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Cour administrative d'appel de Paris, 12 novembre 2013 n°12PA03588 (Dossier médical – Communication – Copies – Frais)

 

L’Assistance publique hôpitaux de Paris (AP-HP) demande l'annulation du jugement du 15 juin 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé le titre exécutoire émis le 23 novembre 2010 à l'encontre de Mme X pour un montant de 176,84 euros correspondant aux frais de reprographie et d'envoi du dossier médical de sa mère.

La mère de Mme X a été hospitalisée dans le service de gastro-entérologie de l'hôpital A du 10 au 23 septembre 2009, puis dans le service d'anesthésie et de réanimation du 23 septembre au 15 novembre 2009, date à laquelle elle est décédée.

La Cour administrative d’appel de Paris rejette la requête de l’AP-HP en considérant que Mme X a demandé à consulter sur place les informations contenues dans le dossier médical de sa mère détenues par le service de réanimation et à en faire des copies ;  que Mme X a indiqué dans un courriel du 26 septembre 2010 vouloir obtenir l'intégralité du dossier médical de sa mère, cette demande ne concernait que les informations relatives à son hospitalisation au sein du premier service ; que l'établissement hospitalier ne lui a pas demandé de lui indiquer les documents figurant dans le dossier détenu par le service de réanimation dont elle souhaitait obtenir la copie et ne l'a pas informée des modalités de communication qu'il envisageait de mettre en œuvre à défaut de choix de sa part. Dans ces conditions, l'AP-HP ne pouvait pas procéder à la reprographie de l'ensemble des informations en possession du service de réanimation et les envoyer par lettre recommandée au domicile de Mme X aux frais de cette dernière.

Cour administrative d'appel de Paris
N° 12PA03588      

 

Inédit au recueil Lebon
8ème chambre
Mme MILLE, président
M. Yves MARINO, rapporteur
M. LADREYT, rapporteur public
TSOUDEROS, avocat

lecture du mardi 12 novembre 2013

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée le 16 août 2012, présentée pour l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), dont le siège est au 3 avenue Victoria à Paris Cedex 04 (75184), représentée par son président en exercice, par MeC..., l'AP-HP demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100469/6-1 du 15 juin 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a déchargé Mme X de l'obligation de payer la somme de 176,84 euros et a annulé le titre de perception émis à son encontre le 23 novembre 2010 ;

2°) de rejeter la demande de Mme X ;

3°) à titre subsidiaire, de mettre à la charge de Mme X...la somme de 170,82 euros ;

4°) de mettre à la charge de Mme X..une somme de 750 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
.....................................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le décret n° 62-1507 du 29 décembre 1962 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 octobre 2013 :

- le rapport de M. Marino, président assesseur,

- et les conclusions de M. Ladreyt, rapporteur public ;
 

1. Considérant que l'AP-HP demande l'annulation du jugement du 15 juin 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé le titre exécutoire émis le 23 novembre 2010 à l'encontre de Mme X .pour un montant de 176,84 euros correspondant aux frais de reprographie et d'envoi du dossier médical de sa mère ;

Sur la recevabilité des conclusions subsidiaires de l'AP-HP :

2. Considérant que l'AP-HP, qui tient du décret susvisé du 29 décembre 1962 le pouvoir d'émettre un titre exécutoire à l'effet de fixer la somme qui lui serait due à raison des frais de photocopies des documents engagés pour reproduire les informations d'un dossier médical à la demande d'un personne hospitalisée ou de ses ayants-droit, n'est pas recevable à demander au juge administratif de condamner le débiteur de sa créance ; que, par suite, les conclusions de la requête présentées à titre subsidiaire, tendant à ce que la Cour condamne Mme X à lui verser une somme de 170,82 euros correspondant aux frais de reproduction de 949 pages du dossier médical de sa mère ne sont pas recevables et doivent être rejetées ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Considérant que si l'AP-HP soutient qu'elle a présenté des observations en défense devant le tribunal administratif qui ne les a pas visées, elle n'apporte pas la preuve du dépôt de ce mémoire qui ne figure pas au dossier de première instance, par la seule production d'une copie dudit mémoire non daté ; que, par suite, elle n'est pas fondée à soutenir qu'en constatant un acquiescement aux faits en application des dispositions de l'article R. 612-6 du code de justice administrative, le tribunal a commis une erreur de droit ;

