L'Union nationale des associations de familles de traumatisés crâniens et de cérébro-lésés (UNAFTC) a saisi le Conseil d’Etat d’une demande d’annulation du décret n° 2016-1066 du 3 août 2016 modifiant le code de déontologie médicale et relatif aux procédures collégiales et au recours à la sédation profonde et continue jusqu'au décès par la loi n° 2016-87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie. Elle a demandé au Conseil d’Etat de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des articles L. 1110-5-1, L. 1110-5-2 et L. 1111-4 du code de la santé publique dans leur rédaction résultant de cette loi.
Pour rappel, l'article L. 1110-5-1, inséré dans le code de la santé publique par la loi du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie, dispose que les actes de prévention, d'investigation ou de traitements et de soins « ne doivent pas être mis en œuvre ou poursuivis lorsqu'ils résultent d'une obstination déraisonnable. Lorsqu'ils apparaissent inutiles, disproportionnés ou lorsqu'ils n'ont d'autre effet que le seul maintien artificiel de la vie, ils peuvent être suspendus ou ne pas être entrepris, conformément à la volonté du patient et, si ce dernier est hors d'état d'exprimer sa volonté, à l'issue d'une procédure collégiale définie par voie réglementaire. La nutrition et l'hydratation artificielles constituent des traitements qui peuvent être arrêtés conformément au premier alinéa du présent article ».
L'article L. 1110-5-2 de ce code, issu de la même loi dispose que « lorsque le patient ne peut pas exprimer sa volonté et, au titre du refus de l'obstination déraisonnable mentionnée à l'article L. 1110-5-1, dans le cas où le médecin arrête un traitement de maintien en vie, celui-ci applique une sédation profonde et continue provoquant une altération de la conscience maintenue jusqu'au décès, associée à une analgésie. La sédation profonde et continue associée à une analgésie prévue au présent article est mise en œuvre selon la procédure collégiale définie par voie réglementaire qui permet à l'équipe soignante de vérifier préalablement que les conditions d'application prévues aux alinéas précédents sont remplies ».
Enfin, aux termes de l'article L. 1111-4 du même code, dans sa rédaction issue de la même loi : « Lorsque la personne est hors d'état d'exprimer sa volonté, la limitation ou l'arrêt de traitement susceptible d'entraîner son décès ne peut être réalisé sans avoir respecté la procédure collégiale mentionnée à l'article L. 1110-5-1 et les directives anticipées ou, à défaut, sans que la personne de confiance prévue à l'article L. 1111-6 ou, à défaut la famille ou les proches, aient été consultés ».
« L'association requérante soutient que ces dispositions, en ce qu'elles laissent le soin au pouvoir réglementaire de définir la procédure collégiale qu'elles mentionnent sans garantir ni le caractère collégial de la décision de limitation ou d'arrêt des traitements d'un patient hors d'état d'exprimer sa volonté, ni l'exercice d'un recours suspensif contre une telle décision, méconnaissent l'article 34 de la Constitution, qui prévoit la compétence du législateur pour fixer les règles concernant les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques, et privent ainsi de garanties légales les exigences constitutionnelles de sauvegarde de la dignité de la personne humaine, dont découlerait le droit à la vie, de la liberté personnelle, protégée par l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et, enfin, du droit à un recours juridictionnel effectif, découlant de l'article 16 de cette Déclaration ».
Le Conseil d’Etat décide que le moyen tiré de la méconnaissance par le législateur de sa propre compétence dans des conditions affectant les droits et libertés garantis par la Constitution soulève une question nouvelle au regard des droits constitutionnels en cause et de la portée d'une décision d'arrêter ou de limiter un traitement médical.
Il renvoie la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel.