Seize ans après le vote de la première loi relative à l'interruption volontaire de grossesse (I.V.G.), un certain nombre de difficultés d'application subsistent, les femmes en situation de détresse ne trouvent pas toujours de réponses adaptées à leur demande. Ces difficultés sont dues pour une grande part à la méconnaissance par les femmes de la procédure légale d'I.V.G., au manque de formation du personnel chargé de l'accueil dans les lieux d'I.V.G., à l'utilisation trop restreinte de la procédure d'urgence prévue à l'article L. 162-5 du code de la santé publique ainsi qu'à une organisation parfois défectueuse des centres d'I.V.G.
Ces problèmes sont particulièrement aigus en période d'été comme en témoignent les nombreuses plaintes reçues dans nos services.
Des réponses pourraient être apportées pour assurer la continuité
I. Organisation des I.V.G. en période d'été
Pendant cette période, les femmes se voient opposer des refus en raison de la fermeture de certaines unités pratiquant les I.V.G. Elles doivent accomplir alors des démarches difficiles, parfois coûteuses, pour trouver un lieu pouvant les accueillir. Le risque est alors pour elles de se trouver hors du délai légal de dix semaines de grossesse. Les directeurs d'établissement visés à l'article L. 162-8 du code de la santé publique sont tenus par la loi d'assurer en permanence un fonctionnement minimum du service d'interruption volontaire de grossesse.
Aussi, je vous propose d'analyser la situation des différents centres d'I.V.G. de votre département et de veiller à ce que soient mis en place avant l'été 1991 dans toutes ces structures des dispositifs permettant aux femmes demandant une interruption volontaire de grossesse d'être accueillies.
Il convient à cet égard de demander aux directeurs des établissements publics de votre département ou participant au service public d'établir une liste des médecins et infirmières de permanence dans les centres d'I.V.G. pour les mois de juillet et d'août, en faisant appel éventuellement à des médecins et infirmières remplaçants.Cette liste devra vous être transmise.
Si les établissements n'ont pas tous cette possibilité, vous veillerez à mettre en place, au niveau départemental, pour la période d'été, un dispositif de coordination entre les établissements du secteur public et privé conventionné pratiquant des I.V.G. afin de répondre à la demande, qui sera évaluée sur la base des statistiques des deux dernières années. Vous ferez connaître ce dispositif à l'ensemble des structures et des personnes concernées :
- médecins exerçant dans le département;
- établissements d'hospitalisation publics et privés;
- centres, établissements, services et organismes chargés de la contraception et de planification.
Le recours au secteur privé conventionné n'est pas à exclure. Je vous rappelle à cette occasion que les tarifs fixés pour les I.V.G. sont des prix plafond qui ne peuvent être dépassés ni par l'établissement d'accueil ni par les médecins pratiquant les I.V.G.
II. - Accueil et information
Les renseignements parvenus à mes services témoignent d'écarts importants d'un établissement à l'autre dans la qualité de l'accueil et de l'information. La procédure prévue par la loi et le délai de dix semaines de grossesse sont encore mal connus de la population. La réponse aux femmes qui s'adressent aux médecins libéraux ou aux hôpitaux publics pour demander une interruption volontaire de grossesse doit donc avoir un caractère informatif et personnalisé.
Je vous rappelle l'importance de l'article L. 162-3 du code de la santé publique relatif au dossier-guide I.V.G. qui doit être remis obligatoirement par tout médecin lors de la première visite quel que soit son lieu d'exercice, à chaque femme qui demande une I.V.G. Il appartient aux directions départementales des affaires sanitaires et sociales de veiller à ce que le document soit remis aux médecins exerçant dans les départements, aux établissements publics et privés et aux centres de planification. Le service responsable de la diffusion est : direction de l'action sociale, bureau FE 1, 1, place de Fontenoy, 75350 PARIS 07 SP.
En ce qui concerne les établissements publics, je vous demande de les sensibiliser particulièrement à la nécessaire qualité des réponses téléphoniques. En effet, il apparaît que les femmes se voient souvent opposer un simple refus de rendez-vous sans analyse de leur situation et sans conseil d'orientation. Dans d'autres cas, les rendez-vous sont fixés sans considération de la durée de la grossesse.
Souvent, en effet, l'information relative aux interruptions volontaires de grossesse est fournie par un personnel mal informé lui-même, peu motivé et parfois surchargé par les autres informations sollicitées. Afin de pallier à ces difficultés, il est impératif que les personnels des services hospitaliers appelés à recevoir des appels :
- les dirigent éventuellement vers les services et unités compétents où un personnel sensibilisé à ces questions pourra donner les rendez-vous en fonction de la durée de la grossesse et en veillant spécialement aux cas pour lesquels une attente risquerait d'entraîner un dépassement du délai légal;
- ou puissent recevoir une information ou une formation spécifique à l'accueil.
III. La procédure d'urgence
Actuellement, 3,000 femmes en détresse, désireuses d'interrompre leur grossesse, se trouvent chaque année en situation de délai dépassé sans qu'aucune solution ne puisse leur être proposée. Afin de diminuer ce nombre des I.V.G. tardives, je vous invite à rappeler aux personnels confrontés à des demandes d'I.V.G. une disposition importante de la loi codifiée à l'article L. 162-5 du code de la santé publique qui permet de ramener à deux jours le délai normal d'une semaine de réflexion, si le terme des dix semaines risque d'être dépassé.
IV. Formation des médecins qui pratiquent les interruptions volontaires de grossesse
Certaines difficultés de prise en charge des femmes dans les centres d'I.V.G. tiennent parfois à la formation insuffisante des médecins chargés d'effectuer les I.V.G. aux techniques dites légères.
Une brochure sur ces techniques est en projet au bureau de la maternité de la direction générale de la santé. Elle sera diffusée à tous les médecins des centres d'I.V.G.
Il convient de continuer la formation permanente des personnels des services et unités d'interruption volontaire de grossesse. Les directeurs d'hôpitaux peuvent, à cet effet, passer convention avec des organismes agréés.
Ils peuvent faire face aux difficultés de recrutement des médecins vacataires compétents en organisant, en liaison avec l'inspection départementale ou régionale de la santé, des stages dans des services ayant une pratique confirmée de ces interventions et qui seraient disposés à les recevoir.
Je vous demande de bien vouloir m'informer des difficultés d'application de la présente circulaire.
Vous serez par ailleurs destinataires d'un questionnaire portant sur l'activité des centres d'I.V.G. et les difficultés qu'ils rencontrent.
Références :
Articles 162-1 à 162-14 du code de la santé publique.
Décret n° 88- 59 du 18 janvier 1988.
Circulaire n° 1282 du 12 octobre 1982 relative à l'amélioration de l'information et de la prescription de la contraception et de la pratique des interruptions volontaires de grossesse dans les établissements hospitaliers publics