemple par un acte de notoriété ou par un certificat d'hérédité.

Au cas d'espèce, la commission constate que les objectifs invoqués par Monsieur et Madame ... correspondent à ceux prévus par le code de la santé publique, Elle relève, par ailleurs, que les demandeurs précisent les circonstances qui les conduisent à défendre la mémoire du défunt et les droits qu'ils souhaitent faire valoir.

En revanche, la commission observe que les documents produits par Monsieur et Madame ... (extrait du livret de famille et cartes d'identité) ne prouvent pas leur qualité d'ayant droit au sens des dispositions précitées. Rien n'atteste en effet l'absence d'enfants du défunt ou, en présence d'enfants, la qualité de légataires de Monsieur et Madame ... . La commission estime donc que les informations demandées ne sont pas communicables en l'état aux demandeurs aussi longtemps que ces derniers n'auront pas établi leur qualité d'ayant droit par un autre moyen (certificat d'hérédité par exemple).

Par conséquent, la commission émet, en l'état, un avis défavorable.