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Cour administrative d’appel de Nancy, 9 avril 2009, n° 07NC01796 (Etablissement spécialisé en psychiatrie – Responsabilité – Défaut de sécurité – Faute)

En l’espèce, une patiente a été hospitalisée dans un centre hospitalier, établissement spécialisé en psychiatrie, destiné à recevoir les malades en hospitalisation libre. En août 2000, cette patiente s’est jetée du haut de l’escalier extérieur de secours s’infligeant de graves blessures dont elle conserve notamment une paraplégie. Sa mère et ses frères ont demandé au tribunal administratif de condamner le centre hospitalier à réparer leurs préjudices respectifs. Le tribunal a fait partiellement droit à leur demande et le centre hospitalier a interjeté appel de la décision. La cour administrative d’appel rappelle qu’un établissement hospitalier spécialisé est tenu d'aménager ses locaux et installations aux risques particuliers auxquels sont exposés ses patients, y compris en secteur d'hospitalisation libre. En l’espèce, elle précise que si les fenêtres et les balcons du centre étaient sécurisés, ainsi que les accès aux escaliers de secours par l'intérieur, l'accès à ces escaliers par l'extérieur, depuis le parc de l'établissement, qui constituait le lieu de promenade habituel des patients, était libre. Ces escaliers comportaient un simple parapet n'offrant aucune protection contre le risque d'enjambement volontaire. Dès lors, la cour a considéré que le défaut de sécurité des escaliers de secours constituait une faute dans l'organisation du service public de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier.

Cour Administrative d'Appel de Nancy
3ème chambre - formation à 3

N° 07NC01796

Inédit au recueil Lebon

M. VINCENT, président
M. Jean-Marc FAVRET, rapporteur
M. COLLIER, commissaire du gouvernement
SCP MONHEIT LOOS ANDRE MAI, avocat

Lecture du jeudi 9 avril 2009

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée le 21 décembre 2007, présentée pour le CENTRE HOSPITALIER DE LA HAUTE-MARNE, dont le siège est Carrefour Henri Rollin à Saint-Dizier (52108), représenté par son directeur général, par Me Monheit ; le CENTRE HOSPITALIER DE LA HAUTE-MARNE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0402150 du 18 octobre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne l'a condamné à verser les sommes de 79 000 € à Mme Brigitte AZX en réparation de son préjudice, 466 282 € à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne, correspondant au remboursement de ses débours, ainsi que 760 € au titre de ses frais de gestion, 5 000 € à Mme Roberte Y et 4 000 € à
MM. Thierry et Patrick AZX en réparation de leurs préjudices respectifs, ainsi qu'une somme de 900 € au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et a mis à sa charge les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 1 938,08 € ;

2°) de rejeter la demande des personnes précitées devant le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;
3°) de condamner les intéressés et la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne aux dépens des deux instances ;

4°) de condamner Mme Brigitte AZX, Mme Roberte Y, MM. Thierry et Patrick AZX, d'une part, et la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne, d'autre part, à lui verser chacun une somme de 2 000 € au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- sa responsabilité n'est pas engagée, car il n'y a pas eu de faute dans l'organisation du service, et la conception de l'escalier de secours extérieur ne peut pas être mise en cause ;

- Mme Brigitte AZX ne travaillant plus depuis des années, bien avant son accident, l'indemnité au titre de l'incapacité temporaire totale n'est pas justifiée ; son état avant l'accident était très perturbé et la mettait déjà en état d'incapacité ; le pretium doloris et le préjudice esthétique ont été surestimés ; les troubles dans les conditions d'existence se confondent avec l'incapacité temporaire totale ; le préjudice des membres de la famille est indirect et largement constitué avant même l'accident en raison de l'état antérieur de la victime ;

- la caisse réclame le remboursement de tous les soins postérieurs à l'accident, alors même qu'en l'absence de cet accident et en raison de l'état antérieur de Mme AZX, celle-ci aurait connu des périodes d'hospitalisation et aurait été admise en deuxième, voire même en troisième catégorie d'invalidité ; cette maladie évolue et continue à évoluer indépendamment de la paraplégie ; seul pourrait, le cas échéant, lui être imputé le complément de rente pour passage de la 2° à la 3° catégorie de rente, liée à la paraplégie ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 30 juillet 2008, présenté pour
Mme Brigitte AZX, demeurant ...,
Mme Roberte Y, demeurant ...,
M. Thierry AZX, demeurant ... et M. Patrick AZX, demeurant ..., par
Me Barberousse ; Mme Brigitte AZX, Mme Roberte Y et MM. Thierry et
Patrick AZX demandent à la Cour :

