En l’espèce, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande d’une société d’ambulances tendant à la condamnation d’un centre hospitalier intercommunal au versement d’une somme correspondant à des prestations de transport sanitaire facturées entre le mois de janvier 1998 et le mois de mai 2000 et demeurées impayées. Le centre hospitalier a formé un pourvoi en cassation contre un arrêt de la cour administrative d’appel de Marseille qui a annulé ce jugement et qui a fait droit à la demande de la société. Le Conseil d’Etat rappelle qu’un établissement de santé dont le service d'accueil et de traitement des urgences a accueilli un patient dont l'état de santé nécessite le transfert vers un autre établissement de santé assume la charge des dépenses de transport sanitaire que nécessite ce transfert, qu'il doit assurer par ses moyens propres ou faire assurer par une entreprise de transport sanitaire. De plus, il considère qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les transports sanitaires litigieux ont concerné exclusivement des patients transférés à partir du service d'accueil et de traitement des urgences du centre hospitalier où ils avaient été initialement accueillis, vers un autre établissement de santé. Ainsi, pour mettre à la charge du centre hospitalier le coût de ces transports sanitaires, la cour administrative d'appel a estimé que dans le cas où un établissement public de santé recourait aux prestations de services d'un transporteur privé pour assurer le transfert d'un patient de son service d'accueil et de traitement des urgences vers un autre établissement de santé, il lui appartenait de rémunérer ce prestataire. Aucune erreur de droit n’a ainsi été commise. La Haute juridiction administrative a ainsi rejeté le pourvoi du centre hospitalier.
Conseil d'État
N° 300618
Mentionné dans les tables du recueil Lebon
1ère et 6ème sous-sections réunies
M. Daël, président
Mme Jeannette Bougrab, rapporteur
M. Derepas Luc, commissaire du gouvernement
SCP CHOUCROY, GADIOU, CHEVALLIER ; SCP GATINEAU, avocats
lecture du lundi 16 juin 2008
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 15 janvier et 16 avril 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE CAVAILLON-LAURIS, dont le siège est 119, avenue Georges Clemenceau, BP 157 à Cavaillon cedex (84304) ; le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE CAVAILLON-LAURIS demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 13 novembre 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a annulé le jugement du 6 mai 2004 du tribunal administratif de Marseille rejetant la demande de la société Ambulances Cavaillonnaises tendant à sa condamnation et l'a condamné à verser à cette société la somme de 41 923,37 euros, correspondant aux prix des transports vers d'autres établissements de santé de patients accueillis à son service des urgences, somme augmentée des intérêts au taux légal à compter du 22 mars 2000 ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de la société Ambulances Cavaillonnaises ;
3°) de mettre à la charge de la société Ambulances Cavaillonnaises la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Jeannette Bougrab, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Gatineau, avocat du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE CAVAILLON-LAURIS,
- les conclusions de M. Luc Derepas, Commissaire du gouvernement ;
Considérant, d'une part, qu'en vertu des dispositions, alors en vigueur, de l'article R. 712-65 du code de la santé publique, un service d'accueil et de traitement des urgences d'un établissement de santé autorisé pour cette activité doit accueillir sans sélection vingt-quatre heures sur vingt-quatre, tous les jours de l'année, toute personne se présentant en situation d'urgence, y compris psychiatrique, et la prendre en charge ; qu'aux termes de l'article R. 712-72 du même code : « Le service d'accueil et de traitement des urgences (...) doit, s'il y a lieu, assurer ou faire assurer le transfert, éventuellement médicalisé, d'un patient vers un autre établissement de santé » ; qu'il résulte de ces dispositions qu'un établissement de santé dont le service d'accueil et de traitement des urgences a accueilli un patient dont l'état de santé nécessite le transfert vers un autre établissement de santé assume la charge des dépenses de transport sanitaire que nécessite ce transfert, qu'il doit assurer par ses moyens propres ou faire assurer par une entreprise de transport sanitaire ;
