Deux élèves d’un institut de formation des soins infirmiers et l'Association de défense des droits de l'homme - Collectif contre l'islamophobie en France ont demandé à la ministre en charge de la santé d'abroger les dispositions de l'annexe IV de l'arrêté du 21 avril 2007 relatif aux conditions de fonctionnement des instituts de formation paramédicaux : « les signes et les tenues qui manifestent ostensiblement l'appartenance à une religion sont interdits dans tous les lieux affectés à l'institut de formation ainsi qu'au cours de toutes les activités placées sous la responsabilité de l'institut de formation ou des enseignants, y compris celles qui se déroulent en dehors de l'enceinte dudit établissement ».
Ils demandent l’annulation des décisions implicites de refus nées du silence gardé par la ministre.
Le Conseil d’Etat relève dans un premier temps que « les instituts de formation paramédicaux étant des établissements d'enseignement supérieur, leurs élèves ont, lorsqu'ils suivent des enseignements théoriques et pratiques en leur sein, la qualité d'usagers du service public ».
Dès lors, « ils sont, en cette qualité, sauf lorsqu'ils suivent un enseignement dispensé dans un lycée public, libres de faire état de leurs croyances religieuses, y compris par le port de vêtement ou de signes manifestant leur appartenance à une religion, sous réserve de ne pas perturber le déroulement des activités d'enseignement et le fonctionnement normal du service public notamment par un comportement revêtant un caractère prosélyte ou provocateur » ;
Le Conseil d’Etat poursuit : « lorsqu'ils effectuent un stage dans un établissement de santé chargé d'une mission de service public, les élèves infirmiers doivent respecter les obligations qui s'imposent aux agents du service public hospitalier ». Ainsi, « s'ils bénéficient de la liberté de conscience qui interdit toute discrimination fondée sur la religion, le principe de laïcité fait obstacle à ce qu'ils manifestent leurs croyances religieuses dans le cadre du service public ».
De surcroit, « lorsque les élèves infirmiers effectuent leur stage dans un établissement n'ayant aucune mission de service public, ils doivent respecter, le cas échéant, les dispositions du règlement intérieur de cet établissement qui fixent les conditions dans lesquelles ses agents peuvent faire état de leurs croyances religieuses ».
Le Conseil d’Etat conclut « qu'en interdisant aux élèves des instituts de formations paramédicaux […] de manifester leurs convictions religieuses sans distinguer entre les situations dans lesquelles les élèves sont susceptibles de se trouver en tant qu'usagers du service public ou en tant que stagiaires dans un établissement de santé chargé d'une mission de service public, le ministre a édicté une interdiction qui, par son caractère général, est entachée d'illégalité ».
Il enjoint à la ministre en charge de la santé d'abroger ces dispositions ou de les modifier conformément aux motifs de la présente décision.