L’obstination déraisonnable en réanimation », tel était le thème de la journée qui a réuni plus de 360 personnes en distanciel et en présentiel à l’Hôpital européen Georges-Pompidou le 12 octobre de cette année. Organisée par la Direction des affaires juridiques et des droits des patients et le Centre d’éthique clinique de l’AP-HP, elle était consacrée aux situations où les proches de patients inconscients, ou plus généralement dans l’incapacité de s’exprimer pour eux-mêmes, sont en désaccord avec la décision prise par l’équipe médicale de limiter voire d’arrêter certains traitements. Il s’agit de situations où l’équipe juge que la poursuite des traitements constituerait de l’obstination déraisonnable », c’est-à-dire des traitements devenus « inutiles ou disproportionnés, ou n’ayant comme effet que le seul maintien artificiel de la vie », selon les termes de la loi ; situations particulièrement douloureuses, autant pour les proches que pour les équipes soignantes, même si elles demeurent relativement rares. Ceci ne doit pas occulter cette réalité qu’au sein de l’AP-HP, la grande majorité des décisions de limitation ou d’arrêt de traitements ne provoquent pas de conflits entre les proches et les professionnels de santé.
Quelques constats peuvent être faits à ce stade :
• La notion d’obstination déraisonnable est incertaine et ne répond pas à des critères unanimement partagés. La confrontation parfois constatée entre une vision médicale qui tente d’objectiver et une position plus émotionnelle des proches a été contrebalancée avec l’idée qu’une subjectivité peut exister des deux côtés. Veiller au maintien du dialogue est indispensable. Développer des outils spécifiques dans ce domaine permettrait peut-être d’éviter certains conflits.
• Tant les équipes soignantes que les proches sont convaincus de défendre le meilleur intérêt du patient. C’est en creusant les raisons de ces désaccords que l’on peut probablement mieux entrer en dialogue et s’accorder sur des décisions partagées.
• Au cours des derniers mois, dans certains cas aigus, des proches se sont résolus à en appeler au juge, dans le cadre d’une procédure de « référé-liberté ». Cette extrémité, qui est certes un droit des proches, n’est manifestement jamais une bonne solution.
• L’un des enjeux de la journée était justement de réfléchir aux alternatives à ce conflit judiciarisé. La possibilité de faire appel à un « médiateur » ou à un « tiers extérieur » pourrait être davantage tentée en cas de désaccord voire de conflit : médiateur hospitalier, local voire du siège de l’AP-HP, médiateur culturel comme le « centre Babel », cellule éthique, locale ou le Centre d’éthique clinique de l’AP-HP. L’intervention de ces intervenants extérieurs doit être organisée le plus tôt possible, en prenant en compte le « temps » des proches, avant que la décision de limitation/arrêt de traitements ne soit définitivement prise par les médecins responsables.
Une question majeure est la place des proches dans la prise en charge des patients aujourd’hui. Il a été souligné la nécessité d'exprimer ses volontés en amont, par la désignation d’une personne de confiance, par la rédaction de directives anticipées.
Afin de vous permettre prendre connaissance des différentes présentations et échanges de cette journée, nous proposons les liens vers les vidéos.