1°) de rejeter la requête du CENTRE HOSPITALIER DE LA HAUTE-MARNE ;

2°) par voie d'appel incident, de réformer le jugement susvisé en tant qu'il a limité à 79 000 € la somme due à Mme Brigitte AZX, à 5 000 € la somme due à
Mme Roberte Y, et à 4 000 € chacun les sommes dues à MM. Thierry et Patrick AZX, en réparation de leurs préjudices respectifs et de condamner le CENTRE HOSPITALIER DE LA HAUTE-MARNE à verser les sommes de 309 500 € à Mme Brigitte AZX, et de 20 000 € chacun à Mme Roberte Y et MM. Thierry et Patrick AZX ;

3°) de condamner le CENTRE HOSPITALIER DE LA HAUTE-MARNE à leur verser une somme de 3 000 € au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils font valoir que :

- la requête est irrecevable, car elle reprend mot pour mot le mémoire en défense présenté par le centre hospitalier devant les premiers juges, sans élément de fait ou argumentaire nouveau, et ne comporte aucune critique du jugement du tribunal ;

- la configuration des escaliers extérieurs de secours de la clinique Maine de Biran, non encagés, représentait un danger et, en l'espèce, une faute dans l'organisation du service ; le centre hospitalier engage également sa responsabilité à raison de la décision de transfert de Saint-Dizier à Maine de Biran, en régime d'hospitalisation libre, le 25 août 2000, alors que l'état de Mme AZX ne s'était pas amélioré et que l'hospitalisation en secteur libre était inappropriée à ses tendances suicidaires ; la circonstance que l'intéressée était en régime d'hospitalisation libre ne dispensait pas le personnel de veiller à son accompagnement permanent lors de tous ses déplacements au sein des bâtiments et des extérieurs, compte tenu de son passé psychiatrique ;

- les premiers juges ont sous-évalué les divers postes de préjudice de Mme AZX, mais aussi de la mère et des deux frères de la victime ;

- l'incapacité temporaire totale doit être indemnisée, car elle avait repris une activité professionnelle en tant que femme de service auprès de la mairie de Chaumont au cours des mois de mars et avril 1998 et aurait très bien pu retravailler après l'amélioration de son état de santé ;

Vu le mémoire, enregistré le 3 décembre 2008, présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne, par la SCP d'avocats Colomes ; la caisse conclut au rejet de la requête du CENTRE HOSPITALIER DE LA HAUTE-MARNE et à ce que ce dernier soit condamné à lui verser une somme de 1 500 € au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que la responsabilité du centre hospitalier était engagée ;

Vu le mémoire complémentaire en défense, enregistré le 29 décembre 2008, présenté pour le CENTRE HOSPITALIER DE LA HAUTE-MARNE, qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;

Il soutient en outre que :

- aucune pièce du dossier ne permet de considérer que la mesure d'assouplissement du régime d'hospitalisation était injustifiée ;

- le personnel ne peut pas accompagner les patients dans tous leurs déplacements dans le cadre d'un régime d'hospitalisation libre ;

Vu l'ordonnance du 5 février 2009 du président de la troisième chambre de la Cour fixant la clôture de l'instruction de la présente instance au 23 février 2009 à 16 heures ;

Vu le mémoire complémentaire, enregistré le 12 mars 2009, présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 mars 2009 :

- le rapport de M. Favret, premier conseiller ;

- les observations de Me Monheit, avocat du CENTRE HOSPITALIER DE LA HAUTE-MARNE ;

- et les conclusions de M. Collier, rapporteur public ;

