Une collectivité territoriale a conclu avec le groupement d’entreprises X et Y un marché public de travaux en vue de la reconfiguration et de l’aménagement d’un carrefour sur une route nationale.
La société Z, mandataire d’un groupement d’entreprises candidat évincé de l’attribution du marché, a saisi le tribunal administratif d’une demande tendant à l’annulation de ce contrat et à l’indemnisation du préjudice subi du fait de sa conclusion irrégulière. Cette requête a été rejetée par un jugement du 4 octobre 2016.
La cour administrative d’appel a annulé, par un arrêt du 30 mars 2018, le jugement du tribunal administratif, prononcé la nullité du marché litigieux au motif que le groupement X et Y avait remis une offre irrégulière et ordonné une expertise aux fins de déterminer le montant du manque à gagner subi par la société Z du fait de son éviction irrégulière.
La collectivité territoriale a saisi le Conseil d’Etat d’un pourvoi tendant à l’annulation de l’arrêt de la cour administrative d’appel.
Cette dernière soutenait que la cour avait commis une erreur de droit et dénaturé les pièces du dossier en jugeant que l’offre retenue était irrégulière et devait être écartée alors que le règlement de la consultation ne sanctionnait « l'absence de renseignement d'un sous-critère », soit le caractère incomplet d’une offre, que par une note de zéro.
La Haute juridiction rappelle le principe qu’une offre qui ne respecte pas les prescriptions imposées par le règlement de la consultation doit être rejetée comme irrégulière :
« Le pouvoir adjudicateur ne peut attribuer le marché à un candidat qui ne respecterait pas une des prescriptions imposées par le règlement de la consultation. Il est tenu d'éliminer, sans en apprécier la valeur, les offres incomplètes, c'est-à-dire celles qui ne comportent pas toutes les pièces ou renseignements requis par les documents de la consultation et sont, pour ce motif, irrégulières ».
Le Conseil d’Etat précise ensuite que les pouvoirs adjudicateurs peuvent sanctionner par la note de zéro l’absence de transmission d’éléments d’information qui, sans être nécessaires, peuvent être utiles pour permettre d’apprécier la valeur d’une offre au regard d'un critère ou d'un sous-critère :
« Cette obligation ne fait pas obstacle à ce que ces documents prévoient en outre la communication, par les soumissionnaires, d'éléments d'information qui, sans être nécessaires pour la définition ou l'appréciation des offres et sans que leur communication doive donc être prescrite à peine d'irrégularité de l'offre, sont utiles au pouvoir adjudicateur pour lui permettre d'apprécier la valeur des offres au regard d'un critère ou d'un sous-critère et précisent qu'en l'absence de ces informations, l'offre sera notée zéro au regard du critère ou du sous-critère en cause ».
Il en conclut que la collectivité territoriale n’est pas fondée à demander l’annulation de l’arrêt de la cour administrative d’appel, la production d'informations par le groupement d’entreprises X et Y sur la qualité des matériaux employés, notamment de leurs fiches techniques, « ne pouvait être regardée que comme une production d'éléments nécessaires prescrite par le règlement, dont l'absence dans une offre entraînait nécessairement son irrégularité ».