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Conseil constitutionnel, 16 mars 2017, n° 2017-747 DC (Loi relative à l'extension du délit d'entrave à l'interruption volontaire de grossesse)

Par sa décision n° 2017-747 DC du 16 mars 2017, le Conseil constitutionnel s'est prononcé sur la loi relative à l'extension du délit d'entrave à l'interruption volontaire de grossesse, dont il avait été saisi par plus de soixante députés et plus de soixante sénateurs.

Cette loi donne une nouvelle rédaction à l'article L. 2223-2 du code de la santé publique qui définit le délit d'entrave à l’interruption volontaire de grossesse et qui prévoit de sanctionner de deux ans de prison et 30 000 euros d’amende « le fait d’empêcher ou de tenter d’empêcher de pratiquer ou de s’informer sur une interruption volontaire de grossesse ou les actes préalables prévus par les articles L. 2212-3 à L.2212-8 par tout moyen, y compris par voie électronique ou en ligne, notamment par la diffusion ou la transmission d’allégations ou indications de nature à induire intentionnellement en erreur, dans un but dissuasif, sur les caractéristiques ou les conséquences médicales d’une interruption volontaire de grossesse :

« 1° Soit en perturbant l'accès aux établissements mentionnés à l'article L. 2212-2, la libre circulation des personnes à l'intérieur de ces établissements ou les conditions de travail des personnels médicaux et non médicaux ;
« 2° Soit en exerçant des pressions morales et psychologiques, des menaces ou tout acte d'intimidation à l'encontre des personnes cherchant à s'informer sur une interruption volontaire de grossesse, des personnels médicaux et non médicaux travaillant dans les établissements mentionnés au même article L. 2212-2, des femmes venues recourir à une interruption volontaire de grossesse ou de l'entourage de ces dernières. »

Les parlementaires soutenaient que ce texte portait une atteinte disproportionnée à la liberté d'expression et de communication, que par « sa rédaction floue et confuse » il méconnaissait le principe de légalité des délits et des peines ainsi que l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi, et enfin, qu’il méconnaissait le principe de proportionnalité des peines.

Sur la conformité de la loi au principe de légalité des délits et des peines et à l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi, le Conseil a jugé que ces dispositions étaient « suffisamment claires et précises » pour que soient respectés ces deux principes à valeur constitutionnelle.

Sur la conformité de la loi à la liberté d’expression et de communication, le Conseil a jugé que les dispositions contestées ne portaient pas une atteinte disproportionnée à l’objectif poursuivi, sous deux réserves :

- « ces dispositions ne peuvent permettre que la répression d'actes ayant pour but d'empêcher ou de tenter d'empêcher une ou plusieurs personnes déterminées de s’informer sur une interruption volontaire de grossesse ou d’y recourir » ;

- « le délit d'entrave, lorsqu'il réprime des pressions morales et psychologiques, des menaces ou tout acte d'intimidation à l'encontre des personnes cherchant à s'informer sur une interruption volontaire de grossesse, ne saurait être constitué qu'à deux conditions : que soit sollicitée une information, et non une opinion ; que cette information porte sur les conditions dans lesquelles une interruption volontaire de grossesse est pratiquée ou sur ses conséquences et qu'elle soit donnée par une personne détenant ou prétendant détenir une compétence en la matière ».

Enfin, le Conseil a jugé que les peines de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende, « afin de prévenir l’atteinte susceptible d’être portée à la liberté de la femme », ne sont pas manifestement disproportionnées.