Considérant que Mme Brigitte AZX, âgée de 36 ans au moment des faits, souffre d'une psychose maniaco-dépressive depuis 1995 et a fait l'objet de plusieurs hospitalisations à ce titre depuis 1997 ; qu'elle a été hospitalisée, du 22 au 24 juillet 2000, puis à compter du 31 juillet suivant, au centre médical Maine de Biran de Chaumont, destiné à recevoir les malades en hospitalisation libre, qui relève du CENTRE HOSPITALIER DE LA HAUTE-MARNE ; que l'aggravation de son état a motivé son transfert le 4 août suivant au centre médical « Les Iris » de Saint-Dizier, relevant du même centre hospitalier et destiné à recevoir les malades en hospitalisation sous contrainte ; que, le 18 août 2000, Mme AZX a été replacée en régime d'hospitalisation libre, a bénéficié d'une permission de sortie le 23 août, puis est retournée au centre Maine de Biran le 25 août suivant ; que, le 30 août, elle s'est jetée du haut de l'escalier extérieur de secours, s'infligeant de graves blessures dont elle conserve notamment une paraplégie ; que Mme Brigitte AZX, Mme Roberte Y, sa mère, et MM. Thierry et Patrick AZX, ses frères, ont demandé au Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de condamner le CENTRE HOSPITALIER DE LA HAUTE-MARNE à réparer leurs préjudices respectifs ; que, par jugement en date du 18 octobre 2007, le tribunal a fait partiellement droit à leur demande ; que le CENTRE HOSPITALIER DE LA HAUTE-MARNE relève appel dudit jugement en tant qu'il a retenu sa responsabilité, cependant que, par voie d'appel incident, Mme AZX et ses proches demandent la majoration des indemnités auxquelles il a été condamné à leur profit ;

Sur la recevabilité de l'appel du CENTRE HOSPITALIER DE LA HAUTE-MARNE :

Considérant que la requête du CENTRE HOSPITALIER DE LA HAUTE-MARNE comporte l'énoncé de conclusions et de moyens, conformément aux dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative ; que ce dernier étant défendeur en première instance, la circonstance, au demeurant inexacte, tirée de ce que ladite requête constituerait la reproduction intégrale de ses écritures devant le tribunal administratif est, en tout état de cause, sans incidence sur la recevabilité de ladite requête ; qu'ainsi, la fin de non-recevoir opposée de ce chef par les intimés doit être écartée ;

Sur la responsabilité du CENTRE HOSPITALIER DE LA HAUTE-MARNE :

Considérant que Mme AZX était hospitalisée dans un établissement spécialisé en psychiatrie, lequel est tenu d'aménager ses locaux et installations aux risques particuliers auxquels sont exposés ses patients, y compris en secteur d'hospitalisation libre ; qu'il résulte de l'instruction que si les fenêtres et les balcons du centre Maine de Biran étaient sécurisés, ainsi que les accès aux escaliers de secours par l'intérieur, l'accès à ces escaliers par l'extérieur, depuis le parc de l'établissement, qui constituait le lieu de promenade habituel des patients, était libre ; que lesdits escaliers comportaient un simple parapet n'offrant aucune protection contre le risque d'enjambement volontaire, alors qu'une telle protection de la cage d'escalier, par engrillagement, était compatible avec la liberté d'accès exigée par la sécurité incendie, comme le démontrent les travaux réalisés après l'accident de Mme AZX ; qu'il résulte de ce qui précède que le défaut de sécurité des escaliers de secours constitue une faute dans l'organisation du service public, de nature à engager la responsabilité du CENTRE HOSPITALIER DE LA HAUTE-MARNE, qui n'est ainsi pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a retenu sa responsabilité pour ce motif ;

Sur le préjudice de Mme Brigitte AZX :

En ce qui concerne le préjudice à caractère patrimonial :

S'agissant des dépenses de santé :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la paraplégie de Mme AZX a entraîné des dépenses de santé consistant en des frais médicaux et pharmaceutiques, des frais d'hospitalisation, des frais de transport et des frais d'appareillage, en relation avec les hospitalisations, évalués à la somme totale de 153 421 € à partir des débours de la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne ; que la caisse n'établit pas, en revanche, que les hospitalisations de l'intéressée en centre spécialisé psychiatrique, après sa sortie du centre de réadaptation fonctionnelle le 22 octobre 2001, seraient en lien avec la paraplégie ; qu'il convient ainsi d'exclure les frais correspondant auxdites hospitalisations du montant des débours à la charge du tiers responsable ; que la paraplégie entraînera nécessairement des frais futurs, médicaux et pharmaceutiques, justifiés par la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne, qu'il y a lieu d'évaluer, à partir des estimations de la caisse, à la somme de 53 886 €, après correction d'une erreur portant sur l'âge de la victime, qui était de 39 ans à la date de la consolidation et non pas de 29 ans ; qu'il résulte de ce qui précède que, dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction que des dépenses de cette nature seraient demeurées à la charge de Mme AZX, le préjudice total résultant des dépenses de santé passées et futures en relation avec la paraplégie de Mme AZX doit être fixé à la somme de 207 307 €, à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne, comme l'ont estimé à bon droit les premiers juges ;

