En l’espèce, les juges de première instance ont partiellement engagé la responsabilité d’un centre hospitalier pour retard de diagnostic en estimant que n’avait eu pour seul conséquence d’engendrer des souffrances physiques modérées. Les requérants font alors appel du jugement afin de voir réviser leurs indemnités perçues au titre du préjudice moral. La Cour administrative d’appel de Nancy précise que les appelants ne peuvent obtenir révision de leur réparation en l’absence de tout nouvel élément relatif à l'état de santé de l'enfant qui puisse être mis en relation avec le retard de diagnostic imputable au centre hospitalier. |
Cour Administrative d'Appel de Nancy
3ème chambre - formation à 3
N° 07NC01006
Inédit au recueil Lebon
M. VINCENT, président
M. Olivier TREAND, rapporteur
M. COLLIER, commissaire du gouvernement
DECARME, avocat
Lecture du jeudi 26 février 2009
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 26 juillet 2007, présentée pour Mlle Corinne X et M. Bruno Y, demeurant à ..., par Me Decarme ; Mlle X et M. Y demandent à la Cour :
1°) de réformer le jugement n° 0501271 du 31 mai 2007 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne n'a que partiellement fait droit leurs conclusions tendant à la condamnation du centre hospitalier Auban Moët d'Epernay à les indemniser en leur nom propre et au nom de leur fils mineur Mathieu des préjudices qu'ils ont subis suite à l'hospitalisation de Mathieu dans la nuit du 5 au 6 janvier 2000 ;
2°) de condamner le centre hospitalier Auban Moët à leur verser en qualité de représentants légaux de leur enfant Mathieu une provision de 10 000 euros et de prescrire une expertise complémentaire confiée au docteur Z permettant de définir l'étendue définitive des dommages causés à l'enfant ;
3°) de condamner le centre hospitalier Auban Moët à verser respectivement à Mlle X et à M. Y une somme de 30 490 euros en réparation de leurs préjudices propres ;
4°) de condamner le centre hospitalier Auban Moët à leur verser en qualité de représentants légaux de Thomas, frère de Mathieu, une somme de 7 622,49 euros en réparation des préjudices subis par ce dernier ;
5°) de mettre à la charge du centre hospitalier Auban Moët une somme de 1 000 € en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils soutiennent que :
- le diagnostic posé le 5 janvier 2000 était gravement erroné ; Mathieu ne souffrait pas de crise convulsive hyperthermique ; or, il a été laissé sans soins jusqu'au lendemain matin ; l'enfant a alors contracté une méningite ;
- Mathieu doit se voir allouer une indemnité provisionnelle de 10 000 euros dans l'attente qu'une nouvelle expertise soit organisée, son état de santé n'étant, d'après l'expert, consolidé qu'en 2007 ;
- la longue hospitalisation de Mathieu a généré des troubles dans les conditions d'existence des parents et du frère de Mathieu ; l'angoisse de la famille a été vive ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense ; enregistré le 10 octobre 2007, présenté pour le centre hospitalier Auban Moët d'Epernay, par la SCP d'avocats ACG et Associés qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 000 euros soit mise à la charge de Mlle X et de M. Y au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- les demandes présentées par Thomas Y sont irrecevables puisqu'elles n'ont été formulées ni en première instance, ni en appel par ses parents agissant en qualité de représentants légaux de leur fils ;
- il admet avoir commis une faute mais qui n'est pas à l'origine de la méningite dont souffre Mathieu ; l'enfant n'a subi aucune perte de chance de ne pas développer la maladie ou de guérir plus vite ; aucune expertise complémentaire n'est nécessaire ;
- le seul préjudice dont il accepte l'indemnisation est le pretium doloris subi par Mathieu dans la nuit du 5 au 6 janvier 2000 ; les autres préjudices dont il est demandé réparation sont sans lien avec la faute commise ;
Vu l'ordonnance du président de la troisième chambre de la Cour, fixant la clôture de l'instruction au 12 janvier 2009 à 16 heures ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 janvier 2009 :
- le rapport de M. Tréand, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Collier, commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le Centre hospitalier Auban Moët d'Epernay :
Sur les conclusions indemnitaires :
Considérant que, par jugement du 31 mai 2007, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne n'a fait que partiellement droit aux prétentions indemnitaires de Mlle X et de M. Y, qui recherchaient la responsabilité de l'hôpital Auban Moët d'Epernay au titre du préjudice causé à leur enfant Mathieu et de leur préjudice propre, en estimant que le retard à poser le diagnostic de méningite qui affectait Mathieu n'avait ni provoqué, ni aggravé sa pathologie, mais avait eu pour seule conséquence d'engendrer des souffrances physiques modérées au cours de la nuit du 5 au 6 janvier 2000 ; que les appelants n'invoquent à l'appui de leur requête d'appel que des moyens déjà présentés devant le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ; que ces moyens doivent être écartés par adoption des motifs retenus par les premiers juges ; qu'au surplus, il n'y a pas lieu de prescrire l'expertise complémentaire sollicitée relative à l'état actuel de l'enfant, en l'absence d'invocation par les requérants de tout nouvel élément relatif à l'état de santé de l'enfant qui puisse être mis en relation avec le retard de diagnostic imputable au centre hospitalier ; que, par suite, Mlle X et M. Y ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leur demande ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y pas lieu à cette condamnation » ;
Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier Auban Moët d'Epernay, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que demandent Mlle X et M. Y au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Considérant, d'autre part, qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner Mlle X et M. Y à payer au centre hospitalier Auban Moët d'Epernay la somme qu'il sollicite au titre des frais irrépétibles ;
DECIDE :
Article 1er : La requête susvisée de Mlle X et de M. Y est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du centre hospitalier Auban Moët d'Epernay tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mlle Corinne X, à M. Bruno Y et au centre hospitalier Auban Moët d'Epernay.