La loi du 4 janvier 1993 avait introduit un article L. 666-10 au code de la santé publique qui prévoyait notamment : 'Les produits sanguins labiles destinés à une utilisation thérapeutique directe sont conservés dans les établissements de transfusion sanguine ou dans les établissements de santé autorisés à cet effet par le ministre chargé de la santé après avis de l'Agence française du sang.'
Les circulaires n° 58, n° 96-23 et n° 622 ont eu pour objet de décrire la procédure à suivre dans le contexte de cette loi. Des difficultés parfois incontournables comme, par exemple, la complexité de certaines situations locales, n'ont pas permis de délivrer l'ensemble des autorisations.
Afin de rapprocher la décision d'autorisation des réalités locales, la loi du 1er juillet 1998 a modifié la procédure en donnant compétence aux préfets de département pour accorder ou non ces autorisations après avis de l'EFS et de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS). L'article L. 666-10 est désormais ainsi rédigé :
'Les produits sanguins labiles destinés à une utilisation thérapeutique directe sont conservés dans les établissements de transfusion sanguine ou dans les établissements de santé autorisés à cet effet par l'autorité administrative après avis de l'Etablissement français du sang et de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé sur les conditions de sécurité sanitaire de la conservation et de la distribution.'
Ce transfert de compétence a eu lieu lors de la création de l'AFSSAPS, soit le 10 mars 1999.
La présente circulaire a pour objet de préciser d'une part, les principes généraux devant fonder l'autorisation ou le refus d'autorisation du dépôt de produits sanguins labiles par le préfet de département (I) et d'autre part, les modalités de gestion de la procédure (II).
I. - PRINCIPES GENERAUX
1. L'établissement français du sang (EFS) créé le 1er janvier 2000 veille à la satisfaction des besoins en matière de produits sanguins labiles et organise, sur l'ensemble du territoire national, les activités de transfusion sanguine dont la distribution des produits sanguins labiles (PSL) aux établissements de santé (art. L. 667-5). La distribution des PSL ne peut être faite que par des établissements de transfusion sanguine agréés (art. L. 668-2). Toutefois, la loi prévoit de permettre aux établissements de santé (ES) autorisés à conserver des produits sanguins labiles de les distribuer (art. L. 666-10). L'exercice de cette activité est subordonnée à une autorisation du préfet de département.
En effet, la conservation et la distribution des PSL répondent à des règles spécifiques, notamment pour les raisons suivantes : leur diversité et leur grande labilité rendent la gestion des stocks difficile ; l'urgence et l'imprévisibilité des besoins, dans certains cas, imposent leur mise à disposition urgente ; les caractéristiques du sang distribué doivent être adaptées le plus précisément possible à celles du patient ; l'origine humaine de ces produits suppose une gestion optimale de cette ressource. Il convient donc d'éviter la dispersion des stocks et la péremption des produits.
2. L'engagement de l'établissement de santé, tant en termes de qualité que de continuité, de permanence du service, doit garantir le respect des règles de sécurité sanitaire applicables à cette activité et notamment celui du réglement de bonnes pratiques de distribution.
3. La notion de dépôt, définie dans le réglement de bonnes pratiques de distribution, a été précisée dans l'arrêté du 8 décembre 1994 sus-visé comme suit :
'Constitue un dépôt de sang au sein d'un établissement de santé tout lieu, qu'il soit localisé dans un service d'urgence ou dans un service de soins, où sont conservés, sous la responsabilité d'un médecin ou d'un pharmacien, les produits sanguins labiles homologues et autologues prêts à l'usage thérapeutique.
'Ces produits, qu'ils aient été attribués nominativement ou non par l'établissement de transfusion sanguine qui approvisionne le dépôt, ne font l'objet d'aucune préparation, ni transformation, ni modification, ni qualification par le dépôt, à l'exception, le cas échéant, des épreuves de compatibilité directe en immunohématologie.
'Ne constitue pas un dépôt, au sein d'un service de soins de l'établissement de santé, dans des conditions conformes aux bonnes pratiques de distribution et aux caractéristiques des produits sanguins labiles, la conservation de produits déjà attribués, pour lesquels la durée de conservation qui sépare l'attribution du produit de l'acte transfusionnel n'excède pas six heures.'
La seule exception à cette règle des six heures concerne les interventions chirurgicales de durée supérieure à six heures et est soumise à une condition stricte qui consiste en l'établissement d'une procédure écrite détaillée.