Sur les conclusions en annulation :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1111-7 du code de la santé publique dans sa rédaction en vigueur à la date d'émission du titre exécutoire litigieux : " Toute personne a accès à l'ensemble des informations concernant sa santé détenues, à quelque titre que ce soit, par des professionnels et établissements de santé, qui sont formalisées ou ont fait l'objet d'échanges écrits entre professionnels de santé, notamment des résultats d'examen, comptes rendus de consultation, d'intervention, d'exploration ou d'hospitalisation, des protocoles et prescriptions thérapeutiques mis en oeuvre, feuilles de surveillance, correspondances entre professionnels de santé, à l'exception des informations mentionnant qu'elles ont été recueillies auprès de tiers n'intervenant pas dans la prise en charge thérapeutique ou concernant un tel tiers. [...] La consultation sur place des informations est gratuite. Lorsque le demandeur souhaite la délivrance de copies, quel qu'en soit le support, les frais laissés à sa charge ne peuvent excéder le coût de la reproduction et, le cas échéant, de l'envoi des documents " ; qu'aux termes de l'article R. 1111-2 du même code : " A son choix, le demandeur obtient du professionnel de santé, de l'établissement de santé ou de l'hébergeur communication des informations demandées, soit par consultation sur place, avec, le cas échéant, remise de copies de documents, soit par l'envoi de copies des documents. Les frais de délivrance de ces copies sont laissés à la charge du demandeur dans les conditions fixées par l'article L. 1111-7. [...] Dans le cas d'une demande de consultation sur place adressée à un établissement de santé, le demandeur est informé du dispositif d'accompagnement médical organisé par l'établissement dans les conditions fixées à l'article R. 1112-1 (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 1111-3 du même code : " Lorsque la demande est imprécise ou qu'elle n'exprime pas de choix quant aux modalités de communication des informations, le professionnel de santé, l'établissement ou l'hébergeur informe le demandeur des différentes modalités de communication ouvertes par la présente section et lui indique celles qui seront utilisées à défaut de choix de sa part. / Si, au terme du délai de huit jours ou celui de deux mois prévu à l'article L. 1111-7, le demandeur n'a toujours pas précisé sa volonté, le professionnel de santé, l'établissement ou, le cas échéant, l'hébergeur mettent à sa disposition les informations sous la forme qu'ils lui avaient précédemment indiquée. " ;

5. Considérant que la mère de Mme X a été hospitalisée dans le service de gastro-entérologie de l'hôpital A du 10 au 23 septembre 2009, puis dans le service d'anesthésie et de réanimation du 23 septembre au 15 novembre 2009, date à laquelle elle est décédée ; qu'il ressort des pièces du dossier et des dires des parties que Mme X.a demandé à consulter sur place les informations contenues dans le dossier médical de sa mère détenues par le service de réanimation et à en faire des copies ; que si Mme X.a indiqué dans un courriel du 26 septembre 2010 vouloir obtenir l'intégralité du dossier médical de sa mère, cette demande ne concernait que les informations relatives à son hospitalisation au sein du premier service ; qu'en outre, l'établissement hospitalier ne lui a pas demandé de lui indiquer les documents figurant dans le dossier détenu par le service de réanimation dont elle souhaitait obtenir la copie et ne l'a pas informée des modalités de communication qu'il envisageait de mettre en oeuvre à défaut de choix de sa part ; que, dans ces conditions, l'AP-HP ne pouvait pas procéder à la reprographie de l'ensemble des informations en possession du service de réanimation et les envoyer par lettre recommandée au domicile de Mme X ..aux frais de cette dernière ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'AP-HP n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé le titre exécutoire émis le 23 novembre 2010 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme X, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par l'AP-HP, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

8. Considérant que Mme X .a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Gambotti, avocat de Mme X, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'AP-HP le versement à Me Gambotti de la somme de 1 000 euros ;
 

D E C I D E :

Article 1er : La requête de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris est rejetée.
 

Article 2 : L'Assistance publique-Hôpitaux de Paris versera à Me Gambotti, une somme de 1 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Gambotti renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.