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Circulaire DGS/SQ 2 n° 98-470 du 23 juillet 1998 relative à l'information des patients présentant une demande d'indemnisation suite à une contamination transfusionnelle par le virus de l'hépatite C

Les services centraux et déconcentrés du ministère de l'emploi et de la solidarité sont de plus en plus souvent saisis par les patients de demandes liées à la contamination par le virus de l'hépatite C, notamment à la suite d'une transfusion sanguine.

Une rapide analyse des demandes reçues et traitées à la direction générale de la santé a fait apparaître les caractéristiques suivantes :
- 46 % portent sur les procédures contentieuses (la marche à suivre) ;
- 19 % font état de situations sociale et médicale précaires ;
- 16 % sont conjoncturelles et concernent les suites données au rapport public de 1998 du Conseil d'Etat ;
- 3 % portent sur une reconnaissance d'invalidité ;
- 3 % sont des demandes directes d'indemnisation par l'Etat ;
- 3 % sollicitent une intervention dans une procédure judiciaire en cours ;
- 10 % sont de nature diverse (refus de prise en charge par les assureurs, demande d'information sur les thérapeutiques, difficulté d'accès aux informations médicales...).

La réponse aux usagers en première intention relève de votre compétence d'autant que les problèmes posés impliquent souvent des instances locales (COTOREP, CPAM...). Certains services départementaux ont d'ailleurs été interpellés sur ce sujet et le seront vraisemblablement de plus en plus.

Par conséquent, à partir de septembre 1998, les courriers des particuliers évoqués précédemment et reçus à l'administration centrale vous seront systématiquement transmis. L'objectif de la circulaire est de vous fournir des éléments afin de répondre le plus facilement et de la manière la plus pertinente aux usagers. Les demandes précontentieuses ou formulées au cours de procédures judiciaires ne sont pas concernées.

Seront abordés les points qui reviennent le plus souvent dans les demandes soit :

1° Les possibilités d'indemnisation des victimes de la transmission du virus de l'hépatite C par voie transfusionnelle ;

2° Les règles d'accès au dossier médical dans le cadre d'une action en responsabilité ;

3° Le rôle du dispositif d'hémovigilance en matière d'enquête transfusionnelle.

Les cas particuliers que vous pourrez rencontrer sont abordés dans le chapitre IV.

Ces informations pourront ainsi constituer les éléments de réponse aux demandes de particuliers que vous aurez à traiter.

I. - LES POSSIBILITES D'INDEMNISATION DES VICTIMES DE LA TRANSMISSION DU VIRUS DE L'HEPATITE C PAR VOIE TRANSFUSIONNELLE

Je vous rappelle que d'après le Réseau national de santé publique, la prévalence de l'infection par le virus de l'hépatite C est estimée entre 550 000 et 600 000 personnes. Parmi ces personnes contaminées, on estime qu'environ un tiers des contaminations sont d'origine transfusionnelle jusqu'en 1991, un tiers sont liées à la toxicomanie (intraveineuse ou par voie per nasale). Dans environ un tiers des cas, l'origine ne peut être précisée, mais le risque nosocomial joue probablement un rôle non négligeable sans pouvoir être précisément identifié, ni quantifié.

Des campagnes de dépistage vont être progressivement mises en place dès 1999 dans le cadre d'un programme national de lutte contre l'hépatite C lancé par le ministère chargé de la santé : un nombre croissant de personnes devraient être diagnostiquées dans ce cadre.

Depuis la publication du rapport du Conseil d'Etat, abordant notamment le droit de la santé, et sa prise de position en faveur d'une intervention du législateur pour indemniser les victimes d'un risque sériel, les personnes contaminées par le virus de l'hépatite C considèrent que les mesures sont en cours d'élaboration et sollicitent les services sur la façon de constituer leur dossier. Or il ne s'agit que d'une réflexion générale et d'une recommandation faite au gouvernement et non d'une décision juridictionnelle du Conseil d'Etat.

Il convient de répondre à toute personne qui en exprime la demande, qu'il n'existe pas, pour l'heure, de procédure spécifique d'indemnisation des victimes de l'hépatite C par voie transfusionnelle. Les services des ministères concernés travaillent toutefois à définir un cadre juridique général à la prise en charge de l'aléa thérapeutique, à l'occasion duquel l'indemnisation des victimes de l'hépatite C par voie transfusionnelle devrait être abordée.

Actuellement, ces personnes ne peuvent obtenir réparation du préjudice subi que par règlement amiable avec l'établissement de santé ou l'établissement de transfusion sanguine ou par voie contentieuse. Il leur appartient de s'adresser à l'établissement concerné pour obtenir une indemnisation à l'amiable ou d'engager une action en responsabilité à l'encontre des établissements de santé et/ou des établissements de transfusion sanguine leur ayant dispensé les soins qu'ils estiment à l'origine de leur préjudice.

