J'ai été saisi à plusieurs reprises des risques présentés par le stationnement et la circulation des voitures automobiles dans l'enceinte d'un établissement d'hospitalisation public, dont l'importance justifie l'élaboration de règles strictes qui s'imposent aux particuliers.
Les problèmes posés sont principalement de trois ordres :
1° Les voies et parkings établis à l'intérieur des enceintes des hôpitaux publics doivent-ils être considérés comme dépendances du domaine public au sens de l'article 538 du code civil?
2° Le code de la route y est-il applicable?
3° Quelle est l'autorité compétente pour réglementer l'usage de ces voies et pour y constater et réprimer les infractions?
Devant la complexité juridique de ces questions, j'ai été amenée à consulter le Conseil d'Etat qui, au cours de la séance de l'assemblée générale du 28 avril 1977, a émis l'avis dont je vous communique ci-après la teneur:
1° Définition du domaine
«Les bâtiments et installations qui appartiennent aux établissements publics hospitaliers, lorsqu'ils sont affectés au service public et spécialement aménagés à cette fin, sont des dépendances du domaine public de ces établissements. Il en est ainsi notamment des voies de desserte établies à l'intérieur des enceintes des hôpitaux, de leurs dépendances et accessoires.»
2° Application du code de la route
«Ces voies de desserte, ouvertes seulement au personnel et aux usagers du service public hospitalier ne peuvent être regardées comme des voies ouvertes à la circulation publique.
«Si certaines des dispositions législatives du code de la route y sont applicables comme sur l'ensemble du territoire, il n'en va pas de même des dispositions dudit code qui réglementent l'usage des voies ouvertes à la circulation publique et déterminent les pénalités, ainsi que les mesures d'exécution formée applicables en cas d'infraction auxdites règles.
«Pour le même motif, ces voies échappent à la compétence des autorités administratives chargées de la police de la circulation.
«Des dispositions inspirées de celles du code de la route, mais adaptées à la situation et à la destination particulière des voies intérieures des hôpitaux publics, pourraient être prises, selon le cas, par voie législative ou réglementaire.
«Il apparaît cependant préférable de ne pas dissocier le pouvoir de réglementer et contrôler l'usage de ces voies de celui qui appartient à l'autorité hospitalière d'organiser le service public dont elle a la charge et de gérer son domaine public.»
«Sans préjudice des mesures réglementaires prises par les autorités chargées de la police de la sécurité et de l'ordre public, il appartient au conseil d'administration de l'établissement public hospitalier, notamment par la voie du règlement intérieur prévu à l'article 22 de la loi susvisée du 31 décembre 1970, et sous réserve de l'approbation de l'autorité de tutelle, de réglementer la circulation et le stationnement dans l'enceinte de l'établissement, dans l'intérêt du domaine public et du service public auquel il est affecté, ainsi que dans l'intérêt général.
«Le règlement type annexé au décret n° 74-27 du 14 janvier 1974 pris en application de l'article 22 susvisé, pourrait utilement être complété de dispositions en ce sens (1).
(1) A ce propos, je vous signale qu'un projet de décret qui est actuellement en cours d'élaboration dans mes services a pour objet de compléter, pour la partie administrative, le règlement intérieur type dont il s'agit.
«Au directeur de l'hôpital, chargé d'assurer l'exécution des délibérations du conseil d'administration, il appartient de faire connaître au personnel et aux usagers par tous moyens appropriés, les dispositions du règlement intérieur, et d'assurer la surveillance nécessaire.
«En l'état actuel des textes législatifs et réglementaires, les infractions aux dispositions du règlement intérieur ne peuvent être sanctionnées pénalement que par application de l'article R. 26 (15°) du code pénal. Seul le législateur pourrait instituer des amendes forfaitaires ou prévoir des mesures d'exécution d'office analogues à celles qui figurent dans le code de la route.
«En revanche, la méconnaissance, par un membre du personnel de l'hôpital des dispositions du règlement intérieur peut être constitutive d'une faute et motiver une sanction disciplinaire.
«L'établissement public hospitalier peut, par ailleurs, s'adresser, au besoin par la voie de l'action en référé, à la juridiction administrative compétente, pour ordonner l'expulsion d'un occupant sans titre du domaine public.
