[…] le rejet implicite opposé par le centre hospitalier à la seconde demande de l'intéressé ne pouvait être regardé comme une décision confirmative de la décision de rejet du 23 février 1996, dès lors que ladite demande était fondée sur une cause juridique différente de celle sur laquelle reposait sa première demande […] |
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 29 mars et 28 juillet 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. André X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance en date du 8 janvier 2004 par laquelle le président de la troisième chambre de la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 16 décembre 1999 du tribunal administratif de Besançon qui a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Montbéliard à lui verser une somme de 2 000 000 F en réparation du préjudice qu'il a subi suite à l'accident survenu le 25 juin 1993 ;
2°) statuant au fond, d'annuler le jugement du 16 décembre 1999 du tribunal administratif de Besançon et de renvoyer l'affaire devant ce tribunal ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Montbéliard la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Yves Gounin, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Bachellier, Potier de la Varde, avocat de M. X, de Me Le Prado, avocat du centre hospitalier de Montbéliard et de Me de Nervo, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de Montbéliard,
- les conclusions de M. Didier Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel (...) et les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours peuvent, par ordonnance : (...) /4º Rejeter les requêtes irrecevables pour défaut d'avocat, pour défaut de production de la décision attaquée, ainsi que celles qui sont entachées d'une irrecevabilité manifeste non susceptible d'être couverte en cours d'instance (...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. X a demandé le 14 avril 1998 au tribunal administratif de Besançon de condamner le centre hospitalier de Montbéliard à lui verser une somme de 2 000 000 F en réparation du préjudice qu'il a subi à la suite de l'accident survenu le 25 juin 1993 ; que sa demande a été rejetée, comme tardive, par un jugement du tribunal administratif de Besançon en date du 16 décembre 1999 ; que l'appel de M. X contre ce jugement a été rejeté, le 8 janvier 2004, par une ordonnance du président de la troisième chambre de la cour administrative d'appel de Nancy contre laquelle l'intéressé se pourvoit en cassation ;
Considérant que, alors même que le président de la troisième chambre de la cour administrative d'appel de Nancy estimait tardive la demande présentée au tribunal administratif, l'appel formé contre le jugement rendu par ce tribunal ne pouvait pour ce motif être regardé comme entaché d'une irrecevabilité manifeste insusceptible d'être couverte en cours d'instance ; que l'ordonnance par laquelle le président de la troisième chambre de la cour a rejeté cette requête d'appel par application des dispositions de l'article R. 222-1 du code de justice administrative est, par suite, entachée d'une erreur de droit ; que M. X et la caisse primaire d'assurance maladie de Montbéliard sont donc fondés à en demander l'annulation ;
Considérant qu'il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, d'examiner la requête d'appel formée par M. X contre le jugement du tribunal administratif de Besançon en date du 16 décembre 1999 ;
Considérant que M. X a subi, le 25 juin 1993 au centre hospitalier de Montbéliard, un scanner de l'épaule avec injection de produit iodé ; qu'à la suite de cette injection, il a été victime d'un arrêt cardiaque et est resté dans le coma pendant quinze jours ; qu'ayant estimé que ces faits engageaient la responsabilité de l'hôpital sur le fondement du risque, il a présenté, le 3 août 1995 une demande d'indemnité à son directeur, lequel l'a rejetée par une décision du 23 février 1996, notifiée le 24 février ; qu'il a saisi le 2 avril 1996 le tribunal administratif de Besançon d'une requête en référé aux fins de voir désigner un expert chargé d'apprécier l'état et l'origine de ses préjudices ; qu'à la suite du dépôt, le 17 juin 1997, du rapport de l'expert, qui concluait à l'existence d'une faute de l'hôpital pour avoir pratiqué une injection de produit iodé à l'intéressé, M. X a formé une nouvelle demande d'indemnisation auprès du centre hospitalier le 21 octobre 1997 en invoquant cette fois-ci la faute qu'aurait commise le centre hospitalier en lui injectant un produit iodé malgré ses antécédents asthmatiques ; que, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, le rejet implicite opposé par le centre hospitalier à la seconde demande de l'intéressé ne pouvait être regardé comme une décision confirmative de la décision de rejet du 23 février 1996, dès lors que ladite demande était fondée sur une cause juridique différente de celle sur laquelle reposait sa première demande ; que, par suite, et en application des dispositions du quatrième alinéa de l'article R. 102 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel alors applicable, selon lesquelles, en matière de plein contentieux l'intéressé n'est forclos qu'après un délai de deux mois à compter du jour de la notification d'une décision expresse de rejet, M. X n'était pas tardif lorsqu'il a saisi, le 14 avril 1998, le tribunal administratif de Besançon d'une demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Montbéliard ; que M. X et la caisse primaire d'assurance maladie de Montbéliard sont, dès lors, fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté comme tardive la demande de M. X ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Besançon ;
Sur les conclusions de M. X tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier de Montbéliard la somme de 5 000 euros que M. X demande au titre des frais exposés par lui en première instance, en appel et en cassation et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : L'ordonnance du président de la troisième chambre de la cour administrative d'appel de Nancy en date du 8 janvier 2004 et le jugement du tribunal administratif de Besançon en date du 16 décembre 1999 sont annulés.
Article 2 : L'affaire est renvoyée devant le tribunal administratif de Besançon.
Article 3 : Le centre hospitalier de Montbéliard versera à M. X la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. André X, au centre hospitalier de Montbéliard, à la caisse primaire d'assurance maladie de Montbéliard et au ministre de la santé et des solidarités.