S'agissant des pertes de revenus et de l'incidence professionnelle du handicap :

Considérant, en premier lieu, que Mme AZX a été victime d'une incapacité temporaire totale du 30 août 2000 au 15 avril 2002, au titre de laquelle la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne lui a versé des indemnités journalières pour un montant de 1 860,93 € ; que cette somme a été allouée à juste titre à ladite caisse par les premiers juges ;

Considérant, en deuxième lieu, que si Mme AZX soutient avoir repris une activité professionnelle en tant que femme de service auprès de la mairie de Chaumont au cours des mois de mars et avril 1998 et qu'elle aurait pu retravailler après l'amélioration de son état de santé, il ressort de l'instruction et de deux attestations établies par le maire de Chaumont qu'elle ne travaillait plus depuis plusieurs années lorsqu'elle a été victime de son accident, à l'exception d'une période de 15 jours, entre le 23 et le 27 mars 1998, puis entre le 6 et le 11 avril, et entre le 14 et le 17 avril 1998 ; qu'il ne résulte par ailleurs pas de l'instruction que son état psychiatrique, fortement dégradé avant son accident survenu le 30 août 2000, aurait pu s'améliorer de manière telle qu'elle aurait pu reprendre une activité professionnelle régulière ; que, dans ces conditions, elle n'est pas fondée à réclamer l'allocation d'une somme au titre de pertes de revenus ;

Considérant, en troisième lieu, que Mme AZX a été placée, depuis le 25 novembre 2000, en invalidité de 2ème catégorie, compte tenu exclusivement de sa maladie psychiatrique, puis en invalidité de 3ème catégorie à compter du 11 avril 2001 du fait des atteintes vertébrales en lien direct avec son accident ; que le centre hospitalier n'établit pas que l'état psychiatrique de l'intéressée aurait à lui seul conduit à la placer à terme en invalidité de 3ème catégorie ; que, dès lors, la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne, qui verse à l'intéressée une pension d'invalidité, ne peut solliciter la condamnation du CENTRE HOSPITALIER DE LA HAUTE-MARNE à son profit qu'à concurrence de la différence entre les arrérages échus et arrérages futurs capitalisés de la pension correspondant à une invalidité de 3ème catégorie et ceux correspondant à une invalidité de 2ème catégorie ; que cette somme sera calculée en prenant pour base les arrérages échus et le montant capitalisé de la pension d'invalidité versée à Mme AZX, s'élevant à 257.1221 €, correspondant à une invalidité de 3ème catégorie à l'exception de la période du 25 novembre 2000 au 11 avril 2001 pendant laquelle Mme AZX a perçu une pension de 2ème catégorie ; que, toutefois, les pièces du dossier ne permettent pas à la Cour d'en déterminer le montant ; que, par suite, il y a lieu de renvoyer la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne devant le CENTRE HOSPITALIER DE LA HAUTE-MARNE pour l'évaluation de ladite indemnité ; que la caisse n'ayant pas établi que ladite pension aurait pour objet de réparer tout ou partie du préjudice personnel de Mme AZX, le centre hospitalier n'est par ailleurs pas fondé à demander que la somme allouée à ce titre soit déduite du montant alloué au titre du déficit fonctionnel permanent ;

En ce qui concerne le préjudice à caractère personnel :

Considérant que l'état de santé de Mme AZX a été consolidé le 13 août 2003 ; qu'il sera fait une juste appréciation du déficit fonctionnel temporaire de l'intéressée, pour la période antérieure à la consolidation, en fixant à la somme de 11 000 € le préjudice correspondant ; que Mme AZX présente par ailleurs un déficit fonctionnel permanent, chiffré par l'expert à 75 %, qui doit être évalué à la somme de 195 000 € ;

Considérant que le tribunal a fait une juste appréciation des souffrances endurées, évaluées à 6 sur 7, en allouant à l'intéressée la somme de 15 000 €, ainsi que de son préjudice esthétique, évalué à 5 sur 7, en lui accordant de ce chef la somme de 10 000 € ; qu'il a fait une juste appréciation des troubles de toute nature dans ses conditions d'existence résultant de son taux d'incapacité permanente, lesquels incluent un préjudice sexuel et un préjudice d'agrément, en fixant à la somme de 9 000 € le préjudice correspondant ; qu'il résulte de tout ce qui précède que les préjudices personnels totaux résultant de la paraplégie de l'intéressée s'établissent à la somme de 240 000 € ;

