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Cour Administrative d'Appel de Bordeaux, 10 novembre 2004, Centre de soins long séjour et maison de retraite de Podensac (agent contractuel - faisant fonction d'infirmier - heures supplémentaires - rémunération forfaitaire)

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête et le mémoire, enregistrés le 23 mars 2000, présentés pour le CENTRE DE SOINS LONG SEJOUR ET MAISON DE RETRAITE DE PODENSAC, dont le siège est 5 allées Georges Montel à Podensac (33720), par Me Clément ; le CENTRE DE SOINS LONG SEJOUR ET MAISON DE RETRAITE DE PODENSAC demande à la Cour :
1°) d'annuler, après en avoir ordonné la suspension, le jugement du 23 décembre 1999 du Tribunal administratif de Bordeaux en tant qu'il l'a condamné à verser à M. X une indemnité de 108 411 F (16 527,15 euros) en rémunération d'heures supplémentaires et la somme de 6 000 F (914,69 euros) au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Bordeaux ;
3°) de condamner M. X à lui verser une somme de 10 000 F (1 524,49 euros) au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la directive 93/104/CE du Conseil de l'Union européenne du 23 novembre 1993 modifiée concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le décret n° 91-155 du 6 février 1991 modifié relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;
Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 octobre 2004 :
- le rapport de M. Laborde, rapporteur ;
- les observations de Me Bernadou, pour le CENTRE DE SOINS LONG SEJOUR ET MAISON DE RETRAITE DE PODENSAC, et de Me Guedon, pour M. X ;
- et les conclusions de M. Chemin, commissaire du gouvernement ;

Sur la recevabilité de l'appel incident de M. X :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 229 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel alors applicable repris sous les articles R. 811-2 et R. 811-6 du code de justice administrative : Sauf disposition contraire, le délai d'appel est de deux mois. Il court contre toute partie à l'instance à compter du jour où la notification a été faite à cette partie... ;

Considérant que le CENTRE DE SOINS LONG SEJOUR ET MAISON DE RETRAITE DE PODENSAC a relevé appel du jugement du 23 décembre 1999 en tant que le Tribunal administratif de Bordeaux l'a condamné à payer à M. X, ancien infirmier contractuel dans l'établissement, une indemnité de 108 411 F (16 527,15 euros) représentative de la rémunération d'heures supplémentaires accomplies ; que les conclusions de M. X tendant à la réformation du jugement en tant qu'il a rejeté sa demande de dommages et intérêts à raison de l'illégalité fautive de son prétendu licenciement, et sa demande d'indemnité de licenciement, d'indemnité de préavis et de congés sur préavis et d'indemnité compensatrice de congés annuels non pris, qui ont été présentées devant la Cour dans un mémoire en défense enregistré le 16 juin 2000, reposent sur une cause juridique différente de celle des conclusions de la requête et soulèvent ainsi un litige distinct de celui qui résulte de l'appel principal ; que, dès lors, présentées après le délai imparti pour faire appel, elles ne sont pas recevables ;

Sur l'appel principal :

Considérant que M. Fouad X, étudiant en médecine, titulaire d'un diplôme de médecine délivré par l'université de Rabat, au Maroc, a été recruté par contrats successifs de courte durée en qualité de faisant fonction d'infirmier au CENTRE DE SOINS LONG SEJOUR ET MAISON DE RETRAITE DE PODENSAC et affecté du 1er mars 1995 au 31 décembre 1998 à une permanence de nuit de 19 heures le soir à 7 heures le lendemain pendant sept jours consécutifs, une semaine sur deux ;

Considérant que compte tenu des périodes d'inaction propres à l'emploi susmentionné et des conditions particulières dans lesquelles il était exercé par M. X, qui disposait librement et à titre gratuit d'une chambre meublée, équipée d'un téléphone et d'une télévision, il ne résulte pas de l'instruction que, même si elles ont correspondu à un travail effectif au sens des principes fixés par la directive européenne du 23 novembre 1993, dans la mesure où le salarié restait à la disposition de son employeur sans possibilité de vaquer à ses occupations personnelles, les heures de permanence de nuit assurées par M. X doivent faire l'objet d'une comptabilisation pour leur durée totale et non d'une équivalence de durée pour l'évaluation du montant des heures supplémentaires indemnisables, dès lors que l'intéressé ne devait essentiellement répondre qu'aux sollicitations des aides-soignantes qui assuraient le service de nuit et que la responsabilité médicale du service était à la charge d'un médecin ; qu'au demeurant, M. X, dont les contrats ne précisent pas la durée hebdomadaire de service, ne pouvait se référer à l'horaire collectif applicable aux aides soignantes qui exerçaient leur activité de nuit dans des conditions différentes ; que, par suite, le forfait de 14 heures supplémentaires, qui était alloué chaque mois à M. X, ne peut être regardé comme ayant rémunéré d'une manière insuffisante la durée de travail effectuée au-delà de celle considérée comme équivalente à la durée de travail hebdomadaire pour l'emploi concerné ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le CENTRE DE SOINS LONG SEJOUR ET MAISON DE RETRAITE DE PODENSAC est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Bordeaux l'a condamné à verser à M. X une indemnité représentative de la rémunération d'heures supplémentaires ;

Sur les autres conclusions :

Considérant, d'une part, qu'il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. X tendant à l'octroi d'une indemnité pour procédure d'appel abusive dès lors, en tout état de cause, que le refus de lui accorder des rémunérations supplémentaires n'était pas constitutif d'une faute ;

Considérant, d'autre part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le CENTRE DE SOINS LONG SEJOUR ET MAISON DE RETRAITE DE PODENSAC qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions du CENTRE DE SOINS LONG SEJOUR ET MAISON DE RETRAITE DE PODENSAC tendant au remboursement de ces mêmes frais ;

DECIDE :
Article 1er : L'article 1er du jugement du Tribunal administratif de Bordeaux en date du 23 décembre 1999 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Bordeaux et ses conclusions incidentes en appel sont rejetées.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête du CENTRE DE SOINS LONG SEJOUR ET MAISON DE RETRAITE DE PODENSAC est rejeté.