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Conseil d'Etat, 29 janvier 1999, Mme X. (manquement à l'obligation de surveillance non constitutif d'une faute dans l'organisation et le fonctionnement du service )

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 20 janvier et 14 février 1997 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme X., demeurant (...) ; Mme X. demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 19 novembre 1996 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation du jugement du 27 juin 1995 du tribunal administratif de Versailles rejetant sa demande tendant à ce que le centre hospitalier général d'Orsay soit condamné à réparer le préjudice qu'elle a subi du fait du décès de son fils Stéphane intervenu le 8 août 1990 ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Le Bihan-Graf, Auditeur,
- les observations de Me Choucroy, avocat de Mme X. et de Me Odent, avocat du centre hospitalier général d'Orsay,
- les conclusions de M. Salat-Baroux, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, pour rejeter l'appel de Mme X. contre le jugement du tribunal administratif rejetant sa demande tendant à ce que le centre hospitalier général d'Orsay soit condamné à réparer le préjudice subi par elle du fait du décès de son fils Stéphane intervenu le 8 août 1990, la cour a estimé qu'il y avait lieu d'écarter l'argumentation de Mme X. par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;

Considérant que, s'il est vrai que Mme X. a repris pour l'essentiel devant le juge d'appel l'argumentation qu'elle avait développée devant le tribunal administratif, elle a, dans un mémoire enregistré le 4 avril 1996 au greffe de la cour administrative d'appel de Paris, fait valoir que "la cour ne saurait admettre l'argumentation des premiers juges qui, tout en affirmant un peu hâtivement que les certificats médicaux ( ...) ne faisaient pas état d'une tendance suicidaire, retiennent qu'il n'y avait pas de signe d'agitation alors qu'il est admis qu'une injection calmante a été nécessaire pour le maîtriser sur l'instant" ; que la cour n'a pas répondu à ce moyen en se bornant à relever que Mme X. "n'apporte pas d'éléments nouveaux tendant à contester la motivation du jugement attaqué" ; que, dès lors, en raison de son insuffisance de motivation, l'arrêt attaqué doit être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu, en l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 11 de la loi du 31 décembre 1997 et de juger l'affaire au fond ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'alors que le service psychiatrique du centre hospitalier général d'Orsay s'apprêtait à procéder aux formalités d'admission de M. T. au titre de la procédure d'hospitalisation sur demande d'un tiers, prévue à l'article L. 333 du code de la santé publique, le jeune homme, à qui l'on avait pourtant administré une piqûre calmante, a profité de l'ouverture momentanée de la porte de ce service pour s'enfuir en bousculant le personnel présent qui tentait de s'interposer ; que, le lendemain, M. T. s'est suicidé à son domicile ; que, dans ces circonstances, le fait que M. T. ait pu échapper à la surveillance dont il faisait l'objet ne suffit pas à établir qu'une faute ait été commise dans l'organisation et le fonctionnement du service ; qu'ainsi, Mme X. n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier général d'Orsay ;

DECIDE :
Article 1er : L'arrêt du 19 novembre 1996 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme X. devant la cour administrative d'appel de Paris est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme X., au centre hospitalier général d'Orsay et au ministre de l'emploi et de la solidarité.