Vous trouverez en annexe, des éléments de réponse-type sur ce point.

II. - RAPPEL DES REGLES EN MATIERE D'ACCES AU DOSSIER MEDICAL DANS LE CADRE D'UNE ACTION EN RESPONSABILITE

L'analyse des demandes écrites et téléphoniques fait apparaître que pour une bonne part, les patients n'ont pas demandé la communication de leur dossier médical et ignorent leurs droits dans ce domaine. Or en l'état actuel de la jurisprudence, il appartient au demandeur d'apporter la preuve de sa contamination au regard d'une ou de plusieurs transfusions sanguines ou à défaut, d'apporter les informations médicales susceptibles de constituer une présomption de preuve. Il importe donc de rappeler à l'intéressé qu'il peut avoir communication des informations médicales le concernant, quel que soit leur support de gestion, par l'intermédiaire d'un médecin désigné à cet effet. Cette règle s'applique aux dossiers informatisés, aux dossiers manuels, aux dossiers hospitaliers ainsi qu'à ceux des médecins libéraux. L'article 35 de la loi du 6 janvier 1978 spécifie bien que la communication doit être intégrale.

Cependant, nombre de courriers font également état des difficultés rencontrées par les particuliers pour obtenir des informations lorsque les archives des établissements ont été détruites ou font défaut. Dans ce cas, l'établissement de santé ou l'établissement de transfusion sanguine doivent délivrer au demandeur un document écrit, daté, signé et motivé attestant de l'impossibilité de retrouver les informations demandées. L'établissement de santé interroge également l'établissement de transfusion sanguine (et réciproquement) concerné par les transfusions du malade afin de rechercher s'il dispose des informations demandées. La circulaire DGS/DH/AFS n° 97-149 du 26 février 1997 relative à l'accès des patients aux informations dans le domaine de la transfusion sanguine, notamment dans le cadre d'une action en responsabilité rappelle aux établissements de santé et aux établissements de transfusion sanguine leurs obligations en matière de recueil, de conservation et de transmission des données transfusionnelles des patients.

III. - RAPPEL DU ROLE DES ACTEURS DE L'HEMOVIGILANCE EN MATIERE D'ENQUETE TRANSFUSIONNELLE

Le décret n° 94-68 du 24 janvier 1994 a introduit dans le code de la santé publique les dispositions relatives à l'hémovigilance (art. R. 666-12-1 à R. 666-12-27).

Ce dispositif repose sur la mise en place d'un réseau de professionnels :

Dans chaque établissement de santé et dans chaque établissement de transfusion sanguine est désigné (art. R. 666-12-11 et R. 666-12-14) un correspondant d'hémovigilance qui est notamment chargé de signaler et suivre tout effet inattendu et indésirable dû, ou susceptible d'être dû, à l'administration d'un produit sanguin labile.

La procédure de déclaration de l'incident est prévue à l'article R. 666-12-24 du code de la santé publique : 'Tout médecin, pharmacien, chirurgien-dentiste, sage-femme, infirmière ou infirmier qui a connaissance de l'administration d'un produit sanguin labile à un de ses patients et qui constate un effet inattendu ou indésirable dû, ou susceptible d'être dû à ce produit, doit le signaler sans délai au correspondant d'hémovigilance de l'établissement dans lequel a été administré le produit, qui déclenche, le cas échéant, une enquête transfusionnelle'. La déclaration de l'incident donne lieu à la rédaction d'une fiche d'incident transfusionnel, qui constitue le point de départ de l'enquête transfusionnelle. Le correspondant réalise les enquêtes ou participe à la réalisation de leur bonne conduite.

Il est donc absolument nécessaire de rappeler qu'une enquête transfusionnelle peut toujours être effectuée à la demande des patients en dehors d'une expertise judiciaire. Etant entendu qu'une telle enquête ne peut être déclenchée directement par le patient, il doit s'adresser à l'une des personnes visées à l'article R. 666-12-24.

Au niveau de chaque région est désigné par arrêté ministériel sur proposition du président de l'Agence française du sang et à l'avenir de l'Agence de sécurité sanitaire des produits de santé, un coordonnateur, placé auprès du directeur régional des affaires sanitaires et sociales. Il assure le suivi de la mise en oeuvre par les établissements de santé et les établissements de transfusion sanguine, des dispositions du décret relatif à l'hémovigilance, à proposer à l'Agence française du sang, sous couvert du préfet de région et du DRASS, l'adoption de toute mesure susceptible d'améliorer la qualité, la fiabilité et la cohérence du dispositif d'hémovigilance. En outre, il décide de la poursuite ou de l'interruption des investigations entreprises en cas d'urgence par les correspondants, devant des effets inattendus ou indésirables.

Il convient donc de faire état de cette possibilité à toute personne qui envisage de faire un recours contentieux, afin de lui permettre d'avoir une certitude sur l'imputabilité de la transfusion.