«Les autorités de police ont l'obligation d'intervenir, soit à la demande des autorités hospitalières, soit même d'office, en cas d'atteinte à la sécurité ou à l'ordre public et notamment lorsque le fonctionnement du service public hospitalier est compromis.
«Enfin, le directeur ne commettrait pas une voie de fait en procédant lui-même, en cas d'urgence et de péril grave pour les intérêts dont l'établissement public a la charge, aux mesures strictement nécessaires pour faire cesser ce péril.»
En conclusion, cet avis permet de dégager deux principes essentiels :
a) Les bâtiments, installations et voies de desserte qui appartiennent aux établissements d'hospitalisations publics, font partie du domaine public, lorsqu'ils sont affectés au service public ;
b) Par voie de conséquence, les autorités de police peuvent intervenir, à l'intérieur d'un établissement d'hospitalisation public, en cas d'atteinte à la sécurité ou à l'ordre public (exemple : stationnement abusif d'un véhicule devant une bouche d'incendie, devant l'entrée des ambulances, etc.).
Je n'ignore pas les difficultés d'ordre pratique auxquelles peuvent se heurter les administrations hospitalières pour la mise en place des mesures à prendre dans les cas de l'espèce.
Aussi bien, convient-il d'envisager dès maintenant trois possibilités d'actions dans le domaine considéré, qui ne sauraient s'exclure l'une l'autre :
En effet, selon les structures hospitalières, les difficultés peuvent se présenter de façon différente, mais il me paraît nécessaire dans tous les cas, de réglement l'entrée, la circulation et le stationnement des véhicules automobiles dans l'enceinte de l'hôpital.
On pourrait donc envisager :
1. Dans l'attente de la publication du décret qui doit compléter le décret précité du 14 janvier 1974, chaque établissement hospitalier pourrait élaborer un règlement intérieur provisoire définissant les mesures et dispositions à prendre tant par les usagers que par les autorités hospitalières.
2. Dès que la partie du règlement intérieur applicable à l'entrée, à la circulation et au stationnement des véchicules automobiles aura été délibérée par le conseil d'administration et approuvée par la tutelle: la mise en place à l'entrée de l'hôpital d'un panneau indicateur mentionnant que le code de la route est rendu partiellement applicable à l'intérieur de l'établissement, par le règlement intérieur de l'hôpital, les limitations de vitesse, les emplacements de stationnements interdits ou réservés, etc.
Chaque fois que l'inobservation de ces règles présenterait un risque sérieux pour la sécurité, le directeur pourrait faire appel aux forces de police.
3. Le respect de ces règles pourrait être assuré par les agents de l'hôpital spécialement formés à cet effet. A défaut, une convention pourrait utilement être conclue entre le directeur de l'hôpital (représentant légal de l'établissement) et le maire de la ville (agissant au nom de la commune d'implantation), chacun étant respectivement mandaté par le conseil d'administration et le conseil municipal, afin de permettre à l'administration hospitalière d'assurer le contrôle de la circulation et du stationnement à l'intérieur de l'hôpital avec le concours d'agents assermentés recrutés à titre contractuel par la municipalité et mis spécialement à la disposition dudit hôpital.
Cette convention pourrait fixer également le nombre d'agents assermentés dont pourrait disposer l'établissement hospitalier intéressé, ainsi que les modalités de remboursement à la ville de la rémunération de ces agents; ces suggestions vous sont faites à titre indicatif, chaque administration hospitalière ayant toute latitude pour conclure avec la municipalité telle ou telle convention ayant l'agrément des deux parites contractantes, sous réserve de l'avis de la tutelle préfectorale.
Vous voudrez bien me tenir informé sous le timbre «Direction des hôpitaux, bureau TG 2», des difficultés auxquelles pourrait donner lieu l'application de la présente circulaire.
13808. Ministère de la santé et de la sécurité sociale Direction des hôpitaux (Bureau TG 2.)(Adressée aux préfets de région, services régionaux de l'action sanitaire et sociale et aux préfets, directions départementales de l'action sanitaire et sociale.)