En ce qui concerne les sommes totales dues par le CENTRE HOSPITALIER DE LA HAUTE-MARNE :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que l'indemnité due par le CENTRE HOSPITALIER DE LA HAUTE-MARNE à Mme AZX doit être fixée à la somme totale de 240 000 € ; que l'intéressée est fondée à demander la réformation du jugement attaqué en ce sens ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'indemnité due par le centre hospitalier à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne consiste en la somme de 209 168 €, correspondant aux indemnités journalières, aux frais médicaux et pharmaceutiques passés et futurs, aux frais d'hospitalisation, aux frais de transport et aux frais d'appareillage en relation avec la paraplégie de la victime, pris en charge par celle-ci, à laquelle devra s'ajouter la somme correspondant à la différence entre les arrérages échus et les arrérages futurs capitalisés correspondant à une pension d'invalidité de 3ème catégorie et ceux correspondant à une pension d'invalidité de 2ème catégorie, calculée comme indiqué ci-dessus ; que le centre hospitalier est fondé à demander la réformation du jugement attaqué en ce sens ;

Sur le préjudice des proches de la victime :

Considérant que le préjudice moral de Mme Y, mère de la victime, et de MM. Thierry et Patrick AZX , frères de la victime, est établi en raison de la perte d'autonomie irréversible dont souffre leur fille et soeur ; que le tribunal a fait une juste appréciation des faits de la cause en allouant à ce titre 5 000 € à Mme Y et 4 000 € chacun à M. Thierry AZX et M. Patrick AZX ; qu'il s'ensuit que les conclusions présentées par les intéressés de ce chef doivent être rejetées ;

Sur les conclusions au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant, en premier lieu, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme Brigitte AZX, de Mme Roberte Y et de MM. Thierry et Patrick AZX, qui ne sont pas parties perdantes dans la présente instance, la somme que le CENTRE HOSPITALIER DE LA HAUTE-MARNE demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner le CENTRE HOSPITALIER DE LA HAUTE-MARNE à verser conjointement à Mme Brigitte AZX, Mme Roberte Y et MM. Thierry et Patrick AZX, une somme globale de 1 500 € au titre des mêmes dispositions ;

Considérant, en second lieu, que ces mêmes dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge du CENTRE HOSPITALIER DE LA HAUTE-MARNE, qui n'est pas partie perdante vis-à-vis de la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne, la somme que demande celle-ci au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a en revanche pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions du CENTRE HOSPITALIER DE LA HAUTE-MARNE sur ce fondement en tant qu'elles sont dirigées contre la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne ;

DECIDE :

Article 1er : La somme de 79 000 € que le CENTRE HOSPITALIER DE LA HAUTE-MARNE a été condamné à verser à Mme Brigitte AZX par le jugement du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en date du 18 octobre 2007 est portée à 240 000 €.

Article 2 : La somme de 466 282 € que le CENTRE HOSPITALIER DE LA HAUTE-MARNE a été condamné à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne par ledit jugement est ramenée à la somme de 209 167 €, à laquelle s'ajoutera une somme correspondant à la différence entre les arrérages échus et les arrérages futurs capitalisés correspondant à une pension d'invalidité de 3ème catégorie et ceux correspondant à une invalidité de 2ème catégorie, calculée comme indiqué dans les motifs qui précèdent. La caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne est renvoyée devant le CENTRE HOSPITALIER DE LA HAUTE-MARNE pour qu'il soit procédé à la liquidation de ladite indemnité.

Article 3 : Les articles 1er et 2 du jugement du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en date du 18 octobre 2007 sont réformés en ce qu'ils ont de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le CENTRE HOSPITALIER DE LA HAUTE-MARNE versera conjointement à Mme Brigitte AZX, Mme Roberte Y et MM. Thierry et Patrick AZX une somme globale de 1 500 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête du CENTRE HOSPITALIER DE LA HAUTE-MARNE et de l'appel incident de Mme Brigitte AZX, Mme Roberte Y et MM. Thierry et Patrick AZX est rejeté, ainsi que les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié au CENTRE HOSPITALIER DE LA HAUTE-MARNE, à Mme Brigitte AZX, à Mme Roberte Y, à MM. Thierry et Patrick AZX et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne.