Suite à la luxation d’une prothèse du genou posée le 25 janvier 2000 au centre hospitalier X, M.B a dû subir le 27 avril 2000 et le 8 février 2001 une intervention chirurgicale de reprise ainsi qu’une intervention visant au remplacement de cette prothèse. M.B a agi en responsabilité contre le centre hospitalier en invoquant la défectuosité de la prothèse.
Par un arrêt du 12 décembre 2013, la Cour administrative d’appel de Lyon a retenu la responsabilité sans faute du centre hospitalier et l’a condamné à verser la somme de 7 300 euros à M.B et la somme de 6 660,37 euros à la caisse primaire d’assurance maladie en réparation des préjudices causés par l’implantation de la prothèse défectueuse. Par le même arrêt, la Cour a rejeté l’appel en garantie des condamnations prononcées formé par le centre hospitalier contre le producteur de la prothèse, la société Y, et fondé sur les dispositions de la directive européenne 85/374/CEE relative au régime spécial de responsabilité du fait des produits défectueux, transposée en droit français par les articles 1245-1 à 1245-17 du Code civil (anciens articles 1386-1 à 1386-18).
Le centre hospitalier s’est par la suite pourvu en cassation et a demandé la condamnation du producteur la société Y à le garantir des condamnations prononcées à son encontre.
Le Conseil d’Etat rappelle dans un premier temps sa jurisprudence constante selon laquelle « le service public hospitalier est responsable, même en l’absence de faute de sa part, des conséquences dommageables pour les usagers de la défaillance des produits et appareils de santé qu’il utilise, y compris lorsqu’il emplante, au cours de la prestation de soins, un produit défectueux dans le corps d’un patient ».
Dans un second temps, le Conseil d’Etat applique la jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union Européenne qui a jugé dans un arrêt rendu le 21 décembre 2011 « qu’un prestataire de services, tel qu’un prestataire de soins, dont la responsabilité est engagée à l’égard du bénéficiaire de la prestation en raison de l’utilisation, dans le cadre de celle-ci, d’un produit défectueux, doit avoir la possibilité de mettre en cause la responsabilité du producteur sur le fondement des règles issues de la directive européenne 85/374/CEE du 25 juillet 1985, relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des Etats membres en matière de responsabilité du fait des produits défectueux ». Dès lors, le centre hospitalier prestataire de service peut se fonder sur la directive 85/374 pour mettre en cause la responsabilité du producteur, au titre du recours en garantie.
Concernant la prescription de l’action en responsabilité exercée par le centre hospitalier contre le producteur, le Conseil d’Etat considère que le centre hospitalier n’a pas la qualité de fournisseur au sens de l’article 1245-6 du Code civil (ancien article 1386-7) mais d’utilisateur de la prothèse défectueuse, ce qui, par voie de conséquence, rend inapplicable le délai de prescription du recours du fournisseur contre le producteur prévu par cet article. Le Conseil d’Etat précise à cet égard que seul le délai de prescription de trois ans prévu à l’article 1245-16 du Code civil (ancien article 1386-17) est susceptible d’être opposable au centre hospitalier. Ce délai court à compter de la date à laquelle le demandeur à l’action a eu ou aurait dû avoir connaissance du dommage, du défaut et de l’identité du producteur. En l’espèce, l’action en garantie du centre hospitalier n’est pas prescrite.
Concernant enfin la responsabilité de la société Y, le Conseil d’Etat juge que les dommages subis par le patient M.B ont été causés par la défectuosité de la prothèse fabriquée par cette société. Le Conseil d’Etat retient donc la responsabilité de la société Y sur le fondement de l’article 1245-1 du Code civil (ancien article 1386-1) et la condamne à rembourser au centre hospitalier les sommes que celui-ci a été condamné à verser à M.B et à la caisse primaire d’assurance maladie.