4. Les autorisations des dépôts doivent garantir le respect de la sécurité sanitaire tout en s'adaptant aux réalités locales. Pour que cet objectif puisse être atteint, il est nécessaire :
4.1. D'identifier toutes les activités existantes ou prévues du dépôt de PSL
Il est apparu, au terme de plusieurs enquêtes, que les termes usuels de 'dépôt d'urgence', 'dépôt médicalisé', 'dépôt relai', 'dépôt alterné' ne reflétaient pas, pour chacun d'entre eux, une même activité. Aussi, il convient de ne plus utiliser ces termes pour décrire l'activité d'un dépôt dans le cadre des conventions et des autorisations, mais d'établir la liste des activités que le dépôt est autorisé à effectuer.
Cette liste peut comporter :
A. S'agissant de l'activité de conservation des dépôts :
- soit : conservation de produits sanguins labiles autologues et homologues ;
- soit : conservation de produits sanguins labiles homologues ;
- soit : conservation de produits sanguins labiles autologues.
B. S'agissant de l'activité de distribution des dépôts :
Afin de répertorier les activités de distribution de PSL des dépôts, le mot 'attribution' est utilisé lorsque c'est le dépôt qui réalise l'attribution de PSL à un patient donné et ainsi le choix des PSL en fonction de l'ordonnance nominative. Le mot 'délivrance' est utilisé lorsque le dépôt distribue des PSL dont l'attribution au patient a été précédemment effectuée par l'ETS. Ces activités comportent :
- pour des PSL homologues conservés et non attribués préalablement par l'ETS :
- attribution de PSL dans le cadre de l'urgence (y compris l'urgence vitale) ;
- attribution de PSL en dehors des urgences ;
- pour des PSL autologues et homologues conservés et déjà attribués par l'ETS :
- délivrance de PSL autologues ;
- délivrance de PSL homologues ;
- retour en stock de PSL homologues et attribution à un autre patient ;
- délivrance de PSL, à titre exceptionnel, à un autre ES.
- pour des PSL homologues attribués ou non par l'ETS et pour des PSL autologues déjà attribués :
- attribution ou délivrance à un autre ES, à titre exceptionnel.
En outre, quelles que soient les activités pré-citées, le dépôt doit pouvoir effectuer, dans le respect de la réglementation en vigueur :
- retour à l'ETS de PSL devenus non conformes ;
- retour à l'ETS des informations nécessaires à la traçabilité, notamment l'identification des receveurs effectifs ;
- décongélation de plasma frais congelé.
Enfin, il convient de préciser si :
- le dépôt effectue, en accord avec l'ETS et dans le cadre d'une procédure écrite, le retour à l'ETS de PSL restés conformes ;
- le laboratoire de l'établissement de santé réalise les épreuves de compatibilité directe en immuno-hématologie ;
- la transmission des résultats d'immuno-hématologie au dépôt est informatisée ou non.
4.2. D'examiner les critères qui président à l'ouverture ou au maintien d'un dépôt de PSL dans l'établissement de santé
Il convient notamment de prendre en compte :
4.2.1. L'éloignement d'un site transfusionnel d'un ETS, apprécié en termes de délai d'acheminement ;
4.2.2. L'existence au sein de l'établissement de santé de services consommateurs de PSL, en particulier d'un service d'urgences, d'un SMUR ou d'une antenne de SMUR, de services de chirurgie, d'obstétrique ou d'hématologie-oncologie ;
4.2.3. Le niveau d'activité annuelle du dépôt, apprécié en nombre de concentrés de globules rouges et de plasmas frais congelés distribués ;
4.2.4. Les éléments de sécurité sanitaire inclus dans la grille d'analyse jointe à la présente circulaire y compris les éléments concernant :
- le fonctionnement du système de traçabilité permettant ensuite à l'ETS d'assurer sa mission relative au fichier des receveurs de PSL ;
- le lien fonctionnel entre le dépôt et le(s) laboratoire(s) réalisant les analyses d'immuno-hématologie, ce lien étant reconnu comme concourant de façon importante à la sécurité transfusionnelle (cf. circulaire du 5 mars 1999 (1)) ;
- l'organisation des transports de PSL et des circuits de PSL dans l'établissement de santé ;
- la formation des personnels (comité de sécurité transfusionnelle et d'hémovigilance).
(1) Le groupe d'experts prévu par la circulaire du 5 mars 1999 travaille à la rédaction de recommandations sur la nature et les conditions de réalisation de ce lien. Des décisions en la matière seront donc diffusées ultérieurement.
4.3. De tendre à limiter les fonctionnements alternés entre le site de l'ETS et le dépôt ES
En effet, la fermeture du site de l'ETS hors des périodes ouvrables nécessite de mettre des structures de distribution dans les ES avec une activité limitée aux périodes de garde, ce qui est contraire à l'article R. 668-2-23 et qui implique dans certains cas une redondance de moyens techniques et humains (personnel, locaux, dispersion des stocks...) à laquelle peut s'ajouter des disparités en terme de compétence ;
4.4. D'autoriser à titre exceptionnel la distribution d'un ES à un autre ES, dans les conditions précisées par la convention passée entre ETS et ES. L'objectif est d'éviter de multiplier le nombre de dépôts. Les critères spécifiques pris en compte pour autoriser cette activité comportent notamment, en sus des critères mentionnés au 4-2 :
- l'existence d'une proximité géographique et éventuellement d'un regroupement juridique de plusieurs ES éloignés d'un site transfusionnel ;
- le volume total de PSL consommés par l'ES distributeur ;
- le faible volume de PSL consommés par l'ES recevant des PSL distribués par un ES ;
- le type de services existant dans l'ES recevant des PSL distribués par un ES.
En outre, le fait que ces ES possèdent un même laboratoire d'analyses d'immunohématologie 'receveurs' ayant un système de transmission informatisé ainsi qu'un comité de sécurité transfusionnelle et d'hémovigilance commun peut constituer un élément favorable.
II. - PROCEDURE
II.1. La procédure d'autorisation issue de la loi du 1er juillet 1998
La procédure d'autorisation des dépôts de PSL est modifiée à compter de la création de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS).
La décision d'autorisation du préfet de département intervient après avis de l'AFSSAPS et de l'Etablissement français du sang (EFS).
L'avis de l'AFSSAPS sur les conditions sanitaires de la conservation et de la distribution est fondé sur une grille d'analyse remplie par les médecins inspecteurs de santé publique lors de l'inspection visant à vérifier la conformité aux règles de sécurité sanitaire en vigueur. La nouvelle grille d'analyse jointe à la présente circulaire devra être utilisée pour toute inspection effectuée à compter de la date d'application de la circulaire.
L'avis favorable de l'Etablissement français du sang est considéré comme acquis dès lors que la convention entre l'ETS ou l'EFS et l'ES est signée. En effet, dans le cadre de la loi du 1er juillet 98, les ETS n'ont plus d'autonomie juridique et la convention sera donc signée, soit directement par le président de l'EFS, soit par le Directeur de l'ETS, si celui-ci agit par délégation du président de l'EFS.
II.2. La nouvelle procédure d'instruction des dossiers
La constitution et la circulation du dossier sont représentées sur un logigramme annexé à la présente circulaire (annexe I).
2.1. Le projet de convention pour les nouvelles demandes ou la convention ETS/ES antérieurement signée pour les dossiers déjà constitués est transmis à la DDASS. Pour les dossiers déjà constitués, il conviendra d'actualiser la dénomination des ETS signataires des conventions au regard des nouvelles dispositions des schémas d'organisation de la transfusion sanguine. En outre, toute demande de modification d'une convention déjà signée suit le même circuit qu'une nouvelle demande
2.2. L'inspection
S'agissant de la création d'un dépôt de PSL ou lorsque l'inspection d'un dépôt existant date de plus de deux ans à compter de la date d'application de la circulaire, le projet de convention déclenche une inspection conduite à l'aide de la nouvelle grille d'analyse de la sécurité sanitaire, annexée à la présente circulaire (ANNEXE 2). En cas de création d'un nouveau dépôt, certains items de la grille d'analyse ne pourront pas être renseignés lors de l'inspection. Ils sont précisés dans la grille.
J'insiste sur le fait que cette grille contient des éléments et informations qui ne figurent pas dans les conventions. Sans cette grille, il n'est donc pas possible de procéder à une instruction complète des dossiers.
Les dossiers concernés, déjà transmis à l'AFS, l'AFSSAPS ou la DGS seront renvoyés aux DDASS dès la diffusion de la présente circulaire.
Enfin, pour toute inspection de dépôt, je ne verrai que des avantages à ce que l'aide du coordonnateur régional d'hémovigilance placé auprès du DRASS soit requise. En tout état de cause, le coordonnateur régional d'hémovigilance interviendra en tant qu'expert.
2.3. Le dossier complet
Le dossier est complet lorsqu'il comporte les trois documents suivants : la copie du projet de convention pour les nouveaux dossiers ou de la convention signée pour les anciens dossiers, la grille d'analyse renseignée et l'avis motivé du DDASS sur l'opportunité de la création ou du maintien du dépôt. Ce dossier est alors transmis pour avis à l'AFSSAPS avec demande d'accusé de réception.
Une copie du dossier complet est adressée au coordonnateur régional d'hémovigilance.
