Par une décision du 23 novembre 2016, le directeur général d’une agence régionale de santé a mis en demeure un laboratoire de biologie médicale, dirigé par M. X., de cesser immédiatement de fonctionner, au motif que le dossier de demande d'accréditation initiale n'avait pas été déposé dans le délai règlementaire. Ce courrier a été adressé aux organismes d'assurance maladie pour qu'ils ne remboursent pas les actes réalisés après le 31 octobre 2016.
Par une ordonnance du 24 février 2017, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a fait droit à la demande présentée par M. X. tendant à la suspension de l'exécution de la décision du 23 novembre 2016, en jugeant qu'il était fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à sa légalité.
Le ministre des affaires sociales et de la santé se pourvoit en cassation contre cette ordonnance.
Sur l’admission du pourvoi : le Conseil d’Etat relève que pour faire droit à la demande de M. X., le juge des référés du tribunal administratif s'est borné à relever l'existence d'un moyen propre à créer un doute sérieux quant à sa légalité, en indiquant qu'il n'était pas « besoin de statuer sur l'urgence ». Il décide qu’en statuant ainsi, le juge des référés du tribunal administratif a commis une erreur de droit : il admet donc le pourvoi.
Sur la condition d’urgence : le Conseil d’Etat relève que « la décision litigieuse fait obstacle à la poursuite de l'activité du laboratoire de biologie médicale […] dont il n'est pas contesté qu'il emploie plusieurs salariés. Ni la circonstance que M. X. n'ait pas transmis de demande d'accréditation avant le 30 avril 2015, date qui n'était pas prescrite à peine de forclusion, ni celle qu'il a saisi le juge des référés deux mois après la notification de la décision litigieuse ne sont de nature […] à faire obstacle à ce que la condition d'urgence […] soit regardée comme remplie ».
Sur l'existence d'un moyen propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision litigieuse : le Conseil d’Etat affirme que « si l'article L. 6221-1 du code de la santé publique dispose, depuis sa modification par l'ordonnance du 13 janvier 2010, qu'un laboratoire ne peut désormais réaliser d'examen de biologie médicale sans accréditation, l'article 7 de cette même ordonnance prévoit, pour l'entrée en vigueur de cet article et à titre transitoire, des étapes en vue de l'accréditation des laboratoires, auparavant soumis au régime de l'autorisation administrative prévue par l'article L. 6211-2 du même code dans sa rédaction antérieure à cette même ordonnance, en précisant notamment que les laboratoires doivent disposer avant le 1er novembre 2016 d'une accréditation portant, en particulier, sur 50 % des examens de biologie médicale qu'il réalisent. Toutefois, le décret du 24 octobre 2016 puis la loi du 9 décembre 2016 ont repoussé cette échéance, sous certaines conditions, jusqu'à la date de la décision rendue sur leur demande d'accréditation et au plus tard jusqu'au 31 décembre 2017 ».
Il poursuit : « d’une part, si le décret du 23 février 2015 a entendu préparer l'échéance du 1er novembre 2016 en déterminant un calendrier de dépôt des demandes permettant, compte tenu du nombre important de laboratoires concernés, leur accréditation partielle avant le 1er novembre 2016, il ne résulte pas de ce décret que les dates limites qu'il prévoit auraient été prescrites aux laboratoires de biologie médicale à peine de forclusion de leur demande d'accréditation. D'autre part, si le décret du 24 octobre 2016 réserve le bénéfice du report de l'échéance initialement prévue au 1er novembre 2016 aux seuls laboratoires ayant présenté une demande d'accréditation « conformément aux dispositions du décret du 23 février 2015 », il dispose également que le bénéfice de ce report concerne les laboratoires « qui, au 31 octobre 2016, ont déposé » une telle demande ».
Ainsi, en opposant au laboratoire la circonstance que son « dossier de demande d'accréditation initiale n'a pas été déposé dans le délai fixé par le décret (...) du 23 février 2015 » pour en conclure que les dispositions du décret du 24 octobre 2016 reportant l'échéance du 1er novembre 2016 « ne peuvent pas s'appliquer » et qu'en conséquence le laboratoire « ne peut pas continuer à fonctionner au-delà du 31 octobre 2016 », le directeur général de l'agence régionale de santé aurait méconnu les dispositions de l'article 1er du décret du 24 octobre 2016.
Cette circonstance « est de nature à faire naître, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision litigieuse ».