IV. - CAS PARTICULIERS

A. - LES DEMANDES DIRECTES D'INDEMNISATION PAR L'ETAT

De plus en plus, les victimes de contamination VHC se tournent directement vers l'Etat pour obtenir réparation (3 % des demandes à l'heure actuelle mais la tendance est nettement à la hausse). Vous porterez une attention particulière à ces demandes et vous me signalerez toute augmentation significative de ce type de courrier.

Dans l'hypothèse où vous estimeriez être en présence d'une demande précontentieuse (demandes formalisées avec accusé de réception, dossier reconstitué) vous voudrez bien la transmettre à la direction générale de la santé (bureau SQ 2).

B. - LES DEMANDES D'INTERVENTION DANS UNE PROCEDURE CONTENTIEUSE EN COURS

Ces courriers doivent être transmis pour attribution au ministère de la justice. Il peut être précisé cependant que l'administration ne peut interférer dans une procédure judiciaire.

Je vous remercie de bien vouloir m'informer des difficultés que vous pourriez rencontrer dans l'application de cette circulaire (direction générale de la santé, bureau SQ 2, Angélique Lapierre, tél. : 01-40-56-58-71, bureau SQ 4, Christiane Draicchio, tél. : 01-40-56-57-88).

Délai d'application : 15 septembre 1998.

Références :

Loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 (art. 34 et 35) relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés ;
Loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal ;
Loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Article R. 710-2-1 et R. 710-2-2 du code de la santé publique ;
Circulaire DGS/DH n° 95-22 du 6 mai 1995 relative aux droits des patients hospitalisés et comportant charte du patient hospitalisé ;
Circulaire DGS/DH n° 96-499 du 6 août 1996 relative à la conduite à tenir en cas de découverte d'une séroconversion ou d'une sérologie positive chez un receveur de produits sanguins labiles ainsi qu'aux suites à donner aux demandes d'enquêtes des établissements de transfusion sanguine sur les receveurs de produits sanguins labiles présentant un risque viral ;
Circulaire DGS/DH/AFS n° 97-149 du 26 février 1997 relative à l'accès des patients aux informations dans le domaine de la transfusion sanguine, notamment dans le cadre d'une action en responsabilité.

ANNEXE
ELEMENTS DE REPONSE

Demande d'indemnisation

'Il n'existe pas de fonds d'indemnisation pour les victimes de contamination par le virus de l'hépatite C. Ces personnes ne peuvent obtenir réparation que par voie contentieuse. Il vous appartient, le cas échéant, d'engager une action en responsabilité devant les tribunaux à l'encontre des établissements de santé ou des établissements de transfusion sanguine qui vous ont dispensé les soins que vous indiquez à l'origine de votre contamination'.

Aide juridictionnelle

'Afin de recevoir une information complète sur la juridiction compétente et les possibilités d'aide juridique, je vous invite à prendre l'attache du bureau d'aide juridictionnelle ou du greffe du tribunal de grande instance dont relève votre domicile.'

Communication du dossier médical

'Dans le cadre d'une procédure contentieuse que vous engageriez, vous aurez à fournir les informations médicales qui constituent éventuellement des éléments de preuve de votre contamination. La loi fait obligation aux établissements de santé de communiquer au malade les informations médicales le concernant par l'intermédiaire d'un médecin qu'il aura désigner à cet effet (art. L. 710.2 du code de la santé publique). En février 1997, le secrétaire d'Etat à la santé a rappelé cette obligation aux établissements par voie de circulaire.'

Enquête transfusionnelle

'La réglementation en matière d'hémovigilance permet à tout patient, victime d'un effet inattendu lors de l'administration d'un produit sanguin labile et par l'intermédiaire d'un médecin, d'un pharmacien, d'un chirurgien dentiste, d'une sage-femme ou d'une infirmière, de demander qu'une enquête transfusionnelle soit réalisée. Elle peut être effectuée en dehors d'une expertise judiciaire.'

Aléas thérapeutiques

'Conscient de la lourdeur de la procédure contentieuse, des difficultés pour les victimes d'obtenir réparation du préjudice subi, et suite aux réflexions du Conseil d'Etat sur l'indemnisation des victimes d'aléas thérapeutiques, M. le secrétaire d'Etat a demandé à ses services de réfléchir à un cadre juridique approprié à la prise en charge du risque médical. La question des contaminations post-transfusionnelles par le virus de l'hépatite C constituera, à l'évidence, un des axes majeurs de cette réflexion.'

Le secrétaire d'Etat à la santé, Direction générale de la santé, Bureau SQ 2.

Mesdames et Messieurs les préfets de région (direction régionales des affaires sanitaires et sociales [pour information]) ; Mesdames et Messieurs les directeurs d'Agence régionale d'hospitalisation [pour information]) ; Mesdames et Messieurs les préfets de département (directions départementales des affaires sanitaires et sociales [pour mise en oeuvre]).

Texte non paru au Journal officiel.