2.4. L'avis de l'AFSSAPS
Tout avis défavorable de l'AFSSAPS est notifié par le directeur général de l'AFSSAPS au préfet de département et au président de l'Etablissement français du sang. En outre, le dossier de demande d'autorisation, complété par l'avis de l'AFSSAPS, est transmis à l'Etablissement de transfusion sanguine concerné en vue de la signature conjointe (deux exemplaires originaux) par le directeur de l'ETS agissant par délégation du président de l'EFS ou par le président de l'EFS et par le directeur de l'ES.
2.5. L'avis de l'EFS
La signature de la convention par le directeur de l'ETS agissant par délégation du président de l'EFS ou par le président de l'EFS vaut avis favorable de l'Etablissement français du sang (EFS).
Le dossier de demande d'autorisation, complété par l'avis de l'AFSSAPS et la convention signée est adressé au préfet de département.
Toute dénonciation de la convention par les parties doit être portée à la connaissance du directeur général de l'AFSSAPS et du préfet.
2.6. L'autorisation du préfet
La décision du Préfet ne peut intervenir que lorsque celui-ci est en possession du dossier complet mentionné au II.2.3 ainsi que de l'avis de l'AFSSAPS et de la convention signée. Une copie de l'autorisation du préfet ainsi qu'un exemplaire de la convention sont adressés au directeur de l'ETS et au directeur de l'ES. Le coordonnateur d'hémovigilance est destinataire d'une copie de ces deux documents. Le dossier est archivé à la DDASS.
II.3. La mise en oeuvre de la procédure
Jusqu'à la date d'application de la présente circulaire, l'instruction des dossiers d'ores et déjà transmis par les DDASS a continué. Toutefois, n'ont pu être instruits que les dossiers complets, comportant la copie de la convention signée entre l'ETS et l'ES, la grille d'analyse du dépôt concerné remplie par le médecin de santé publique accompagnée d'un avis motivé sur l'opportunité de créer ou de maintenir ce dépôt au regard des nécessités du service public de la transfusion sanguine et des impératifs de sécurité sanitaire.
En janvier 2000, 641 dépôts ont été recensés sur le territoire national et la situation est la suivante :
- sept dépôts ont été autorisés par le ministre chargé de la santé, pour lesquels les conventions ont donc pris effet ;
- 238 dossiers complets adressés par les DDASS ont été instruits par l'Agence française du sang (AFS). Ils ont été transmis par l'EFS à l'AFSSAPS, pour recueil de son avis sur les conditions sanitaires de la conservation et de la distribution.
En outre, l'EFS et l'AFSSAPS devront notifier par courrier aux DDASS les dossiers incomplets ou comportant une grille d'analyse datant de plus de deux ans à la date d'application de la présente circulaire, afin qu'une inspection sur la base de la nouvelle grille soit effectuée avant nouvelle transmission du dossier à l'AFSSAPS.
Pour suivre la mise en oeuvre de la procédure, il m'apparaît nécessaire de faire un bilan des autorisations délivrées et des difficultées rencontrées au cours de l'année 2000.
Je vous remercie de bien vouloir me faire connaître (DGS, bureau SQ, tél : 01-40-56-56-24 ; télécopie : 01-40-56-40-26) les éventuelles difficultés que vous pourriez rencontrer dans l'application de cette nouvelle procédure.
Date d'application : immédiate.
Références :
Article L. 666-10 du code de la santé publique modifié par la loi n° 98-535 du 1er juillet 1998 ;
Décret du 8 mars 1999 portant nomination du directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé ;
Arrêté du 8 décembre 1994 fixant les clauses obligatoires de la convention entre un établissement de santé et un établissement de transfusion sanguine pour l'établissement d'un dépôt de sang et modifiant le réglement relatif aux bonnes pratiques de distribution homologuées par arrêté du 4 août 1994 ;
Circulaire n° 99-140 du 5 mars 1999 sur les transferts d'activités entre les établissements hospitaliers et les établissements de transfusion sanguine ;
Arrêté du 26 novembre 1999 portant approbation des schémas d'organisation de la transfusion sanguine ;
Décret n° 99-1143 du 29 décembre relatif à l'Etablissement français du sang et aux activités de transfusion sanguine ;
Décret du 31 décembre 1999 portant nomination du président du conseil d'administration de l'Etablissement français du sang.
Textes abrogés :
Circulaire DGS/DH n° 58 du 28 juin 1995 relative à la procédure d'autorisation des dépôts de sang dans les établissements de santé ;
Circulaire DGS/DH/AFS n° 96-23 du 17 janvier 1996 complétant la circulaire n° 58 du 28 juin 1995 relative à la procédure d'autorisation des dépôts de sang dans les établissements de santé ;
Circulaire DGS/DH/AFS n° 622 du 8 octobre 1996 complétant les circulaires n° 58 et n° 9623.