Considérant, d'autre part, que ces dépenses de transport sont prises en charge par l'assurance maladie au titre des frais d'hospitalisation et de traitement dans les établissements de soins mentionnés au 1° de l'article L. 321-1 du code de la sécurité sociale, notamment, s'agissant de dépenses supportées par un établissement public de santé, en application des dispositions de l'article L. 174-1 du code de la sécurité sociale relatif à la dotation globale annuelle, dans sa rédaction en vigueur aux dates des transports sanitaires litigieux ;
Considérant que, par un jugement du 6 mai 2004, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de la société Ambulances Cavaillonnaises tendant à la condamnation du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE CAVAILLON-LAURIS à lui verser la somme de 274 999,26 F (41 923,37 euros), augmentée des intérêts légaux, correspondant à des prestations de transport sanitaire facturées entre janvier 1998 et le 23 mai 2000 et demeurées impayées ; que le centre hospitalier se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 13 novembre 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a annulé ce jugement et fait droit à la demande de la société ;
Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les transports sanitaires litigieux ont concerné exclusivement des patients transférés à partir du service d'accueil et de traitement des urgences du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE CAVAILLON-LAURIS, où ils avaient été initialement accueillis, vers un autre établissement de santé ; que, pour mettre à la charge du centre hospitalier le coût de ces transports sanitaires, la cour administrative d'appel a estimé que dans le cas où un établissement public de santé recourait aux prestations de services d'un transporteur privé pour assurer le transfert d'un patient de son service d'accueil et de traitement des urgences vers un autre établissement de santé, il lui appartenait de rémunérer ce prestataire ; qu'il résulte de ce qui a été dit plus haut qu'elle n'a, en statuant ainsi, pas commis d'erreur de droit ;
Considérant, en second lieu, qu'il ressort de ses écritures devant la cour administrative d'appel que le centre hospitalier s'est borné à soutenir que si les cent cinquante quatre interventions facturées pouvaient représenter un montant de 240 220,06 F (36 621,31 euros) au cours de la période de fin 1998 à fin 1999, deux prestations de transports apparaissaient excessives, sans indiquer le montant qui aurait dû être facturé pour ces deux prestations ; que, pour estimer qu'il était débiteur à l'égard de la société de la somme de 41 923,37 euros, la cour administrative d'appel a relevé, d'une part, que si le centre hospitalier faisait valoir que la société requérante ne démontrait pas que tous ces transferts avaient été effectués sur sa demande, il ne contestait précisément aucune des factures versées au dossier, qui font apparaître le nom du patient et la date du transport ainsi que l'établissement de destination ; qu'elle a relevé, d'autre part, que si le centre hospitalier faisait aussi valoir que les factures en litige sont d'un montant excessif, il ne contestait aucune facture précisément identifiée ; que la cour a suffisamment motivé son arrêt sans dénaturer les pièces du dossier ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi du centre hospitalier doit être rejeté, y compris ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE CAVAILLON-LAURIS est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE CAVAILLON-LAURIS et à la société Ambulances Cavaillonnaises.
Copie en sera adressée pour information à la ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.
Abstrats : 61-01-02 SANTÉ PUBLIQUE. PROTECTION GÉNÉRALE DE LA SANTÉ PUBLIQUE. TRANSPORTS SANITAIRES. - SERVICE D'ACCUEIL ET DE TRAITEMENT DES URGENCES - PRISE EN CHARGE PAR L'ÉTABLISSEMENT D'ACCUEIL DES FRAIS DE TRANSPORT SANITAIRE D'UN PATIENT DE CE SERVICE QUI DOIT ÊTRE TRANSFÉRÉ VERS UN AUTRE ÉTABLISSEMENT DE SANTÉ - ARTICLE R. 712-65 DU CODE DE LA SANTÉ PUBLIQUE, ALORS EN VIGUEUR.
Résumé : 61-01-02 Aux termes des dispositions de l'article R. 712-65 du code de la santé publique, alors en vigueur, un établissement de santé dont le service d'accueil et de traitement des urgences a accueilli un patient dont l'état de santé nécessite le transfert vers un autre établissement de santé assume la charge des dépenses de transport sanitaire que nécessite ce transfert, qu'il doit assurer par ses moyens propres ou faire assurer par une entreprise de transport sanitaire.