REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 juillet et 30 septembre 2002, présentés pour Mme Amba X, élisant domicile ..., par Me Campana-Doubet ; Mme X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 991344/5 du tribunal administratif de Melun en date du 18 juin 2002 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 8 février 1999 du directeur du centre hospitalier de Lagny la licenciant pour inaptitude physique et à la condamnation du centre hospitalier à lui verser des dommages et intérêts ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision et de condamner le centre hospitalier de Lagny à lui verser, à titre de dommages et intérêts, la somme de 304.890 euros, majorée des intérêts de droit capitalisés depuis le 2 avril 1999, date de la demande préalable ;
3°) de condamner le centre hospitalier de Lagny à lui verser une somme de 1.525 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 22 avril 1905 ;
Vu la modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;
Vu le décret n° 91-155 du 6 février 1991, modifié, relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 septembre 2004 :
- le rapport de Mme Régnier-Birster, rapporteur ;
- et les conclusions de M. Trouilly, commissaire du gouvernement ;
Considérant que Mme X, agent non titulaire recruté par le centre hospitalier de Lagny en qualité d'aide soignante par un contrat devenu à durée indéterminée, fait appel du jugement susvisé du tribunal administratif de Melun du 18 juin 2002 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 8 février 1999 du directeur du centre hospitalier de Lagny la licenciant pour inaptitude physique et à la condamnation du centre hospitalier à lui verser des dommages et intérêts ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
Considérant qu'il résulte d'un principe général du droit, dont s'inspirent tant les dispositions du code du travail relatives à la situation des salariés qui, pour des raisons médicales, ne peuvent plus occuper leur emploi, que les règles statutaires applicables dans ce cas aux fonctionnaires, que lorsqu'il a été médicalement constaté qu'un salarié se trouve de manière définitive atteint d'une inaptitude physique à occuper son emploi, il appartient à l'employeur de le reclasser dans un autre emploi et, en cas d'impossibilité, de prononcer, dans les conditions prévues pour l'intéressé, son licenciement ; que la qualité d'agent contractuel de l'intéressée, recrutée par un contrat devenu à durée indéterminée, ne fait pas obstacle à l'application de ce principe général du droit ;
Considérant qu'en se bornant à soutenir que Mme X, qui a produit devant les premiers juges un avis de vacance de poste de standardiste publié par le centre hospitalier de Lagny peu avant son licenciement et un certificat attestant qu'elle avait donné toute satisfaction lors du stage accompli du 17 février au 21 mars 2003 en qualité de réceptionniste-standardiste dans le centre de santé dentaire de Torcy, ne réunissait pas les compétences requises pour le poste de standardiste alors vacant, le centre hospitalier de Lagny n'établit, ni avoir informé l'intéressée de son droit à reclassement, ni avoir effectué de quelconques diligences en vue de son reclassement ; que, par suite, la décision licenciant Mme X, est entachée d'illégalité et doit être annulée ;
Considérant que, par suite, Mme X est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Melun a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision en date du 8 février 1999 prononçant son licenciement ;
Sur les conclusions à fin de dommages et intérêts :
Considérant que, dans le dernier état de ses écritures, Mme X demande, au titre de dommages et intérêts, le versement de la somme de 30.489,80 euros majorée des intérêts de droit, correspondant au montant de la demande formée le 2 avril 1999 devant le centre hospitalier de Lagny et au montant de la demande présentée devant les premiers juges ; que, pour justifier du montant de cette demande, elle fait valoir qu'elle n'a pas retrouvé d'emploi, nonobstant les stages et recherches effectuées et produit les feuilles de salaires perçues antérieurement à son licenciement et ses avis d'imposition ou déclarations de revenus des années 2000 à 2002 ainsi qu'un avis attestant de la reprise du versement de l'allocation de solidarité spécifique à compter du 1er avril 2003 ; qu'il ressort de ces pièces que Mme X, qui percevait, antérieurement à son licenciement, un salaire annuel imposable de 103.904 F (15.840 euros), a vu ses revenus réduits de moitié l'année postérieure à son licenciement, puis diminuer de manière encore plus sensible les années suivantes ; qu'il sera fait, dans les circonstances de l'espèce, une juste appréciation du préjudice matériel et moral subi en condamnant le centre hospitalier de Lagny à lui verser la somme de 30.000 euros, majorée des intérêts de droit à compter du 2 avril 1999, date de la demande ;
Considérant que Mme X a demandé, par un mémoire enregistré le 30 septembre 2002 la capitalisation des intérêts ; qu'à cette date, les intérêts étaient dus pour au moins une année entière ; qu'il y a lieu dès lors de faire droit à cette demande tant à cette date qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande et à demander la condamnation du centre hospitalier de Lagny à lui verser la somme de 30.000 euros majorée des intérêts de droits et capitalisés ainsi qu'il vient d'être dit ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que Mme X, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à verser au centre hospitalier de Lagny la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche dans les circonstances de l'espèce, par application des mêmes dispositions, de condamner le centre hospitalier de Lagny à payer à Mme X la somme de 1.500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Décide :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Melun est annulé.
Article 2 : La décision du 8 février 1999 du directeur du centre hospitalier de Lagny licenciant Mme X est annulée.
Article 3 : Le centre hospitalier de Lagny est condamné à verser à Mme X, à titre de dommages et intérêts la somme de 30.000 euros, majorée des intérêts de droit à compter du 2 avril 1999 et capitalisés ainsi qu'il vient d'être dit et la somme de 1.500 euros, au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions du centre hospitalier de Lagny tendant au bénéfice des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.