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Cour administrative d'appel de Douai, 21 mai 2002, Société X. (Eviction irrégulière d'un candidat et responsabilité du pouvoir adjudicateur)

Le pouvoir adjudicateur peut être condamné à payer à un candidat irrégulièrement évincé d'une procédure d'appel d'ofres une indemnité calculée d'après le montant du manque à gagner constaté en fait.

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu l'ordonnance en date du 31 août 1999 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Nantes a, en application du décret n 99-435 du 28 mai 1999 portant création d'une cour administrative d'appel à Douai et modifiant les articles R. 5, R. 7 et R. 8 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, alors applicables, transmis à la cour administrative d'appel de Douai la requête présentée pour la société X... dont le siège social est sis au lieudit Ferme de la Rivière à Manneville sur Risle (27502), représentée par son gérant M. X..., par la SCP Dubos-Pelissier-Prunié, avocats ;

Vu la requête, enregistrée le 18 mai 1998 au greffe de la cour administrative d'appel de Nantes, par laquelle la société X... demande à la Cour :

1 ) de réformer le jugement en date du 20 mars 1998 par lequel le tribunal administratif de Rouen a condamné la commune d'Alizay à lui verser seulement une somme de 50 000 francs en réparation du préjudice subi du fait de son éviction injustifiée d'une pro cédure d'appel d'offres ;

2 ) de condamner la commune d'Alizay à lui verser les sommes de 266 498,57 francs à titre d'indemnité et de 36 180 francs au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu le décret n 99-435 du 28 mai 1999 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 mai 2002
- le rapport de Mme Lemoyne de Forges, président-assesseur,
- et les conclusions de M. Michel, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la société X... demande la réformation du jugement en date du 20 mars 1998 par lequel le tribunal administratif de Rouen a limité la réparation du préjudice subi par elle à raison de l'éviction injustifiée d'une procédure d'appel d'offres à la somme de 50 000 francs (7 622,45 euros) alors qu'elle demandait la condamnation de la commune d'Alizay à lui verser une somme de 266 498,57 francs (40 627,46 euros) ;

Considérant que, devant la Cour, la commune d'Alizay ne conteste plus que la société X... ait été illégalement évincée de la procédure d'appel d'offres restreint pour la réalisation des travaux d'aménagement extérieur du lotissement Siemor ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société X... bénéficiait de chances sérieuses d'emporter le marché compte tenu de ses qualités professionnelles et du prix de son offre légèrement inférieur à celui proposé par l'entreprise retenue en définitive ; qu'elle a ainsi droit, du fait de son éviction irrégulière, à une indemnité calculée d'après le montant du manque à gagner constaté en fait ;

Considérant que par la seule production, par ailleurs déjà au dossier de première instance, de l'attestation d'un expert comptable fixant un pourcentage de marge brute pour l'exercice 1994 sans autres précisions, la société X... n'apporte pas d'éléments nouveaux de nature à infirmer l'appréciation portée par les premiers juges ; que, dès lors, le tribunal administratif de Rouen n'a pas fait une insuffisante appréciation du manque à gagner de la société X... en condamnant la commune d'Alizay à lui verser une indemnidé de 50 000 francs (7 622,45 euros) ; qu'il y a lieu de confirmer le jugement attaqué et de rejeter la requête de la société X... ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune d'Alizay qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à la société X... la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner la société X... à payer à la commune d'Alizay la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société X... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune d'Alizay tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société X..., à la commune d'Alizay et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Copie sera transmise au préfet de l'Eure.